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Aurialie Jublin

Derrière les promesses de l'intelligence artificielle, le cauchemar du "digital labor" - Digital Society Forum - 0 views

  • « Ce ne sont pas les machines qui font le travail des hommes, mais les hommes qui sont poussés à réaliser un digital labor pour les machines en les accompagnant, en les invitant, en les entraînant », résume le chercheur. Les intelligences artificielles doivent toujours être paramétrées, entraînées et encore très largement supervisées par des humains, malgré les progrès des méthodes d’apprentissage non supervisés. Les progrès fulgurants des IA ces dernières années sont surtout dus à l’explosion des quantités de données d’entraînement : or celles-ci doivent être triées, annotées, préparées par des humains. Et enfin, ces programmes doivent être évalués et corrigés pour pouvoir s’améliorer. Ainsi, les utilisateurs vont utiliser pendant plusieurs années une version beta du service Gmail de Google, pour l’améliorer, ou tagger leurs amis sur des photos et contribuer ainsi sans nécessairement en avoir conscience à l’affinement du service de reconnaissance faciale de Facebook : « C’est un travail humble et discret, qui fait de nous, contemporains, à la fois les dresseurs, les manouvriers et les agents d’entretien de ces équipements. » La question que pose l’intelligence artificielle et l’automatisation, ce n’est donc pas celle de la menace sur l’emploi – mais celle de la transformation profonde du travail pour répondre aux besoins de la machine.
  • Cet imaginaire largement libertarien irrigue profondément la culture du web depuis ses débuts et s’incarne, par exemple, dans la figure du hacker ou de l’entrepreneur nomade, du passionné qui s’accomplit dans un « projet professionnel qui est aussi existentiel ». Mais Antonio Casilli note combien cette vision est élitiste et ne prend pas en compte l’asymétrie des forces dans un marché du travail en berne où le chômage est élevé et l’ascenseur social en panne,
  • En l’absence de régulation, le digital labor préfigure le pire du travail : un monde de travailleurs isolés, privés de droits sociaux et iolés les uns des autres, livrés aux conditions léonines des employeurs — et accomplissant des tâches standardisées, fragmentées, peu qualifiées et dépourvues de sens global. Ici et là, des tentatives de régulation ou de création de plateformes équitables sont en cours. Il est urgent de les soutenir, si l’on ne veut pas que le développement croissant de l’automatisation ne soit synonyme non d’une disparition du travail, mais de sa dégradation irrémédiable.
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    "Un spectre hante l'intelligence artificielle, c'est le digital labor. Le dernier livre du sociologue Antonio Casilli , spécialiste des réseaux sociaux et des mutations du travail à l'ère numérique, dresse un panorama sombre des nouvelles formes de travail déconsidéré ou invisible apparues avec l'essor des plateformes et de l'automatisation."
Aurialie Jublin

Pour une protection sociale des données personnelles - - S.I.Lex - - 0 views

  • Une première contestation est venue du Think Tank Génération libre par le biais d’un rapport défendant la thèse de la « patrimonalisation » des données personnelles. L’idée consiste à créer un droit de propriété privée sur les données personnelles de manière à ce que les individus puissent négocier leur utilisation sur une base contractuelle avec les plateformes, en se faisant éventuellement rémunérer en contrepartie. Ce point de vue sous-entend que c’est le marché qui doit réguler l’utilisation des données et que la vie privée sera plus efficacement protégée par ce biais qu’en la défendant comme un droit fondamental de la personne. A l’opposé de cette vision ultra-libérale, Antonio Casilli et Paola Tubaro ont publié une tribune dans les colonnes du Monde, formulant une critique d’ordre « social » du système actuel. Intitulé Notre vie privée : un concept négociable, ce texte invite lui aussi à un renversement profond de perspective résumé par la phrase suivante : « la défense de nos informations personnelles ne doit pas exclure celle des droits des travailleurs de la donnée ».
  • Le défi qui attend la CNIL est de devenir non pas un gardien de la propriété sur les données, mais un défenseur des droits des travailleurs de la donnée.
  • S’il y a un rapport de production assimilable à du travail, alors il faut s’assurer de l’extension des régimes de protection du travail, y compris à ceux qui, de prime abord, seraient présentés comme de simples usagers ou consommateurs.
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  • Il paraît en effet douteux que la CNIL puisse à elle seule assurer une défense des droits des travailleurs de la donnée, même si son champ d’action était élargi. Non pas que cette autorité soit dépassée, comme certains le laissent entendre, mais parce que la protection des travailleurs passe traditionnellement par des mécanismes juridiques et institutionnels d’une nature bien différente de la régulation assurée aujourd’hui par la CNIL. Historiquement, c’est un système de droits et la protection sociale qui se sont progressivement mis en place pour protéger les individus dans le cadre des relations asymétriques de travail. Il convient de ne pas participer à leur affaiblissement en morcelant les espaces de régulation, mais bien de faire valoir les droits sociaux existants.
  • Nous soutenons donc que si les données sont produites dans le cadre d’activités assimilables à de nouvelles formes de travail, alors ce sont des mécanismes de protection sociale enracinés dans le droit social qu’il convient de déployer pour garantir les droits des personnes.
  • Si la défense du droit à la vie privée dépend aujourd’hui avant tout d’une négociation collective, alors il convient de nous doter collectivement des moyens les plus efficaces possibles pour engager, conduire et peser dans ces négociations, dont les termes restent aujourd’hui dictés par le cadre profondément déséquilibré imposé par les plateformes. Un simple appel à la CNIL sera là encore sans doute insuffisant pour changer en profondeur cette situation. C’est en réinventant la protection des données sous l’angle de la protection sociale qu’il nous paraît possible de faire émerger de nouveaux moyens d’action collective qui sortiraient l’individu de l’isolement dans lequel il reste trop souvent enfermé lorsqu’il s’agit de vie privée, que ce soit face aux plateformes ou à l’État.
  • Car la protection sociale renvoie plus fondamentalement à la question des solidarités et celles-ci ne peuvent être uniquement une affaire d’État. Si négociation collective autour de la vie privée il y a, celle-ci doit être le fait d’une société civile collectivement organisée, sans quoi les individus ne pourront échapper aux rapports structurellement inégalitaires auxquels les soumettent les plateformes, et la négociation en cours ne pourra conduire qu’à la soumission collective.
  • Du point de vue d’une protection sociale entendue comme participant à la construction d’un « régime de travail réellement humain », on peut se demander si la seule option souhaitable ne consiste pas pour le législateur à interdire purement et simplement que l’on rémunère ce type de tâches à la pièce. Aucune « protection sociale » ne pourra jamais venir compenser après coup les dégâts causés par la réduction d’humains au rang de « tâcherons du clic » et l’accepter reviendrait à porter un coup mortel à l’idée que le travail puisse constituer une activité « réellement humaine ».
  • Il s’agit non seulement de s’intéresser aux architectures techniques des plates-formes qui permettent l’extraction et la circulation des données personnelles, mais aussi de créer les conditions pour que le travail de production et d’enrichissement des données (autant de la part des services de microtravail que des usagers de plates-formes généralistes comme Instagram ou Google) reste respectueux des droits des personnes et du droit du travail
  • Se référer à ce riche héritage juridique, institutionnel et social permettrait selon nous de dépasser certaines des insuffisances auxquelles la défense des données personnelles et de la vie privée se heurte encore trop souvent aujourd’hui. C’est notamment en suivant une telle piste qu’il nous paraît possible de réconcilier les dimensions individuelle et collective en matière de protection des données. Le système juridique actuel reste en effet imprégné d’un individualisme méthodologique qui n’envisage la personne que de manière isolée et indépendamment des rapports sociaux dans laquelle la vie privée est toujours étroitement enchâssée.
  • C’est ce fil que nous souhaitons suivre dans cet article qui vise à explorer les différentes dimensions d’une protection des données repensée comme une protection sociale. Comme le souligne la démonstration d’Antonio Casilli et Paola Tubaro, il convient de partir de l’idée qu’il existe un continuum de pratiques entre usagers et travailleurs des plateformes, depuis les utilisateurs de Google ou Facebook jusqu’aux chauffeurs d’Uber. Cette continuité justifie la construction de nouveaux droits et un nouveau volet de la protection sociale, pensé dans une solidarité entre usagers et travailleurs.
  • expliciter en préambule ce que nous percevons des liens qui se sont tissés entre données personnelles, vie privée, usages et travail numériques. Ces liens sont remarquables et inédits à plusieurs égards : leur volume, la précision des informations que produisent nos usages, et leurs méthodes de production
  • Le second phénomène inédit, intrinsèquement lié au premier, c’est le degré d’opacité des mécanismes techniques et humains de production des données qui forgent cette identité. Ce qui nous échappe, c’est donc autant la perception (y compris physique) de nos traces et signaux numériques, que les processus de production (partant de l’exploitation de ces signaux et traces) qui forgent une donnée, et enfin leur exploitation ou utilisation sous la forme d’une expression explicite de nos identités et de nos activités.
  • Cette triple perte de contrôle justifie à notre sens que notre relation avec les plateformes soit considérée sous l’angle d’une présomption de subordination d’usage. Elle permettrait d’acter en droit les déséquilibres de fait qui caractérisent les forces en présence, entre la société civile, les collectifs d’usagers et les travailleurs numériques d’une part, et les plateformes lucratives d’autre part. Notion distincte de la subordination des rapports de production dans l’espace du travail, elle viendrait s’articuler à elle, établissant en droit un continuum de négociation.
  • La subordination juridique et économique est ainsi reconnue et traditionnellement associée au statut d’employé. Mais elle déborde aujourd’hui ce cadre pour s’exercer sur les consommateurs et les usagers, également saisis par une subordination d’usage. Celle-ci intègre une logique lucrative, en ce qu’elle transforme en valeur financière – et donc « financiarise » à proprement parler – des rapports humains jusqu’alors vécus hors des sphères de production de marché orientées vers le profit.
  • Pour faire émerger ce concept de « subordination d’usage », il paraît possible de s’appuyer notamment sur les travaux d’Alain Supiot, qui propose depuis la fin des années 90 des moyens conceptuels pour identifier des formes de travail « au-delà de l’emploi ». Il propose en particulier de saisir les « nouveaux visages de la subordination » à partir du critère de la « dépendance économique » qui viendrait compléter celui de la subordination stricto sensu caractérisant aujourd’hui le contrat de travail. Dans cette vision, le rapport de production est bien conçu comme incluant d’emblée un rapport de subordination face à la figure de l’entreprise capitaliste, intégrant la notion de déséquilibre exorbitant dans les rapports sociaux, que le droit et la négociation doivent participer à « civiliser »
  • La présomption de subordination permettrait donc de faire correspondre au continuum des pratiques d’usage et de travail, une continuité de droits, puisant pour partie leur légitimité dans le caractère exorbitant et disproportionné des rapports induits à la fois par la nature propriétaire et par l’objectif d’exploitation des plateformes lucratives de marché. Pour faire émerger ce concept de « subordination d’usage », il paraît possible de s’appuyer notamment sur les travaux d’Alain Supiot, qui propose depuis la fin des années 90 des moyens conceptuels pour identifier des formes de travail « au-delà de l’emploi ». Il propose en particulier de saisir les « nouveaux visages de la subordination » à partir du critère de la « dépendance économique » qui viendrait compléter celui de la subordination stricto sensu caractérisant aujourd’hui le contrat de travail.
  • Cette continuité entre ces deux régimes d’action est liée au rapport de production (des données) que nous entretenons avec les plateformes, rapport qui vient se fondre dans la problématique de la régulation du travail. Un des enjeux est de faire émerger une identification claire du travail numérique, dans un moment historique d’exploitation des travailleurs les plus fragiles et des pratiques prédatrices de délocalisation de la main d’œuvre.
  • Il y a donc un double enjeu à mieux saisir ces rapports sociaux de production : il s’agit d’identifier ou de faire émerger plus distinctement les régimes de travail présent dans les espaces de production numérique pour mieux les encadrer d’une part, et d’autre part d’envisager les limites que nous voulons leur fixer pour protéger la vie privée et son exploitation.
  • La pénétration du travail numérique dans notre vie privée, au sens où il est saisi par les plateformes pour le transformer en valeur économique, interroge à la fois nos conceptions et nos imaginaires contemporains relatifs à la vie privée et au travail, en particulier le travail domestique.
  • Le second phénomène inédit, intrinsèquement lié au premier, c’est le degré d’opacité des mécanismes techniques et humains de production des données qui forgent cette identité. Ce qui nous échappe, c’est donc autant la perception (y compris physique) de nos traces et signaux numériques, que les processus de production (partant de l’exploitation de ces signaux et traces) qui forgent une donnée, et enfin leur exploitation ou utilisation sous la forme d’une expression explicite de nos identités et de nos activités.
  • Une patrimonialisation des données personnelles, telle qu’elle est proposée par Génération libre, ne constituerait pas un moyen d’ouvrir cette discussion collective, mais conduirait au contraire à y renoncer définitivement. En effet, la réparation de cette violence par la réaffirmation ou la revendication d’une propriété privée négociable sur un marché réduit la question politique du vivre ensemble à l’abandon total de toute volonté collective de débat démocratique – ici remplacé par la négociation sur le marché.
  • Accepter des micro-rémunérations corrélées aux données personnelles, c’est graver dans le marbre que les discussions collectives deviennent des petites négociations individuelles […] Ce micro-revenu est d’ailleurs en parfaite cohérence avec la promotion d’un revenu universel tel le que propose Génération Libre (attention, il y a plein de revenus universels différents) façon néo-libérale : on vous donne le minimum pour ne pas trop vous ennuyer dans ce nouveau monde plein de machines (dont personne n’a discuté au préalable, faute au déterminisme technologique, mais c’est encore un autre sujet). Ce qui nous laisse avec l’amère sensation d’avoir gagné quelque chose, alors que c’est justement le projet des libertariens. L’argumentaire de Génération Libre est subtil puisqu’il explicite un certain nombre de ces problèmes (surveillance de masse, ciblage publicitaire abusif, croisements de données non choisis) tout en prétendant qu’à partir du moment où l’on se ferait payer pour ses données, on deviendrait conscient – et consentant – quant à l’usage qui pourra en être fait…).[…]
  • La défense de la dignité et des libertés des personnes est centrale dans le fait de distinguer espace privé et espace de production. De fait, une part de nos gestes privés et intimes, exprimés dans des espaces numériques qui revêtent l’apparence de la sphère privée, sont accaparés dans un objectif de profit. De plus, les industries travaillent activement à influencer l’environnement et nos comportements numériques pour mieux capter la valeur issue des entrelacements de nos liens sociaux qui forment le « graphe social », reflet numérique de notre vie collective.
  • Il est urgent de revendiquer collectivement une régulation efficace contre ces phénomènes d’exploitation, mais aussi le soutien et l’encouragement au développement d’outils numériques émancipateurs. Car comme le souligne Irénée Régnauld, cette exploitation et cette violence ne sont pas des fatalités technologiques
  • Que reste-t-il de ces aspirations et du sens investi collectivement dans le travail lorsque l’on exerce des « métiers » de tâcherons développés par les industries numériques ? Au-delà des déséquilibres économiques, c’est la dignité des personnes qui est à protéger face au retour des modèles d’exploitation proprement féodaux. De même, il apparaît combien notre conception du travail sous-tend nos conceptions de la société dans son ensemble, et les perspectives de progrès social et de progrès humain partagé qu’il nous revient de discuter collectivement.
  • Compléter l’action de protection de la vie privée en l’articulant avec les enjeux de respect du droit du travail et la protection des travailleurs pourrait permettre d’enrichir le débat en réintroduisant les notions de consentement et d’intentionnalité, mais aussi d’intimité, associés à la notion de vie privée moderne, à réencastrer dans nos comportements au sein des plateformes. Relier l’exploitation des données et de la dimension potentiellement intime qu’elle recouvre, avec la question centrale d’un régime de travail décent des travailleurs professionnels, pourrait permettre de poser plus distinctement l’enjeu de rapports éthiques numériques, entre usagers, consommateurs et travailleurs, tels qu’ils sont discutés au sein des autres espaces de production
  • Or les données personnelles sont bien toujours également des « données sociales », parce que la vie privée elle-même est toujours enchâssée dans un tissu de relations sociales (amicales, familiales, professionnelles, territoriales, citoyennes, etc.). L’interconnexion des données, via les outils numériques, constitue par ailleurs un préalable indispensable à leur valorisation, y compris financière
  • Il y a donc d’emblée une double dimension collective caractéristique de nos données « personnelles », qui s’exprime au sens d’un usage du monde « en lien » dans nos pratiques numériques, de la connexion et de la mise en relation – autant que du point de vue des rapports de production qui sont nécessaires à l’existence et l’exploitation des données. Ces deux répertoires d’actions numériques sont difficiles à distinguer précisément car l’approche centrée sur « l’émission » de données est marquée par une grande continuité des effets, sinon des pratiques individuelles et collectives
  • Le droit des données personnelles reste aujourd’hui largement « aveugle » à cette double dimension collective et pour la chercheuse Antoinette Rouvroy, cette construction individualiste du statut des données est précisément ce qui entraîne aujourd’hui une « inadéquation des régimes de protection »
  • Le défi qui serait le nôtre aujourd’hui, relativement à la protection des données, pourrait donc s’énoncer ainsi: comment tenir compte, de la nature relationnelle, et donc aussi collective, à la fois de la donnée (une donnée n’est jamais que la transcription numérique d’une relation entre un individu son milieu, laquelle n’acquiert d’utilité, dans le contexte d’analyses de type big data, que mise en rapport avec des données « émises » par les comportements d’autres individus), et de ce qui mérite d’être protégé, y compris à travers la protection des données ?
  • Avec les données d’intérêt général, on songeait à donner à l’État une forme de pouvoir de « réquisition » de données détenues par des acteurs privés dans une série de secteurs stratégiques (santé, énergie, environnement, logement, etc.) ou pour faire face à des situations de crise. Ce concept a fait l’objet de nombreuses critiques et s’il a été maintenu dans la version finale du texte, ce n’est qu’au prix d’une profonde transformation, puisqu’il se réduit désormais à une simple obligation d’ouverture des données imposée aux personnes privées délégataires de service public.
  • Des négociations collectives avec des représentants des utilisateurs, formalisées et encadrées par la loi, pourraient intervenir ensuite pour obtenir des conditions plus favorables de la part des plateformes. Ces discussions pourraient se dérouler secteur par secteur, de la même manière que les négociations collectives en droit du travail se font au niveau des branches, permettant aux utilisateurs de s’organiser sur une base concrète. Il y aurait aussi intérêt à ce que ces négociations puissent s’ouvrir au niveau local, par exemple celui des métropoles, car on sait que c’est à cette échelle que des conflits peuvent naître à propos de l’utilisation des données avec des plateformes comme AirBnB, Uber ou Waze et qu’il existe des enjeux importants en termes de récupération des données pour la conduite de politiques publiques infrastructurelles (dans les transports, le logement, l’urbanisme, etc.).
  • Les choses sont différentes avec les plateformes comme Facebook ou Google qui s’appuient sur le « travail gratuit » de simples utilisateurs ne pouvant agir pour bloquer l’outil de production. Ils pourraient certes cesser de recourir à ces services, mais jusqu’à présent, même les plus grands scandales n’ont pas entraîné des exodes significatifs d’internautes hors de l’écosystème des GAFAM…
  • Mais imaginons à présent un « droit à la portabilité collective » qui puisse être actionné par des groupements d’individus agissant au sein d’associations ou de syndicats tels qu’évoqués plus haut, et plus seulement par des individus isolés revendiquant leur droit à la vie privée. Un tel droit collectif pourrait être opposé aux plateformes lorsque ces acteurs parviendraient à apporter la preuve que la récupération des données est nécessaire pour l’exercice de droits et libertés fondamentaux. On changerait alors l’échelle, mais aussi le sens même de la portabilité, car ce serait bien alors des portions entières du graphe qui pourraient être récupérées collectivement de cette manière, en conservant leur valeur « sociale » sans que celle-ci ne soit dissoute par l’atomisation que provoque fatalement la portabilité individuelle.
  • Si l’objectif est de réinventer la protection des données sous la forme d’une « protection sociale » à même de préserver la dignité et les droits fondamentaux des individus, n’importe-t-il pas de nous poser en amont la question de savoir si nous devons nous résigner à ce que toutes ces activités basculent dans des rapports de production, y compris lorsque nous ne l’avons pas choisi, individuellement et collectivement ? Si l’idée d’une « protection sociale des données » a un sens, ne devrait-elle pas précisément résider dans une faculté de déterminer quelle part de nos vies nous voulons voir saisies dans un rapport de production et quelle part nous voulons au contraire en préserver ?
  • Admettre d’emblée que toutes nos activités numériques sont assimilables à du Digital Labor ne revient-il pas à entériner que ce basculement dans des rapports de production est inéluctable et que plus rien de nous permettra d’échapper à cette « financiarisation » forcée de nos vies, y compris dans ce qu’elles ont de plus intime ? Si tel était le cas, la « protection sociale des données » pourrait recevoir la même critique que celle qu’on adresse parfois à la protection sociale tout court : que ces mécanismes, installés dans leur forme actuelle pendant la période fordiste, visent simplement à « compenser » les rapports de domination imposés aux individus dans la sphère du travail et non à remettre en cause le principe même de la soumission qu’ils impliquent. Pour conjurer ce risque, il importe selon nous d’être au contraire capable d’opérer des distinctions claires au sein même du continuum de pratiques décrites comme du Digital Labor, en les repositionnant soigneusement par rapport à l’idée de protection sociale.
  • Si l’idée d’une « protection sociale des données » a un sens, ne devrait-elle pas précisément résider dans une faculté de déterminer quelle part de nos vies nous voulons voir saisies dans un rapport de production et quelle part nous voulons au contraire en préserver ?
  • Face à ces situations de fragilisation brutale des individus, il importe de réactiver les principes de base de la protection sociale, en appelant à ce que les juges ou le législateur fassent preuve de volontarisme en requalifiant ces activités en emplois salariés. C’est de cette manière que le législateur a procédé par exemple avec les intermittents du spectacle dans les années 1990 en instaurant une présomption de salariat, alors même que ces activités s’exercent dans un cadre où la subordination traditionnellement associée à la situation d’emploi n’est pas nécessairement caractérisée. Même s’il y aurait beaucoup à dire sur les lacunes de la protection sociale des intermittents, il n’en reste pas moins que ce rattachement à l’emploi salarié participe à la sécurisation du parcours des individus œuvrant dans ce secteur.
  • En imposant aux individus d’inscrire leur intimité dans un rapport de production, les plateformes provoquent en réalité un effondrement de la distinction entre la sphère publique et la sphère privée, phénomène lourd de conséquences qu’Hannah Arendt a identifié comme un des mécanismes par lesquels le totalitarisme s’empare des sociétés. Le cadre analytique du Digital Labor traduit donc une certaine vérité, car à l’époque moderne c’est bien le fait de faire apparaître une activité dans l’espace public qui la transforme presque mécaniquement en « travail ».
  • Cela implique donc, lorsque nous utilisons des services numériques, de toujours être en mesure de savoir clairement si nous sommes engagés dans un rapport de production et de pouvoir en sortir, si nous le voulons. Sachant que cette possibilité de « sortir » reste en réalité profondément illusoire si n’existent pas des alternatives tangibles dans lesquelles nos activités sociales pourraient s’inscrire sans qu’on les soumette à des dominations à visée économique. C’est la raison pour laquelle une protection sociale des données personnelles passe nécessairement aussi par la construction de Communs numériques, basés sur des logiciels libres.
  • Compte tenu de ce contexte, il s’agit bien de construire une protection sociale des données en même temps que de revendiquer des conditions de travail dignes et réellement humaines pour les personnes impliquées professionnellement dans leur production. Cette double dimension collective dans la production et la gestion des données ouvre sur un vaste enjeu de solidarité, en action, dans la coordination de nos usages « amateurs »/non-professionnels avec ceux des travailleurs des plateformes. Discuter collectivement le fondement d’une éthique dans l’agencement de nos relations numériques nous amène nécessairement à regarder en face les grands équilibres économiques, l’exploitation et les mécanismes de prédation des grandes firmes sur les travailleurs les plus précaires, et souligne tout autant l’urgence de la construction de responsabilités collectives pour y répondre.
  • Il ne faut pourtant pas nous priver de penser des environnements et des pratiques numériques beaucoup plus émancipatrices, en s’appuyant sur ce que le monde du logiciel libre, le mouvement des communs et de l’économie solidaire, proposent conjointement : participer à la construction du progrès social et des capabilités numériques individuelles et collectives, permettant de prendre une part active dans l’organisation de nos pratiques. A cet égard, les activités d’éducation populaire développées par l’association Framasoft sont tout à fait remarquables, en ce qu’elles articulent des solutions logicielles alternatives avec un travail de fond d’éducation populaire – au sens d’une éducation qui prend en compte la dimension profondément politique de la construction et de la circulation des savoirs et des savoir-faire.
  • Dans cette même perspective, qualifier les données d’intérêt général, c’est aussi ne pas laisser s’échapper le caractère profondément politique de leur usage : c’est réaffirmer la dimension sociétale de nos usages individuels et collectifs.
  • Pour contrer cela, nous devons construire une nouvelle infrastructure pour permettre aux personnes de regagner cette souveraineté individuelle. Ces aspects de l’infrastructure qui concernent le monde qui nous entoure doivent appartenir aux biens communs et les aspects qui concernent les gens – qui constituent les organes de notre être cybernétique – doivent être détenus et contrôlés par les individus eux-mêmes.
Aurialie Jublin

L'entreprise libérée, réalité ou imposture ? - 1 views

  • Première critique : l’entreprise libérée propose d’abattre un système qui n’existe presque plus ! Frederick Taylor est mort il y a un siècle (en 1915). Son modèle d’organisation scientifique du travail, fondé sur la division à l’extrême des tâches, le chronométrage, le salaire à la pièce, a fait l’objet de fortes critiques (dont par exemple, Le Travail en miettes de Georges Friedman, 1956). Dans le même temps, les relations humaines, les motivations et l’autonomie des employés commençaient à être prises en compte tant dans la théorie, comme le modèle Y de Douglas McGregor que dans la pratique.
  • Une nouvelle bureaucratie est apparue au cours des deux dernières décennies, liée à l’essor des modes de contrôle de gestion, des normes de qualité, des outils informatiques (5), mais ces nouvelles normes et directives sont imposées en large partie par des contraintes institutionnelles, comme les normes de qualité et les normes comptables. Leur suppression ne dépend pas de la seule bonne volonté de « leaders libérateurs ».
  • L’autre critique vient de François Geuze, directeur du master management des RH de Lille. Pour lui, l’entreprise libérée se situe à mi-chemin entre la « stratégie de communication et l’imposture (6) ». Il récuse l’idée que l’on puisse se débarrasser aussi aisément des « fonctions supports » comme les RH, envisagées par les hérauts de l’entreprise libérée comme de purs parasites. (« Les RH sont des parasites à l’état pur (…), ils font partie de ces sorciers devins qui sont autogénérés », affirme Jean-François Zobrist, ex-dirigeant de FAVI (7)). Mais si on supprime les DRH, jugés inutiles, qui va s’occuper de la gestion des carrières, de la formation, des conditions de travail ? Les chefs d’équipe sont-ils à même de traiter eux-mêmes les questions de formation ou d’évolution de carrière ? Pour F. Geuze, la vision caricaturale d’un encadrement qui ne sert « qu’à la prescription et au contrôle » est une façon de renforcer le pouvoir du leader « petit père des peuples ».
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  • Car la suppression du contrôleur ne veut pas dire suppression du contrôle. « La logique pernicieuse de l’entreprise libérée est qu’elle prône l’autocontrôle (…). Mais celle-ci peut bien vite glisser vers le contrôle de tout le monde par tout le monde, chacun des membres d’une équipe étant en permanence sous le contrôle de l’ensemble de ses membres. »
  • L’autre visage de FAVI Mais il existe aussi une autre version de l’histoire. Certes, les ouvriers ne pointent plus ; ils règlent eux-mêmes leur machine. Mais est-ce vraiment aussi révolutionnaire ? J.F. Zobrist n’a fait qu’introduire un type de management à la japonaise des années 1970, très largement importé dans de nombreux secteurs, avec les équipes semi-autonomes. Mais la loyauté des salariés repose aussi sur l’existence d’une norme de groupe très forte, fondée sur l’autocontrôle des salariés entre eux. Tout dissident est mis au ban, et l’omniprésence du « leader libérateur » fait songer au gourou d’une secte…
  • Quand l’automobile a connu la crise de 2008, l’entreprise s’est réorganisée et est passée de 600 salariés à moins de 400 aujourd’hui. J.F. Zobrist a donc dû se séparer de 200 personnes. Dans le même temps, la productivité a progressé au rythme de 3 % l’an, ce qui impose un rythme de travail soutenu. Les ouvriers de chez Favi doivent façonner 1 800 pièces dans la journée, ce qui est un objectif très élevé dans le secteur. La peur du chômage aurait-elle remplacé la pointeuse ? Les récits stéréotypés du leader Favi ne le disent pas.
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    "Devant tant d'enthousiasme, il n'apparaît pas inutile d'écouter quelques voix discordantes. Dans Faut-il libérer l'entreprise ? (2016), Gilles Verrier et Nicolas Bourgeois, tout en partageant les buts et méthodes (on n'interroge que les dirigeants !), prennent un peu de distance et tentent une approche un peu plus mesurée de l'entreprise libérée. D'autres sont franchement plus critiques (4). On peut résumer les critiques à trois grandes catégories."
Aurialie Jublin

Vos désirs sont des ordres | Cosmo [†] Orbüs - 0 views

  • La morale, c’est qu’il n’y a pas de limites à la volonté de contrôle des corps. Le techno-capitalisme avance souvent main dans la main avec sa meilleure ennemie : la liberté individuelle. […] Les organisations qui ne savent pas promouvoir l’homme tel qu’il est (et la femme telle qu’elle est), dans toutes ses dimensions, dans toutes ses richesses (et faiblesses !), sont des organisations dont le design n’est pas prévu pour l’humain.
  • Dans un monde où les entreprises cherchent à dépasser les possibilités de leur main d’oeuvre humaine (cadence, qualité, standardisation de la production etc.) pour pas trop cher (ou vite rentabilisé), la machine semble être une solution logique. Le design de la machine industrielle (et du logiciel de service) est conçu pour accomplir précisément ce qu’elle est supposée faire (on en a déjà parlé). Ça paraît tout bête dit comme ça, mais ça va mieux en le disant : la machine est faite pour faire ce qu’on veut qu’elle fasse. Elle est donc complètement compatible avec les attentes de l’entreprise, contrairement à ces humains bourrés de vices de conception, qui dorment, mangent, prennent des pauses, font grève et… vont aux toilettes.
  • Certains prêchent qu’on aurait intérêt à s’entraîner pour concurrencer les machines qui, demain, nous remplacerons. D’autres évoquent l’impossibilité totale de battre le droïde sur son propre terrain (encore une fois : il est conçu pour une tâche précise. Comment voulez-vous lutter ?), et appellent à embrasser le Grand Remplacement Robotique qui serait pour demain.
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  • La première option n’en est pas une. S’entraîner pour accomplir ce qu’un robot manifestement imparfait fait déjà mieux que nous est une gageure. A moins de les perfuser en permanence (sucre + excitants + antidépresseurs), de les gaver de pilules anti-sommeil, de les enchaîner à la chaîne de montage et de tenir la Ligue des Droits de l’Homme à distance, les ouvriers de l’industrie automobile sont moins efficaces que les robots qui existent d’ores et déjà. Dans le futur, aucune « augmentation » transhumaniste ne changera jamais cet état de fait.
  • La deuxième option est plus intéressante. Souvent la réflexion de penseurs comme Ariel Kyrou (dans Réinventer le travail sans l’emploi) ou des auteurs de SF comme Norbert Merjagnan (CoÊve 2051) fait suivre le constat du tout-robotique à venir par un appel au Revenu de Base. Forcément : si les machines font si bien le travail, laissons leur. Mais si nous n’avons plus de boulot ni de salaire, qui achètera les quantités de produits débités par nos usines robotisées ? Le revenu de Base est parfois vu comme la face B, indissociable de la robotisation galopante. A moins de s’en remettre à la phrase de Catherine Dufour : « Avec la robotisation on nous avait promis les loisirs, et on a eu le chômage. »
  • Pendant que le service marketing s’essaye à la promesse, quelqu’un d’autre doit la tenir. Le paradis du consommateur est souvent l’enfer du salarié.
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    "Il y a des entreprises où les employés portent de couches parce qu'il n'ont pas le temps - parce qu'on ne leur laisse pas le temps - d'assouvir un besoin essentiel et commun à tou(te)s. Il y a des entrepôts d'Amazon environnés de tentes parce que les employés n'ont pas le temps - parce qu'on ne leur laisse pas le temps - de rentrer chez eux le soir. (Et encore, pour le moment ils n'ont pas de bracelet de surveillance.) Allons bon, ils ont toujours le choix ! Sauf qu'à trop faire la fine bouche, on leur rappellera que six millions de crevards demandeurs d'emplois attendent dehors pour prendre leur place. Comme le notait Mais où va le web dans son excellent article Pause pipi et ovocytes congelés : l'homme machine selon Heidegger, le fait que des entreprises en arrivent à de tels délires dans l'exploitation de leurs salariés est un problème de design. Ces entreprises et leur fonctionnement ne sont pas compatibles avec ce qu'est l'être humain. "
Aurialie Jublin

Et si l'on se débarrassait une fois pour toutes de l'emploi ? - 0 views

  • Le travail comme contrôle social Une première solution serait de continuer à travailler, même si cela ne sert plus à rien, ne serait-que pour préserver un certain ordre social, comme l'imaginent Léo Henry et Jacques Mucchielli dans leur nouvelle Demain l’usine
  • Le travail comme expression de soi Il serait évidemment préférable de se remettre en quête du sens de ce que l’on nomme encore aujourd’hui « travail ». On ne peut cependant pas s’en tirer par des expressions toutes faites telles que « créativité » ou « empathie », puisqu’on fait aujourd’hui toutes sortes d’efforts pour doter les robots et les IA de ce type de capacités.
  • Le travail comme oeuvre collective Mais on ne travaille pas tout seul, ni pour soi. Le travail est par essence une activité sociale, tant dans son déroulement que dans son résultat. Beaucoup d’utopies des XIXe et XXe siècle s’organisaient autour d’une manière de travailler ensemble
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  • Le travail comme assurance-futur Oeuvrer, d’accord, mais à quoi ? Dans son article « The Option Value of the Human », situé à la lisière de la recherche et de la spéculation, l’informaticien et penseur de l’économie Steve Randy Waldmann suggère qu'à l'heure de la robotisation, la fonction du travail pourrait consister, d’une part, à garder en vie les savoir-faire et même les systèmes productifs du passé et d’autre part, à inventer le plus grand nombre de choses possibles, indépendamment de leur utilité immédiate.
  • ... Ou plus de travail du tout ? À moins… que nous apprenions à accepter l’oisiveté au nom de la contemplation, de l’amélioration de soi et de la philosophie, comme nous y invitent certaines des fictions les plus anciennes sur la robotisation du travail humain - le travail résiduel devenant une forme de “service social”, d’impôt temporel, comme dans la pièce « R.U.R, les Robots Universels de Rossum », de Karel Capek
  • Au fond, la disparition éventuelle du travail n’est peut-être un problème que dans un monde où la majorité des activités humaines s’inscrit dans un contexte marchand, justifiant dès lors un calcul coût-avantage qui tournera souvent à l’avantage de la machine. Tout en cherchant à inventer les métiers de demain, on pourrait aussi chercher aussi à imaginer la disparition de l’idée de métier, pour s’intéresser à l’infinie variété des « activités », des manières d’être utile à soi et aux autres.
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    "Les deux premiers épisodes de la série d'articles « Boulofictions » se penchaient respectivement sur la façon dont la fiction nous aide à penser les futurs du travail et sur l'origine et les intentions des robots. Dans ce troisième épisode, Daniel Kaplan, à l'initiative du projet Work+, explore le scénario suivant : à supposer que les robots se substituent effectivement aux humains dans la plupart des emplois actuels et que la création de nouveaux emplois (notamment de servants, de réparateurs ou de coaches des machines) ne vient pas compenser la destruction des anciens, que pourrions-nous bien faire de nos vies ?"
Christophe Gauthier

Peut-on encore ne pas travailler ? | Anthony Masure - 0 views

  • Le consommateur de la société hyperindustrielle est un consommateur qui se déqualifie à toute vitesse — et qui du même coup se désindividue, comme l’avait montré [Gilbert] Simondon pour le producteur. Il ne sait plus « faire à manger », il ne sait plus compter. Bientôt il ne saura plus conduire, sa voiture conduira toute seule. Les consommateurs sont préformatés dans leurs comportements de consommation, téléguidés, conditionnés, et, comme dit [Gilles] Deleuze, « contrôlés »
  • Ainsi, quand je like, que je commente ou que je publie un message publié sur média social, je renforce sa valeur financière en générant du temps d’activité (qui apparaîtra dans son bilan d’activité), en créant du contenu (qui pourra générer d’autres interactions), et en lui fournissant des informations personnelles (métadonnées : heure et lieu de connexion, etc.).
  • Selon Hannah Arendt, le « domaine public » se caractérise par le fait que chacun peut voir et entendre la place de l’autre, différente de la sienne
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  • Sans cette distinction, il ne saurait exister de lieu de rencontre, et donc de débat politique. Aussi, ces activités quotidiennes économisées en jeu (« gamifiées ») pour ne pas paraître laborieuses posent directement un problème politique, tant que les revenus dégagés (soustraits en grande partie à l’impôt) et que les modes de gouvernance (qui prennent la forme de « conditions d’utilisation » formulées pour ne pas être lues) échappent à la délibération collective — et se placent dès lors hors du domaine public qui caractérisait encore les « marchés d’échange » du capitalisme naissant. Evgeny Morozov parle ainsi de « réglementation algorithmique
  • » pour pointer le fait que chacune de nos actions est susceptible d’être enregistrée, quantifiée et corrigée, y compris par des États.
  • Aussi, plutôt que de chercher à sauver l’emploi, qui comme nous l’avons vu, a largement perdu de sa consistance, il faut plutôt œuvrer à redonner du sens au travail — compris non pas comme une souffrance (labeur) ou comme une activité récurrente s’épuisant dans la consommation, mais plutôt, au sens moderne du terme, comme l’idée d’« effectuer un exercice », de « fonctionner » (en parlant d’une machine) ou encore de « pouvoir être façonné » (« se travailler »)
  • Un tel design, inemployable, c’est-à-dire qui ne participe pas d’une instrumentalisation des relations humaines, n’est pourtant pas sans valeur. Les projets réalisés par l’architecte et designer Ettore Sottsass dans les années 1970 sont à ce titre révélateurs d’une démarche interrogeant les fondements de la culture industrielle, et plus globalement « des lois, des habitudes et du vocabulaire de la culture rationaliste
  • Alimentant et tirant profit de la disparition des métiers, voire des professions, des sociétés « de service » fournissent clé en main nourriture, amour, vacances, connaissances, langues, éducation, loisirs
  • peut-on encore ne pas travailler ? Pour répondre à cette question, il faut tout d’abord examiner la mutation de la notion de métier en profession à l’époque des Lumières, puis le développement du capitalisme
  • Cette première séparation conceptuelle entre les capacités techniques d’un individu et leur asservissement (voire leur aliénation) au sein de tâches d’exécution recouvre déjà des problématiques contemporaines :
  • est-il certain que toutes les compétences qu’un individu est en capacité d’exercer et de développer s’épuisent dans leurs applications économiques ?
  • C’est précisément cet écart qui sépare le travail de l’emploi
  • mince est la limite entre des emplois salariés, pour lesquels il faut en faire toujours plus, et une myriade de micro-tâches non rémunérées, qui donnent l’impression de travailler jour et nuit
  • Au capitalisme industriel (concentration des moyens de production) se sont ainsi ajoutés le capitalisme financier (ère de la spéculation et domination des institutions financières) puis le capitalisme cognitif
  • le design peut permettre de répondre à la question de départ, à savoir qu’il s’agit moins de chercher à ne pas travailler
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    "Tandis que le travail, en crise, est de plus en plus recherché, mince est la limite entre des emplois salariés, pour lesquels il faut en faire toujours plus, et une myriade de micro-tâches non rémunérées, qui donnent l'impression de travailler jour et nuit. Autrement dit : peut-on encore ne pas travailler ? Afin de traiter ce paradoxe, nous examinerons tout d'abord le passage du métier à des professions employées à faire croître le capital. Ensuite, après avoir vu en quoi l'époque contemporaine pourrait signer une possible « mort de l'emploi », nous analyserons en quoi le développement du « labeur numérique » (digital labor) et des objets supposément « intelligents » (smart) brouille la distinction entre le temps libre et le temps travaillé. Afin de sortir de ces impasses, nous nous demanderons si le design, en tant que travail de « qualités » inutiles, pourrait permettre d'envisager de nouveaux rapports au temps."
Aurialie Jublin

Travail : 4 propositions pour éviter la précarisation généralisée | Usbek & Rica - 0 views

  • Première piste d’évidence : briser la neutralité, l’équivalence des différents types de travail, ou plutôt d’emplois.
  • Une deuxième piste supposerait, pour être tracée, de revaloriser les métiers du care, du soin, de l’éducation et du service à la personne, qui relèvent d’une intelligence pratique et empathique qu’aucune machine ne remplacera jamais. Mais il s’agit également, dans les réponses individuelles comme dans le modèle de travail à encourager, de refuser la fragmentation de l’individu et des communautés. De considérer toujours les gens comme bien plus que juste des clients, juste des patients, juste des usagers, juste des bénévoles, juste des patrons, juste des travailleurs ou juste des parents.
  • Une troisième clé, sur laquelle parie à juste titre Dominique Méda, consiste à oublier la boussole imbécile et destructrice du PIB ainsi que les billevesées de la croissance purement comptable pour mieux construire la nouvelle économie d’une reconversion écologique radicale – mais sans s’illusionner sur quelque retour au plein emploi… Nous pourrions d’ailleurs associer à ce sésame environnemental et non entropique l’horizon de la « société des communs » telle qu’aimeraient par exemple la construire Michel Bauwens et les acteurs de la P2P Foundation. Ce qui supposerait d’inventer un nouveau régime de valeur, où « des citoyens qui s’organisent pour nettoyer une plage à la suite d’une marée noire » ne feraient pas baisser la mesure de ce qui « compte » (aujourd’hui le PIB), « là où le bateau qui l’a provoquée crée de la valeur, puisqu’il engendre une activité économique liée à la réparation de ses propres dommages[3]. 
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  • Enfin, quatrième chemin, plus complexe encore à engager : la réforme en profondeur, en Allemagne et surtout en France, de notre modèle social, que les sociologues qualifient de « corporatiste conservateur », pour la raison qu’il ne conçoit l’inscription dans la société, et donc la protection sociale, qu’au filtre du groupe professionnel, en particulier du chef de famille, c’est-à-dire d’un statut (teinté de machisme) qui ne tient qu’à l’emploi salarié et à lui seul[4]. Ce système devient totalement absurde dès lors que la majorité desdits emplois seraient assurés par des machines, sauf à accorder une retraite et des droits sociaux aux robots et aux algorithmes.
  • Le « comment » de cette route vers l’horizon mouvant d’une société non plus gouvernée par l’emploi mais par un travail au sens d’œuvre, de care et de singularité personnelle et collective, reste évidemment à creuser. L’une des voies envisageables, défendue par les auteurs du Manifeste accélérationniste[5], Nick Strinek et Alex Williams, tient en deux mouvements intenses et apparemment contradictoires : d’une part accélérer le remplacement de l’humain par les machines, afin d’éliminer au plus vite les tâches nous transformant nous-mêmes en femmes et hommes machines ; d’autre part baisser au plus vite le temps de travail et instaurer un revenu universel suffisant, supérieur au SMIC, donc à terme de 1 100 à 1 500 euros par mois.
  • Cette somme, bien sûr, serait infinançable à très court terme, d’où l’idée, défendue par la revue Multitudes et Yann Moulier-Boutang, d’y ajouter une radicale refonte de la fiscalité selon les principes de la taxe pollen, ponctionnant tous les flux d’argent plutôt que les revenus, quitte à instaurer d’abord une taxe européenne sur ceux issus du trading haute fréquence pour financer le revenu universel
  • Une autre piste, portée par Bernard Stiegler et l’association Ars Industrialis, consiste à élargir le statut de l’intermittence à l’ensemble de la population et à instaurer pour ce faire un revenu contributif. Le statut d’intermittent – et donc le droit à toucher ce revenu – nécessiterait d’acquérir et de transmettre en permanence ses connaissances, ses savoir-faire et savoir-être
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    "« Réinventer le travail sans l'emploi. Pourquoi le numérique nous contraint à changer notre conception du travail ». Tel est le titre de la note écrite pour l'Institut Diderot par l'essayiste Ariel Kyrou. L'auteur a souhaité partager ce texte avec Usbek & Rica, dans une version légèrement augmentée. Le dernier épisode de ce feuilleton réflexif sur le futur du travail présente quatre pistes majeures pour bien anticiper les bouleversements nés de l'innovation technologique et pour contrer les mécanismes de précarisation actuellement en cours."
Aurialie Jublin

Les 8 tendances "lucides" pour le monde du travail en 2018. Partie 1 : freelance vs salarié·e vs machine ? - Secafi Blog - 0 views

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    - Faire coexister plusieurs statuts de travailleurs et plusieurs générations de manière harmonieuse dans l'entreprise - Responsabilité l'individu sur le développement de ses compétences - Travailler avec des machines
Aurialie Jublin

Le sens du travail à l'ère numérique | Pierre-Yves Gomez - 0 views

  • Le travail professionnel, lui, est organisé dans les entreprises ou les administrations si on est salarié, ou défini par un contrat commercial si on est indépendant. Il se distingue, d’une part, par la subordination du travailleur au donneur d’ordre, d’autre part, par la rémunération monétaire de l’effort réalisé. Il représente toutefois moins de la moitié de l’ensemble des activités de travail que nous réalisons au quotidien. Le travail professionnel est donc à tort considéré comme « le » travail par excellence, au terme d’une confusion courante entre les notions de travail et d’emplo
  • La question du sens du travail n’est donc pas (seulement) de l’ordre d’une contemplation du résultat. Elle fait aussi écho au contrôle des outils utilisés. Si le travailleur doit se plier à leur rythme, leur cadence ou leurs exigences, le sens du travail est décidé, au final, par ceux qui contrôlent ces outils et les imposent dans les processus de production. Pour éviter une approche idéaliste, il est donc nécessaire de s’interroger sur le degré de maîtrise des techniques par ceux qui les utilisent, qu’il s’agisse des innombrables robots, ordinateurs, téléphones, réseaux techniques ou des machines nécessaires aussi bien pour accomplir un travail domestique, collaboratif que professionnel.
  • L’histoire du travail humain est celle d’une tension constitutive entre l’emploi des outils et leur propriété, entre ceux qui les manipulent et ceux qui en définissent les conditions d’usage, imposant la finalité du travail et réduisant les travailleurs au seul accomplissement des efforts pour produire. La tension s’est accrue au fur et à mesure que la société industrielle s’est enracinée dans un système technique complexe.
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  • Au tournant du XXe siècle, quand l’organisation du travail se veut « scientifique », le travailleur est soumis au rythme et à l’intensité des machines avec lesquelles il est mis en concurrence : « La machine n’agit pas seulement comme un concurrent dont la force supérieure est toujours sur le point de rendre le salarié superflu. […] Elle devient l’arme de guerre la plus irrésistible pour réprimer les grèves, ces révoltes périodiques du travail contre l’autocratie du capital[4]. » Le travailleur subordonné perd la capacité de définir le sens d’une activité inscrite dans les processus complexes de la production mécanisée qui sert à la fois d’étalon de productivité et de menace d’exclusion. Ceux qui contrôlent l’investissement et l’usage des machines peuvent jouer de cette menace.
  • En réaction à l’hyper-rationalisation des organisations, notamment avec la période de financiarisation, mais aussi à l’insécurité croissante de stratégies globalisées et souvent incompréhensibles, ils ont réinvesti les formes du travail « privé » pour reprendre la main sur leurs activités et y trouver une nouvelle opportunité de donner du sens à leurs efforts. Il s’en est suivi un désengagement des entreprises sous forme de « bore out » (prise de conscience que le travail professionnel est ennuyeux), de « brown out » (prise de conscience que ce travail est inutile), voire de « burn out » (travail insoutenable).
  • À l’opposé du scénario précédent, la numérisation autoriserait une décentralisation économique inédite, permettant à la fois de travailler à distance et aussi de produire et de consommer localement – voire d’auto-consommer – la plus grande partie de la production[8]. Ce scénario suppose une reconfiguration de la consommation : échapper à l’industrialisation planétaire des objets, c’est en consommer moins et choisir un mode de vie plus simple, qui pourrait compenser la perte de revenus due au déclin du travail professionnel classique, sans paupérisation des ménages. Au total, le monopole des organisations marchandes sur la définition de la finalité du travail professionnel serait fortement entamé.
  • On voit que le jeu est ouvert entre ces deux scénarios, dont l’un prétend émanciper par une hyperconsommation numérique, l’autre par une réappropriation locale du sens du travail. L’issue dépendra, notamment, de ce que nous ferons des nouvelles technologies.
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    "Hors de l'emploi, le travail est largement invisible. Il est pourtant vecteur de sens, un sens fixé par l'employeur dans le salariat. Mais dans un monde numérisé, qui maîtrisera la finalité du travail ? "
Aurialie Jublin

21 jobs of the future : a guide to getting and staying employed over the next 10 years (pdf) - 0 views

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    Raisons pour lesquelles ne pas s'inquiéter de l'automatisation et du progrès : - le travail a tjs changé - de nombreux emplois actuels sont horribles - les machines ont besoin d'humains - ne pas sous-estimer l'imagination et l'ingéniosité humaines - la technologie va améliorer tous les aspects de la société - la technologie résout et crée des pb
Aurialie Jublin

Automation may require as many as 375 million people to find new jobs by 2030 - Quartz - 0 views

  • y 2030, up to 30% of the hours worked globally could be automated, according to a new report by the McKinsey Global Institute. Analysts in the consultancy’s research arm estimate that between 400 million and 800 million people could find themselves displaced by automation and in need of new jobs, depending on how quickly new technologies are adopted. Of this group, as many as 375 million people—about 14% of the global workforce—may need to completely switch occupational categories and learn a new set of skills to find work.
  • Notably, McKinsey argues that demand for work will increase as automation grows. Technology will drive productivity growth, which will in turn lead to rising incomes and consumption, especially in developing countries. Meanwhile, there will be more jobs in health care to meet the demands of aging societies and more investment in infrastructure and energy.
  • For these benefits to be realised, everyone needs to gain new skills, with governments and private companies taking on the unprecedented task of retraining millions of people in the middle of their careers. “Even if there is enough work to ensure full employment by 2030, major transitions lie ahead that could match or even exceed the scale of historical shifts out of agriculture and manufacturing,” the report says.
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  • There will be other challenges too. In advanced economies, there is a risk that automation will worsen the trend of income polarization, with demand for high-wage jobs increasing, and demand for medium-wage jobs falling. Also, displaced workers will need to find jobs quickly—preferably within a year—otherwise frictional unemployment (lots of people moving between jobs) could put downward pressure on wages.
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    "Fears that automation and machine learning will cause massive job losses and make people obsolete are starting to wane (well, unless you ask Stephen Hawking). Instead, there's a more optimistic prediction taking hold: that the new technology could actually lead to job gains. But the transition won't be easy."
Aurialie Jublin

À la rencontre des « raters », petites mains des « big data » - 0 views

  • Il y a aussi le « Google Now », ça c’est ce qu’ils appellent les « device actions ». Attention, là on rentre dans le genre de truc qui fait flipper les gens quand je leur dis. C’est quand tu notes la pertinence d’une action que le téléphone a faite quand une personne lui a demandé, à son téléphone, de faire quelque chose. Typiquement : « Envoie un message à Sarah, dis-lui que j’arrive dans 15 minutes. »
  • Quand ils ont fait leur moteur de recherche, ils se sont pas dit : « On va faire un annuaire de sites rempli à la main. » Avant ça existait, les annuaires de sites avec des gens qui remplissaient les rubriques, qui notaient les pages, etc. C’était avant le PageRank, qui fait ça automatiquement. Avec l’algorithme, c’est du passage à la chaîne. Moi, je suis le dernier ouvrier de la chaîne, qui est encore là parce qu’il y a encore un dernier truc qu’on ne sait pas faire faire à une machine.
  • Cette matière première issue de l’activité humaine est souvent considérée comme du « travail », au sens où elle participe de la création de valeur pour les entreprises du numérique, n’est pas le propos qui nous intéresse ici. Il est plutôt de souligner que même les univers les plus algorithmés sont consommateurs de main d’œuvre. Irréductible travail humain ?
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    "Mon taf, il existe parce que, aujourd'hui, on n'est pas capables de faire des machines aptes à comprendre le contexte des choses, d'aller plus loin que les instructions qui leur ont été données, et donc on est obligés de faire appel à de l'intelligence humaine pour faire le boulot que je fais. Si tu me demandes ce que c'est mon boulot et ce que j'en pense, je dirais que c'est une des étapes nécessaires dans le chemin vers l'intelligence artificielle."
Aurialie Jublin

Les penseurs du travail - France Culture - 2 views

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    Serie de 4 émissions sur le concept de travail, la loi du travail, l'impact du progrès technique et le sens du travail.
Aurialie Jublin

Cher Elon Musk, oublie les robots-tueurs, voici ce qui devrait vraiment t'inquiéter - Mais où va le Web - 0 views

  • Tu devrais jeter cet œil inquiet (et attentif) au Rapport AI Now (2016). Tu devrais te soucier des thèmes qu’ils mettent en lumière, notamment en ce qui concerne les impacts sur le travail, la santé, l’égalité et l’éthique à l’heure où l’intelligence artificielle s’insinue dans nos vies quotidiennes.
  • Tu devrais réfléchir à la façon dont l’apprentissage machine change nos façons de travailler et le travail tout court. Tu devrais te préoccuper de l’impact de l’intelligence artificielle sur la création et la destruction de nos emplois, te soucier des questions éducatives, de formation à de nouveaux métiers et des allocations et modes de redistribution qui devraient résulter d’une reconfiguration du travail par l’IA. Tu devrais considérer la question de l’automatisation non pas seulement du point de vue de la robotique mais sous l’angle des infrastructures : comment les industries du transport, de la logistique, seront affectées par l’apprentissage machine ? Scoop : elles le sont déjà au prix de nombreux emplois.
  • Tu devrais te préoccuper des articles publiés par ProPublica sur les biais algorithmiques, notamment celui-ci qui explique comment les logiciels de police prédictive accusent de façon inconsidérée les noirs et beaucoup moins les blancs. Tu devrais te soucier de cet autre article de ProPublica qui indique que certains assureurs augmentent les prix pour les personnes de couleur. Les raisons sous-jacentes ne sont pas si claires mais selon ProPublica, des algorithmes prédateurs favorisent les quartiers blancs plus que les autres. La négligence derrière cette masse de données devrait t’inquiéter
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  • Tu devrais t’inquiéter de la provenance des données qui entraînent ces algorithmes. Tu devrais t’offusquer de voir ces données récupérées sans consentement explicite, comme l’a montré The Verge dans cet article qui rapporte que des images de personnes transgenres en transition ont été utilisées sans leur consentement dans le cadre d’un projet de recherche portant sur la reconnaissance faciale grâce à l’intelligence artificielle.
  • ProPublica révèle aussi que le système de « scoring » établissant une possibilité forte de « commettre de nouveau un crime » généré par les logiciels de police prédictive était utilisé pour alourdir les peines. Les juges s’en servent comme d’une aide, une « preuve algorithmique » issue d’un nouvel outil au service du système judiciaire. Voici une préoccupation majeure.
  • Que se passe-t-il quand un utilisateur se retrouve coincé dans une série de systèmes sans pouvoir en sortir ? Que se passe-t-il quand un agent conversationnel est bloqué, quand des données sont fausses et qu’il n’y a personne pour proposer à l’utilisateur d’apporter des modifications ou des rectifications ? Les machines font des erreurs, un point c’est tout. La question est donc : comment ces systèmes gèrent-ils leurs propres erreurs ?
  • Elon, tu devrais t’inquiéter des capteurs qui ne reconnaissent pas la peau noire. Tu devrais t’inquiéter des produits insensibles à certaines couleurs, comme par exemple ces distributeurs de savon qui ne réagissent pas aux mains noires. Tu devrais t’inquiéter des caméras qui suggèrent que les asiatiques ont « cligné des yeux » parce que leur système est majoritairement entraîné par des profils de type caucasien.
Aurialie Jublin

Quantified Workers in Precarity - phoebevmoore - 2 views

  • The precarity of the modern worker is central to understanding the quantified self at work. Precarity is the purest form of alienation where the worker loses all personal association with the labour she performs. She is dispossessed and location-less in her working life and all value is extracted from her in every aspect of life. Because precarious workers are constantly chasing the next ‘gig’, spatial and temporal consistency in life is largely out of reach. Capital encourages universal communication and machinic devices appear to facilitate this communication within precarious conditions: but only in quantified terms. Thus, anything that cannot be quantified and profiled is rendered incommunicable – meaning it is marked and marginalised, disqualified as human capital, denied privilege, and precarious (Moore and Robinson 2015). Workers are compelled to squeeze every drop of labour-power from our bodies, including work that is seen, or work that has always been measured in Taylorist regimes; and increasingly, work that is unseen, such as attitudes, sentiments, affective and emotional labour.
Aurialie Jublin

The coming jobs boom in the age of intelligent machines  - LSE Business Review - 0 views

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    "We're pessimistic when we focus on the world that we know now, not thinking that processes are being reorganised, writes Ben Pring" L'auteur cite notamment : - la création d'infrastructure numérique va créer des emplois pour les cols bleus, les cols blancs et les "sans cols" - les machines ne vont pas remplacer mais améliorer la performance humaine - les new tech = expansion économique
Aurialie Jublin

QVT et collectifs « heureux » : le rôle du manager - Metis - 0 views

  • la déconnexion des dirigeants au terrain, une problématique déjà évoquée par Michel Crozier et approfondie aujourd'hui par l'un de ses continuateurs, François Dupuy, auteur notamment de La fatigue des élites, Lost in management et La faillite de la pensée managériale. On retrouve justement la problématique de la quantophrénie et du chiffre. En effet, plus les dirigeants s'éloignent des processus de travail et ont du mal à les cerner et plus ils demandent du reporting, des données. Il y a alors une grande partie de l'énergie des opérateurs qui est dérivée, déviée vers la production de chiffres.
  • on est en France dans ce contexte particulier d'un taylorisme dont on a des difficultés à sortir. En même temps, ces vingt dernières années il y a eu un effort extrêmement important sur l'éducation : le niveau moyen s'est considérablement élevé et de plus en plus de jeunes sortent de l'université. Ainsi, des personnes de mieux en mieux formées se trouvent confrontées à des marges de manœuvre de plus en plus réduites. D'où cet intérêt vis-à-vis de l'entreprise libérée qui existe aussi en Belgique, mais nulle part à ce point ailleurs en Europe. D'où aussi le nombre important de jeunes qui veulent créer leur startup, préférant la liberté et le dynamisme à la contrainte. Cet esprit entrepreneurial est l'aspect positif, mais il y a un gros revers, c'est le désengagement d'autres personnes dans l'entreprise et ce que l'on appelle « la grève du zèle ». Quand tout le monde suit les consignes à la lettre, cela bloque le travail et les organisations. Cela prouve que l'hyper-prescription du travail n'est pas un gage de performance, ni sur le plan économique ni sur le plan humain.
  • En France, on a souvent une vue assez critique sur le management, on a même tendance à le diaboliser. Mais, pour moi, il ne faut pas aller dans le sens de ce que voudrait nous faire croire l'entreprise libérée qui développe son « modèle idéal » : dialogue direct entre le chef d'entreprise - le libérateur - et ses collaborateurs. J'estime au contraire que ce modèle est détestable dès que l'entreprise atteint une certaine taille et doit composer avec la complexité. L'étude de Technologia que j'ai mentionnée montre à quel point la fréquence et la qualité de la relation avec le manager de proximité sont déterminantes pour construire la QVT. Lorsqu'il y a un désaccord ou un conflit, on doit trouver les moyens de les résoudre. S'il n'y a plus personne pour le faire les tensions montent et les risques psychosociaux (RPS) avec. Même si les machines et algorithmes peuvent apporter un certain nombre d'informations, la dimension humaine est irremplaçable.
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    "La QVT qu'est ce que c'est ? Qu'est-ce qui pousse les dirigeants à s'en emparer ? Et pourquoi ne pas aller vers l'entreprise libérée ? Les collectifs sont-ils morts ? Dans un entretien croisé, une conversation entre Yves Grasset, sociologue du travail et auteur de Nourrir le collectif - sortir de l'individualisation pour sauver le travail et Martin Richer spécialiste de la Responsabilité Sociale des Entreprises et co-auteur du rapport Qualité de vie au travail : un levier de compétitivité, ces questions vont trouver réponse... et le manager sa juste place."
Thierry Nabeth

Smart machines and the future of jobs - The Boston Globe - 0 views

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    We need to pursue policies so that In this article, I'll try to predict some of the key implications of the coming "smart economy," and even more important, key policies that we should pursue sothe coming generation of smart machines works for us, rather than humanity working for the machines.
Aurialie Jublin

l'An 2000 - Hello it's Valentine: le like est-il un pourboire (et vous, un gros radin)? - Libération.fr - 0 views

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    "Pour Scott Kushner, le like a débarqué sur Facebook comme une «arme anti-lurking». C'est l'invention d'un moyen ultra simple pour participer, afin que la masse silencieuse se mette elle aussi au travail. Le like est une barrière à l'entrée bien moindre que la véritable création de contenu et permet de qualifier, et donc de monétiser, l'activité paresseuse d'un internaute. Le like ne fait pas que réveiller la masse silencieuse, il encourage la minorité active à être encore plus active et à faire d'autant mieux son travail de production des contenus. Le like est le contremaître de l'usine à contenus du web 2.0, s'assurant que tout le monde fait bien son travail et produit les contenus les plus «likables» et donc rémunérateurs pour l'ensemble de la chaîne de production. Vu sous cette perspective, le lurker est une forme de héros moderne, un briseur de machines, qui rompt la belle mais cynique mécanique des réseaux sociaux."
Aurialie Jublin

Microsoft rachète LinkedIn pour 26 milliards de dollars : une certaine vision du travail - L'actu Médias / Net - Télérama.fr - 0 views

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    "Le rachat de LinkedIn dit-il quelque chose de Microsoft et de sa vision du travail ? Selon Antonio Casilli, le danger d'une subordination technique des travailleurs guette, tapi derrière la machine à café : « Microsoft assume sa volonté de prendre en charge toute la vie d'une entreprise, de son univers bureautique, bureaucratique même, en passant par ses outils de formation ou son système d'exploitation. Qui revêt ici un sens très littéral, puisque le système remplace le supérieur hiérarchique dans le rôle du donneur d'ordres. La vision du travail selon Microsoft, c'est celle d'un hypertravail qui peut pénétrer tous les moments de notre vie »."
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