Gérer les distances
L’idée que la gestion des distances est une dimension majeure de la vie sociale est au fondement du paradigme des mobilités. Les sociétés ont géré les distances de diverses manières, pour se mettre à l’abri et chercher la sécurité, exercer la violence et s’en défendre, contrôler des territoires et des populations, se procurer de la nourriture, de l’eau et d’autres ressources, faire du commerce et produire, organiser des actions collectives, cultiver l’amitié et la vie de famille, acquérir du savoir, ressentir du plaisir et satisfaire des besoins spirituels. L’apprentissage de la gestion des distances est un aspect essentiel de la vie, un processus socialement organisé qui prend des formes variables selon les groupes sociaux et les périodes. Au XXe siècle, cette problématique n’a été explicitement considérée comme un objet d’études que par quelques chercheurs, plutôt isolés. Dans leur ensemble, les sciences sociales ont négligé le rôle de la distance (et des déplacements nécessaires à son franchissement) dans la vie sociale 1 .