Skip to main content

Home/ QN2019/ Group items tagged lien social

Rss Feed Group items tagged

Aurialie Jublin

« La technologie offre aux quartiers la possibilité de devenir des espaces pr... - 0 views

  • La plupart du temps, nous n’avons pas besoin des multinationales. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la maire de Barcelone, Ada Colau, a pris une décision historique en interdisant les franchises dans sa ville. Changer de paradigme est un grand projet, mais changer des éléments à une échelle locale, c’est tout à fait faisable et ça commence à se faire dans de plus en plus de villes. Par exemple, moi qui suis investie dans le mouvement des fermes verticales, je constate que l'agriculture urbaine essaime : aujourd’hui, à New York, on peut même obtenir un permis pour élever une poule chez soi.
  • La technologie offre aux quartiers la possibilité de devenir des espaces productifs. Prenons le cas des quartiers défavorisés, par exemple. Très souvent, le voisin y est perçu comme un « ennemi » simplement parce qu’il est accessible : un gouvernement est hors d’atteinte, tandis qu'un voisin est un excellent souffre-douleur. Il est donc essentiel de favoriser le lien social dans ces quartiers.
  • si ces personnes doivent faire face à un problème urgent de garde d'enfant, ils n'ont souvent pas le temps de passer un coup de fil dans la journée pour trouver une solution, et s'ils s'absentent, ils risquent d'être licenciés. The Emergency Nanny permet à un groupe de personnes de confiance habitant un même quartier (coiffeur, épicier, voisin, etc.) de se rendre disponible tel jour à telle heure pour garder les enfants de la personne qui les solliciterait d'un clic via l'appli.
  • ...2 more annotations...
  • Oui, les citoyens sont des acteurs clés pour orienter les usages de la technologie. Mais aux États-Unis, les maires procèdent à l’envers. Ils font appel à des entreprises informatiques et leur achètent des solutions préconçues pour des problèmes qui n’ont pas été clairement exposés en amont. La plupart du temps, ces technologies sont inutiles. Or, c’est l’inverse qui devrait se passer : les maires devraient réunir leurs équipes et établir quels sont les besoins, en bonne intelligence avec les citoyens. Il est regrettable que les classes dirigeantes refusent à ce point de comprendre la technologie et ses potentialités. Elles ont établi que c’était l’apanage des experts et s’en sont détournées
  • Les différents habitants d'un quartier ont des connaissances spécifiques de leur zone d’habitation que n'ont ni les élus locaux, ni les experts en urbanisme. On doit utiliser cette connaissance. Chacun devrait pouvoir accéder à une plateforme pour signaler une fuite d'eau, un nid-de-poule ou autre chose. Ça mobilise les habitants dans un effort commun, ça crée du tissu social et, à terme, cela peut aussi réduire la souffrance dans les quartiers défavorisés.
  •  
    "À l'occasion du Fab City Summit, qui s'est tenu à Paris du 11 au 22 juillet, nous avons rencontré Saskia Sassen. Connue pour ses travaux autour du concept de « ville mondiale » (« global city » en VO) - qui désigne les mégapoles devenues le coeur battant de la mondialisation tant elles concentrent tous les pouvoirs - la sociologue néerlando-américaine, qui enseigne notamment à l'Université Columbia de New York, a pris le temps d'échanger sur les leviers à actionner aujourd'hui pour mieux associer les citoyens à la gouvernance urbaine et recréer du lien social en ville."
Aurialie Jublin

Le mythe de la technologie salvatrice | Esprit Presse - 0 views

  • Le débat entre les pessimistes, qui craignent pour l’environnement, et les optimistes, tenants du business as usual, ne porte donc pas sur la nécessité d’agir – personne n’est vraiment pour la disparition des éléphants ou la contamination des nappes phréatiques aux pesticides –, mais sur la gravité du problème, l’intensité et la vitesse avec laquelle il faudrait réagir, la possibilité de changer modes de production et habitudes de consommation, la manière (régulation, taxes, incitations, soutien public…) et les moyens (financiers, techniques) de mener la transition.
  • De fait, les solutions techniques sont présumées disponibles et abordables, sinon à portée de main, que ce soit pour les énergies « décarbonées », les solutions de mobilité du futur ou la capacité des rendements agricoles à toujours s’accroître – ou à se maintenir. Les plus audacieux, comme Jeremy Rifkin, vont jusqu’à promettre de telles « ruptures » technologiques – un vocable à la mode – que tout ou presque en deviendrait gratuit ou à « coût marginal zéro », à commencer par l’énergie issue de sources renouvelables2.
  • La pénurie a bien été un aiguillon essentiel, à l’origine d’une grande partie des innovations de la révolution industrielle, car la croissance permanente de la consommation allait bientôt dépasser les capacités de ponction sur les ressources renouvelables, locales ou importées. Jusque tard dans le xixe siècle, il y eut une limite purement « surfacique » à la production de produits essentiellement animaux et végétaux 
  • ...11 more annotations...
  • Globalement (hors l’épineux problème de répartition), le système technique, enchâssé dans un système social, moral et culturel qu’il modifiait à mesure, a plutôt bien répondu aux « besoins ». Mais cela a eu un prix : celui d’une fuite en avant, d’une accélération permanente entre des risques de pénuries et de nouvelles solutions pour y répondre, créant elles-mêmes de nouveaux besoins et de nouveaux risques ; celui de pollutions, de destructions sociales et environnementales sans précédent. Nos « ingénieurs thaumaturges » font rarement des omelettes sans casser des œufs.
  • À quoi ressembleraient nos campagnes, s’il avait fallu y monter les nouvelles usines – et assumer leurs rejets – pour notre consommation exponentielle de téléphonie, d’informatique, de jouets, de vêtements ? Pour y répondre, il faut regarder les zones industrielles chinoises. Mais grâce à la distance, nous nous berçons d’illusions sur la « dématérialisation » de l’économie et la croissance « verte » à base de nouvelles technologies.
  • Le numérique n’a rien de virtuel. Il mobilise toute une infrastructure, des serveurs, des bornes wifi, des antennes-relais, des routeurs, des câbles terrestres et sous-marins, des satellites, des centres de données… Il faut d’abord extraire les métaux (argent, lithium, cobalt, étain, indium, tantale, or, palladium…), engendrant destruction de sites naturels, consommation d’eau, d’énergie et de produits chimiques nocifs, rejets de soufre ou de métaux lourds et déchets miniers. Ensuite fabriquer les composants, comme les puces au silicium qui nécessitent quantité d’eau purifiée, mais aussi du coke de pétrole, du charbon, de l’ammoniaque, du chlore, des acides, etc., fournis par le cœur du capitalisme « carbonifère9 ». Puis faire fonctionner le tout, avec plus de 10 % de l’électricité mondiale ! Enfin, se débarrasser des déchets électroniques, parmi les plus complexes à traiter : une partie – majoritaire – est incinérée ou jetée en décharge ; une autre rejoint les circuits « informels » (Afrique de l’Ouest, Chine…), où ils sont brûlés à l’air libre et empoisonnent les sols et les eaux. Le reste rejoint quelques usines spécialisées, qui ne récupèrent que partiellement les ressources. In fine, le taux de recyclage de nombreux métaux rares est inférieur à 1 %, un terrible gâchis.
  • Pourtant, plus que jamais, nous vivons dans la religion exclusive du « techno-solutionnisme », en plaçant tous nos espoirs dans les innovations et les effets bénéfiques (futurs) du numérique, en fantasmant un monde où tout sera bien mieux optimisé, où les outils et les services numériques seront facteurs d’efficacité et de sobriété : énergies renouvelables distribuées par des smart grids, covoiturage bientôt servi par des véhicules autonomes, déplacements fluidifiés dans les smart cities, économie de la fonctionnalité réduisant les équipements individuels, etc., sans parler des biotechnologies et des applications médicales.
  • Mieux, les technologies de demain ne seront pas seulement propres, elles seront réparatrices : les bactéries modifiées génétiquement dépollueront les sols, les big data et les capteurs protégeront les forêts tropicales, la science ressuscitera même le mammouth laineux, dont l’Adn dégèle en même temps que le permafrost.
  • Peut-on compter sur une « sortie par le haut » à base d’innovation technologique ? Il serait périlleux de tout miser dessus. En premier lieu parce que la plupart des technologies prétendument « salvatrices » nécessitent, à plus ou moins grande échelle, des ressources métalliques, non renouvelables, et viennent accélérer, plutôt que remettre en cause, le paradigme « extractiviste » de notre société thermo-industrielle
  • En second lieu parce que les gains d’efficience sont balayés par un formidable effet « rebond ». Indéniablement, la consommation d’énergie des véhicules, des avions, des centres de données, des procédés industriels baisse régulièrement, les innovations sont nombreuses et les progrès réels. Mais la croissance du parc automobile, des kilomètres parcourus, des données échangées et stockées est largement supérieure aux gains unitaires. Entre 2000 et 2010, le trafic internet a été multiplié par cent. Que vaut alors une amélioration de quelques dizaines de points d’efficacité énergétique par octet ?
  • Il n’y a pas de solution technique permettant de maintenir – et encore moins de faire croître – la consommation globale d’énergie et de ressources. En continuant à alimenter la « chaudière du progrès11 », nous nous heurterons tôt ou tard aux limites planétaires, régulation climatique en tête. C’est donc – aussi – vers l’économie de matières qu’il faut orienter l’innovation. Avant tout par la sobriété, en réduisant les besoins à la source, en travaillant sur la baisse de la demande et pas seulement sur le remplacement de l’offre.
  • Mais on peut imaginer toute une gamme d’actions, comme bannir le jetable, les supports publicitaires, l’eau en bouteille, revenir à des emballages consignés, composter les déchets même en ville dense, brider progressivement la puissance des véhicules et les alléger, avant de passer au vélo, adapter les températures dans les bâtiments et enfiler des pull-overs, car il est bien plus efficace, plus simple, plus rapide, d’isoler les corps que les bâtiments !
  • Pour recycler au mieux les ressources et augmenter la durée de vie de nos objets, il faudra les repenser en profondeur, les concevoir simples et robustes (Ivan Illich aurait dit « conviviaux »), réparables et réutilisables, standardisés, modulaires, à base de matériaux simples, faciles à démanteler, n’utiliser qu’avec parcimonie les ressources rares et irremplaçables comme le cuivre, le nickel, l’étain ou l’argent, limiter le contenu électronique. Quitte à revoir le « cahier des charges », accepter le vieillissement ou la réutilisation de l’existant, une esthétique moindre pour les objets fonctionnels, parfois une moindre performance, de l’intermittence, une perte de rendement ou un côté moins « pratique ».
  • Pourquoi ne pas tenter plutôt la voie d’une transition post-croissance vers un nouveau « contrat social et environnemental » ?
  •  
    "Les coûts écologiques de la technique (déchets, pollution) sont rendus invisibles par la délocalisation de la production industrielle. Ils devraient nous inciter à promouvoir une technologie sobre et résiliente."
Aurialie Jublin

Lionel Maurel : «On doit pouvoir quitter Facebook sans perdre les liens qu'on... - 0 views

  •  
    Pour le juriste Lionel Maurel, l'approche individualiste de la protection des données personnelles ne permet pas d'appréhender la dimension sociale qu'exploitent les grandes plateformes du Net. Il appelle à la mise en place d'un droit à la migration collective.
Aurialie Jublin

Uber, Deliveroo : le statut spécial voulu par le gouvernement censuré - 0 views

  •  
    Le Conseil constitutionnel a rejeté pour des raisons de procédure l'article de la loi « Avenir professionnel » ouvrant la possibilité pour les plates-formes de conclure une charte sociale couvrant leurs travailleurs. Motif : aucun lien avec le texte initial de la loi.
Aurialie Jublin

Aux Etats-Unis, Uber verse 20 millions de dollars à des chauffeurs qui contes... - 0 views

  • Le texte ne vient en revanche pas trancher le conflit sur le fond, à savoir si Uber doit des rattrapages de rémunération aux chauffeurs et si les travailleurs affiliés à une plateforme sont des travailleurs indépendants ou doivent être considérés légalement comme des employés avec salaire et protection sociale afférents. L’accord prévoit aussi qu’Uber cesse notamment de désactiver le compte des chauffeurs les moins actifs ou crée une procédure d’appel pour les chauffeurs suspendus du service, selon le texte consulté mardi par l’AFP.
  • Sous l’impulsion de son successeur, Dara Khosrowshahi, le groupe s’attache à redorer son image et assainir ses finances dans le but de s’introduire en Bourse très prochainement. Plusieurs cas de travailleurs affiliés à une plateforme demandant leur reconnaissance comme salariés, se sont faits jour dans plusieurs pays, notamment en France. En novembre, la Cour de cassation a reconnu le lien de subordination entre la société de livraison de repas Take Eat Easy et l’un de ses coursiers à vélo, rebattant les cartes concernant la définition du salariat et le recours des plateformes de services à des indépendants. En janvier, la cour d’appel de Paris a estimé que le lien qui unissait un ancien chauffeur indépendant à Uber était bien un contrat de travail, une première concernant le géant américain en France. Ce dernier a depuis formé un pourvoi en cassation
  •  
    "Uber a accepté de payer 20 millions de dollars pour solder des poursuites lancées par des chauffeurs qui contestaient leur statut de sous-traitant les privant de salaire minimum et de protection sociale. Cet accord, déposé au tribunal lundi soir, couvre quelque 13 600 chauffeurs Uber ayant transporté des passagers entre août 2013 (date initiale des poursuites) et le 28 février 2019 dans les Etats du Massachusetts (est) et de Californie (ouest), où se trouve le siège de la plateforme. Avec cet accord, qui doit encore formellement être entériné par un juge et ne vaut pas aveu de culpabilité de la part d'Uber, les plaignants s'engagent à abandonner les poursuites. "
Aurialie Jublin

L'internet des familles modestes : les usages sont-ils les mêmes du haut au b... - 0 views

  • Le plus étonnant finalement, c’est de constater que pour des gens qui se sont équipés sur le tard, combien ces usages sont devenus aisés et rituels. Je m’attendais à trouver plus de difficultés, plus d’angoisses… Mais cela n’a pas été le cas. Les familles modestes se sont emparées d’internet à toute vitesse. Ils font certes des usages plutôt utilitaristes de ces outils polymorphes. Ils ont peu de pratiques créatives. Participent peu. Mais n’en ont pas particulièrement besoin. L’outil s’est glissé dans leurs pratiques quotidiennes, d’une manière très pragmatique. Les gens ont de bonnes raisons de faire ce qu’ils font de la manière dont ils le font.
  • Oui, internet est une seconde école. Et ce constat n’est pas sans vertus pour des populations qui bien souvent ne sont pas allées à l’école ou qui n’ont pas le bac. Internet leur propose des manières d’apprendre qui leur correspondent mieux, sans hiérarchie ni sanction. On pourrait croire par exemple qu’en matière d’information ils ne recherchent pas des choses importantes, mais si. Ils cherchent à comprendre les termes qu’emploient le professeur de leurs enfants ou le médecin qu’ils consultent. Quelque chose s’est ouvert. L’enjeu n’est pas pour eux de devenir experts à la place des experts, mais de parvenir à mieux argumenter ou à poser des questions. D’être mieux armés.
  • La dématérialisation de l’administration est inhumaine et brutale. Les familles modestes utilisent peu le mail. Leurs adresses servent principalement aux achats et aux relations avec les administrations. Mais les courriers de l’administration se perdent dans le spam qu’ils reçoivent des sites d’achat. Pour eux, le mail est un instrument de torture et ce d’autant plus qu’il est l’outil de l’injonction administrative.
  • ...10 more annotations...
  • Pour les familles modestes, le mail n’est pas un outil de conversation agréable. Il est asynchrone et écrit. Envoyer et attendre une réponse ne correspond pas aux valeurs du face à face dans l’échange, qui reste très fort dans les milieux populaires. Il demeure de l’ordre du courrier, ce qui en fait un dispositif formellement distant.
  • Les usagers ne sont pas contre la dématérialisation pourtant. Le public que j’ai rencontré utilise quotidiennement les applications bancaires par exemple, matins et soirs. Ils n’ont pas de mal à gérer leurs factures en ligne. Mais les relations avec les institutions sociales, en ligne, sont particulièrement difficiles.
  • Les familles disposent bien souvent d’une seule adresse mail partagée. C’est un moyen de tenir un principe de transparence familial… (et de surveillance : une femme ne peut pas recevoir de courrier personnel). Ce principe de transparence se retrouve également dans les comptes Facebook, dans les SMS,… La famille intervient sur les comptes de ses membres, on regarde les téléphones mobiles des uns et des autres. On surveille ce qu’il se dit. Les familles modestes ne voient pas de raison à avoir des outils individuels.
  • Effectivement, l’internet n’est jamais vu comme un moyen de contribution. J’ai demandé ainsi à une femme qui souhaitait se remarier et qui me confiait avoir beaucoup consulté de forums pour se décider à franchir le pas de la famille recomposée… si elle posait des questions sur ces forums. Elle m’a clairement répondu non, comme si c’était impensable. Ce qui l’intéressait c’était la réponse aux questions qu’elle aurait pu poser.
  • Ces partages se font avec des gens qu’on connaît. On ne cherche pas à étendre sa sociabilité.
  • Les gens que j’ai vus ne sortent pas de leur monde, sauf en ce qui concerne les connaissances, mais pas en matière de culture ni de sociabilité. Ils utilisent internet pour apprendre des choses qu’ils ne connaissent pas ou perfectionner des pratiques, comme le tricot, la cuisine, le jardinage… Mais ce n’est pas une ouverture sur des nouveaux goûts culturels. Il n’y en a pas du tout dans mon public. Les liens partagés servent aussi beaucoup à rappeler le passé, à le célébrer ensemble une nostalgie. Leur fonction consiste plus à évoquer une culture commune et à renforcer le consensus qu’à une ouverture culturelle. Mais ces résultats auraient certainement été très différents si j’avais regardé les pratiques de leurs enfants.
  • « Sur le Bon Coin, chacun garde sa fierté ». Y vendre ou y acheter des produits, même très peu chers – et beaucoup des produits qu’on y échange le sont pour quelques euros -, c’est un moyen de conserver sa fierté, d’affirmer qu’on n’est pas des assistés. Il faut entendre l’omniprésence de la peur du déclassement dans ces populations, limites financièrement.
  • En tout cas, il n’y a plus ce qu’observait Olivier Schwartz, à savoir que les femmes trouvaient leur épanouissement dans la tenue du foyer. Il faut dire que contrairement aux enquêtes qu’il a réalisées dans les familles de mineurs, ces femmes travaillent. C’est sans doute la transformation du marché du travail qui fait bouger les lignes à la maison.
  • Pour autant, ce n’est pas la guerre non plus. On trouve plus d’endroits où on échange des maximes célébrant le couple que le contraire. C’est moins vrai pour les hommes célibataires. Dans les milieux populaires, les hommes sans qualification (comme les femmes trop qualifiées) ont du mal à entrer en couples. D’où l’expression d’un vif ressentiment.
  • Les mères, qui se sont mises au jeu et qui ont compris qu’elles étaient accros à leur tour, ont une meilleure compréhension de ce qu’il se passe quand on ne peut pas s’arrêter. Les disputes sur le temps d’écran sont moins présentes. Reste qu’une grande partie de la vie des enfants échappe au périmètre familial et c’est difficile à vivre pour les parents. Ils ont l’impression parfois de contrôler ce que font leurs enfants en ligne, mais ils se trompent.
  •  
    "Alors qu'il n'y a pas si longtemps, la fracture numérique semblait ne pouvoir se résorber, les usagers les plus modestes semblent finalement avoir adopté les outils numériques très rapidement, à l'image de l'introduction de la photographie au début du XXe siècle dans les sociétés rurales traditionnelles qu'évoquait Pierre Bourdieu dans Un art moyen. L'internet des classes dominantes et urbaines a colonisé la société, rapporte Dominique Pasquier dans son étude où elle s'est intéressée aux employées (majoritairement des femmes) travaillant principalement dans le secteur des services à la personne et vivant dans des zones rurales. En matière de temps, d'utilisation des services en lignes, les usages d'internet des plus modestes ont rejoint les taux d'usages des classes supérieures. Reste à savoir si les usages sont les mêmes du haut au bas de l'échelle sociale. Interview."
Aurialie Jublin

Données personnelles et CGU : l'UFC Que Choisir fait plier Twitter - ZDNet - 0 views

  •  
    Les magistrats ont suivi l'association qui considérait que ces clauses abusives ou illégales avaient pour effet de : "considérer les données personnelles comme des données « publiques » par défaut ; de transférer librement les données personnelles dans un autre pays sans autres précisions. "Il y a des données, que vous ne voulez pas partager comme le contenu du carnet d'adresses, les photos stockées dans le smartphone..., les clauses permettent la collecte de ces données", affirmait l'UFC lors de la mise en demeure ; de se déclarer irresponsable en cas de faille de sécurité entraînant la fuite notamment des données personnelles ; de copier, adapter, modifier, vendre les contenus postés ou futurs des utilisateurs, y compris ceux protégés par le droit de la propriété intellectuelle, à tout bénéficiaire sur tout support, sans autorisation préalable ; de clôturer le compte d'un utilisateur en conservant notamment son nom sans limitation de durée ; de modifier les 25 pages de « conditions générales d'utilisation », renvoyant en partie à des contenus en anglais, sans en informer systématiquement les utilisateurs ; d'user trop fortement du recours aux liens hypertextes (38 pour accéder à une dizaine d'autres documents !), rendant impossible pour le consommateur la vision de ses droits et devoirs".
Aurialie Jublin

Paris se dote d'une « stratégie de résilience » - 0 views

  • Pour définir ce plan, la ville s’est notamment appuyée sur le réseau « 100 Résilient Cities », une initiative de la Fondation Rockefeller pour accompagner les villes confrontées à une multiplication des menaces, tout en favorisant le partage d’expériences, les bonnes pratiques et solutions.
  • Cette stratégie de résilience, à laquelle Paris s’engage à dédier 10 % de ses investissements, se décline en 35 actions qui viennent renforcer différentes politiques déjà initiées pour adapter la ville aux évolutions du climat, améliorer sa qualité environnementale ou encore favoriser des modes de production et de consommation responsables.
  • « L’idée est de remettre de l’humain dans les grandes politiques, que tout un chacun, à son échelle, participe, se mobilise et se responsabilise par rapport aux enjeux », explique Célia Blauel, adjointe à la Maire de Paris en charge de l’environnement. La Ville va ainsi créer un « réseau de citoyens solidaires et volontaires », qui pourront renforcer les moyens d’interventions des autorités en cas de crise majeure, comme au quotidien.
  • ...3 more annotations...
  • « Indépendamment des crises, il s’agit aussi de remettre du lien entre les gens, de renforcer la cohésion sociale. Une ville soudée et solidaire est une ville plus résiliente. Les réseaux qui se créent au quotidien sont des réseaux qui fonctionnent d’emblée le jour où l’on connaît une crise », insiste Célia Blauel
  • Plus solidaire au quotidien, Paris souhaite aussi adapter ses infrastructures. La ville veut s’inspirer de l’expérience de Rotterdam qui, face au risque d’inondation, a créé des bassins de rétention d’eau qui sont devenus de véritables espaces publics intégrés au quartier. Paris entend ainsi développer un « référentiel de voie résiliente » (matériaux adaptés aux différents risques, typologies de surfaces, mobiliers polyvalents…) avant d’aménager une ou plusieurs rues.
  • À travers sa stratégie de résilience, Paris affiche aujourd’hui sa volonté de recoudre le lien avec les territoires qui l’entourent, proches comme ruraux. Car la ville sait qu’elle ne peut pas répondre seule aux défis qui se posent à elle, qu’ils s’agissent des transports, des risques liés à la Seine, à l’alimentation, à l’énergie…
  •  
    "La capitale veut renforcer sa capacité à faire face aux chocs prévisibles comme imprévisibles. Une stratégie qui la conduit à développer une gouvernance participative et à coopérer avec les territoires qui l'entourent."
Aurialie Jublin

La plupart des applis pour les réfugiés ne sont pas utilisées - Digital Socie... - 0 views

  • avec la généralisation du mobile. Celle-ci a instauré un mode d’existence différent, fondé sur la joignabilité permanente. Les nouvelles technologies ont apporté des réponses immédiates à certains besoins des migrants : rester proche de la famille, rendre la migration supportable. À mesure que ces technologies se sont développées, elles ont envahi tous les aspects de la vie des migrants. Elles ont aussi amené de nouvelles contraintes : les smart borders , le tracking, la question de la privacy, ainsi que des contraintes sociales nouvelles comme l’obligation d’être présent même à distance, d’envoyer de l’argent…
  • Tout s’accélère en 2015, quand les médias mettent en lumière le migrant connecté. De tous côtés activistes et hackers se mettent à créer des applications pour les réfugiés. Il y a une vague d’idées, une sorte de « technophorie ». Avec une expertise technique sur le sujet, beaucoup d’élan et d’initiative, mais sans vraiment avoir étudié la chose avant, sans avoir réellement regardé les usages.
  • Toutes les associations doivent soudain s’y mettre, le Haut Commissariat aux Réfugiés de l’ONU se lance aussi là-dedans, Techfugees naît et la presse encourage beaucoup ces initiatives. Il y a de l’argent, public et privé, pour développer des prototypes, mais pas assez pour accompagner ces applications vers leur maturation, les phases de testing, le développement d’un business model.
  • ...6 more annotations...
  • Avec mes collègues Léa Macias et Samuel Huron, nous avons inventorié une centaine d’applications et de plateformes construites ces 8 dernières années. Celles-ci proposent des services très variés : Information-service, mise en relation, recherche d’emploi, hébergement, traduction, apprentissage des langues, éducation et formation, identité, santé… Nous avons constaté que ces applications ont une vie de comète : ainsi en juin 2018, 27 % des applications recensées précédemment avaient disparu (13 sur les 48 recensées). En septembre 2018, 29 % avaient disparu (soit 10 sur les 35 recensées).
  • Nous avons aussi testé ces applications avec des réfugiés inscrits à l’école Simplon, dans le programme Refugeek qui les forme à être programmeurs en France. Ce sont des gens habitués au code, aux applications. Dans leur téléphone, nous n’avons trouvé aucune application destinée aux réfugiés. Ils utilisent Facebook, WhatsApp, Google, comme tout le monde
  • Nous avons aussi constaté que toutes les applications, même les plus simples, demandaient des informations personnelles. Toutes ont l’idée de faire reposer leur modèle économique sur les data. C’est classique dans le champ des applications. Mais quand on travaille avec des réfugiés, c’est délicat. Car ces personnes ne sont pas réfugiées par hasard : elles fuient des dangers et il faut faire très attention avec ces données.
  • Les applications qui marchent, comme CALM (Comme à la Maison, application qui met en lien des réfugiés avec des particuliers qui peuvent les héberger pour des durées variables, ndlr), c’est parce qu’elles mettent en pratique une idée longuement mûrie, dans le cas de CALM celle de favoriser l’intégration par l’immersion.
  • CALM, développé par le mouvement citoyen Singa , repose sur l’idée de l’intégration par l’immersion. je crois aussi que c’est très efficace. Les codes d’une société s’acquièrent plus facilement lorsqu’on est immergé dans un environnement, on approche l’altérité différemment. Surtout, des sentiments naissent de cette mise en relation de reconnaissance, de satisfaction... Cela crée une énergie très positive. Parfois ces relations durent quelques semaines, parfois toute une vie. Quand les migrants racontent des trajectoires migratoires réussies, il y a toujours une personne, à un moment donné, qui les a tiré vers la société. Singa a essayé de capter ce moment, de l’investir de manière numérique et je pense que c’est une bonne chose.
  • Ensuite, nous avons vu que l’hospitalité ne pouvait pas être déléguée à des techniques de matching. L’hospitalité, ce n’est pas Tinder. Nous avons essayé d’utiliser le matching pour organiser des rencontres, par exemple, sur la base d’intérêts communs. Mais ça ne marchait pas. Ou bien, quand ça prenait, les gens passaient sur Facebook, qui donne un aperçu plus complet de l’environnement social de la personne... Mais CALM reste une plateforme importante. Elle a été beaucoup médiatisée et a permis d’ouvrir les esprits, de faire parler de l’hébergement chez soi. Je pense qu’elle n’est pas étrangère à l’amendement adopté en octobre 2018 par l’Assemblée Nationale, instaurant un crédit d’impôt pour les personnes hébergeant des réfugiés chez elles .
  •  
    "Depuis le début de la crise migratoire en 2015, de nombreuses applications pour les réfugiés ont vu le jour. Si elles naissent de bonnes intentions, elles sont rarement utiles. C'est ce qu'explique la sociologue Dana Diminescu , enseignante-chercheuse à Télécom Paris-Tech, qui étudie depuis longtemps les usages des TIC chez les migrants (elle avait d'ailleurs coordonné le dossier consacré aux diasporas connectées sur notre site )."
Aurialie Jublin

Bimby : le concept qui bouscule l'aménagement urbain - Elueslocales.fr - 0 views

  • le projet Bimby, conçu par deux architectes urbanistes, Benoît Le Foll et David Miet. Bimby, c’est l’acronyme de « Build in My Back Yard », littéralement, « construire dans mon jardin ». L’idée est de définir une nouvelle filière de production de la ville, en s’appuyant sur les quartiers pavillonnaires déjà existants, et en proposant donc une solution alternative à l’étalement urbain.
  • Plus concrètement, Bimby vise à offrir la possibilité aux propriétaires de vendre une partie de leur terrain pour la construction d’un nouveau logement. L’idée est donc de densifier les zones déjà habitées. Pour les concepteurs, les zones pavillonnaires recèleraient en effet un gisement foncier exceptionnel : il y a actuellement 14 millions de maisons individuelles et une partie des propriétaires pourrait être encline à céder une partie de leur terrain. Même si ça ne concernerait qu’1 % d’entre eux, cela représenterait déjà 140.000 terrains à bâtir.
  • un intérêt économique : à la fois pour la commune qui voit ainsi la possibilité de « fabriquer un urbanisme sur mesure et à moindre coût » et pour les habitants propriétaires de maisons individuelles, qui peuvent « mobiliser une partie de leur patrimoine foncier pour financer la réalisation de leurs projets, notamment en détachant une partie de leur terrain pour la valoriser en tant que nouvelle parcelle constructible. »
  • ...4 more annotations...
  • un intérêt écologique : l’étalement urbain a des conséquences environnementales. Par exemple, la fragmentation des espaces naturels et agricoles est néfaste à la biodiversité. Bimby, au contraire, présente l’avantage de s’appuyer sur des zones urbaines déjà existantes, « tout en maintenant des densités faibles et sans engendrer de pression foncière, ceci dans des quantités qui permettraient de répondre chaque année à une part significative des besoins en logements »
  • un intérêt social : « en redonnant à l’habitant un rôle fort de maître d’ouvrage de la production de l’habitat, on donne à la collectivité de puissants leviers pour porter une politique urbaine ambitieuse, fondée sur la mise en synergie des projets des habitants et des projets de la collectivité, et ceci en faisant appel aux entreprises locales de construction, qui sont les plus économiques et les plus créatrices d’emplois. » Bimby propose également une ouverture concernant les logements sociaux. Si cette démarche n’est pas une solution miracle, elle peut permettre la production le logements plus abordables et offrir la possibilité à la collectivité de reprendre la main sur le prix du foncier.
  • Pour concrétiser la démarche BIMBY, celle-ci doit être pleinement intégrée dans le PLU comme un élément à part entière du développement de la commune. A cet effet, elle doit constituer l’un des volets du programme d’aménagement et de développement durable (PADD), être développée comme une orientation d’aménagement et de programmation (OAP), transcrite dans le règlement d’une zone ou d’un secteur (selon l‘importance de la superficie qu’elle concerne, les enjeux qu’elle représente, et ses spécificités réglementaires) et justifiée dans le rapport de présentation.
  • Les communes qui souhaitent s’inscrire dans cette démarche organisent des réunions pour présenter le projets aux habitants. Nouer le dialogue entre les élus porteurs du projet et les propriétaires intéressés est essentiel mais, prévient David Miet dans le guide, il ne faut « pas créer d’espoirs que l’on risque de décevoir. Une fois que l’on a noué un dialogue avec sa population, en organisant des ateliers pour imaginer le futur des quartiers pavillonnaires existants, il convient d’aller jusqu’au bout de la démarche, et notamment jusqu’à la modification des documents d’urbanisme pour que ces derniers soient de bon catalyseurs des projets individuels. »
  •  
    "L'urbanisme, et particulièrement la question de la construction de nouveaux logements, représente l'un des points majeurs de la politique communale. Face à l'étalement urbain qui a longtemps été la norme en France, mais qui nous montre aujourd'hui ses limites, la démarche Bimby se pose comme une véritable alternative."
Aurialie Jublin

Aucun algorithme, jamais, ne pourra défendre la démocratie - Libération - 0 views

  • Comment avons-nous pu nous retrouver au début du XXIe siècle dans une situation où Mark Zuckerberg – et quelques autres patrons de plateformes numériques – se fixent comme objectif récurrent de «protéger la démocratie», principalement à grands coups «d’algorithmes» et «d’intelligence artificielle» et affirment que cela sera une de leurs principales «missions» au sein de leur entreprise et à l’échelle du monde ?
  • En 2011, deux théoriciens de l’intelligence artificielle traitant des problèmes éthiques qu’allaient poser les algorithmes écrivaient que «les algorithmes de plus en plus complexes de prise de décision sont à la fois souhaitables et inévitables, tant qu’ils restent transparents à l’inspection, prévisibles pour ceux qu’ils gouvernent, et robustes contre toute manipulation» (Bostrom et Yudowski, «The Ethics of Artificial Intelligence»).
  • Aujourd’hui, «les algorithmes» dont nous parlons se déploient au sein d’architectures techniques toxiques englobant des millions ou des milliards d’utilisateurs. Aujourd’hui, «les algorithmes» dont nous parlons reposent sur des jeux de données propriétaires et donc totalement opaques. Aujourd’hui, «les algorithmes» dont nous parlons sont explicitement développés pour se doter d’un niveau d’autonomie (ou «d’apprentissage») qui rend leur «comportement» et leurs décisions souvent imprévisibles pour leurs créateurs eux-mêmes. Aujourd’hui, «les algorithmes» dont nous parlons interagissent en permanence avec d’autres algorithmes, d’autres jeux de données et d’autres architectures techniques toxiques ; et ils le font à des échelles toujours plus vastes et dans des environnements toujours plus contraints qui augmentent encore le niveau de risque et d’incertitude.
  • ...5 more annotations...
  • Pendant les dix dernières années, le combat principal d’activistes, de journalistes, de défenseurs des libertés numériques fut celui visant à limiter l’impact de l’empreinte algorithmique sur nos vies privées et intimes. Ce combat-là est terminé, obsolète et, pour l’essentiel, perdu. C’est un autre combat qu’il nous faut aujourd’hui mener, sur un tout autre front, avec une tout autre urgence et à une tout autre échelle. C’est le combat pour limiter l’impact de l’empreinte algorithmique décisionnelle sur notre vie publique, sur nos infrastructures sociales communes et sur notre destin collectif
  • Il est urgent et impératif que toute forme, ambition ou projet de gouvernance algorithmique, dès lors qu’il touche à des secteurs régaliens (transport, éducation, santé, justice, sécurité) soit, obligatoirement et par contrainte législative, développé sur le modèle des licences GNU GPL du logiciel libre pour garantir a minima l’auditabilité complète et pérenne des processus à l’œuvre.
  • Il est urgent et impératif que le développement d’un modèle universel de portabilité de l’ensemble de nos données (1) soit une priorité des Etats, et qu’il soit imposé à l’ensemble des acteurs du monde économique en lien avec la conservation ou le dépôt de données numériques, et ce quels qu’en soient la nature, le volume et l’usage.
  • Il est urgent et impératif que les entreprises qui captent aujourd’hui l’essentiel des données et des flux numériques (en gros les Gafam, Natu et autres Batx) soient taxées à la hauteur réelle de leur volume d’affaire et que cet impôt finance directement les actions précitées, ce processus de redistribution devant impérativement rester hors du contrôle desdites sociétés. Car le processus inverse a déjà commencé, celui dans lequel quelques entreprises omnipotentes s’arrogent le droit de défier la puissance publique et l’intérêt général dans la levée de l’impôt, comme Amazon et Starbucks en ont encore récemment fait la démonstration à Seattle.
  • L’enjeu est de savoir si nous serons capables à très court terme de construire une alternative qui, après le temps numérique de la «désintermédiation» des vingt dernières années, sera celle de formes de remédiations algorithmiques respectueuses du corps social et partant de sa partie la plus fragile, la plus pauvre, et la plus exposée. Alors peut-être, et alors seulement, les questions de gouvernance algorithmique pourront commencer d’être envisagées sereinement.
  •  
    "Nous avons perdu la bataille contre les algorithmes en ce qui concerne la vie privée. Il faut aujourd'hui se battre pour limiter leur impact sur nos vies publiques et notre destin collectif. "
Aurialie Jublin

Des impacts énergétiques et sociaux de ces data-centers qu'on ne voit pas - M... - 0 views

  • Côté consommation pour commencer, les études les plus pessimistes avancent que ceux-ci pourraient représenter jusqu’à 13% de l’électricité mondiale en 2030 (avec un secteur informatique qui consommerait jusqu’à 51% du total de la consommation électrique mondiale). Des chiffres qui ne font pas l’unanimité, The Shift Project prévoyant plutôt 25% pour le secteur informatique et 5% pour les data centers en 2025 (ces 5% équivaudraient tout de même à toute la consommation électrique actuelle du secteur numérique).
  • Même si l’on constate de nombreux efforts faits pour améliorer l’efficacité énergétique des infrastructures, par exemple du côté des « big tech », l’ADEME rapporte que les géants du numérique ne portent pas un véritable discours sur la « sobriété énergétique et numérique nécessaire pour rester sous la perspective d’une augmentation des températures planétaires de 1,5°.»
  • Le rapport insiste ensuite sur les déséquilibres qui résultent de certaines implantations dans les territoires. Première constatation : ces impacts sociaux sont très peu documentés. Bien souvent, les data centers arrivent sans dire leur nom, en périphérie des villes, aux Etats-Unis ou en France, à Saclay par exemple ou encore Plaine Commune. Cette furtivité des bâtiments rend d’autant plus difficile les contestations ou demandes de participation de la part des populations locales.
  • ...14 more annotations...
  • Ils sont considérés comme de simples entrepôts par les pouvoirs publics alors même que leur consommation électrique a des répercussions à l’échelle d’un territoire tout entier.
  • Autre phénomène important : les data centers attirent les data centers, pour des questions de mutualisation d’énergie et de réseaux de télécommunication. Bien souvent, les hiérarchies urbaines en place sont renforcées par ces mécanismes. Les élus eux, peinent à lutter contre des acteurs puissants qui imposent leurs conditions « dans une négociation asymétrique qui pousse certains territoires à sur-calibrer des infrastructures énergétiques, hydrauliques et viaires pour pouvoir accueillir quelques dizaines, ou centaines d’emploi si l’on inclut les phases de construction. »
  • Aujourd’hui, c’est plutôt pour installer des hangars logistiques et des fermes de serveurs qu’on artificialise les sols. Autre effet non négligeable qui mériterait sans doute une discussion plus ample avec les populations locales : l’étalement urbain.
  • Le rapport souligne ensuite les possibles synergies entre les infrastructures numériques et le territoire. La réutilisation de la chaleur générée par les data centers  est à ce titre un cas d’usage bien connu. A Bailly-Romainvilliers, par exemple, le data center de BNP Parisbas chauffe le centre nautique voisin. Celui de Céleste à Noisy-Champs, chauffe ses propres bureaux. D’autres systèmes très chauffants comme les chaudières numériques de Stimergy chauffent une partie de l’eau de la piscine de la Butte-aux-Cailles, dans le treizième arrondissement de Paris.
  • Cependant, ces exemples restent anecdotiques. Dans l’immense majorité des cas, la chaleur n’est pas récupérée. D’abord pour des questions de coût et de rentabilité économique : les promoteurs des data-centers attendent des rendements sur des périodes courtes incompatibles avec la contractualisation pour les réseaux de chaleur (des engagements qui coulent sur 25 à 30 ans
  • Il existe aussi un frein technique : il est préférable de prévoir ces éventuels contrats dès la construction du data center car le modifier a posteriori peut représenter des risques que les promoteurs ne sont pas prêts à prendre.
  • La cinquième partie du rapport, qui m’a particulièrement plu, fait la part belle aux initiatives citoyennes, associatives et publiques des « infrastructures numériques alternatives ». Du côté des fournisseurs d’accès, de nombreux acteurs associatifs comme franciliens.net ou Aquilenet dans le Sud-Ouest sont regroupés au sein de la Fédération FFDN. Ils viennent compléter l’offre des fournisseurs principaux (Bouygues, Free, Orange et SFR). Le grand atout de ces solutions est de miser sur le social, l’éducation et la démocratie : « Ils participent d’une gouvernance partagée du commun qu’est Internet en portant des valeurs de transparence, d’inclusion, de lien social, d’apprentissage technique, et d’incitation à la participation à la vie citoyenne. »
  • La socioanthropologue des techniques Laure Dobigny affirme que quand cette gestion inclut et implique, alors les consommateurs vont vers plus de sobriété : « la mise en place de systèmes techniques de plus petite échelle ont permis, en modifiant les usages, une réduction des consommations. » La question est ensuite de savoir comment passer d’une gestion commune de réseaux à une gestion commune de data-centers.
  • Le rapport présente un certain nombre de solutions, comme le cloud de pair-à-pair : « l’idée centrale sous-tendant ces dispositifs est que les fichiers et les contenus téléchargés par les utilisateurs dans le système sont stockés, totalement ou en partie, sur un nuage de stockage composé d’une partie des disques durs de chaque utilisateur, reliés entre eux en architecture P2P. » L’idée est plutôt simple : re-décentraliser internet, réduire le besoin de grands data-centers et atténuer l’impact spatial de ces infrastructures. Les limites de ces solutions sont nombreuses bien sûr : pertes de données, erreur, taille critique non atteinte… Il existe également des data centers « de proximité » comme les chatons (« Collectif d’Hébergeurs Alternatifs, Transparents, Ouverts, Neutres et Solidaires ») ou encore SCANI dans l’Yonne et Tetaneutral à Toulouse.
  • Pour terminer, le rapport dessine trois « mondes numériques possibles ». Le premier scénario parie sur l’extrême croissance et l’ultracentralisation numérique. Pour faire simple, c’est aujourd’hui mais en pire : tout est numérisé, plateformisé, big-daté et concentré dans les mains des GAFAMS ou d’autres acteurs similaires. La ville se conforme aux modèles numériques de la smart-city, la consommation de data explose. C’est la fuite en avant, la croyance qu’un monde infini existe. Côté C02, c’est la catastrophe, la température globale monte de 2,5° en 2050. Pics de chaleur dans les villes, problèmes sociaux, etc.
  • Le deuxième scénario est en demie teinte. On stabilise le système technique numérique en permettant la coexistence de deux mondes : celui des big tech et celui, plus centralisé, des infrastructures à plus petite échelle. L’Union Européenne taxe les « Net Goinfres », ce qui modifie les comportements : on échange moins de photos de chats et on tend à les stocker sur nos terminaux personnels plutôt que dans le cloud, idem pour la musique. Côté consommation, on parvient à réduire les émissions de CO2 du secteur de 5% par an entre 2025 et 2050, ce qui nous ramène au niveau de 2013.
  • Le dernier scénario propose une forme de décentralisation ultime du numérique qui signe plus ou moins la fin des data-centers tels que nous les connaissons. Internet devient plus local et dépendant des énergies renouvelables, ce qui ne permet plus d’assurer sa continuité. Le projet Greenstar au Canada suit ces principes et accepte les intermittences du réseau (follow the wind/follow the sun), de même, le blog du Low Tech Magazine s’arrête de fonctionner quand le vent ne souffle plus (le scénario nucléaire n’est pas vraiment envisagé car l’exercice prospectif est global). Ce scénario « effondrement » se base sur des infrastructures totalement low-tech (c’est-à-dire peu coûteuses en énergie) et permet assez ironiquement un « retour aux principes fondateurs d’internet (horizontal et distribué) ». Côté service, on se contente du local et l’international devient l’exception
  • L’ADEME invite également à soutenir les FAI indépendants et à créer un « service public du numérique et des data centers publics », notamment pour améliorer l’intégration spatiale des infrastructures. Les questions énergétiques font également l’objet de propositions : sobriété, récupération de chaleur, décentralisation.
  • Le chercheur Clément Marquet cité plus haut dans l’article me rappelle que ces différents rapports (Shift, ADEME) arrivent dans un moment particulier puisque le gouvernement a voté en octobre 2018 une loi visant à réduire la fiscalité énergétique pour attirer les gros data centers. Je le cite : « il y a une tension entre le projet de souveraineté numérique par les infrastructures (et des bénéfices économiques qui iraient avec bien sûr) et celui de réduction de la consommation énergétique. »
  •  
    "L'ADEME, via le projet Enernum, vient de publier une étude approfondie sur les impacts à la fois énergétiques et sociétaux de l'installation et du déploiement des data centers, en France et ailleurs. Ce travail vient confirmer les conclusions du Think tank The Shift Project qui alertait déjà des coûts carbone importants de ces infrastructures qui soutiennent tous nos usages numériques. Par delà les chiffres, l'ADEME replace les data-centers dans leur contexte humain et géographique et interroge la gestion de ce type d'infrastructure sur le territoire."
Aurialie Jublin

Uberland : l'avenir du travail à l'heure des algorithmes | InternetActu.net - 0 views

  • Pour Alex Rosenblat, Uber a provoqué « un changement culturel fondamental sur ce que signifie avoir un emploi ». Uber a tiré un maximum de valeur des conducteurs en surfant sur les limites et ambiguïtés des normes culturelles et juridiques. Pour Adrian Chen, la gestion algorithmique d’Uber est moins une révolution qu’un affinage, à l’image des chauffeurs de taxi eux-mêmes, qui ont longtemps été dans une situation entre autonomie et dépendance, notamment avec nombre d’intermédiaires influant sur leurs possibilités de travail. Uber a simplement rendu cette sous-traitance plus efficace.
  • Adrian Chen pour Intelligencer explique que cette gestion algorithmique de la force de travail suppose une surveillance totale (jusqu’aux tremblements du téléphone pour s’assurer que le conducteur conduit en toute sécurité ! ce qui montre à nouveau, s’il en était besoin, que Uber n’est pas seulement un intermédiaire pour réaliser une transaction). Pourtant, de nombreux chauffeurs semblent satisfaits du travail qu’ils réalisent : ils apprécient la flexibilité et le complément de salaire que leur travail apporte. Même si les récits que Rosenblat a recueillis témoignent principalement d’une résignation épuisée. «Pour certains chauffeurs, ce travail est un véritable boulet, et pour d’autres, c’est un gilet de sauvetage».
  • Dans une interview pour CityLab, la chercheuse rappelle que malgré les efforts d’Uber, le taux de désengagement des chauffeurs est assez fort : 68 % d’entre eux quittent la plateforme dans les 6 mois. Elle pointe néanmoins que les outils d’Uber proposent des services que les collectivités ne savaient pas fournir, notamment en offrant des modalités de transports là où elles n’existaient pas (voir « Plateformes et métropoles » et « Vers une ville numérique ingouvernable »). Uber, derrière sa neutralité de façade, a surtout profité d’un Far West réglementaire pour s’imposer. Partout où elle s’est imposée, la firme a profondément déstabilisé la société (autour de la question du statut des chauffeurs), tout en offrant des avantages populaires (ouvrant de nouvelles dessertes et des prix bas notamment). Toute la question reste de trouver la balance entre les avantages et les inconvénients
  • ...10 more annotations...
  • Dans une tribune pour le New York Times, la chercheuse rappelait la difficulté de cette gestion algorithmique de la relation de travail (voir également « Qui des algorithmes ou des clients seront nos nouveaux patrons »). Une relation profondément asymétrique et qui se crispe notamment dès qu’il y a un problème. Elle souligne combien les informations que délivre Uber à ses chauffeurs comme à leurs passagers sont asymétriques. Un chauffeur de New York évoquait par exemple un échange avec un client qui montrait que celui-ci était facturé 40$ alors que pour le chauffeur, la course n’en coûtait que 28 !
  • Dans les années 70, le sociologue du travail britannique Michael Burawoy, dans son livre Produire le consentement (1979, traduit en français en 2015) constatait que si les travailleurs consentaient à leur propre exploitation, c’était en fait surtout par jeu. Burawoy expliquait que lorsque le travail prenait la forme d’un jeu, la principale source de tension n’était plus dans la relation des travailleurs avec les dirigeants, mais s’étendait aux autres travailleurs, aux machines et contre eux-mêmes. En proposant un sentiment d’autonomie et de contrôle relatifs, la ludification propose aux travailleurs de souscrire aux objectifs de l’entreprise. Lyft propose ainsi des défis à ses conducteurs en échange d’une prime supplémentaire : des défis assez difficiles à décrocher qui reposent sur le nombre de courses à réaliser à certains créneaux horaires.
  • 50 % des conducteurs de Uber cessent d’utiliser l’application au bout de deux mois. 4 % des conducteurs le sont encore après une année. Des rapports récents estiment que le revenu des chauffeurs à l’heure est souvent inférieur au salaire minimum.
  • Sur les forums de chauffeurs ou dans leurs discussions, ceux-ci spéculent sans cesse sur les algorithmes et les moyens de les déjouer, mais sans réellement ne jamais y parvenir. Ils tentent fréquemment de faire des déconnexions en masse de l’application pour faire monter les prix des courses, sans que l’effet n’ait jamais vraiment été assuré. Ces formes de déconnexion volontaires et organisées ressemblent à des microgrèves, à des microprotestations, sans jamais avoir permis de réelles émancipations.
  • Burawoy est à nouveau utile pour comprendre pourquoi. Le fait de « jouer » permet aux travailleurs d’exercer un contrôle limité sur le processus de travail. Mais les victoires qu’ils remportent renforcent leur engagement et leur consentement aux règles du jeu. À l’inverse, leurs échecs dirigent leur insatisfaction contre les obstacles du jeu, et non contre ceux qui en fixent les règles. Apprendre à utiliser intelligemment les paramètres du jeu, de l’algorithme, devient pour eux la seule option imaginable.
  • Après des semaines d’une conduite maniaque pour améliorer sa note… elle a constaté que cette amélioration était sans incidence directe (tant qu’elle restait au-dessus de 4,6/5) : cela ne générait ni réel bonus ni amélioration du niveau de rémunération. « En fait, je perdais de l’argent en essayant de flatter les clients avec des bonbons et de garder ma voiture scrupuleusement propre », simplement parce qu’elle souhaitait rester un pilote bien côté. « Ce qui est à la fois si brillant et affreux dans la ludification de Lyft et Uber, c’est qu’elle repose sur notre seul désir d’être utile, aimé et bon. Les semaines où je suis très bien noté, je suis plus motivé à conduire. Les semaines où je suis mal noté, je suis également plus motivé à conduire. » Une fois qu’on est pris dans la zone du jeu, il n’y a plus d’échappatoire !
  • Heureusement, la réaction à l’ubérisation s’est aussi peu à peu musclée. Pour Les Inrocks, Benoît Fabien revient sur le lancement de la Fédération transnationale des coursiers (FTC), qui a rassemblé fin octobre à Bruxelles des livreurs à domicile de toute l’Europe, à l’initiative du Groupe de recherche pour une stratégie économique alternative, de l’Alter Summit et du réseau ReAct, qui encourage les mobilisations transnationales face aux grandes entreprises. Un moyen de contrer la division et l’individualisation des plateformes de livraison pour rééquilibrer les relations de travail imposées par celles-ci. Les revendications sont nombreuses, mais s’organisent : salaire minimum, transparence des algorithmes, la liberté de se réunir en collectif…
  • les chauffeurs d’Uber s’informent des nouvelles fonctionnalités de la plateforme via ces outils, notamment quand Uber teste sur certains d’entre eux de nouvelles fonctionnalités. Le géographe Mark Graham a montré que plus de 50 % de travailleurs freelances qui utilisent des plateformes comme le Mechanical Turk d’Amazon ou Freelancer, sont en contact avec d’autres travailleurs de plateformes et échangent sur les tarifs, sur les tâches proposées et la qualité de ceux qui proposent du travail. Ces groupes servent souvent à des formes de coordination, comme l’a montré la grève des enseignants de Virginie-Occidentale, où 70 % des 35 000 enseignants de l’État étaient présents et ont permis d’articuler les revendications et d’organiser les protestations. Les groupes permettent également de fabriquer des hashtags, des gifs, des vidéos et des mêmes pour publiciser leurs actions. Si ces outils ne sont pas conçus pour soutenir le militantisme, le relai est assuré par des sites dédiés comme Coworker.org, permettant par exemple aux employés de Starbucks de faire pression sur la direction pour limiter le « clopening », le fait qu’un même employé soit chargé de la fermeture et de l’ouverture d’un magasin.
  • Reste que ces services ne sont pas toujours suffisamment en lien avec les syndicats existants : ils manquent d’assistance juridique, comme le proposent les syndicats, ou de fonds pour être maintenus. Les « startups du travail » ont assurément besoin de la force des syndicats pour se transformer. En Allemagne, IG Metal, l’un des plus importants syndicats, permet aux autoentrepreneurs de le rejoindre. Il a également lancé un site pour comparer les conditions de travail sur les plateformes baptisé Fair Crowd Work.
  • Pour Fredrik Soderqvist de Unionen, un syndicat suédois, les syndicats doivent apprendre également à mieux utiliser les données afin de permettre de créer des services adaptés aux transformations du monde… À l’exemple de Mystro, une application pour conducteurs, qui leur permet de basculer d’un service à l’autre, d’évaluer les demandes, de rejeter celles qui ne sont pas rentables, afin d’aider les conducteurs à prendre de meilleures décisions pour eux-mêmes. Assurément, s’emparer activement de la technologie pour les syndicats et les travailleurs peut leur permettre de contrer l’ubérisation… Ça ne remplace ni la lutte sociale ni la lutte légale, mais la lutte technologique peut permettre de faire des contre-propositions concrètes, de fournir des outils d’aide à la décision des travailleurs algorithmisés pour les aider à en comprendre le fonctionnement et à resymétriser la relation.
  •  
    "Dans Uberland : comment les algorithmes réécrivent les règles du travail (2018, Presse universitaire de Californie, non traduit), la chercheuse Alex Rosenblat (@mawnikr) a synthétisé quatre années de recherche ethnographique avec les conducteurs d'Uber. Un livre où transparaît une vision dystopique du travail où des millions de conducteurs sont gérés par un système technique qui combine à la fois l'autoritarisme du management scientifique à la Frederick Taylor et le leadership cynique d'un Michael Scott (le personnage incarné par Steve Carell dans la série The Office), rapporte Intelligencer."
Aurialie Jublin

« Le cyberminimalisme libère du temps, réhabilite les rencontres, préserve la... - 0 views

  • D'autres principes s'adressent à tous, comme posséder le moins d’objets connectés possible. Cesser de noter autrui, aussi, permettrait d'éviter de basculer vers le système de « crédit social » chinois. Même si cela semble ludique ou que l'on pense bien faire en notant son prochain sur Uber ou Airbnb, ce sont les prémisses d'une société à la chinoise. Si on n'y prend pas garde, on y va tout droit.
  • J’ai cherché un mot permettant de refléter la façon dont j’avais envie de vivre, entre la mise à distance des objets connectés et le désir de vivre dans mon époque. Je me suis intéressée à l'équipément et aux usages, en listant 7 principes. Certains concernent la jeunesse, comme « ne pas fournir de téléphone portable avant 15 ans ».
  • Le minimalisme matériel concerne aussi les logiciels, donc il faut alléger son téléphone. On peut « libérer » son portable et son ordinateur en optant pour des logiciels libres qui respectent davantage la vie privée. Mais le libre peut prendre du temps et nous river de nouveau aux écrans, c’est toute son ambiguïté.
  • ...6 more annotations...
  • Il y a plusieurs enjeux avec le « life log », c’est-à-dire le fait de mettre sa vie en ligne en permanence. Il y a la perte de temps, d’abord. C’est une activité qui peut prendre le pas sur la vie réelle. Certains ont des vies sur instagram devenues plus intenses que leur vie réelle. D’autres saluent Instagram tous les soirs, « bonne nuit Insta », mais à qui s’adresse-t-on ?
  • Je suis optimiste de nature donc j’ai tendance à estimer que les quelques résistances à l’oeuvre sont des bons signes. On peut parler des éleveurs de « Faut pas pucer » dans le Tarn, qui refusent d’accrocher une boucle électronique à leurs animaux. Les animaux sont parfaitement identifiés par ailleurs, ils ont reçu toute la prophylaxie nécessaire, mais ils n’entrent pas dans la nouvelle norme… Ces éleveurs sont en difficulté et ils ont besoin de soutien. 
  • Je pense à deux autres résistances. Des élus locaux de New York viennent de fermer la porte à Amazon qui voulait y installer son siège social. Craignant une hausse des prix et une gentrification du quartier pressenti pour le projet, ils refusent aussi par principe d’accorder une aide fiscale à Jeff Bezos, l’homme le plus riche du monde. C’est une résistance politique très intéressante. Je pense aussi à la Cour de Cassation qui, en novembre 2018, a requalifié en contrat de travail la relation contractuelle d'un livreur à vélo et de la plateforme de livraison de repas Take Eat Easy. Elle a estimé qu’il y avait un lien de subordination entre le livreur et la plateforme, et non une relation de type travail indépendant. On voit donc des juges qui ne se laissent pas faire, des élus locaux résistant à l'ogre Amazon, et des éleveurs qui tentent d'élever leurs chèvres avec du bon sens. 
  • Il n’y a aucun débat démocratique sur la société cybernétique. Il n’y a donc de la place que pour des résistances locales ou individuelles. Mon espérance est que cela devienne un sujet politique, qu’on nous pose des questions scientifiques, à propos de la société numérique, et que chacun puisse se positionner. Veut-on vraiment des voitures autonomes ? Une médecine « connectée » et « à distance » ? Veut on vraiment tomber sur des répondeurs plutôt que sur des gens ? Bien sûr, il y a d’autres priorités, je ne prétends pas que ce soit toujours le sujet numéro 1. Mais à travers ce thème de l'artificialisation du monde, il y a la question de l’écologie, de la démocratie, de la jeunesse. Il faut faire émerger le débat. 
  • Je trouverais intéressant de faire émerger un nouveau droit fondamental qui donnerait le droit, par exemple, d’accéder aux services publics sans passer par un écran, en allant trouver un humain à un guichet. C’est important pour toutes les personnes qui sont allergiques aux écrans, qui souffrent énormément de passer par Internet, pour les personnes âgées, pour les personnes qui n’ont pas les moyens. Il faut retrouver l’humain dans ce rapport à l’administration. Les enfants et les jeunes doivent de leur côté conserver le droit de vivre de façon non connectée. Cela suppose de renoncer au projet fou de numérisation progressive de l’école. 
  • C’est une démarche qui d’abord libère du temps. Renoncer au « life log » (la captation et la publication de sa vie) permet de laisser moins de données derrière soi, et donne de la liberté mentale en se sentant moins dépendant de l'approbation d'autrui. Le cyberminimalisme apporte aussi du bien-être puisque l’idée est de réhabiliter les rencontres réelles, de privilégier les coups de fil plutôt que les courts messages, les sorties sans téléphone, s’autoriser quelques soirées sans écran et enrichir l'amitié. Enfin il y a préservation de la biosphère par l'achat systématique de numérique d'occasion afin de remettre en circulation les objets déjà produits, et soulager ainsi la Terre d'une activité extractive très polluante. 
  •  
    "Le tout-numérique n'est pas une fatalité et la résistance, déjà à l'oeuvre, doit grossir ses rangs. Tel est le message au coeur de Cyberminimalisme, à la fois essai critique et manuel pratique, paru le 7 février au Seuil dans la collection Anthropocène. Entretien avec son auteure, Karine Mauvilly."
Aurialie Jublin

CFDT - Travailleurs des plateformes : beaucoup de bruit pour rien ? - 0 views

  • Devant la cour d’appel, son contrat, dénommé « contrat de prestations de services », a été passé au peigne fin. Il en est ressorti que, si le livreur pouvait choisir ses plages horaires (« shifts ») pour effectuer des livraisons, il ne pouvait, sans pénalité, se désengager moins de 72 heures avant leur commencement. Qui plus est, la société Take eat easy se réservait le pouvoir de résiliation du contrat dans certains cas. Aussi, la société avait-elle édicté un « petit guide du coursier », instaurant un système de bonus-malus, les malus étant plus couramment appelés strike. 3 strikes en 1 mois conduisait à une convocation à un entretien avec la société sur les motivations du coursier et 4 strikes à la rupture des relations contractuelles. A la suite du rejet de ses prétentions par le conseil de prud’hommes de Paris, le livreur a interjeté appel. Par une décision du 20 avril 2017, la cour d’appel de Paris a refusé de reconnaître l’existence d’un contrat de travail. Selon les juges du fond, bien que le système de bonus/malus mis en place évoque un pouvoir de sanction, les pénalités sanctionnent des manquements à des obligations contractuelles, ce qui ne caractérise pas un pouvoir de sanction de type salarial. De plus, la cour relève que ces stipulations ne remettent pas en cause la liberté du coursier de choisir ses horaires, le moment de ses congés, tout comme sa durée de travail. Les juges du fond en déduisent que la société Take eat easy « ne détermine pas unilatéralement les conditions d’exécution du travail ».
  • La cour relève également que le livreur n’est lié par aucune clause d’exclusivité. Régisseur dans un petit théâtre parisien, celui-ci exerce même une seconde activité professionnelle. Aux yeux des juges d’appel, « cette liberté totale de travailler ou non (…) est exclusive d’une relation salariale ».
  • Dans sa décision très attendue, la Haute juridiction contredit la solution retenue en appel. La Cour de cassation considère que le livreur était bien lié à la plateforme par un contrat de travail. A cette fin, elle applique les principes classiques en matière de reconnaissance de la qualité de salarié.
  • ...3 more annotations...
  • Selon la Cour, le système de la géolocalisation du livreur permettant son suivi en temps réel, ainsi que le système de sanctions auraient dû conduire les juges du fond à reconnaitre l’existence d’un pouvoir de direction et de contrôle et celle d’un pouvoir de sanction. Toutes choses caractérisant l’existence un contrat de travail.
  • En tout cas, les décisions semblaient autant se fonder sur le degré d’autonomie du travailleur que sur les principes classiques de qualification d’un contrat de travail, qu’elles rappelaient malgré tout. Manière sans doute de prendre en compte la nouveauté de ces situations… La Cour de cassation ne l’entend pas ainsi. Pour elle, dès lors que les indices classiques de l’existence d’un lien de subordination sont présents, l’autonomie (réelle ou supposée selon les cas) des travailleurs du numérique n’est pas déterminante. Ce qui compte c’est l’existence, ou non, d’un pouvoir de direction et de contrôle, sur lequel s’appuie le pouvoir de sanction.
  • En tout cas, il n’est sans doute pas anodin que, dans la note explicative de l’arrêt, la Haute juridiction indique que les textes actuellement existants concernant les travailleurs des plateformes (pas applicables en l’espèce) ne comportent aucune réponse à la question. La Cour de cassation prend ainsi explicitement position pour dire que la loi Travail (9) ne pose pas de présomption d’indépendance vis-à-vis de ces travailleurs, mais seulement l’esquisse d’une responsabilité sociale des plateformes.
  •  
    "Grande première : la Cour cassation vient d'analyser la relation liant un livreur à une plateforme ! Appliquant des principes très classiques à cette situation pourtant spécifique, la Haute juridiction a considéré que le livreur était bien lié à la plateforme par un contrat de travail. Selon la Cour de cassation, la plateforme disposait d'un pouvoir de direction, de contrôle et de sanction sur le livreur. Cass.soc.28.11.18, n°17-20079."
Aurialie Jublin

Babayagas, Oasis et Grands Voisins : réinventer le vivre-ensemble | Le Club d... - 0 views

  •  
    "L'Etat détruit la ZAD de Notre-Dame-des-Landes mais son esprit refleurit partout. Le tour Alternatiba vient de partir, il nous montre à chaque étape que le vivre-ensemble s'épanouit dans les lieux alternatifs. Les expériences collectives comme les Babayagas, les Grands Voisins ou les Oasis des Colibris préfigureraient-elles la ville de demain ?"
Aurialie Jublin

affordance.info: Undocumented Men - 0 views

  • De fait nous semblons aujourd'hui n'avoir que deux choix fondés sur deux doctrines s'excluant mutuellement : Doctrine n°1 : La vie privée est une anomalie et si vous n'avez rien à vous reprocher vous n'avez rien à cacher. Soit le scénario d'une surveillance totale et globale de chacun de nos comportements par les grandes firmes tech en lien avec les états. Un projet au mieux de nature totalitaire et au pire de nature fasciste. Doctrine n°2 : La vie privée est un droit constitutionnel dont les états et les grandes firmes technologiques doivent être garants. Et là vous aurez toujours quelqu'un pour commencer à parler des exceptions, toujours un "oui mais" : "oui mais s'il s'agit de pédophilie ? De terrorisme ? D'empêcher un pilote d'avion mentalement déséquilibré de causer la mort de centaines de personnes ? A quel moment commence le "principe d'une surveillance de précaution" et quel aspect du droit fondamental à la vie privée doit-il fouler au pied ?" Et on ne s'en sort pas. 
  • Seul un troisième scénario pourra nous permettre d'éviter le pire. Il nécessite de passer par : la multiplication d'outils effectivement respectueux de notre vie privée dans le traitement technique des données qui y circulent (c'est la cas de DuckDuck Go, de Qwant, et de quelques autres) le déploiement de solutions alternatives à la toute puissance des GAFAM (comme l'initiative Dégooglisons internet le permet déjà, et comme le permettrait encore davantage la création d'un index indépendant du web combiné à la mutualisation déjà effective de ressources en Creative Commons) le soutien politique (et législatif) au déploiement du logiciel libre la formation à l'explicitation des enjeux de la surveillance ("Surveillance://" de Tristan Nitot en est un exemple magnifique) la prise de conscience que les données dont nous parlons sont avant tout celles de notre servitude volontaire
  • Demain peut-être, lorsque la dystopie se sera définitivement installée, ne nous faudra-t-il plus parler de "sans papiers" mais de "sans comptes". Des individus sans trace sociale numérique qui permette de les documenter. Ils ne seront plus "undocumented" mais "undigitized", non-numérisés. Et donc non-surveillables. Peut-être que ce sera une chance. Probablement même. De nouvelles formes de résistance documentaire émergeront, de nouvelles pédagogies contre la surveillance seront nécessaires. Et nous serons sans  peur, mais jamais sans reproche(s), car nous aurons compris que la doctrine selon laquelle "si nous n'avons rien à nous reprocher nous n'avons rien à cacher" est la source de tous les totalitarismes, que la vie privée est tout sauf une anomalie. Alors oui nous serons sans peur, dussions-nous pour cela rejoindre la cohorte de toutes celles et ceux qui sont, aujourd'hui, sans documents. Car cette humanité "undocumented" est bien plus qu'une humanité "sans papiers", elle est une humanité "non-documentée", en ce sens elle est aussi libre qu'elle permet de pointer et de mesurer notre propre asservissement aux nouveaux ordres documentaires. 
  •  
    "Deuxio, sa haine viscérale est adressée à des communautés et à des minorités (rien de nouveau sous le fascisme ordinaire ...) mais elle se caractérise en cela qu'elle stigmatise principalement ces communautés du fait de leur absence de papiers (les fameux "Undocumented Men") et qu'elle utilise, pour conduire et guider cette haine, les outils et les métriques ne pouvant s'appliquer qu'à une population "sur-documentable". C'est ainsi que Cambridge Analytica a joué un rôle majeur dans la construction de sa victoire ; c'est ainsi également que la toute puissance du discours totalitaire est d'autant plus efficiente qu'elle s'applique à des communautés ciblées parce que sur-documentées (et sur-documentables) ; c'est ainsi, enfin, qu'il faut voir la volonté affichée de récupérer à toute force les mots de passe de ces "undocumented men" car cela permet au discours totalitaire et au projet fasciste qui le sous-tend de faire entrer le monde dans les deux seules catégories binaires qu'il comprend et qui composent son horizon et son projet : d'un côté ceux qu'il est possible de contrôler et de manipuler (les "sur-documentés") et de l'autre ceux contre qui il faut diriger la haine des premiers (les "sous-documentés", les "undocumented")."
Aurialie Jublin

Livreur.ses de tous les pays, unissons-nous ! | La Rue est notre Usine - 0 views

  • Du côté des institutions, après de longues procédures d’investigation le ministère du Travail vient de lancer une procédure en attaquant Deliveroo pour salariat déguisé. Le ministère des Transports s’en prend lui à l’absence de licence des livreurs en scooter et a également commencé une procédure. Elles n’en sont qu’au stade de dépôt au parquet. Si nous ne pouvons que nous réjouir de la prise de conscience des ministères publics des problèmes de l’ubérisation, nous restons attentifs et relativement inquiets des conséquences que pourront avoir les jugements. Peut-on craindre qu’après un jugement positif en notre faveur les multinationales soient obligées de cesser leurs activités en France ? Et donc de mettre à la rue un grand nombre de livreurs ? Nous réaffirmons nos revendications qui sont de profiter des avantages sociaux comme l’ensemble des autres travailleurs et de gérer les boîtes à la base par et pour les livreurs, par et pour nous.
  • Une des perspectives d’émancipation des livreurs, face au refus de Deliveroo de tout dialogue concernant l’amélioration de nos conditions de travail, est de créer nos propres structures. La forme privilégiée repose sur des structures coopératives autogérées par et pour les livreurs. Si la création de coopératives semble difficile à penser dans un grand nombre de secteurs (industrie par ex.), notamment parce qu’il faut un capital de départ important, difficile à réunir sans passer par des banques (on peut néanmoins citer l’exemple des Fralib qui après des années de luttes ont réussi à récupérer leur outil de travail), elle s’affranchit de beaucoup de problématiques pour la question des livraisons de repas.
  • Il nous paraît tout de même important de ne pas idéaliser les coopératives comme une solution finale. Les coopératives ont en effet deux buts liés et non exclusifs. Elles doivent être pour nous, à la fois comprises comme une perspective de lutte et d’émancipation. Mais cette stratégie ne peut pas se passer des luttes sociales chez Deliveroo, car tant que ces multinationales exploiteront leurs travailleurs, une coopérative ne pourra pas être concurrentielle en termes de tarif et devra donc se contenter de marchés limités, ne pouvant ainsi pas fournir un travail à tous les livreurs, qui devront donc continuer à se faire exploiter. De plus, en cas de manque de commandes, les livreurs sont obligés de s’auto-exploiter. Il faut donc voir les coopératives comme un élément d’une lutte générale contre les multinationales qui ne peut pas se passer de l’auto-organisation des travailleur.se.s.
  • ...6 more annotations...
  • C’est le but de l’association Coopcycle qui développe depuis 2016 une application qui permet de répartir les commandes entre les livreurs. Elle est utilisée par deux coopératives à Bordeaux et Molenbeek. Le but est simple et le résultat efficace, se passer des multinationales, éviter le vol de la plus-value et pouvoir répartir collectivement les bénéfices. Ces coopératives sont également la solution, de fait, pour les livreurs virés/réprimés pour s’être battus. Les camarades livreurs de la CGT à Bordeaux, qui ont été parmi les premiers mobilisés de France, ont pour la plupart aujourd’hui été virés de Deliveroo ou de Foodora après les mouvements de grèves. Ils ont ainsi créé leur propre coopérative, la coopérative des coursiers bordelais.
  • On voit clairement que les syndicats ont cherché à intégrer les livreurs et leurs spécificités dans un moule qui ne correspond pas forcément à leurs besoins. Cependant nous avons toujours pu compter sur des équipes spécifiques de la CGT et de Solidaires pour nous soutenir, que ce soit sur le plan financier, juridique ou organisationnel. Un certain nombre de militants de ces structures, parce qu’ils ont compris le risque que présente l’ubérisation, nous ont été d’une aide inestimable, et nous ne saurons jamais les remercier assez. Ils ont, c’est certain, fait beaucoup plus que quiconque pour rapprocher les jeunes précaires des structures syndicales qu’ils considéraient bien trop souvent comme des coquilles vides et inutiles.
  • Se battre lorsqu’on est précaire dans un travail qui n’est pas indispensable à l’économie est difficile. Mais lorsqu’on est individualisé à l’extrême cela devient très compliqué. C’est pourquoi nous sommes convaincus qu’une amélioration de nos conditions de travail et de vie ne peut se faire qu’en lien avec d’autres secteurs précaires et le reste du monde du travail. Nous tâchons donc d’essayer de prendre contact avec un maximum de monde, de créer des convergences de luttes avec d’autres secteurs pour pouvoir échanger sur nos conditions de travail, nos stratégies de luttes, mais également pouvoir partir ensemble dans un affrontement contre la précarité. Par exemple Stuart, start up française de livraison a été rachetée par le groupe La Poste. Il n’est pas inenvisageable, au vu des stratégies actuelles de flexibilisation du travail menées par ce groupe, que vos colissimos soient livrés 7/7j par des autoentrepreneurs. Afin d’éviter les divisions et parce que nous avons les mêmes intérêts objectifs que les postiers, nous sommes entrés en contact avec leurs syndicats pour réfléchir collectivement à une réponse positive pour les deux secteurs.
  • C’est pourquoi dès la première journée de mobilisation à Paris en août 2017 nous avons cherché à nous coordonner avec les autres collectifs de livreurs en France afin de faire valoir nos mobilisations au même moment et de nous mettre d’accord sur des mots d’ordre et des revendications. Cela a donné naissance à la CAVAL (Coordination d’actions vers l’autonomie des livreurs), structure nationale pérenne de mobilisations et d’échange d’informations. Ce qui a permis que, par la suite, la plupart des journées d’actions soient nationales. Mais pour mettre une pression suffisante sur Deliveroo, présent dans la plupart des pays européens, ce n’est pas suffisant. C’est pourquoi nous avons entrepris depuis quelques mois de nous coordonner au niveau européen. Nous avons ainsi rencontré des livreurs de Turin, Bologne, Vienne, Londres et nous sommes allés soutenir les grèves du mois de Janvier à Bruxelles.
  • La grève est très souvent considérée comme un outil daté, qui ne fonctionnerait plus. Le capitalisme se serait modifié et les nouvelles formes du travail seraient particulièrement touchées par ce constat. Nous pensons au contraire que la grève reste le moyen le plus efficace et le plus juste pour gagner le rapport de force qui oppose les livreurs et la multinationale. Parce que c’est le principal levier que nous avons pour engager un bras de fer économique avec la multinationale et qu’il se fait à la base par les travailleurs, les premiers concernés. Cependant, en raison des caractéristiques spécifiques de notre exploitation, il nous faut repenser la grève pour l’adapter aux modalités de ces nouvelles formes de travail. Nous avons pris la décision de bloquer les restaurants pour mettre un maximum la pression et faire perdre le plus d’argent possible aux multinationales.
  • Pour éviter la répression, nous devons être nombreux pour ne pas nous faire virer instantanément, mettre nos téléphones en mode avion (ils ont accès à notre géolocalisation) et faire masse. Cela permet de discuter entre nous plus longtemps que 5 minutes entre deux livraisons, de recréer une conscience collective du travail : nous sommes collègues et non concurrents. Nous étions pour la plupart masqués lors des premières mobilisations, mais paradoxalement c’est beaucoup plus radical de se mobiliser à visage découvert et de revendiquer qu’en France en 2018 on a le droit de se battre pour nos conditions de travail. Par la grève, et la grève seule, nous pourrons nous emparer des moyens de production et faire en sorte que Deliveroo appartienne à ses livreurs et non à des obscurs actionnaires et des fonds de pension.
  •  
    "L'ubérisation, stade suprême du capitalisme ? Depuis quelques années, les plateformes numériques réorganisent et transforment le travail, permettent à leurs propriétaires de maximiser leurs profits et de diviser les travailleurs. Ces derniers paient le prix fort : mal rémunérés, payés à la tâche, condamnés à la précarité. Malgré ces obstacles, les forçats de la pédale s'organisent et mènent des luttes. Dans cet article, un membre du collectif des livreurs autonomes de Paris (CLAP) nous raconte les mobilisations en cours face à Deliveroo. Au niveau local, national et transnational, les livreurs s'organisent, font alliance avec les syndicats et font pression sur la multinationale. Ils inventent des solutions qui permettront à l'avenir de créer une économie au service de ceux qui la font tourner."
Aurialie Jublin

La directive Copyright n'est pas une défaite pour l'Internet Libre et Ouvert ... - 0 views

  • Trop souvent, nous avons concentré nos énergies sur des combats législatifs, hypnotisés par l’idée que le décompte des voix conduirait à une sorte « d’ordalie démocratique ». Cela nous a donné plusieurs fois l’illusion d’avoir remporté quelque chose, comme au moment du rejet de l’ACTA, alors que les racines du problème restaient intactes. Mais heureusement en sens inverse, si la victoire n’est jamais acquise en cas de succès législatif, il en est de même pour la défaite. Et rien ne serait plus faux que de penser que le vote de cette semaine sur la directive Copyright constitue la fin de l’histoire, sous prétexte que nous aurions encaissé là une défaite décisive !
  • Certes les articles 11 et 13 du texte, qui instaurent une obligation de filtrage automatisé des plateformes et une taxe sur les liens hypertextes au profit des éditeurs de presse, représentent des monstruosités contre lesquelles il était nécessaire de lutter. Mais il convient à présent d’apprécier exactement la portée de ces mesures, pour réadapter très rapidement notre stratégie en conséquence à partir d’une appréhension claire de la situation. Or cette « vision stratégique d’ensemble » est à mon sens précisément ce qui a manqué tout au long de cette campagne dans le camp des défenseurs des libertés numériques et il est inquiétant de constater que ces erreurs de jugement n’ont pas disparu maintenant que l’heure est venue d’analyser les conséquences du scrutin.
  • On a pu voir par exemple cette semaine l’eurodéputée du Parti Pirate Julia Reda expliquer sur son blog que ce vote constituait un « coup dur porté à l’internet libre et ouvert » (Today’s decision is a severe blow to the free and open internet). De son côté, Cory Doctorow a écrit un article sur le site de l’EFF, où il affirme que « l’Europe a perdu Internet » (Today, Europe lost the Internet). Sur Next INpact, Marc Rees déplore dans la même veine « une mise au pilori du Web tel que nous le connaissons, un affront à la liberté d’expression. » Ces appréciations font écho au mot d’ordre qui fut celui des défenseurs des libertés en campagne contre les articles 11 et 13 de la Directive : Save Your Internet (Sauvez votre Internet).
  • ...12 more annotations...
  • Or lorsqu’on lit attentivement ces articles, tels qu’amendés par le vote des eurodéputés, on se rend compte qu’ils ne visent pas pas « l’Internet » ou « le Web » tout entier, mais seulement une catégorie d’acteurs déterminés, à savoir les plateformes centralisées à but lucratif. Ce n’est donc pas « l’Internet libre et ouvert » qui va être frappé par cette directive, mais plutôt exactement ce qui représente son antithèse ! A savoir cette couche d’intermédiaires profondément toxiques qui ont dénaturé au fil du temps les principes sur lesquels Internet et le Web s’appuyaient à l’origine pour nous faire basculer dans la « plateformisation ».
  • Or le grand mensonge sur lesquels s’appuient les GAFAM – principaux responsables de cette centralisation -, c’est de chercher à faire croire qu’ils représentent à eux-seuls l’Internet tout entier, comme si rien ne pouvait plus exister en dehors de leur emprise. En ce sens quand j’entends Cory Doctorow dire que nous « avons perdu Internet » à cause de mesures ciblant les acteurs centralisés lucratifs, je ne peux que frémir. Avec tout le respect que je peux avoir pour ce grand monsieur, ses propos paraissent avoir incorporé la prétention des GAFAM à recouvrir le web et c’est particulièrement grave. Car c’est précisément cela qui constituerait la défaite finale des défenseurs des libertés : se résigner à cet état de fait et ne pas agir sur les marges dont nous disposons encore pour briser cette hégémonie.
  • Sur Next INpact, Marc Rees identifie avec raison le changement le plus profond que ce texte va amener : il remet en question la distinction classique entre hébergeurs et éditeurs, issue de la directive eCommerce de 2000. Jusqu’à présent, les hébergeurs bénéficiaient d’une responsabilité atténuée vis-à-vis des actes commis par leurs utilisateurs. Au lieu de cela, la directive Copyright introduit une nouvelle catégorie d’intermédiaires dits « actifs » qui devront assumer la responsabilité des contenus qu’ils diffusent, même s’ils ne sont pas directement à l’origine de leur mise en ligne.
  • On voit que le « rôle actif » se déduit de trois éléments : la taille de l’acteur, son but lucratif et la hiérarchisation automatisée de contenus. Ce sont donc bien des plateformes centralisées lucratives, type Facebook ou YouTube, qui devront assumer cette nouvelle responsabilité. Pour y échapper, elles devront conclure des accords de licence pour rémunérer les ayant droits et, à défaut, déployer un filtrage automatisé des contenus a priori. En pratique, elles seront certainement toujours obligées de mettre en place un filtrage, car il est quasiment impossible d’obtenir une licence capable de couvrir l’intégralité des œuvres pouvant être postées.
  • La directive a par ailleurs pris le soin de préciser que les « prestataires sans finalité commerciale, comme les encyclopédies en ligne de type Wikipedia » ainsi que les « plateformes de développement de logiciels Open Source » seraient exclus du champ d’application de l’article 13, ce qui donne des garanties contre d’éventuels dommages collatéraux.
  • Marc Rees nous explique que cette évolution est dangereuse, parce que l’équilibre fixé par la directive eCommerce constituerait le « socle fondamental du respect de la liberté d’expression » sur Internet. Mais cette vision me paraît relever d’une conception purement « formelle » de la liberté d’expression. Peut-on encore dire que ce qui se passe sur Facebook ou YouTube relève de l’exercice de la liberté d’expression, alors que ces acteurs soumettent leurs utilisateurs à l’emprise d’une gouvernance algorithmique de plus en plus insupportable, que cible précisément la notion de « rôle actif » ?
  • Il est peut-être temps de tirer réellement les conséquences de la célèbre maxime « Code Is Law » de Lawrence Lessig : le droit n’est qu’une sorte de voile dans l’environnement numérique, car c’est le soubassement technique sur lequel s’appuie les usages qui conditionne réellement l’exercice des libertés. Quoi que dise la directive eCommerce, il n’y a quasiment plus rien qui relève de l’exercice de la liberté d’expression sur les plateformes centralisées lucratives, sinon une grotesque parodie qui salit le nom même de la liberté et nous en fait peu à peu perdre jusqu’au sens ! En le lisant « en creux », l’article 13 dessine au contraire l’espace sur Internet où la liberté d’expression peut encore réellement s’exercer : le réseau des sites personnels, celui des hébergeurs ne jouant pas un rôle actif et – plus important encore – les nouveaux services s’appuyant sur une fédération de serveurs, comme Mastodon ou Peertube.
  • Ce qui va se passer à présent avec l’obligation de filtrage automatisée, c’est que les grandes plateformes centralisées lucratives, type YouTube ou Facebook, vont sans doute devenir des espaces où les utilisateurs éprouveront le poids d’une répression « à la chinoise » avec la nécessité de se soumettre à un contrôle algorithmique avant même de pouvoir poster leurs contenus. Le contraste n’en sera que plus fort avec les espaces restant en dehors du périmètre de l’article 13, que les créateurs et leur public seront d’autant plus incités à rejoindre. Doit-on réellement le déplorer ?
  • On retrouve ici le problème de « l’agnosticisme économique » dont j’ai déjà parlé sur ce blog à propos du fonctionnement même des licences libres. En refusant de discriminer selon les types d’usages économiques, les défenseurs du Libre se sont en réalité privés de la possibilité de développer une réelle doctrine économique. C’est ce même aveuglement aux questions économiques qui conduit à des aberrations de positionnement comme celles que l’on a vu au cours de cette campagne contre la directive Copyright. Comment mobiliser autour du mot d’ordre « Save Your Internet », alors que cet « Internet » que l’on a voulu faire passer pour « le notre » comprend en réalité les principaux représentants du capitalisme de surveillance ? C’est le sens même de nos luttes qui disparaît si nous ne nous donnons pas les moyens d’opérer des distinctions claires parmi les acteurs économiques.
  • En juin dernier, c’est-à-dire avant même le premier vote sur la directive, La Quadrature du Net a commencé à développer ce type d’analyses, en suggérant de ne pas s’opposer à l’introduction du critère du « rôle actif » des plateformes pour au contraire le retourner comme une arme dans la lutte contre la centralisation
  • L’enjeu n’est pas de chercher – sans doute vainement – à supprimer l’article 13, mais de réussir à délimiter clairement son périmètre pour s’assurer qu’il ne s’appliquera qu’à des acteurs centralisés lucratifs procédant à une hiérarchisation des contenus. Manœuvrer ainsi ferait peser sur les GAFAM une charge écrasante, tout en préservant un espace pour développer un réseau d’acteurs éthiques non-centralisés et inscrits dans une logique d’économie solidaire. Il n’y a qu’au sein d’une telle sphère que l’on puisse encore espérer œuvrer pour un « Internet Libre et Ouvert ».
  • Il faut aussi sortir de l’urgence immédiate imposée par cette série de votes pour se replacer dans le temps long. De toutes façons, quelle que soit l’issue des dernières négociations, il restera encore plusieurs années (3, 4, peut-être plus ?) avant que la directive ne soit transposée dans les pays de l’Union. C’est un délai appréciable qui nous laisse encore le temps de travailler au développement de cette sphère d’acteurs alternatifs.
  •  
    "Bien que la directive droit d'auteur soit le symptôme d'une soumission économique de nos industries aux géants du Web, elle crée néanmoins l'opportunité de remettre en cause ces géants, au profit de l'Internet décentralisé. C'est ce que nous rappelle Calimaq, membre de La Quadrature du Net, dans cette tribune - initialement publiée sur son blog."
Aurialie Jublin

[Internet] Internet : vive le prétendu anonymat ! - Libération - 0 views

  • Sale temps pour la privacy, comme on dit dans le monde des nouvelles technologies, c’est-à-dire pour notre intimité - le mot français est sans doute plus parlant. Elle était déjà menacée par les grandes plateformes numériques qui vivent de la prédation de nos données personnelles, et qui en savent parfois plus que nous sur nous-mêmes. Elle est désormais attaquée sur un deuxième front, politique cette fois, avec le retour sur le devant de la scène d’un serpent de mer aussi inutile que dangereux : l’appel à en finir avec «l’anonymat sur Internet».
  • «Forçons chacun à publier avec son vrai nom, et alors Internet redeviendra une agora paisible et constructive !» Le mantra est repris jusqu’au sommet de l’Etat. Tant pis si la recherche universitaire ne démontre pas de lien nécessaire entre «anonymat» et comportement haineux ou manipulateur sur les médias sociaux. Tant pis si le concept même d’anonymat numérique veut tout, et surtout rien dire - on laisse quasiment toujours des traces sur Internet, sauf efforts et technicité hors normes. Tant pis donc si «l’anonymat» n’existe pas et est à proprement parler, dans la grande majorité des cas, un pseudonymat, c’est-à-dire l’utilisation d’un identifiant qui ne renvoie pas directement à son nom, prénom. Tant pis si la justice, en France, a déjà les moyens techniques et légaux d’identifier qui se cache derrière une identité fictive, en cas de comportement délictueux et si elle est saisie. Au diable la nuance, transformons le Web en un gigantesque LinkedIn, et tout ira mieux !
  • Fait significatif, les contempteurs de l’anonymat - qui-est-en-fait-un-pseudonymat - ne font jamais l’effort de se demander à quels usages il renvoie concrètement, par delà le fantasme de l’immonde troll téléguidé par une puissance étrangère qui viendrait tourmenter l’honnête internaute à coups de théories du complot et de harcèlement organisé. S’ils faisaient cet effort, ils comprendraient, je l’espère, que l’horrible «anonymat» recouvre autant de libertés, et de possibilités, qu’il est en réalité urgent de défendre et de sanctuariser.
  • ...10 more annotations...
  • La liberté d’exprimer des idées qui soient jugées pour elles-mêmes, et non pour l’identité de la personne qui les profère.
  • La liberté de dire ce que l’on pense, d’affirmer ou de discuter convictions politiques, religieuses, philosophiques, passions et centres d’intérêt personnels, sans avoir à affronter le qu’en-dira-t-on de ses voisins, de ses collègues, de son milieu.
  • La liberté de dire, tout court, quand son emploi ne le permet pas, que l’on ait un devoir de réserve - comme les fonctionnaires - ou une fonction sensible dans une entreprise.
  • La liberté de faire savoir ce qui se passe à son travail, en bien comme en mal, sans avoir à en référer à son patron, ni courir de risque professionnel.
  • La liberté de se dévoiler quand ce qu’on vit ou ce qu’on est peut attirer critiques, moqueries, menaces, opprobre sociale - quand on appartient à une population discriminée, et même si on n’a aucune honte à en avoir.
  • La liberté de changer, de ne pas être prisonnier de positions tenues ou d’erreurs commises des mois ou des années plus tôt, et que n’importe qui pourrait venir inspecter à tout moment, en passant au crible un nom sur tous les moteurs de recherche.
  • La liberté de ne pas tout partager avec tout le monde, d’avoir une vie compartimentée, une identité complexe, multiple, et de choisir comment, à et qui, on veut la dévoiler. Parce que tout le monde n’a pas fait le choix d’être une célébrité ou un «influenceur» vivant du voyeurisme institutionnalisé.
  • La liberté de créer, de tenter des choses, des expressions, des façons de faire - faut-il rappeler la place des pseudonymes dans l’histoire de la littérature ?
  • La liberté, en résumé et paradoxalement, d’être soi-même, sans passer son temps à s’autocensurer.
  • L’appel à cette transparence totalitaire, mais à sens unique - on aimerait que les politiciens qui la défendent s’astreignent à la même règle sur leurs rapports avec lobbys et financeurs - a, enfin, un ultime effet pervers : il fait peser le poids des problèmes actuels d’Internet, que nul ne conteste, sur l’utilisateur final, plutôt que sur leurs principaux coupables. Si vous voulez vraiment «civiliser» le Web, mesdames et messieurs les législateurs, portez plutôt votre attention sur le modèle économique et l’architecture technique des plateformes quasi monopolistiques qui le dominent et le façonnent. Donnez à la justice les moyens financiers et humains de poursuivre et de punir ceux qui abusent des canaux numériques pour menacer, insulter, harceler. Interrogez-vous sur les pratiques de vos propres partis, dont les militants ne sont pas les derniers à «ensauvager» ces nouveaux espaces de débat et d’expression. Votre responsabilité est immense. Notre vigilance la sera aussi.
  •  
    "On n'est jamais totalement incognito sur les réseaux sociaux, on laisse toujours des traces. C'est donc une fausse bonne idée de supprimer ce relatif anonymat. Il recouvre en fait autant de libertés que de possibilités d'agir qu'il faut conserver."
1 - 20 of 21 Next ›
Showing 20 items per page