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Aurialie Jublin

Interview des auteurs du livre : "Blockchain - vers de nouvelles chaînes de v... - 0 views

  • Une monnaie, qu’elle qu’en soit la forme, remplit une fonction d’utilité : principalement celle d’être un moyen d’échange facilitant les transactions. Le point commun entre les pièces d’argile, les pièces métalliques, les monnaies fiduciaire et scripturale est donc de remplir cette fonction de média d’échange. L’utilisation d’un média d’échange dans le cadre d’une transaction permet de réduire les coûts associés à celle-ci.
  • Le troc est facilement imaginable, notamment au sein de petites communautés, mais est extrêmement coûteux puisqu’il nécessite « une coïncidence des volontés ». Il faut qu’à un instant t, deux personnes aient besoin du bien proposé par l’autre mais surtout que chacun estime que la transaction est équitable. L’utilisation d’une monnaie supprime ce problème : je peux vendre un bien, conserver la monnaie en « réserve de valeur » avant de racheter un autre bien lorsque l’envie m’en prendra. Plus largement, une monnaie remplit donc classiquement trois fonctions économiques : medium d’échange, réserve de valeur (possibilité de transférer des valeurs dans le temps) et unité de compte (métrique / libellé de référence pour des acteurs).
  • Vous dites aussi qu’une autre caractéristique de la monnaie est qu’elle n’a peu ou pas de valeur intrinsèque.En effet. La valeur qu’on lui accorde dépasse de loin sa valeur fondamentale. Nul doute que le poids du métal d’une pièce de deux euros valle bien moins que deux euros. La valeur d’une monnaie repose sur la confiance, la croyance collective que lui apporte un groupe d’individus, le symbole. Nous aimons beaucoup les thèses de Yuval Noah Harari sur la construction collective des mythes et des croyances ; selon nous, une monnaie en est une. La monnaie est «l’avatar le plus représentatif de la capacité des hommes à créer des mondes intersubjectifs ». Ce constat est d’autant plus fort depuis que la fin de la convertibilité or du dollar a été actée en 1971.
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  • Nous démontrons que les média d’échange ont toujours évolué dans l’histoire économique, prise dans le temps long. A ce titre, Bitcoin ne mérite pas de statut plus négatif que le billet de banque lors de son invention. Cette évolution historique n’est certes pas linéaire, et prudence doit être de mise pour ne pas tomber ni dans l’anachronisme ni dans un évolutionnisme mal placé. On peut toutefois identifier de grands changements associés au progrès technique : à chaque révolution industrielle son support. L’apprentissage de la manipulation des métaux a permis la création des pièces métalliques, l’invention de l’imprimerie a ouvert la voie à la création des billets et de la monnaie fiduciaire, la création de la comptabilité en partie double au XVe siècle a rendu possible la compensation de compte à compte sans déplacement physique de moyens d’échange. Il n’y a donc rien d’aberrant ou de surprenant à voir émerger de nouvelles formes d’échanges et de monnaies, comme le bitcoin, au gré des évolutions technologiques et sociétales. En cela, Bitcoin et la blockchain constituent une étape supplémentaire dans l’évolution de l’histoire monétaire et des transactions.
  • Pourtant, aujourd’hui, le bitcoin est rarement utilisé comme une monnaie.C’est vrai. Certes Bitcoin s’inscrit dans la continuité de l’histoire monétaire, repose sur un nouveau consensus, une nouvelle construction collective ; comme c’est le cas pour le dollar depuis des dizaines d’années. Cependant, nous pensons qu’à date Bitcoin remplit imparfaitement les fonctions monétaires, de médium d’échange, de réserve de valeur et dans une moindre mesure d’unité de compte. Imparfaitement puisque la volatilité reste trop importante et l’acceptation trop limitée pour prétendre au même statut que le dollar ou l’euro.
  • Avec le Bitcoin, c’est la première fois dans l’Histoire que l’évolution des médias d’échange se traduit par une décentralisation absolue, ou presque. Rappelons pour les novices que le protocole Bitcoin — et d’autres — permettent de transférer des valeurs en pair-à-pair, c’est-à-dire sans l’intervention de tiers centralisé, donc complètement à côté du système monétaire, financier et bancaire actuel. Bitcoin s’est donc construit selon une gouvernance diamétralement opposée au système monétaire actuel, sans lien aux Etats ou aux banques centrales ; mais aussi sans entreprise.
  • Le paradoxe en question réside dans le fait que se libérer d’un pouvoir ou d’une autorité donné ne signifie pas pour autant échapper à toute forme de contrôle. Ainsi, Bitcoin et d’autres protocoles parviennent à trouver des moyens d’échapper aussi bien au contrôle des États de manière générale, qu’à celui de la banque centrale pour ce qui concerne l’application monétaire de cette technologie. Mieux encore, elle abolit l’idée même d’autorité entre agents, ce qui constitue la condition sine qua non de l’accomplissement de la liberté dans l’optique crypto-anarchiste où fut élaborée cette technologie.
  • C’est précisément parce que tout est traçable et transparent au sein de la chaîne, que se crée une double situation dont on peut douter qu’elle soit propice à une liberté authentique. D’une part, par la sécurisation de l’information, chacun devient aliéné à son passé transactionnel, la blockchain enchaînant au sens propre l’utilisateur — fût-il anonyme — aux opérations qu’il accompli. D’autre part, au sein du système disparaissent les notions de secret et d’opacité, qui semblent constituer des fondements tout aussi décisifs d’une liberté concrète comme la volonté de ne pas être soumis à une surveillance continue.
  • Il ne faut pas confondre la dissimulation, qui est une négation — je ne suis pas identifiable — et la liberté, qui est une affirmation — je suis maître de ma volonté et de mes actes de telle sorte qu’ils me soient imputables. Or, à moins de disposer d’une définition extrêmement pauvre de la liberté — ne pas être identifié –, il semble impossible de déduire d’un anonymat la preuve d’une liberté effective ; par ailleurs, le propre de la blockchain consiste justement à rendre impossible (ou du moins difficile) l’attribution de transactions à l’identité réelle d’un individu donné. La condition même par laquelle l’individu échappe au contrôle devient la raison pour laquelle sa liberté perd son sens puisque que rien ne peut lui être imputé et que rien ne s’apparente de près ou de loin à une maîtrise responsable de sa volonté et de ses actes.
  • Enfin, la soustraction à l’endroit d’une certaine forme de contrôle (autorité, État, banques) ne garantit en rien d’éviter l’activation d’une autre forme de contrôle, plus contraignante encore puisqu’accomplie au nom de la sacro-sainte transparence mais supposant un contrôle autrement plus poussé et aliénant que le contrôle traditionnel de la puissance publique.
Aurialie Jublin

Technologie : l'âge sombre | InternetActu.net - 0 views

  • Pire, la technologie s’est fait la complice de tous les défis auxquels nous sommes confrontés : à la fois d’un système économique hors de contrôle qui ne cesse d’élargir les inégalités, la polarisation politique comme le réchauffement climatique. Pour Bridle, la technologie n’est pas la solution à ces défis, elle est devenue le problème. Il nous faut la comprendre plus que jamais, dans sa complexité, ses interconnexions et ses interactions : mais cette compréhension fonctionnelle ne suffit pas, il faut en saisir le contexte, les conséquences, les limites, le langage et le métalangage.
  • Trop souvent, on nous propose de résoudre ce manque de compréhension de la technologie par un peu plus d’éducation ou son corollaire, par la formation d’un peu plus de programmeurs. Mais ces deux solutions se limitent bien souvent en une compréhension procédurale des systèmes. Et cette compréhension procédurale vise surtout à renforcer la « pensée computationnelle », c’est-à-dire la pensée des ingénieurs et des informaticiens qui n’est rien d’autre que le métalangage du solutionnisme technologique 
  • Les systèmes techniques sont devenus de plus en plus complexes. Trop critiques et interconnectés pour être compris, pensés ou conçus. Leur compréhension n’est disponible plus que pour quelques-uns et le problème est que ces quelques-uns sont les mêmes que ceux qui sont au sommet des structures de pouvoir. Pour James Bridle, il y a une relation causale entre la complexité des systèmes, leur opacité, et les violences et inégalités qu’ils propagent.
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  • Le cloud (l’informatique en nuage) n’est plus une métaphore du réseau, c’est l’incarnation de ce système global et surpuissant qu’aucun d’entre nous ne peut désormais attraper. Ce nuage est pourtant une bien mauvaise métaphore. Rien de ce qu’il recèle n’y est sans poids, rien n’y est amorphe ou invisible. Le cloud cache une infrastructure physique complexe faite de lignes téléphoniques, de fibre optique, de satellite, de vastes entrepôts d’ordinateurs, qui consomment d’énormes quantités d’énergie et qui influent sur de multiples juridictions. Le cloud est l’incarnation d’une nouvelle industrie.
  • De la sécurité nationale aux secrets industriels, il y a beaucoup de raisons à obscurcir ce que recouvre ce nuage. Mais ce qui s’en évapore est assurément notre propriété (dans les nuages, tout appartient à d’autres) et notre agentivité, c’est-à-dire notre capacité à faire.
  • Le réseau donne l’impression d’être à la fois l’idéal de progrès le plus abouti et l’idéal de base de notre culture tout en paraissant avoir émergé inconsciemment, poursuivant son but d’interconnexion sans fin pour lui-même et par lui-même… « Nous présumons que l’interconnexion est inhérente et inévitable. Le réseau semble être devenu le résultat du progrès, son accomplissement ultime », à l’image de machines qui accompliraient ainsi leurs propres désirs. Internet semble avoir accompli l’idéal des Lumières, l’idéal du progrès : celui que plus de connaissance et plus d’information conduit toujours à prendre de meilleures décisions.
  • Mais n’est-ce pas plutôt le contraire auquel nous assistons ? « Ce qui était censé éclairer le monde l’a obscurci. L’abondance d’information et la pluralité d’opinion accessible à tous n’ont pas produit un consensus cohérent, mais au contraire a déchiré la réalité en narrations simplistes, en théories fumeuses et en politique d’opinion. Contrairement au Moyen Âge, où l’âge sombre était lié à une perte de connaissance antique, l’âge sombre moderne est lié à une abondance de connaissance dont nous ne savons plus démêler collectivement l’apport. »
  • L’obscurité dont parle Bridle c’est notre incapacité à voir clairement ce qui est devant nous, avec capacité et justice. Pour Bridle pourtant, ce constat ne doit pas être lu comme une condamnation de la technologie. Au contraire. Pour relever l’âge sombre qui s’annonce, il nous faut nous engager plus avant dans la technologie, avec elle, mais avec une compréhension radicalement différente de ce qu’il est possible d’en faire, en retrouver un sens que la seule recherche d’efficacité nous a fait perdre. Tout comme le changement climatique, les effets de la technologie s’étendent sur le globe et affectent tous les aspects de nos vies. Mais comme le changement climatique, ses effets sont potentiellement catastrophiques et résultent de notre incapacité à comprendre les conséquences de nos propres inventions. Nous devons changer de manière de voir et penser le monde, nous invite Bridle, un peu facilement ou naïvement.
  • « En rapprochant la simulation de l’approximation, les grands prêtres de la pensée computationnelle pensent remplacer le monde par des modèles biaisés de lui-même ; et en le faisant, les modeleurs s’assurent du contrôle du monde. » James Bridle s’inscrit dans la continuité des constats de l’historien des sciences David Noble qui, dans Le progrès sans le peuple notamment, soulignait combien la pensée des ingénieurs avait contribué à donner du pouvoir aux puissants plutôt que favoriser l’équité ou la démocratie ; comme dans celle de Richard Sclove du Loka Institute, qui dans Choix technologiques, choix de société, soulignait combien les enjeux démocratiques restaient le parent pauvre de la question technologique.
  • La pensée computationnelle s’infiltre partout : elle devient notre culture. Elle nous conditionne à la fois parce qu’elle nous est illisible et à la fois parce que nous la percevons comme neutre émotionnellement et politiquement. Les réponses automatisées nous semblent plus dignes de confiance que celles qui ne le sont pas. Dans la pensée computationnelle, nous sommes victimes du biais d’automatisation : « nous avons plus confiance dans l’information automatisée que dans notre propre expérience, même si elle est en conflit avec ce qu’on observe ». Les conducteurs de voitures comme les pilotes d’avion ont plus tendance à croire leurs instruments que leur expérience, même si celle-ci n’est pas alignée.
  • Pour Bridle, l’informatique, en ce sens, est un piratage de notre capacité cognitive, de notre capacité attentionnelle, qui renvoie toute responsabilité sur la machine. « À mesure que la vie s’accélère, les machines ne cessent de prendre en main de plus en plus de tâches cognitives, renforçant par là leur autorité – sans regarder les conséquences ». « Nous nous accommodons de mieux en mieux et de plus en plus aux confortables raccourcis cognitifs que nous proposent nos machines. L’informatique remplace la pensée consciente. Nous pensons de plus en plus comme des machines, ou plutôt nous ne pensons plus du tout ! ».
  • « Ce qui est difficile à modéliser, à calculer, à quantifier, ce qui est incertain ou ambigu, est désormais exclu du futur possible. » L’informatique projette un futur qui ressemble au passé (« Les algorithmes ne prédisent pas le futur, ils codifient le passé », disait déjà Cathy O’Neil). La pensée computationnelle est paresseuse. Elle propose finalement des réponses faciles. Elle nous fait croire qu’il y a toujours des réponses.
  • les réseaux souffrent d’une gouvernance fragmentée, sans responsabilités claires, peu cartographiés et sous-financés ; des infrastructures en silos ; des investissements privés comme publics insuffisants et plus encore un manque de compréhension de la complexité de leur fonctionnement… expliquent leur fragilité intrinsèque et la difficulté de leur maintenance. Ajoutez à cela les impacts du changement climatique sur leur maintenance et leur évolution et vous comprendrez que les réseaux ne sont pas dimensionnés pour faire face au futur. Bref, non seulement l’informatique contribue largement au réchauffement climatique, mais elle risque d’en être l’une des principales victimes.
  • Mais les grands volumes de données ne produisent pas de la connaissance automatiquement. Dans la recherche pharmacologique par exemple, les dépenses et investissements n’ont jamais été aussi forts alors que les découvertes, elles, n’ont jamais produit aussi peu de nouveaux traitements. On appelle cela la loi d’Eroom : l’exact inverse de la loi de Moore. Le nombre de résultats de recherche chute et ces résultats sont de moins en moins dignes de confiance. Si les publications scientifiques n’ont jamais été aussi volumineuses (au détriment de leur qualité), les rétractions ont augmenté et le nombre de recherches ayant un impact significatif, elles, ont diminué proportionnellement. La science connaît une crise de réplicabilité majeure.
  • Plusieurs facteurs expliquent ce revirement de la loi du progrès. La première est que les choses les plus évidentes à découvrir ont été exploitées. La régulation est également devenue plus exigeante et la société moins tolérante aux risques. Mais le problème principal relève certainement des méthodes désormais employées. Historiquement, la découverte de médicament était le fait de petites équipes de chercheurs qui se concentrait intensément sur de petits groupes de molécules. Mais depuis 20 ans, ces processus ont été largement automatisés, sous la forme de ce qu’on appelle le HTS (High-throughput screening pour criblage à haut débit) qui consiste en des recherches automatisées de réactions potentielles via de vastes bibliothèques de composants. Le HTS a priorisé le volume sur la profondeur. Ce qui a marché dans d’autres industries a colonisé la recherche pharmaceutique : automatisation, systématisation et mesures… Certains commencent à douter de l’efficacité de ces méthodes et voudraient revenir à l’empirisme humain, au hasard, au bordel, au jeu… À nouveau, « la façon dont nous pensons le monde est façonnée par les outils à notre disposition ». Nos instruments déterminent ce qui peut être fait et donc, ce qui peut être pensé. À mesure que la science est de plus en plus technologisée, tous les domaines de la pensée humaine le sont à leur tour. Les vastes quantités de données ne nous aident qu’à voir les problèmes des vastes quantités de données.
  • Les bourses et places de marchés d’antan ont été remplacées par des entrepôts, des data centers, anonymes, dans des banlieues d’affaires impersonnelles. La dérégulation et la numérisation ont transformé en profondeur les marchés financiers. La vitesse des échanges s’est accélérée avec la technologie. Les transactions à haute fréquence (HFT, High-frequency trading) reposent sur la latence et la visibilité. La latence, c’est-à-dire la rapidité d’échange où des millions peuvent s’échanger en quelques millisecondes et la visibilité (sauf pour les non-initiés), c’est-à-dire le fait que les échanges sont visibles de tous les participants, instantanément. Les échanges reposent sur des algorithmes capables de calculer des variations éclair et de masquer les mouvements de fonds. Les échanges sont plus opaques que jamais : ils s’imposent sur des forums privés, les « dark pools » (en 2015, la SEC, l’organisme américain de réglementation et de contrôle des marchés financiers, estimait que les échanges privés représentaient 1/5e du total des échanges)… Les échanges financiers ont été rendus obscurs et plus inégaux que jamais, rappelle Bridle.
  • Pour Bridle, l’une des clefs qui expliquent que les inégalités se renforcent avec la technologie est intrinsèquement liée à l’opacité des systèmes. Comme les robots des entrepôts d’Amazon et ses employés commandés par des commandes vocales émanant de robots, nous sommes en train d’arranger le monde pour rendre les machines toujours plus efficaces, quitte à ce que le monde devienne incompréhensible et inadapté aux humains. Les travailleurs deviennent le carburant des algorithmes, utiles seulement pour leurs capacités à se déplacer et à suivre des ordres. Pour Bridle, les startups et les Gafam signent le retour des barons voleurs, ces tyrans industriels du XIXe siècle. La technologie est venue couvrir d’un voile d’opacité la prédation : l’avidité s’est habillée de la logique inhumaine des machines. Amazon ou Uber cachent derrière des pixels lumineux un système d’exploitation sans faille
  • Pour la sociologue Deborah Cowen (@debcowen), nous sommes entrés dans la tyrannie de la techne explique-t-elle dans The Deadly Life of Logistics (2014) : l’efficacité est devenu primordiale sur tous les autres objectifs, sur toutes les autres valeurs
  • Autre exemple avec How-Old.net un outil de reconnaissance faciale qui tente de prédire l’âge d’une personne, et qui a été utilisée pour deviner l’âge de migrants arrivants au Royaume-Uni. Microsoft, qui a développé cette application, s’est défendu et a dénoncé cette utilisation… comme les 2 chercheurs chinois. Ceux-ci expliquaient néanmoins dans leur défense que leur système était « sans préjugé » (sic). Comme souvent, on nous explique que la technologie, et plus encore l’apprentissage automatisé, est neutre. Mais « la technologie n’émerge pas de nulle part. Elle est toujours la réification de croyances et de désirs, notamment de ses créateurs. Leurs biais sont encodés dans les machines et les bases de données ou les images que nous prenons du monde. »
  • Pour Bridle, le problème n’est pas tant que les machines puissent réécrire la réalité, mais que la réalité, le passé comme le futur, ne puissent plus être correctement racontés. DeepDream de Google illustre parfaitement cela. L’enjeu n’est pas pour nous de comprendre ce qu’est l’image, mais de nous demander ce que le réseau de neurones veut y voir ?
  • Pour Bridle, nous devrions ajouter une 4e loi aux trois lois de la robotique d’Asimov. Les machines intelligentes devraient être capables de s’expliquer aux humains. Ce devrait être une loi première, car éthique. Mais le fait que ce garde-fou ait déjà été brisé laisse peu d’espoir quant au fait que les autres règles le soient à leur tour. « Nous allons devoir affronter un monde où nous ne comprendrons plus nos propres créations et le résultat d’une telle opacité sera toujours et inévitablement violent ».
  • Pour Bridle, l’alliance entre l’humain et la machine peut encore fonctionner, comme l’a montré Garry Kasparov avec les échecs avancés, consistant à ce qu’une IA et qu’un humain jouent ensemble plutôt qu’ils ne s’affrontent. C’est dans la perspective d’associer les talents des humains et des machines, d’associer leurs différences d’une manière coopérative plutôt que compétitive que nous parviendrons à réduire l’opacité computationnelle. La perspective que l’intelligence des machines nous dépasse dans nombre de disciplines est une perspective destructrice. Nous devons trouver la voie d’une éthique de la coopération avec les machines, plutôt qu’un affrontement.
  • Bridle s’en prend également longuement à la surveillance et notamment à la surveillance d’Etat pour souligner combien elle nous est masquée et continue à l’être, malgré les révélations d’Edward Snowden. Vous pouvez lire n’importe quel e-mail dans le monde d’une personne dont vous avez l’adresse. Vous pouvez regarder le trafic de tout site web. Vous pouvez suivre les mouvements de tout ordinateur portable à travers le monde. Pour Bridle, cela nous a montré qu’il n’y a pas de restriction possible à la capacité de surveillance du réseau. L’échelle et la taille de la surveillance a excédé ce que nous pensions comme étant techniquement possible.
  • En opposition au secret, nous demandons de la transparence, mais elle n’est peut-être pas le bon levier. La NSA et Wikileaks partagent la même vision du monde avec des finalités différentes, rappelle Bridle. Les deux pensent qu’il y a des secrets au coeur du monde qui, s’ils étaient connus, pourraient rendre le monde meilleur. Wikileaks veut la transparence pour tous. La NSA veut la transparence pour elle. Les deux fonctionnent sur une même vision du monde. Wikileaks ne voulait pas devenir le miroir de la NSA, mais voulait briser la machine de surveillance. En 2006, Assange a écrit « Conspiracy as Governance » (.pdf). Pour lui, tout système autoritaire repose sur des conspirations, car leur pouvoir repose sur le secret. Les leaks minent leur pouvoir, pas par ce qui fuite, mais parce que la peur et la paranoïa dégradent la capacité du système autoritaire à conspirer. Mais les fuites de données ne suffisent pas à remettre en cause ou à abattre l’autorité. Les révélations ne font pas bouger l’opinion, sinon, nous aurions réagi bien avant les révélations de Snowden. Tant que les organisations de surveillance ne changent pas de l’intérieur, ceux qui sont en dehors de ces organisations, comme les lanceurs d’alertes, n’ont pas de capacité d’action. Ils attendent que des fonctionnaires ou que la justice confirment ce qu’ils avancent.
  • Mais la lumière du calcul nous dépossède de pouvoir, car elle nous fait crouler sous l’information et nous donne un faux sens de la sécurité. C’est là encore une conséquence de la pensée computationnelle. « Notre vision est devenue universelle, mais notre capacité d’action, elle, s’est réduite plus que jamais. » A l’image du réchauffement climatique, à nouveau, « nous savons de plus en plus de choses sur le monde, mais nous sommes de moins en moins capable d’agir sur lui ». Au final, nous nous sentons plus démunis que jamais. Plutôt que de reconsidérer nos hypothèses, nous nous enfonçons dans la paranoïa et la désintégration sociale.
  • Le monde est devenu trop complexe pour des histoires simples. En fait, « la démultiplication de l’information ne produit pas plus de clarté, mais plus de confusion ». L’un des symptômes de la paranoïa consiste à croire que quelqu’un vous surveille. Mais cette croyance est désormais devenue raisonnable, s’amuse Bridle en évoquant la surveillance d’Etat comme la surveillance des services numériques. Nous sommes entièrement sous contrôle, tant et si bien qu’on peut se demander qui est paranoïaque désormais ?
  • « Les théories conspirationnistes sont le dernier ressort des sans pouvoirs, imaginant ce que serait que d’être puissant », avance Bridle. Pour le spécialiste de la postmodernité, Frederic Jameson, les théories conspirationnistes sont « la cartographie cognitive des plus démunis dans un âge postmoderne ». C’est la figure dégradée de la logique par ceux qui ont le moins de capital culturel, une tentative désespérée de se représenter un système qu’ils ne comprennent pas. Encerclé par l’évidence de la complexité, l’individu a recours à un récit simpliste pour tenter de regagner un peu de contrôle sur la situation. À mesure que la technologie augmente et accélère le monde, celui-ci devient plus complexe. Les théories conspirationnistes deviennent alors des réponses, étranges, intriquées et violentes, pour s’en accommoder.
  • Ainsi, si vous cherchez de l’information sur les vaccins, vous tomberez invariablement sur de l’information contre les vaccins. Si vous cherchez de l’information sur la rotondité de la terre, vous tomberez inexorablement sur ceux qui pensent qu’elle est plate. Ces opinions divergentes semblent devenir la majorité tant elles sont exprimées et répétées avec force. « Ce qui se passe quand vous désirez en savoir de plus en plus sur le monde entre en collision avec un système qui va continuer à assortir ses réponses à n’importe quelle question, sans résolution ». Vous trouverez toujours quelqu’un pour rejoindre vos points de vue. Et toujours un flux pour les valider. Voici l’âge de la radicalisation algorithmique (à l’image de ce que disait Zeynep Tufekci de YouTube). Les théories conspirationnistes sont devenues la narration dominante. Elles expliquent tout. Dans la zone grise des connaissances, tout prend un sens.
  • Les failles des algorithmes sont les dernières failles du capitalisme où certains s’infiltrent non pas pour le renverser, mais pour tenter de gratter un peu d’argent que les plus gros systèmes s’accaparent. Au final, des vidéos automatisées finissent par être vues par des enfants. Leurs personnages préférés y font n’importe quoi, parfois suggèrent des scènes de meurtre ou de viols. Ces effets de réseaux causent des problèmes réels. Les algorithmes de YouTube ont besoin d’exploitation pour produire leurs revenus. Derrière leurs aspects séduisants, ils encodent les pires aspects du marché, notamment l’avidité. « La capacité à exploiter l’autre est encodée dans les systèmes que nous construisons », pointe très justement James Bridle, puisque leur efficacité repose sur leur capacité à extraire de l’argent de nos comportements.
  • À défaut d’une solution, Google annonçait en avril que l’application YouTube Kids allait devenir « non-algorithmique »… À croire, comme le pointait très justement le chercheur Olivier Ertzscheid, que l’algorithimsation n’est pas une solution sans limites.
  • Pour Bridle, les humains sont dégradés des deux côtés de l’équation : à la fois dans l’exploitation qui est faite de leur attention et à la fois dans l’exploitation de leur travail. Ces nouvelles formes de violence sont inhérentes aux systèmes numériques et à leur motivation capitaliste. Le système favorise l’abus et ceux qui le produisent sont complices, accuse-t-il. L’architecture qu’ils ont construite pour extraire le maximum de revenus des vidéos en ligne a été hackée par d’autres systèmes pour abuser d’enfants à une échelle massive. Les propriétaires de ces plateformes ont une responsabilité forte dans l’exploitation qu’ils ont mise en place. « C’est profondément un âge sombre quand les structures qu’on a construites pour étendre la sphère de communications sont utilisées contre nous d’une manière systématique et automatique. »
  • Pour Bridle, les fausses nouvelles ne sont pas le produit de l’internet. Elles sont le produit de la cupidité et de la démocratisation de la propagande où tout a chacun peut devenir un propagandiste. Elles sont un amplificateur de la division qui existe déjà dans la société, comme les sites conspirationnistes amplifient la schizophrénie.
  • Mais ce qu’il y a de commun avec le Brexit, les élections américaines ou les profondeurs de YouTube, c’est que malgré tous les soupçons, il reste impossible de savoir qui fait ça, qu’elles sont leurs motivations, leurs intentions. On peut regarder sans fin ces flux vidéos, on peut parcourir sans fin les murs de mises à jour de statuts ou de tweets… cela ne permet pas de discerner clairement ce qui est généré algorithmiquement ou ce qui est construit délibérément et soigneusement pour générer des revenus publicitaires. On ne peut pas discerner clairement la fiction paranoïaque, l’action d’États, la propagande du spam… Ces confusions servent les manipulateurs quels qu’ils soient bien sûr, mais cela les dépasse aussi. C’est la manière dont le monde est. Personne ne semble réellement décider de son évolution… « Personne ne veut d’un âge sombre, mais nous le construisons quand même et nous allons devoir y vivre. »
  • Exploiter plus de données pour construire de meilleurs systèmes est une erreur. Cette méthode ne parviendra pas à prendre en compte la complexité humaine ni à la résoudre. Le développement de l’information n’a pas conduit à une meilleure compréhension du monde, mais au développement de points de vue alternatifs et concurrents. Nous devons changer nos façons de penser comme nous y invitait Lovecraft. Nous ne survivrons pas plus à l’information brute qu’à la bombe atomique. Le nouvel âge sombre est un lieu où le futur devient radicalement incertain et où le passé devient irrévocablement contesté. Mais c’est le présent dans lequel nous devons vivre et penser. Nous ne sommes pas sans pouvoir ni capacités. Mais pour cela nous devons nous défaire des promesses illusoires de la pensée computationnelle. Penser le monde autre, c’est ce à quoi nous invite James Bridle dans le nouvel âge sombre.
  • Reste à savoir si cet âge sombre des technologies est vraiment notre avenir. L’âge sombre du Moyen Âge n’a jamais vraiment existé ailleurs que dans les lacunes des historiens. On peut douter également de cette nouvelle obscurité ou regretter le titre faussement prophétique. Reste que la complexité et l’intrication du monde que décrit James Bridle, montrent combien il nous faut, plus que jamais, nous défaire justement d’une vision simple et manichéenne de la technologie.
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    "Ce New Dark Age porte un titre prophétique et apocalyptique. Un peu trop peut-être. C'est effectivement un livre très critique sur notre rapport à la technologie, très éloigné du rapport souvent curieux et amusé que Bridle portait aux technologies avec la nouvelle esthétique. En une dizaine de chapitres, Bridle explore les glitchs qui sont désormais devenus des schismes, des scissions, des ruptures… comme s'ils n'étaient plus aussi distrayants. Dans son livre, il montre combien les bugs se cristallisent en caractéristiques. Combien la complexité technique que nous avons construite s'entremêle pour produire des effets en réseau, complexes, profonds, intriqués que nous ne parvenons plus vraiment à démêler. Son constat principal consiste à dire que ces dysfonctionnements ne sont pas amenés à être corrigés. Ils sont au contraire intrinsèques à la nature même des technologies qui se déploient aujourd'hui. Contrairement à ce que nous annonçaient les pionniers et les prophètes des technologies, pour Bridle, la technologie n'annonce pas de nouvelles Lumières ou une Renaissance, mais, comme Jules Michelet parlait du Moyen Âge, un âge sombre, une ère d'obscurité pour ne pas dire d'obscurantisme. Ni les réseaux sociaux, ni l'intelligence artificielle, ni les systèmes techniques ne vont nous aider à faire monde commun. Au contraire."
Aurialie Jublin

Retour sur MyData2018 : quelle(s) approche(s) collective(s) des données perso... - 0 views

  • L’entrée en vigueur du RGPD a clairement été l’événement marquant de 2018 et beaucoup d’intervenants s’y sont référés. Le principe d’équité y est affirmé. Or il s’agit d’un principe qui recouvre une dimension collective : l’équité suppose un groupe, contrairement aux autres principes (transparence, légalité, limitation de but, rétention, intégrité et confidentialité, minimisation des données, précision). Toutefois le texte ne donne pas de définition de l’équité dans le contexte de la gestion des données personnelles a fait remarquer Jussi Leppälä, Privacy Officer (Global) chez Valmet. Finalement, les intervenants s’accordaient à dire que le RGPD est un texte axé sur les besoins individuels plutôt que collectifs. Il protège l’individu, mais ne porte pas de vision véritablement collective des données personnelles.
  • Sur cette question de l’équité, l’exemple d’openSCHUFA donné par Walter Palmetshofer (Open Knowledge Allemagne) est inspirant : une campagne de collecte de données a été faite auprès de milliers d’individus pour comprendre l’algorithme de credit-scoring (pointage de crédit) de SCHUFA, bureau de crédit privé allemand. Cela a permis à des individus de pouvoir demander, preuves à l’appui, à corriger des décisions prises par l’algorithme. De manière générale, le biais algorithmique est un enjeu sociétal important, surtout pour les groupes les plus fragiles dont les données personnelles sont plus exposées et davantage victimes de biais algorithmiques (à ce sujet, lire Internet Actu).
  • D’autres intervenants ont insisté sur la nécessité d’accompagner les entreprises vers plus de prises en compte de leur responsabilité sociale. Le modèle de gouvernance qui domine actuellement étant l’hégémonie d’acteurs économiques (GAFA, BATX) raconte Bruno Carballa Smichowski, de Chronos, le rééquilibrage des pouvoirs doit venir des Etats. Ces derniers disposent de données personnelles, mais peuvent également demander des comptes et pousser les acteurs qui utilisent les données à être plus ouverts et actifs : littératie, infrastructure, open innovation, construire la confiance et faire reculer la peur, ou encore impliquer les personnes concernées (Hetan Shah et Jeni Tennison), sont autant d’actions que les pouvoirs publics peuvent mettre en place.
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  • Depuis le lancement de MyData, la nécessité de développer les enjeux collectifs des données personnelles apparaît chaque année plus forte. En parallèle, les communs numériques apparaissent de plus en plus comme un modèle alternatif désirable face aux comportements abusifs des acteurs dominants. Les communs autorisent par nature une gestion transparente et au service de la communauté, car gérés par leurs membres.
  • Si sa remarque a donné naissance au track “OurData” en 2017 et en 2018,, le terme de “commun” était pourtant quasiment absent des discussions du track OurData, essentiellement tourné vers l’acteur public et la régulation. L’exemple d’OpenSCHUFA se rattache néanmoins au courant des communs en donnant un exemple concret.
  • L’idée derrière la coopérative de données qui s’intègrerait au modèle MyData/Self Data viserait plutôt à créer un commun : une association d’individus développant des outils et services (chat, moteur de recherche,…) leur permettant de gérer leurs données de A à Z. Il existe plusieurs coopératives de données de ce type : diglife.coop, schluss, open.coop,…
  • Laura James (doteveryone) a suggéré  cette session afin d’échanger avec les participants sur la faisabilité de créer une ou des coopératives “de masse”, appartenant à leurs membres et gérées par eux. L’objectif serait d’offrir aux gens de meilleurs services que les géants de la technologie et les entreprises de type Silicon Valley. Laura James constate que si le problème avec les géants numériques est leur modèle d’entreprise (capitalisme de surveillance) et le modèle de propriété (extraction de richesse au profit de quelques-uns), la “data coop” doit permettre d’offrir une technologie en laquelle nous pouvons avoir confiance – c’est-à-dire préservant notre vie privée, accessible, fiable, équitable, basée sur les sources ouvertes existantes, avec un meilleur support et une véritable durabilité.
  • Est-ce que le peu de succès de Digital Life Collective est dû à un manque d’intérêt de la part des consommateurs pour les questions liées aux données personnelles ? Ou bien est-ce que les enjeux ne sont pas encore bien compris par les gens ? Les porteurs de coopératives présents à la session échangent sur plusieurs éléments de réponse. D’abord, il n’y a pas une absence d’intérêt pour les questions de privacy mais une perception et un traitement différent selon les personnes (par les « millenials » par exemple). Ensuite, les consommateurs veulent-ils avoir à supporter la responsabilité qui va avec la reprise du contrôle sur leurs données ? Rien n’est moins sûr : comme les services gratuits d’aujourd’hui, cela doit être simple. Mais le contrôle implique nécessairement des responsabilités… Les consommateurs ont aussi besoin de services pratiques. Il faut travailler l’expérience utilisateur. Enfin, il faut une littératie des données pour créer un véritable intérêt et dissiper la peur et les malentendus autour de ce sujet.
  • Comment avoir une véritable gouvernance partagée tout en ayant une organisation suffisamment grande ? A peine 10 personnes sont vraiment actives au sein de Digital Life Collective. Schluss recherche une manière de faire participer davantage les membres. C’est un problème récurrent pour les coopératives, et toute organisation dont la gestion s’appuie sur l’ensemble de ses membres. Toutefois, l’un des participants soulignait que même si seul 1% s’implique dans la prise de décisions, tous reçoivent les bénéfices de la coopérative ! Ca n’est pas la gestion parfaitement partagée et idéale, mais cela fonctionne quand même. Avant de renoncer au modèle participatif, quelques modèles de gouvernance pourraient être expérimentés pour faciliter les prises de décision participatives au sein de la coopérative : les jurys citoyens, sociocracy 3.0 (utilisé par certaines entreprises télécom en Finlande), …
  • Dans les sessions de la thématique “OurData”, nous avons eu le plaisir d’entendre à chaque fois (ou presque) que la propriété appliquée aux données personnelles n’a aucun sens. Bien que ce track, plus qu’aucun autre, soit prédisposé à un tel constat,depuis quelques années, la position de la communauté MyData s’est éclaircie à ce sujet et on voit de moins en moins de personnes prôner ce modèle de propriété et de revente individuelle de ses données..
  • En découle un modèle collectif basé non pas sur des titres de propriété individuels mais sur des droits d’usage. Le RGPD en crée quelques-uns mais d’autres questions restent en suspens, comme le droit à la mémoire collective, notamment pour les catégories les plus défavorisées, ou encore l’équité, qui s’oppose à une régulation par les lois du marché.
  • La plupart des intervenants postulent que c’est l’acteur public qui doit agir : en créant de nouveaux droits associés aux données personnelles, en accompagnant les acteurs privés à fournir des solutions plus éthiques et transparentes, en s’engageant pour une culture et une littératie de la donnée pour tous, en actant juridiquement que les données personnelles sont le résultat d’un processus collectif qui appartient à la société qui l’a co-généré et qu’il ne peut y avoir de propriété associée (en France la CNIL est très claire sur ce dernier point, nous avons besoin d’une voie aussi claire au niveau européen !), en promouvant leur valeur sociale, et non commerciale, et enfin qu’il fasse que le fruit de ce travail doit servir à répondre à des problématiques collectives telles que la santé, l’éducation, la culture, la protection de l’environnement, …
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    "LE CONSTAT : LA GESTION ACTUELLE DES DONNÉES PERSONNELLES S'INTÉRESSE PEU AU COLLECTIF MyData s'intéresse à toutes les dimensions que recouvre le contrôle des données personnelles : si la privacy occupe souvent le devant de la scène, MyData explore également la transparence des organisations et des technologies, l'équité et la dimension collective des données personnelles."
Aurialie Jublin

CFDT - Travailleurs des plateformes : beaucoup de bruit pour rien ? - 0 views

  • Devant la cour d’appel, son contrat, dénommé « contrat de prestations de services », a été passé au peigne fin. Il en est ressorti que, si le livreur pouvait choisir ses plages horaires (« shifts ») pour effectuer des livraisons, il ne pouvait, sans pénalité, se désengager moins de 72 heures avant leur commencement. Qui plus est, la société Take eat easy se réservait le pouvoir de résiliation du contrat dans certains cas. Aussi, la société avait-elle édicté un « petit guide du coursier », instaurant un système de bonus-malus, les malus étant plus couramment appelés strike. 3 strikes en 1 mois conduisait à une convocation à un entretien avec la société sur les motivations du coursier et 4 strikes à la rupture des relations contractuelles. A la suite du rejet de ses prétentions par le conseil de prud’hommes de Paris, le livreur a interjeté appel. Par une décision du 20 avril 2017, la cour d’appel de Paris a refusé de reconnaître l’existence d’un contrat de travail. Selon les juges du fond, bien que le système de bonus/malus mis en place évoque un pouvoir de sanction, les pénalités sanctionnent des manquements à des obligations contractuelles, ce qui ne caractérise pas un pouvoir de sanction de type salarial. De plus, la cour relève que ces stipulations ne remettent pas en cause la liberté du coursier de choisir ses horaires, le moment de ses congés, tout comme sa durée de travail. Les juges du fond en déduisent que la société Take eat easy « ne détermine pas unilatéralement les conditions d’exécution du travail ».
  • La cour relève également que le livreur n’est lié par aucune clause d’exclusivité. Régisseur dans un petit théâtre parisien, celui-ci exerce même une seconde activité professionnelle. Aux yeux des juges d’appel, « cette liberté totale de travailler ou non (…) est exclusive d’une relation salariale ».
  • Dans sa décision très attendue, la Haute juridiction contredit la solution retenue en appel. La Cour de cassation considère que le livreur était bien lié à la plateforme par un contrat de travail. A cette fin, elle applique les principes classiques en matière de reconnaissance de la qualité de salarié.
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  • Selon la Cour, le système de la géolocalisation du livreur permettant son suivi en temps réel, ainsi que le système de sanctions auraient dû conduire les juges du fond à reconnaitre l’existence d’un pouvoir de direction et de contrôle et celle d’un pouvoir de sanction. Toutes choses caractérisant l’existence un contrat de travail.
  • En tout cas, les décisions semblaient autant se fonder sur le degré d’autonomie du travailleur que sur les principes classiques de qualification d’un contrat de travail, qu’elles rappelaient malgré tout. Manière sans doute de prendre en compte la nouveauté de ces situations… La Cour de cassation ne l’entend pas ainsi. Pour elle, dès lors que les indices classiques de l’existence d’un lien de subordination sont présents, l’autonomie (réelle ou supposée selon les cas) des travailleurs du numérique n’est pas déterminante. Ce qui compte c’est l’existence, ou non, d’un pouvoir de direction et de contrôle, sur lequel s’appuie le pouvoir de sanction.
  • En tout cas, il n’est sans doute pas anodin que, dans la note explicative de l’arrêt, la Haute juridiction indique que les textes actuellement existants concernant les travailleurs des plateformes (pas applicables en l’espèce) ne comportent aucune réponse à la question. La Cour de cassation prend ainsi explicitement position pour dire que la loi Travail (9) ne pose pas de présomption d’indépendance vis-à-vis de ces travailleurs, mais seulement l’esquisse d’une responsabilité sociale des plateformes.
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    "Grande première : la Cour cassation vient d'analyser la relation liant un livreur à une plateforme ! Appliquant des principes très classiques à cette situation pourtant spécifique, la Haute juridiction a considéré que le livreur était bien lié à la plateforme par un contrat de travail. Selon la Cour de cassation, la plateforme disposait d'un pouvoir de direction, de contrôle et de sanction sur le livreur. Cass.soc.28.11.18, n°17-20079."
Aurialie Jublin

affordance.info: La libellule et la muraille (Google en Chine) - 0 views

  • Nous sommes à un moment de l'histoire des technologies de l'information et du numérique qui est assez comparable à l'état du monde en 1949 c'est à dire au moment où l'autre superpuissance de l'époque (l'union soviétique) se dota également de la bombe nucléaire (voir notamment ici ou là). Ce que je veux dire par là c'est que désormais, la totalité des plateformes existantes "à l'Ouest" dispose d'équivalents "à l'Est". Et le rapport au nucléaire n'est pas seulement analogique ou symbolique comme je l'écrivais par ici :  "Le numérique est une technologie littéralement nucléaire. Une technologie de noyau. Au "cœur" fissible d’un éventail de possibles aussi prometteurs qu’angoissants et pour certains, incontrôlables."   L'analogie est également (géo)politique. Toutes les grandes plateformes vont devoir faire le choix politique de savoir dans quelle mesure elles acceptent de se censurer et donc de collaborer avec des régimes autoritaires pour conquérir un marché. Et à l'échelle des enjeux que représentent à la fois les audiences qu'elles touchent déjà et celles qu'elles visent à conquérir, chacun de ces choix est un peu plus qu'un simple choix économique ou même moral.   
  • La vraie nouveauté c'est que ce projet à suscité la colère d'une partie des salariés de Google, qui à l'image de la victoire - je pense temporaire - qu'ils avaient remporté pour obliger leur employeur à se retirer du projet militaire Maven, espèrent cette fois faire suffisamment de bruit pour que ce projet de moteur censuré n'aille pas à son terme.  La crise éthique de certains anciens cadres des GAFA qui agissent comme autant de "repentis" pour les technologies qu'ils ont contribué à créer n'est plus simplement externe mais elle s'étend désormais à l'interne et touche aussi bien Google que Facebook, Microsoft, Amazon (à propos d'un programme de reconnaissance faciale) ou Twitter (à propos du refus de Jack Dorsey de fermer le compte d'un leader de l'Alt-right complotiste). 
  • S'agissant du contrôle linguistique il opère pour l'instant uniquement au travers des dispositifs et des plateformes agréées par le gouvernement chinois ou opérant sous son autorité directe. C'est le cas par exemple du moteur de recherche Baïdu. Comme d'autres, la Chine n'échappe pas à la multiplication des terminaux de connexion. Là où il y a quelques années il suffisait de surveiller l'ordinateur familial pour capter l'ensemble des pratiques connectées de 5 ou 6 personnes, il faut aujourd'hui étendre et démultiplier les moyens de surveillance sur chaque Smartphone ou tablette. Après la surveillance "de masse" c'est la surveillance "de chacun" qui prime. D'où d'ailleurs, le renforcement du contrôle "social" et du micro-ciblage comportemental qui devient le plus petit dénominateur commun efficient dans le cadre d'une volonté politique de contrôle de la population comme dans le cadre d'une volonté marketing d'expansion commerciale. Les deux aspects finissant d'ailleurs par se rejoindre, ce qui n'est pas le moindre des problèmes que nous avons aujourd'hui à résoudre, car pour citer encore Zeynep Tufekci :  "Nous créons une dystopie simplement pour pousser les gens à cliquer sur des publicités". Il me semble que nous sommes aujourd'hui à la phase d'après. Celle où les gens ont cliqué sur suffisamment de publicités et ont, ce faisant, accepté suffisamment de technologies de traçage actif ou passif pour que les conditions d'existence d'une forme de pouvoir autoritaire soient réunies et surtout pour qu'elle soient en passe d'être acceptées comme naturelles ou, pire, comme légitimes. 
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  • La question essentielle se déplace donc : il ne s'agit plus de savoir si nous acceptons ou si nous refusons ce traçage publicitaire (débat permis et en partie résolu par le RGPD) ; il s'agit de savoir si nous acceptons ou si nous refusons cette forme de néo-fascisme documentaire propre au totalitarisme littéral des plateformes et le cadre économico-politique qui est sa condition d'existence première. Les "repentis" de la Silicon Valley l'ont dénoncé de l'extérieur. Désormais les employés de ces firmes tentent de s'y opposer de l'intérieur. Il reste aux citoyens, c'est à dire à nous-mêmes, à terminer le boulot. Et ce ne sera pas facile. Car il nous faut retrouver l'envie de le faire. Or ...
  • Le même article - à lire dans la continuité des leçons que nous propose Zeynep Tufekci - rappelle qu'à rebours du postulat d'une inéluctable émancipation dont serait porteur le numérique et ses plateformes pour des populations sous le joug de régimes autoritaires, c'est l'inverse qui est en train de se produire : c'est le modèle chinois d'un internet censuré qui est en train de s'exporter dès aujourd'hui au Vietnam, en Tanzanie ou en Ethiopie, mais également sous un autre aspect en Australie où le réveil est déjà douloureux, et probablement demain dans l'ensemble de ces pays "émergents" et politiquement instables ou non-démocratiques, les mêmes que visent également les occidentaux GAFA pour aller y puiser leur prochain milliard d'utilisateurs. Et cette guerre là n'est pas que commerciale. Elle est avant tout culturelle. Et d'un cynisme est sans égal. Car lorsque toutes les ressources naturelles auront été épuisées, lorsque le dernier gisement du dernier minerai aura été extrait et raffiné, il restera encore à tous ces états la possibilité de vendre le visage de leurs citoyens. Ils n'ont d'ailleurs pas attendu.
  • Les intérêts des GAFA et des gouvernements disons, "autoritaires", sont donc aujourd'hui peu ou prou les mêmes. Ils cherchent à exporter un modèle d'affaire qui est le prétexte à une forme renouvelée de Soft Power qui fait du risque de dystopie et de la mise en oeuvre de son architecture de surveillance un simple dégât collatéral voire un biais nécessaire. Et leurs stratégies sont également semblables par bien des aspects : là encore elles visent une anecdotisation, une discrétisation des régimes de surveillance qui leur permettent de perpétuer et de légitimer leur modèle d'affaire. Quand aux questions d'éthique et aux scrupules, là encore ... on apprenait récemment que pour que Google cesse réellement de nous géolocaliser via notre smartphone, il ne suffisait pas simplement de lui dire de cesser de nous géolocaliser.
  • l'hystérisation récente autour du "fichage" supposé de milliers de Twittos en est un symptôme qui me semble aussi explicite que malheureux, et rappelle à quel point la question des "sans papiers" ou des furtifs échappant à l'hyper-surveillance des plateformes et des états est aujourd'hui plus que jamais politiquement centrale.
  • Souvenons-nous que le démantèlement ou la nationalisation desdites plateformes ont d'abord prêté à sourire avant de finalement être envisagées même si cela ne fut que d'un point de vue purement théorique.  Comme le rappelle encore Zeynep Tufekci :  "Pour comprendre pleinement ce qui se passe, nous avons aussi besoin d'étudier comment les dynamiques des sociétés humaines, la connectivité ubiquitaire, et le modèle d'affaire des géants du numérique se combinent pour créer des environnements dans lesquels la désinformation prospère et où même une information authentique et vérifiée peut nous paralyser et nous rendre confus plutôt que de nous informer et de nous éclairer."
  • Croire que les états n'ont pas à se mêler de la stratégie d'entreprises comme Google, Facebook ou Amazon au motif que nous ne serions, justement, pas en Chine ou dans un pays communiste est aujourd'hui le triple aveu d'un dépassement, d'une impuissance et d'une incapacité à penser ce qui se joue réellement à l'échelle politique.  Et en même temps ... imaginer que des états, que nos états actuels, gouvernés par des bouffons narcissiques de la finance ou par des clowns égocentriques ivres de leur nationalisme, imaginer que ces états puissent aujourd'hui se mêler du projet politique de ces mêmes firmes n'apparaît pas davantage comme une solution souhaitable. 
  • Le drame est que nous n'avons plus confiance ni dans les murailles ni dans les libellules. Et que cette érosion totale de la confiance à l'égard du politique et de la technique (numérique) s'ajoute à l'incapacité du premier à penser la seconde alors même que les infrastructures techniques du numérique n'ont de sens que si elles servent un projet politique. 
  • S'agissant du contrôle de la sphère sociale, on se réfèrera à la littérature pléthorique sur le "Social Credit Score" qui permet d'accorder à certains des droits refusés à d'autres en fonction de comportements sociaux mesurés et scrutés en permanence par le gouvernement (voir notamment sur Wired ou dans Wikipedia). 
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    "Au coeur de l'été. Une libellule. Et une muraille. "Libellule" (en anglais "Dragonfly") c'est le nom de code du projet de Google pour retourner implanter une version censurée de son moteur de recherche en Chine d'après les révélations de The Intercept. En Chine, d'où la "muraille" du titre de ce billet. "
Aurialie Jublin

Livre blanc PrivacyTech (pdf) - Une nouvelle gouvernance pour les données du ... - 0 views

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    Une économie digitale performante et éthique nécessite une libre circulation des données personnelles sous le contrôle des individus. Le RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données), lancé le 25 mai 2018, est un pas en avant majeur vers une nouvelle économie centrée sur l'individu grâce : au nouveau droit à la portabilité (Article 20) qui encourage la circulation des données, à une série de mesures et principes visant à augmenter la protection des individus comme le consentement spécifique et informé et le privacy by design. Le RGPD s'inscrit dans la stratégie de Marché Unique du Digital (Digital Single Market) de l'Union Européenne et a pour but de créer les conditions pour une économie sans barrières qui bénéficierait autant aux individus et aux entreprises qu'à la société dans son ensemble. Presque un an après le lancement du RGPD, nous observons un paysage prometteur d'organisations qui commencent à s'adapter au nouveau règlement, autant en Europe que dans le reste du monde. Mais il reste encore beaucoup à faire, particulièrement en ce qui concerne la mise en œuvre du contrôle des données par l'individu et de la portabilité. La tâche est éminemment complexe et requiert une coordination internationale, multisectorielle et multi-expertises. Pour réussir nous avons définitivement besoin d'une nouvelle approche ambitieuse qui pourrait partir de l'Europe pour s'étendre à l'international. Dans un tel contexte, nous proposons d'engager un échange constructif entre tous les acteurs de la donnée personnelle (entreprises, administrations, académies, associations) qui voudraient joindre leurs efforts au sein d'une nouvelle forme d'organisation dont le but serait de construire, harmoniser et proposer des standards technologiques, terminologies et bonnes pratiques pour la circulation et la protection des données personnelles, ainsi qu'une gouvernance adaptée. Les grandes pro
Aurialie Jublin

Les musulmans chinois, en première ligne de la surveillance - 1 views

  • La population musulmane de la région est soumise à de nombreuses technologies de contrôle afin de mesurer le degré de croyance et de pratique religieuse des individus, notamment par le biais du big data et de la reconnaissance faciale.
  • Le quotidien de la minorité religieuse est ainsi fait de caméras statiques et de drones-colombes intelligents, ou d’agents officiels et secrets susceptibles de fouiller tout individu plusieurs fois par jours. Des fouilles corporelles ou numériquse,  soit directement par le biais du smartphone ou via les traces numériques semées sur le très surveillé réseau social WeChat.
  • En cette période de hajj, le pélerinage à La Mecque que tous les musulmans en capacité de le faire se doivent d'effectuer une fois dans sa vie, cette surveillance étouffante se poursuit pour les ressortissants chinois. Accompagnés durant tout le pèlerinage par un guide de l’Association Islamique Chinoise, dirigée par l’Etat, les pélerins sont également porteurs de « cartes intelligentes » nouées autour de leur cou et enregistrant leurs données de géolocalisation ainsi que leurs conversations.
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  • Maya Wang a signé, fin février, un rapport sur le « police cloud », un programme de police prédictive fondé sur l'analyse de données volumineuses, et déployé au Xinjiang. Il signale les personnes qui pourraient être des menaces, et celles ci peuvent être envoyées dans les « centres d'éducation politique ». « Pour la première fois, écrivait elle, nous sommes en mesure de démontrer que le recours au big data par les services de renseignements du gouvernement chinois non seulement viole de manière flagrante le droit à la vie privée, mais permet également aux autorités de détenir arbitrairement des personnes.»  
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    "Le nationalisme religieux est dans la ligne de mire du Parti Communiste chinois. Le gouvernement cible particulièrement les minorités musulmanes du Xinjiang concentrées dans une région située à l'opposé des capitales économiques et politiques chinoises. Comme le souligne un article de The Atlantic, la région fait donc office de zone de test à grande échelle pour les technologies de contrôle dernière génération et les programmes de propagande au sein de camps de rééducation."
Aurialie Jublin

De l'imbrication algorithmique | InternetActu.net - 0 views

  • Pour la programmeuse et essayiste Ellen Ullman, le problème est que la programmation est de plus en plus éloignée de la compréhension humaine du fait de l’intrication des programmes, algorithmes et données. Les gens pensent souvent que les algorithmes peuvent être modifiés, mais le plus souvent, ils s’exécutent et évoluent par eux-mêmes (cf. notre dossier, réinventer la programmation). Leurs concepteurs ne les contrôlent pas vraiment et ce d’autant plus qu’ils font appellent à des bases de données, à des bibliothèques de programmes distants, à d’autres algorithmes qui évoluent également.
  • Mais désormais, les algorithmes désignent des systèmes logiciels de prise de décision complexes, avec un nombre de règles et de critères volumineux, souvent interreliés et interdépendants. Or, ils nous ont été toujours présentés comme des promesses d’objectivité, d’où le fait qu’ils se soient étendus à nombre de décisions de la vie courante : octroi de prêts, de prestations, de places… Pourtant, ces décisions ne sont pas sans biais, du fait de la manière même dont ces relations sont conçues par les ingénieurs.
  • Le problème, c’est que quand l’algorithme apprend, nous ne savons plus quels sont les règles et les paramètres qu’il utilise puisqu’il les transforme. Ces algorithmes-là ne sont plus prévisibles et peuvent se mettre à produire des résultats erratiques. Pour Smith ce sont des « algorithmes Frankenstein », des machines qui créent leurs propres règles, comme ceux qui dominent désormais les marchés financiers via les transactions à haute fréquence. Pour Neil Johnson, physicien de la complexité à l’université George Washington, Facebook peut ainsi avoir des algorithmes simples pour reconnaître un visage dans une photo… Mais que se passe-t-il quand des milliers d’algorithmes travaillent ensemble sur des milliards de profils ? « Vous ne pouvez pas prédire le comportement global appris à partir de règles microscopiques ».
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  • Pour la mathématicienne Cathy O’Neil (@mathbabedotorg), dans l’environnement algorithmique complexe actuel, il est difficile de définir les responsabilités des différents segments de codes imbriqués les uns aux autres. Les Flash Crash, ces krachs financiers éclair, n’ont pas lieu que sur les marchés financiers. La tarification algorithmique d’Amazon s’emballe aussi parfois en faisant grimper le prix de livres à des hauteurs folles. Or, comprendre où se situe la responsabilité de ces emballements n’est pas si simple. « Comme dans la finance, le déni est intégré au système ».
  • Éviter les conflits de code sur des millions de lignes de code alimentés par des flux d’information constants est extrêmement difficile. Pour l’historien des sciences George Dyson, le problème est que nous construisons des systèmes qui vont au-delà de nos moyens intellectuels pour les contrôler. Or, nous pensons que si un système est déterministe (c’est-à-dire qu’il agit selon des règles fixes), alors il est prévisible et que s’il est prévisible alors il peut être contrôlé. Mais ces deux hypothèses sont fausses, estime Dyson. « La loi d’Ashby dit qu’un système de contrôle doit être aussi complexe que le système qu’il contrôle ». Mais cela se révèle difficile. Nous ne savons pas tester cette complexité de manière exhaustive.
  • Une étude sur les attaques par drones au Pakistan entre 2003 et 2013 a ainsi montré que 2 % des personnes tuées par drones étaient des cibles présentant une menace. 20 % étaient considérés comme des non-combattants… Et 75 % étaient des cibles… « non identifiés ». Pour elle, nous sommes face à une technologie d’identification très grossière. Dans ce contexte, la perspective du développement d’armes autonomes laisse plus que perplexe. Pour Lilly Irani (@gleemie) de l’université de Californie, les choix des concepteurs d’algorithmes nous sont trop souvent présentés comme objectifs quand ils cachent des enjeux politiques.
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    "On se souvient de la mort d'Elaine Herzberg, première humaine tuée par une voiture autonome en mars 2018 (voir l'enquête qu'en dressait l'écrivain Thierry Crouzet). Pour le Guardian, le journaliste Andrew Smith (@wiresmith) revient sur les hésitations de l'algorithme de la voiture à reconnaître ce qu'il se passait."
Aurialie Jublin

Learning analytics et université : quels risques pour la vie privée des étudi... - 0 views

  • Un professeur du Wisconsin soulignait à juste titre que « quand des personnes défendent des budgets, elles doivent ensuite prouver que les crédits obtenus ont été utilisés intelligemment. Et un des moyens d’y parvenir est de s’appuyer sur les données d’utilisation. »
  • Par ailleurs, cette surveillance est parfois réalisée à l’insu des étudiants qui ne mesurent pas que l’accès à telle ressource électronique, le temps passé sur tel article ou le téléchargement d’un livre électronique est consciencieusement collecté. Par conséquent, si l’étudiant n’a pas connaissance de ces techniques d’analyse d’apprentissage, il n’a pas la possibilité d’exercer son opposition à ce traitement de données. En outre, l’analyse d’apprentissage suppose, comme pour tout traitement de données, une sécurisation des données collectées qui pourraient être utilisées à des fins qui ne correspondent pas aux finalités initiales du traitement. Ou bien elles pourraient être utilisées par un prestataire sur lequel l’établissement n’a aucun contrôle.
  • Dans ce contexte, Briney participe à Data Doubles un projet financé par l’Institue Museum and Library Services qui consiste à mesurer l’impact sur les étudiants de l’utilisation de leurs données par les universités et les bibliothèques. Ce serait intéressant de construire un projet similaire en France.
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  • Et bien évidemment plus on recueille de données, plus le risque de ré-identification est fort. La responsable de la vie privée de l’Université de Berkley a produit une grille de questions qu’il convient de se poser afin de réduire les risques : Degré de transparence et de prédictabilité : dans quelle mesure les personnes sont-elles informées sur l’objet de la collecte de données et l’utilisation qui en sera faite ? Degré d’anonymité et de choix : dans quelle mesure les données sont-elles rendues anonymes, ou la personne a-t-elle le choix de participer ? Degré d’accès, de propriété et de contrôle : quel est le niveau d’accès et de propriété des données pour les individus, les institutions, les vendeurs de prestations et le public ? Responsabilité en matière d’utilisation éthique, de gérance et de gouvernance : quels principes éthiques et quelles mesures de responsabilisation les entités qui manipulent les données des étudiant·e·s démontrent-elles ? Quels sont les standards de sécurité et techniques mis en oeuvre ?
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    "Le développement du big data traverse l'ensemble des secteurs de notre société y compris les universités. En effet, le milieu universitaire est également confronté à une production exponentielle de données réalisée dans le cadre de la recherche, c'est évident, mais aussi par les étudiants. Un article de l'Université de l'Arizona publié en début d'année rappelait combien les étudiants étaient scrutés notamment à travers l'utilisation de leur carte étudiante. L'objectif de l'université était de pouvoir prédire quels sont les étudiants qui abandonneront leurs études en cours d'année ou de cursus. Qui dit étudiant, dit aussi bibliothèque universitaire. Les BU pourraient être tentées de céder « à la mesure, la collecte, l'analyse et la présentation de rapports basés sur des données des apprenants en contexte d'apprentissage » (source), autrement dit aux méthodes de Learning Analytics."
Aurialie Jublin

Le Bitcoin va-t-il détruire la planète ? Contre point - LinuxFr.org - 0 views

  • « Si le Bitcoin consomme autant d’électricité que le Maroc, c’est une catastrophe, non ? » Actuellement le Bitcoin consommerait autant d’électricité que le Maroc. En fait, si on ne peut pas parler de catastrophe écologique c’est tout simplement parce que ce mot est plutôt employé pour une pollution flagrante (genre marée noire ou autre pollution chimique). Mais le fait est que le bitcoin consomme tous les jours et tous les jours un peu plus, la facture énergétique s’allonge et s'accroît ; c’est comme fumer : ça détruit un peu tous les jours les poumons et on ne parle de catastrophe que lorsque le cancer est là. Le Bitcoin seul ne crée pas le réchauffement climatique, mais il fait partie des nombreux systèmes qui tendent à l’aggraver. Donc : Si le Bitcoin consomme autant d’électricité que le Maroc, ce n’est pas une catastrophe mais ça n’est clairement pas bon du tout. Pour simplifier je vais diviser les erreurs de raisonnement en quatre parties : La fausse simplification consommation continue et gaspillée n’équivaut pas à pollution On ne compare que ce qui est comparable Oui, l’énergie du Bitcoin est gaspillée Les 2 phases d’optimisation en ingénierie
  • « …parfois l’électricité est là et inutilisée. C’est le cas des panneaux solaires, des barrages hydro-électriques ou des centrales nucléaires qui produisent de l’électricité, quoi qu’il arrive. On ne peut pas faire ON/OFF. Et l’électricité est pour le moment difficilement transportable. » 2 divisions par 0 et un verre de vin : Une plutôt évidente : “les panneaux solaires qui produisent de l’électricité quoi qu’il arrive” … sauf quand il fait nuit, quand la météo n’est pas clémente ou quand ils sont sales. L’autre division par 0 : “l’électricité est pour le moment difficilement transportable”. Difficilement par rapport à quoi ? Car en fait c’est sûrement la source d’énergie la plus transportable qui soit. D’ailleurs les pays européens sont interconnectés entre eux et s’échangent de l’électricité (bien plus rapidement qu’une transaction Bitcoin
  • Et même s’il est possible actuellement de perdre de l’énergie verte (en 2017 la Californie a perdu 300 000 MW faute d’utilisation). Cela démontre juste l’immaturité des réseaux électriques intelligents (smart grid).
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  • “Les comparaisons que j’ai vues sont toutes plus absurdes les unes que les autres”, celle-ci en est un parfait exemple. Reprenons: qu’est ce que Bitcoin : Un système d’échange de valeurs. Ok, donc utiliser Bitcoin c’est comme payer avec sa carte bleue : le système a le même but. Donc ici, on essaye de nous faire avaler que 30 millions de personnes qui ne font que payer régulièrement avec leur carte bleue c’est pareil que 33 millions qui, en plus eux aussi, d’utiliser une carte bleue de temps en temps, se déplacent, s’éclairent, utilisent leurs ordinateurs, leurs machines, rechargent leurs téléphones, ont une climatisation, font fonctionner leurs entreprises … etc, bref 33 millions de personnes qui vivent. Non ce n’est pas du tout comparable : le fait que 30 millions d’utilisateurs de Bitcoin consomment autant que 33 millions de marocains démontre l’inefficacité énergétique extrême du Bitcoin.
  • « Surprise, le Bitcoin consomme à peine plus que la production des pièces de monnaies et des billets de banque ! Or, rappelons que les pièces et billets ne représentent que 8% de la masse monétaire totale et plus spécifiquement 6,2% pour la zone euro. » Effectivement je suis surpris ! Car je n’ai pas du tout les mêmes chiffres pour la production de monnaie. Mais j’ai l’impression que Ploum a intégré l’extraction de l’or dans le coût de production de monnaie ce qui est faux depuis de nombreuses années (j’y reviens juste après) Pour le coût de la monnaie fiduciaire je vais citer Emmanuelle Assouan, de la Banque de France :« le coût de fabrication d'un billet se situe entre 5 et 10 centimes d'euro. Une validation d'une transaction bitcoin c'est 215 kilowatts-heure… » 6.6. « Or, outre la consommation énergétique, l’extraction de l’or est extrêmement contaminante (notamment en termes de métaux lourds comme le mercure). » Donc l’excuse c’est “lui il pollue plus que moi, donc je peux polluer aussi”. C’est la défense Chewbacca !
  • 6.10. « Sans compter que nous n’en sommes qu’au début ! Bitcoin a le potentiel pour devenir une véritable plateforme décentralisée qui pourrait remplacer complètement le web tel que nous le connaissons et modifier nos interactions sociales et politiques : votes, communications, échanges sans possibilité de contrôle d’une autorité centralisée. » L’inefficience de Bitcoin a une conséquence lourde en plus de polluer : il ne scale pas (c’est à dire : très mauvaise montée en échelle). Il plafonne à 7 transactions par seconde, ce qui à l’échelle de la planète : 7 milliards d’utilisateurs potentiels, est vraiment … minable (presque sans mauvais jeux de mot). Pour comparer : VISA effectue en moyenne plus de 1600 transactions par seconde et des pics bien plus importants sont absorbés sans problème. Donc, non, sans résoudre le problème d’efficience, Bitcoin ne peut pas faire plus que ce qu’il fait aujourd’hui, c’est à dire finalement ne servir qu’à très peu d’utilisateurs.
  • Ploum ne parle que de la “Proof Of Work” comme concept de sécurisation. C’est pourtant une partie du système particulièrement inélégante qui devrait être remplacée par quelque chose de moins énergivore. Ethereum veut passer à la “Proof Of Stake” (preuve d’enjeux, moins énergivore) par exemple. Gridcoin remplace la “Proof Of Work” par des calculs utiles à l’humanité Duniter applique un handicap aux utilisateurs ayant trop de puissance de calcul ce qui évite la course à la puissance polluante. Bref, la consommation énergétique outrancière de Bitcoin n’est pas une fatalité pour les crypto monnaies.
  • Une image plus juste : le Bitcoin est actuellement comme un tracteur auquel on ajouterait des chariots, plus on lui ajoute de chariots, plus il crache de la fumée noire en faisant un boucan d'enfer et plus sa vitesse diminue … même si sa vitesse n’atteint jamais 0 km/h. A partir d’un certain nombre de chariots sa vitesse est tellement basse qu’il en devient inutilisable. Ici les chariots sont les utilisateurs et la vitesse représente les frais et la rapidité/lenteur des transactions. Ploum voudrait nous dire que ce tracteur rejette une fumée noire qui est une merveille d’écologie et que ce tracteur peut prendre l’autoroute sans rien y changer. Mais que c’est l’autoroute et notre perception de la vitesse qu’il faudrait adapter au système …
  • Je vous prie de croire que je n’ai aucune raison particulière de défendre les banques ou les états. Un système d’échange décentralisé est une bonne chose, mais pour moi laisser une planète dans le meilleur état possible à mes enfants est bien plus important.
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    "Cet article est une réponse à celui de Ploum visible ici et ici. D'ordinaire j'aime bien les articles de Ploum, sa plume est plaisante et son analyse me paraît souvent juste; mais dans son article sur la consommation énergétique du Bitcoin, Ploum use de contre-vérités, de raccourcis et de métaphores inadaptées pour arriver à ses fins. Je vais m'attacher à démontrer qu'avec un minimum de connaissances des problèmes d'un réseau électrique, de la consommation d'énergie et de rendement il est impossible de considérer ce gaspillage d'énergie comme négligeable. Je reviendrai sur le pourquoi il est urgent d'être efficient dans tous les domaines. C'est-à-dire qu'il ne suffit pas "d'utiliser de l'énergie verte puis c'est tout", une telle affirmation relève d'une ignorance des problèmes liés à la transition énergétique."
Aurialie Jublin

Les objets connectés sont de plus en plus utilisés pour le harcèlement et l'i... - 0 views

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    "Lors de son entretien avec les agents de centres d'appel, une femme rapportait par exemple qu'elle avait allumé son climatiseur, mais celui-ci s'est éteint sans qu'elle y touche. Une autre expliquait que les numéros de code de la serrure numérique de sa porte d'entrée changeaient tous les jours et elle n'arrivait pas à comprendre pourquoi. Une autre femme encore expliquait qu'elle entendait toujours la sonnerie de la porte se déclencher, mais personne n'était à la porte. Selon le New York Times, ces histoires font partie d'un nouveau modèle de menaces ou de violences qui s'est invité dans les maisons avec la montée en puissance des objets connectés. Ces objets connectés sont de plus en plus utilisés par des personnes malveillantes pour harceler, surveiller, contrôler ou se venger sur d'autres personnes, souligne le New York Times. Graciela Rodriguez, qui gère un refuge d'urgence de 30 lits au Centre for Domestic Peace à San Rafael, en Californie, aurait déclaré au New York Times que certaines personnes sont déjà venues la voir avec des histoires de « ;trucs fous ;» comme des thermostats connectés allant soudainement jusqu'à 100 degrés ou des haut-parleurs intelligents qui se mettaient à jouer la musique à fond. Sans explication sur ce problème qui pourrait ressembler à un mauvais film d'exorcisme, ces personnes ont déclaré qu'elles commençaient à perdre le contrôle de leur maison et à devenir folles. Il faut préciser que les personnes malveillantes utilisant ces objets connectés à mauvais escient ne sont pas forcément des personnes hors de la vie des maisons ciblées. Quelques fois, il s'agirait d'un conjoint ayant mal digéré une rupture et disposant toujours des mots de passe des objets intelligents installés dans la maison. Une négligence donc de la part des victimes qui serait aggravée par le manque de connaissance sur le fonctionnement de ces appareils, soutient le New York Tim
Aurialie Jublin

GAFA : « Il faut prendre la Bastille numérique » | Alternatives Economiques - 0 views

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    "Ils bousculent tout sur leur passage. Les GAFA (pour Google, Apple, Facebook et Amazon) ont pris le contrôle d'un monde numérique en expansion continue. Leur emprise soulève une opposition croissante de la part des citoyens comme des gouvernements, que ce soit parce que ces entreprises évitent massivement l'impôt, ou parce que l'économie de plate-forme qu'elles instaurent bouleverse les règles d'organisation de notre économie. Comment les pouvoirs publics peuvent-ils réagir ? Sébastien Soriano, à la tête de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep), s'est saisi de cette question. Pour Alternatives Economiques et en parallèle des Etats généraux du numérique qu'organise actuellement le gouvernement, celui qui dirige le « gendarme » des télécoms livre sa vision et les bases d'une régulation de ces géants du numérique."
Aurialie Jublin

L'empire du signal, ou les dangers d'un contrôle social par les corps - Libér... - 0 views

  • Mais réguler un tel déploiement s’annonce complexe. Car les usages de reconnaissance faciale proposés sont multiformes, à la fois commerciaux, publicitaires, sécuritaires, sanitaires ou éducatifs. Le privé et le public, le divertissement et le punitif s’entremêlent sans que l’on ne puisse y voir clair. Un thème récurrent est largement mobilisé pour justifier l’usage de ces technologies de surveillance biométrique : la sécurité. Et c’est toujours au nom du Bien qu’elle se voit matérialisée.
  • De façon assez inédite, la plupart des technologies de surveillance publique, à l’instar de la reconnaissance faciale, ont d’abord été élaborées et diffusées à des fins commerciales par des géants numériques de la publicité et de la recommandation. La reconnaissance faciale, dont on ne sait plus très bien si elle est proposée à des fins commerciales ou sécuritaires, a été banalisée par la domotique, et amplement développée avec les smartphones ou les réseaux sociaux, pour un confort d’utilisation et une expérience client toujours plus forte. En procédant par pseudomorphisme, l’omniprésence de technologies d’identification qui servent à un moment donné une entreprise de quadrillage techno-sécuritaire du territoire semble aller de soi.
  • L’enjeu technique ne sera bientôt plus la reconnaissance en elle-même, mais l’interprétation comportementale des surveillés. Des systèmes de vidéosurveillance bientôt augmentés d’algorithmes puissants seront capables d’analyser nos comportements et de désigner ceux qui seraient «inhabituels» ou jugés «subversifs».
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  • A la suite des travaux de la mathématicienne américaine Cathy O’Neil, il convient ici d’insister sur les biais qui seront encodés dans les algorithmes modélisant les critères de dangerosité qui pourront toujours accompagner, de manière fluctuante et totalement «liquide», les logiques de surveillance d’une population.
  • Passé d’Etat de droit à Etat de l’ultrasécurité, inquiet pour sa propre survie et par conséquent boulimique de données de surveillance, il semble moins se préoccuper de fabriquer des libertés par la loi dans un cadre de surveillance bienveillant que d’industrialiser, de concert avec les acteurs privés compétents. Ainsi assistons-nous à une marchandisation de la souveraineté territoriale.
  • Il s’agit de trouver le juste équilibre entre la nécessaire sécurisation du territoire et le respect des libertés fondamentales. Et le glissement conceptuel de la Smart City à la Safe City actuellement à l’œuvre pose la question fondamentale de nos libertés, du droit à évoluer dans l’espace public sans être identifié. Surtout, quels contre-pouvoirs, quels recours mettre en place face à des dispositifs algorithmiques intangibles ? Comment rééquilibrer ce système qui invisibilise le pouvoir des surveillants privés et publics, où la transparence est en réalité un «jeu» à géométrie très variable ?
  • Nous évoluons dans des sociétés qui créent des effets de structuration sociotechnique où le passage de la sphère ludique à la sphère politique n’a sans doute jamais été aussi facilité. Le niveau d’acceptation sociale des technologies d’identification, qui nous assure toujours plus de «commodité», tend à créer les conditions d’un contrôle social total.
  • De tels lieux de transmission d’éclairages techno-scientifiques rétabliraient également les principes de responsabilité sociale que certaines communautés d’ingénieurs intégraient jadis dans leur conception de l’innovation. Des lieux et des agencements doivent être incontestablement imaginés et institués dans cet horizon, en vu de faciliter l’hybridation des compétences et le renforcement du jugement critique à l’égard de technologies qui s’avèrent de plus en plus difficiles à cerner d’un point de vue éthique et qui se révèlent toujours plus ambiguës sur le plan démocratique, en rappelant que le progrès technologique doit être toujours pensé dans sa relation au progrès sociétal.
  • Compte tenu de l’accélération croissante de l’innovation dans le domaine de l’identification, une proposition serait de favoriser la création de lieux où les citoyens pourraient librement être amenés à prendre connaissance des avancées technologiques, avec leurs possibles effets éthico-politiques.
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    "Avec la reconnaissance faciale, une nouvelle forme de gouvernementalité se met en place, où des plateformes privées collaborent avec les dispositifs publics de sécurité. Un tel déploiement technologique dans notre quotidien, une telle capture de nos visages et de nos traits constituent un redoutable pallier vers une surveillance généralisée."
Aurialie Jublin

Uberland : l'avenir du travail à l'heure des algorithmes | InternetActu.net - 0 views

  • Pour Alex Rosenblat, Uber a provoqué « un changement culturel fondamental sur ce que signifie avoir un emploi ». Uber a tiré un maximum de valeur des conducteurs en surfant sur les limites et ambiguïtés des normes culturelles et juridiques. Pour Adrian Chen, la gestion algorithmique d’Uber est moins une révolution qu’un affinage, à l’image des chauffeurs de taxi eux-mêmes, qui ont longtemps été dans une situation entre autonomie et dépendance, notamment avec nombre d’intermédiaires influant sur leurs possibilités de travail. Uber a simplement rendu cette sous-traitance plus efficace.
  • Adrian Chen pour Intelligencer explique que cette gestion algorithmique de la force de travail suppose une surveillance totale (jusqu’aux tremblements du téléphone pour s’assurer que le conducteur conduit en toute sécurité ! ce qui montre à nouveau, s’il en était besoin, que Uber n’est pas seulement un intermédiaire pour réaliser une transaction). Pourtant, de nombreux chauffeurs semblent satisfaits du travail qu’ils réalisent : ils apprécient la flexibilité et le complément de salaire que leur travail apporte. Même si les récits que Rosenblat a recueillis témoignent principalement d’une résignation épuisée. «Pour certains chauffeurs, ce travail est un véritable boulet, et pour d’autres, c’est un gilet de sauvetage».
  • Dans une interview pour CityLab, la chercheuse rappelle que malgré les efforts d’Uber, le taux de désengagement des chauffeurs est assez fort : 68 % d’entre eux quittent la plateforme dans les 6 mois. Elle pointe néanmoins que les outils d’Uber proposent des services que les collectivités ne savaient pas fournir, notamment en offrant des modalités de transports là où elles n’existaient pas (voir « Plateformes et métropoles » et « Vers une ville numérique ingouvernable »). Uber, derrière sa neutralité de façade, a surtout profité d’un Far West réglementaire pour s’imposer. Partout où elle s’est imposée, la firme a profondément déstabilisé la société (autour de la question du statut des chauffeurs), tout en offrant des avantages populaires (ouvrant de nouvelles dessertes et des prix bas notamment). Toute la question reste de trouver la balance entre les avantages et les inconvénients
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  • Dans une tribune pour le New York Times, la chercheuse rappelait la difficulté de cette gestion algorithmique de la relation de travail (voir également « Qui des algorithmes ou des clients seront nos nouveaux patrons »). Une relation profondément asymétrique et qui se crispe notamment dès qu’il y a un problème. Elle souligne combien les informations que délivre Uber à ses chauffeurs comme à leurs passagers sont asymétriques. Un chauffeur de New York évoquait par exemple un échange avec un client qui montrait que celui-ci était facturé 40$ alors que pour le chauffeur, la course n’en coûtait que 28 !
  • Dans les années 70, le sociologue du travail britannique Michael Burawoy, dans son livre Produire le consentement (1979, traduit en français en 2015) constatait que si les travailleurs consentaient à leur propre exploitation, c’était en fait surtout par jeu. Burawoy expliquait que lorsque le travail prenait la forme d’un jeu, la principale source de tension n’était plus dans la relation des travailleurs avec les dirigeants, mais s’étendait aux autres travailleurs, aux machines et contre eux-mêmes. En proposant un sentiment d’autonomie et de contrôle relatifs, la ludification propose aux travailleurs de souscrire aux objectifs de l’entreprise. Lyft propose ainsi des défis à ses conducteurs en échange d’une prime supplémentaire : des défis assez difficiles à décrocher qui reposent sur le nombre de courses à réaliser à certains créneaux horaires.
  • 50 % des conducteurs de Uber cessent d’utiliser l’application au bout de deux mois. 4 % des conducteurs le sont encore après une année. Des rapports récents estiment que le revenu des chauffeurs à l’heure est souvent inférieur au salaire minimum.
  • Sur les forums de chauffeurs ou dans leurs discussions, ceux-ci spéculent sans cesse sur les algorithmes et les moyens de les déjouer, mais sans réellement ne jamais y parvenir. Ils tentent fréquemment de faire des déconnexions en masse de l’application pour faire monter les prix des courses, sans que l’effet n’ait jamais vraiment été assuré. Ces formes de déconnexion volontaires et organisées ressemblent à des microgrèves, à des microprotestations, sans jamais avoir permis de réelles émancipations.
  • Burawoy est à nouveau utile pour comprendre pourquoi. Le fait de « jouer » permet aux travailleurs d’exercer un contrôle limité sur le processus de travail. Mais les victoires qu’ils remportent renforcent leur engagement et leur consentement aux règles du jeu. À l’inverse, leurs échecs dirigent leur insatisfaction contre les obstacles du jeu, et non contre ceux qui en fixent les règles. Apprendre à utiliser intelligemment les paramètres du jeu, de l’algorithme, devient pour eux la seule option imaginable.
  • Après des semaines d’une conduite maniaque pour améliorer sa note… elle a constaté que cette amélioration était sans incidence directe (tant qu’elle restait au-dessus de 4,6/5) : cela ne générait ni réel bonus ni amélioration du niveau de rémunération. « En fait, je perdais de l’argent en essayant de flatter les clients avec des bonbons et de garder ma voiture scrupuleusement propre », simplement parce qu’elle souhaitait rester un pilote bien côté. « Ce qui est à la fois si brillant et affreux dans la ludification de Lyft et Uber, c’est qu’elle repose sur notre seul désir d’être utile, aimé et bon. Les semaines où je suis très bien noté, je suis plus motivé à conduire. Les semaines où je suis mal noté, je suis également plus motivé à conduire. » Une fois qu’on est pris dans la zone du jeu, il n’y a plus d’échappatoire !
  • Heureusement, la réaction à l’ubérisation s’est aussi peu à peu musclée. Pour Les Inrocks, Benoît Fabien revient sur le lancement de la Fédération transnationale des coursiers (FTC), qui a rassemblé fin octobre à Bruxelles des livreurs à domicile de toute l’Europe, à l’initiative du Groupe de recherche pour une stratégie économique alternative, de l’Alter Summit et du réseau ReAct, qui encourage les mobilisations transnationales face aux grandes entreprises. Un moyen de contrer la division et l’individualisation des plateformes de livraison pour rééquilibrer les relations de travail imposées par celles-ci. Les revendications sont nombreuses, mais s’organisent : salaire minimum, transparence des algorithmes, la liberté de se réunir en collectif…
  • les chauffeurs d’Uber s’informent des nouvelles fonctionnalités de la plateforme via ces outils, notamment quand Uber teste sur certains d’entre eux de nouvelles fonctionnalités. Le géographe Mark Graham a montré que plus de 50 % de travailleurs freelances qui utilisent des plateformes comme le Mechanical Turk d’Amazon ou Freelancer, sont en contact avec d’autres travailleurs de plateformes et échangent sur les tarifs, sur les tâches proposées et la qualité de ceux qui proposent du travail. Ces groupes servent souvent à des formes de coordination, comme l’a montré la grève des enseignants de Virginie-Occidentale, où 70 % des 35 000 enseignants de l’État étaient présents et ont permis d’articuler les revendications et d’organiser les protestations. Les groupes permettent également de fabriquer des hashtags, des gifs, des vidéos et des mêmes pour publiciser leurs actions. Si ces outils ne sont pas conçus pour soutenir le militantisme, le relai est assuré par des sites dédiés comme Coworker.org, permettant par exemple aux employés de Starbucks de faire pression sur la direction pour limiter le « clopening », le fait qu’un même employé soit chargé de la fermeture et de l’ouverture d’un magasin.
  • Reste que ces services ne sont pas toujours suffisamment en lien avec les syndicats existants : ils manquent d’assistance juridique, comme le proposent les syndicats, ou de fonds pour être maintenus. Les « startups du travail » ont assurément besoin de la force des syndicats pour se transformer. En Allemagne, IG Metal, l’un des plus importants syndicats, permet aux autoentrepreneurs de le rejoindre. Il a également lancé un site pour comparer les conditions de travail sur les plateformes baptisé Fair Crowd Work.
  • Pour Fredrik Soderqvist de Unionen, un syndicat suédois, les syndicats doivent apprendre également à mieux utiliser les données afin de permettre de créer des services adaptés aux transformations du monde… À l’exemple de Mystro, une application pour conducteurs, qui leur permet de basculer d’un service à l’autre, d’évaluer les demandes, de rejeter celles qui ne sont pas rentables, afin d’aider les conducteurs à prendre de meilleures décisions pour eux-mêmes. Assurément, s’emparer activement de la technologie pour les syndicats et les travailleurs peut leur permettre de contrer l’ubérisation… Ça ne remplace ni la lutte sociale ni la lutte légale, mais la lutte technologique peut permettre de faire des contre-propositions concrètes, de fournir des outils d’aide à la décision des travailleurs algorithmisés pour les aider à en comprendre le fonctionnement et à resymétriser la relation.
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    "Dans Uberland : comment les algorithmes réécrivent les règles du travail (2018, Presse universitaire de Californie, non traduit), la chercheuse Alex Rosenblat (@mawnikr) a synthétisé quatre années de recherche ethnographique avec les conducteurs d'Uber. Un livre où transparaît une vision dystopique du travail où des millions de conducteurs sont gérés par un système technique qui combine à la fois l'autoritarisme du management scientifique à la Frederick Taylor et le leadership cynique d'un Michael Scott (le personnage incarné par Steve Carell dans la série The Office), rapporte Intelligencer."
Aurialie Jublin

Qu'est devenue l'utopie d'Internet ? | Revue Projet - 0 views

  • Si les années 1990 constituent bien une sorte d’âge d’or de l’utopie numérique, l’expansion d’Internet va progressivement remettre en cause cette vision enchantée du cyberespace. Afin de financer le développement de l’infrastructure, l’administration scientifique en charge d’Internet décide, en 1993, d’ouvrir le réseau aux entreprises privées. Jusqu’alors soutenu par la puissance publique, il était considéré comme un outil de coordination scientifique dont les usages se devaient d’être strictement non lucratifs. Mais le développement de services commerciaux d’accès favorise la découverte du web par un plus large public.
  • La deuxième trahison tient à l’accroissement du contrôle des communications dans un espace numérique jusqu’ici marqué par le principe d’auto-régulation et de responsabilisation de chaque participant. Dans les années 1990, les premières « affaires du net » révèlent la face sombre du web : incitations à la haine, pédopornographie, piratage informatique, propagande, etc. Ces menaces favorisent un retour progressif des États, jusqu’alors remarquablement absents, pour réguler les échanges et protéger les droits sur Internet. Depuis les années 2000, les initiatives législatives se multiplient pour lutter contre le piratage, la prolifération de contenus haineux ou, plus récemment, la manipulation de l’information.
  • Retour du contrôle des communications, règne de la marchandisation et centralisation du web autour des grandes plateformes : ces transformations d’Internet sont dénoncées comme autant de coups portés au projet initial de « l’Internet libre », principalement de la part des Gafam. Pour autant, on aurait tort d’opposer schématiquement les défenseurs aux fossoyeurs de l’utopie numérique. Google s’est parfois trouvé aux côtés des militants du net pour défendre la libre circulation de l’information, la neutralité du net ou l’assouplissement de la propriété intellectuelle. Le projet « Google books » de numérisation de livres, par exemple, n’est pas sans rappeler celui de bibliothèque universelle formulé par les premiers concepteurs du réseau. On songe également aux prises de position très strictes d’Apple au sujet de la protection de la vie privée5. Ces affinités s’expliquent aussi par les racines culturelles de l’utopie numérique. Les fondateurs d’entreprises numériques, les développeurs qui y travaillent, sont bien souvent des utilisateurs pionniers et passionnés d’Internet. Pour certains, l’esprit de la Silicon Valley, loin de marquer une trahison de l’utopie numérique, en constitue l’expression la plus aboutie en tant que synthèse entre l’esprit de la contre-culture et l’enthousiasme technologique d’entrepreneurs innovants.
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    "Aux débuts d'Internet, un idéal d'horizontalité, de gratuité, de liberté. Trente ans après, le web s'est centralisé, marchandisé, et a été colonisé par les géants du numérique. Ces derniers ont-ils trahi l'utopie des pionniers d'Internet ?"
Aurialie Jublin

Paris se dote de sa propre infrastructure pour héberger les données de ses ad... - 0 views

  • Alors que les services publics sont de plus en plus numérisés, ce nouvel équipement doit offrir les plus hauts standards de sécurité quant à l’hébergement des données. Il permet notamment à Paris, qui externalisait jusque-là cette prestation, de ne plus dépendre d’acteurs étrangers – possiblement soumis à des réglementations, comme le Cloud Act, lequel permet aux Etats-Unis de réclamer à des fournisseurs de service américains l’accès à des données stockées à l’étranger – et de garantir ainsi la souveraineté des données. En outre, sauf dans le cas de missions ponctuelles, les équipements sont entièrement gérés par les services informatiques de la mairie. « Nous avons la maîtrise physique du stockage de bout en bout », se réjouit M. Grégoire.
  • La mairie a également tenu à ce que cette installation ait une empreinte environnementale limitée. Manifestation la plus visible de cette volonté, la chaleur dégagée par le data center est utilisée pour alimenter le réseau de chauffage de bâtiments voisins.
  • Ce nouvel équipement a nécessité un investissement de 16 millions d’euros. Pour faire baisser la facture, la mairie a dimensionné le lieu de telle sorte qu’il puisse proposer à d’autres services publics d’accueillir leurs serveurs, moyennant finances – à un coût qu’elle assure avantageux. L’Assistance publique-Hôpitaux de Paris et Eau de Paris comptent parmi ses premiers clients, et des discussions sont en cours pour conclure de nouveaux contrats.
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  • Une telle solution pourrait-elle être adoptée par d’autres villes françaises ? L’adjoint au maire admet que le coût d’entrée est prohibitif et que Paris n’aurait pas pu faire ce choix s’il ne disposait pas des compétences en interne pour créer et maintenir ce site. Mais, veut-il croire, « c’est une philosophie qui est appelée à se développer ».
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    "Alors qu'elle externalisait jusque-là le stockage de ses données numériques, la ville a investi 16 millions d'euros dans un centre de données pour en reprendre le contrôle."
Aurialie Jublin

Le contrôle des données numériques personnelles est un enjeu de liberté colle... - 0 views

  • Il serait commode de penser que l’humain du XXIe siècle a renoncé à sa vie privée. Mais il ne s’agit pourtant pas d’indifférence. Les sondages montrent avec insistance et sans ambiguïté que les internautes la chérissent encore à l’heure des réseaux sociaux et des smartphones. Comment, alors, expliquer cette apathie ?
  • Pendant des décennies, à raison, défendre la vie privée revenait à protéger l’individu. Aujourd’hui encore, on s’obstine à rechercher et mesurer les conséquences individuelles de cette collecte effrénée de données personnelles et de ces piratages à répétition. Mais le paradigme a changé : la question des données personnelle n’est pas un problème d’intimité. C’est un enjeu de liberté collective.
  • Prenez l’affaire Cambridge Analytica : le problème n’est pas que Donald Trump et son équipe de campagne ont consulté méthodiquement la liste d’amis de 87 millions d’utilisateurs de Facebook (dont plus de 200 000 Français). Mais qu’ils aient pu utiliser ces informations, agrégées à des millions d’autres, pour mener une campagne politique extrêmement personnalisée, quasi individualisée, en utilisant à plein l’invraisemblable machine à cibler des messages proposée par Facebook. L’impact de cette fuite de données personnelles n’est plus individuel, il est collectif. Il ne s’agit pas de l’intimité de son existence vis-à-vis d’une organisation politique, mais de la liberté collégiale de choisir en conscience son dirigeant politique ou ses conditions de vie commune.
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  • Au bout du compte et si rien ne change, alors que ces entreprises s’immisceront de plus en plus dans nos activités quotidiennes, passant peu à peu de la « suggestion » à l’« injonction », nous serons sans doute pris au piège des données personnelles. On décidera à notre place, d’une manière qu’on nous présentera comme optimale puisque conçue sur l’analyse de données de millions de personnes dont la vie nous est similaire, et en nous confisquant une part de notre libre arbitre. Il ne s’agit pas d’intimité vis-à-vis d’une quelconque entreprise de la Silicon Valley, mais de liberté individuelle.
  • La seule solution est de limiter la dissémination aux quatre vents de nos données personnelles. Mais comment le faire sans se retirer des connexions, sociales et professionnelles, d’une société désormais numérisée ? Comment renoncer à tous ces avantages ? La solution se trouve quelque part entre le collectif (des règles politiques pour limiter la collecte et l’exploitation des données) et l’individuel (le recours à une technologie plus frugale et plus décentralisée).
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    Les révélations des failles de sécurité touchant des services en ligne s'accumulent. Et la collecte de nos données fait peser un risque collectif d'envergure.
Aurialie Jublin

FR - A Contract for the Web - 0 views

  • Les gouvernements s'engagent à  :S'assurer que tout le monde peut se connecter à InternetAinsi, n'importe qui, peu importe son identité ou son lieu de résidence, peut participer activement en ligne.Maintenir la disponibilité constante d'InternetAfin que personne ne soit privé de son droit à un accès complet à Internet.Respecter le droit fondamental des personnes à la vie privéeAinsi, tout le monde peut utiliser Internet librement, en toute sécurité et sans crainte.
  • Les entreprises s'engagent à :Rendre Internet abordable et accessible à tousPour que personne ne soit exclu de l’utilisation et de du futur  du Web.Respecter la vie privée et les données personnelles des consommateursAfin que les gens gardent le contrôle de leur privacité et vie en ligne.Développer des technologies qui supportent le meilleur de l'humanité et défient le pireAfin que le Web soit réellement un bien public qui donne la priorité aux gens.
  • Les citoyens s'engagent à :Être des créateurs et des collaborateurs sur le WebPour que le Web présente un contenu riche et pertinent pour tout le monde.Construire des communautés fortes qui respectent un discours civil et la dignité humainePour que tout le monde se sente en sécurité et bienvenu(e) en ligne.Se battre pour le WebPour que le Web reste ouvert et constitue une ressource publique universelle pour les utilisateurs du monde entier, aujourd'hui et à l'avenir.
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  • Nous nous engageons à respecter ces principes et à impulser  un processus de délibération afin de créer un « contrat pour le Web » complet, qui définira les rôles et les responsabilités des gouvernements, des entreprises et des citoyens. Les défis auxquels le Web est confronté aujourd'hui sont redoutables et ont des impacts sur  tous les aspects de nos vies, et non seulement lorsque nous sommes en ligne. Mais si nous travaillons ensemble et que chacun de nous assume la responsabilité de ses actes, nous pouvons protéger un Web réellement au service de tous et toutes.
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    " Le Web a été conçu pour rassembler les gens et rendre les connaissances librement disponibles. Tout le monde a un rôle à jouer pour que le Web soit utile à l'humanité. En adhérant aux principes suivants, les gouvernements, les entreprises et les citoyens du monde entier peuvent contribuer à protéger le Web ouvert en tant que bien public et droit fondamental pour tous. "
Aurialie Jublin

Des plateformes en leurs limites | InternetActu.net - 0 views

  • L’ouvrage commence par remettre la réalité des plateformes en perspective… Après le temps des promesses de l’avènement de « l’économie du partage » (voir notre dossier de 2014) voire de « la quatrième révolution industrielle », Srnicek rappelle que nous en sommes bien loin. Le secteur des technologies reste relativement modeste dans l’économie, tant en terme de valeur ajouté que d’emplois. Le secteur industriel, malgré la désindustrialisation, est encore bien plus flamboyant que le monde des nouvelles technologies.
  • Pour Srnicek, le capitalisme s’est tourné vers les données pour assurer la croissance et la vitalité de l’économie, à l’heure où l’industrie ralentissait. En ce sens, les plateformes sont un nouveau modèle d’entreprise, dont la fonction est d’extraire, de contrôler et de rendre productifs les données. Un « mirage compétitif », comme l’évoquaient Maurice Stucke et Ariel Ezrachi dans leur livre, qui tend à devenir de plus en plus monopolistique.
  • Le capitalisme s’est restructuré autour du numérique, réservoir de nouveaux concepts, d’innovations réelles ou à venir, reposant sur l’extraction des données. Les données sont devenues la matière première à extraire et les activités des usagers, leur source naturelle. Elles sont désormais au coeur du système capitaliste : « elles nourrissent les algorithmes et donnent [aux entreprises] des avantages concurrentiels, elles coordonnent la main d’oeuvre et permettent souvent de l’externaliser, elles optimisent et flexibilisent les processus de production, elles transforment des produits peu rentables en services hautement profitables et, après leur analyse, elles donnent accès à toujours plus de données – dans une sorte de cercle vertueux. »
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  • La plupart des entreprises capitalistes n’étaient pas conçues pour extraire et utiliser des données, mais pour produire des marchandises. Pour améliorer l’extraction de données, un nouveau type d’entreprise s’est développée : la plateforme. Ce nouveau modèle est un intermédiaire entre différents usagers qui vise via des outils ou une infrastructure dédiée à produire des données à exploiter. Leur seconde caractéristique est de reposer sur des effets de réseaux qui favorisent le nombre et donc produits par nature des formes monopolistiques, très rapidement. Autre caractéristique des plateformes, contrairement aux entreprises allégées qui ne visaient qu’à conserver les compétences essentielles au coeur du projet, les plateformes démultiplient les activités rentables et non rentables pour diversifier les données, comme Google fourbit des services gratuits pour capter un maximum de données. Enfin, elles se présentent souvent comme des espaces ouverts, alors que les services sont entièrement déterminés par leurs propriétaires. Bien que se présentant comme des intermédiaires, les plateformes contrôlent et gouvernent les règles du jeu !
  • Srnicek distingue 5 catégories de plateformes : la plateforme publicitaire (type Google ou Facebook qui consiste à extraire de l’information pour vendre de l’espace publicitaire), la plateforme nuagique (type Amazon Web Services… qui loue de l’équipement à la demande), la plateforme industrielle (comme celles développées par GE ou Siemens… qui visent à transformer la production industrielle en processus produisant des données), la plateforme de produits (comme celles mises en place par Rolls Royce ou Spotify… qui transforment les produits en service sous forme de location ou d’abonnement) et enfin, la plateforme allégée (type Uber ou Airbnb… qui réduisent les actifs au minimum et dégage des profits en baissant au maximum leurs coûts de fonctionnement).
  • Plus qu’un digital labor, concept à l’égard duquel le philosophe semble méfiant, les plateformes publicitaires reposent sur l’appropriation des données et leur raffinage pour assortir annonceurs et usagers. Ce modèle n’est pas seulement prédominant sur internet : Dunnhumby, propriété de Tesco, est une entreprise d’analyse des habitudes de consommation. Ces plateformes publicitaires ont connu un grand succès. Leurs revenus, leurs profits sont élevés.
  • Les plateformes nuagiques permettent aux entreprises de sous-traiter leur développement technologique. Le modèle locatif permet aux entreprises qui développent des services en ligne de collecter de nouvelles données pour renforcer l’extraction. Là encore, les profits et revenus s’envolent.
  • Les plateformes industrielles, comme MindSphere de Siemens ou Predix de GE, sont certainement moins connues. Elles consistent à introduire des capteurs et des puces dans la chaîne de production pour améliorer la traçabilité logistique, afin d’optimiser l’efficacité du processus de production, de développer de la personnalisation dans la chaîne de montage et dans la chaîne de distribution. Ces plateformes construites pour collecter des mégadonnées de filières industrielles spécifiques, sont, elles aussi, particulièrement rentables.
  • Les plateformes de produits et de services en tant que produits reposent pour beaucoup sur le modèle de l’abonnement, à l’image de Spotify ou encore de Rolls Royce, qui, pour ses moteurs d’avion, fait payer les compagnies aériennes pour l’utilisation de ses moteurs plutôt que de les leur vendre. En retour, Rolls Royce prend en charge l’entretien et les pièces de rechange. En récupérant ainsi les données, ces plateformes améliorent leurs produits, à l’image de Rolls Royce qui a pu ainsi améliorer la consommation de carburant de ses moteurs et leur durée de vie, au détriment de ses compétiteurs.
  • Enfin, les plateformes allégées externalisent à maximum leurs coûts. La plateforme contrôle uniquement ce qui lui permet de percevoir une rente de monopole (un pourcentage sur les transactions qu’elle facilite). C’est là clairement le modèle d’Uber ou de Airbnb, de TaskRabbit ou Mechanical Turk. Mais, rappelle Srnicek, ce phénomène n’est pas propre au numérique. Le marché des travailleurs journaliers, des emplois informels, de la sous-traitance… bref du travail traditionnel… est également très proche de ce modèle.
  • Le numérique y ajoute une couche de surveillance. Aux États-Unis, les emplois non conventionnels représenteraient 15 millions de travailleurs soit 10 % de la main d’oeuvre du pays en 2005, et 15,8 % en 2015. Ces emplois non conventionnels ont même dépassé le nombre d’emplois créés entre 2005 et 2015 aux États-Unis (9,4 millions contre 9,1 millions). Reste que l’accélération de la précarisation de l’emploi n’est pas tout entier imputable aux plateformes numériques. On estime que l’économie du partage en ligne représente 1 % de la main-d’oeuvre américaine et que les chauffeurs d’Uber en représenteraient la grande majorité. En fait, ce secteur demeure encore relativement marginal, estime Srnicek. Ces plateformes prolongent la précarisation du travail initié par les entreprises allégées dès les années 70. Srnicek rappelle très justement que ce travail « autonome » demeure largement contraint 
  • Pour Srnicek, ces entreprises qui bénéficient de force investissements, sont un phénomène consécutif à la crise de 2008, mais Uber, Airbnb et Didi Chuxing (le concurrent chinois d’Uber), ont raflé à elles trois en 2015 59 % du financement des entreprises émergentes des services à la demande. Elles ont surtout bénéficié de capitaux excédentaires cherchant des opportunités de rendements élevés dans un contexte de faible taux d’intérêt. Pour Srnicek, la rentabilité des plateformes allégées est encore largement à prouver. Elle repose sur leur capacité à comprimer les coûts et à abaisser les salaires… comme on le constate dans le monde des livreurs à vélo où le prix de la course n’a cessé de s’effondrer.
  • Srnicek en tire un enseignement qui va à l’encontre des discours ambiants sur le modèle des plateformes : « le modèle allégé reste un joueur marginal », qui ne survit que par l’apport de capital-risque plutôt qu’en générant ses propres revenus. « Loin d’incarner l’avenir du travail ou de l’économie, il est fort probable que ces modèles finissent par s’écrouler dans les années à venir ».
  • Reste souligne Srnicek, que « nous n’assistons pas à la fin de la propriété, mais bien à sa concentration ». Les plateformes en imposant leur monopole sur l’extraction des données sont en passe de devenir « propriétaires de l’infrastructure même de la société ».
  • Le problème est que les monopoles qu’elles construisent sont donc de plus en plus importants. Qui pourrait aujourd’hui venir défaire le monopole d’un Google par exemple ? Pour autant, cela ne signifie pas que la concurrence est morte, souligne Srnicek, mais qu’elle a changé de forme. Pour lui, nous serions plutôt dans un colonialisme de plateforme, un moment où la capitalisation sur la quantité et la diversité des données importent plus que leur qualité.
  • Outre l’extraction de données, l’autre travail des plateformes repose sur leur capacité d’analyse et de traitement qui participe lui aussi à la concentration. D’où les investissements massifs dans l’intelligence artificielle : « le moindre goulot d’étranglement dans la circulation de données (…) contribue à entraver la production de valeur ». Pour Srnicek, l’expansionnisme des plateformes repose sur un modèle de convergence, tant et si bien que malgré leurs différences, les grandes plateformes se concurrencent de plus en plus entre elles.
  • Pour Srnicek, cette tendance devrait à terme se cristalliser dans des écosystèmes de plus en plus clos : « la concurrence capitaliste risque fort bien de mener à une fragmentation d’internet » que seule une intervention politique pourrait ralentir ou renverser.
  • Encore faudrait-il être sûr que la concurrence soit encore une caractéristique du capitalisme tel qu’il s’est transformé ces dernières années… C’est peut-être oublier combien celui-ci est en train de muter. Les comportements assez similaires des grandes plateformes, leurs ententes et collusions, montrent que si elles se font effectivement une petite guerre entre elles, leurs principes semblent imposer une vision du monde sans grande concurrence. Le retour des monopoles, le fait que d’énormes conglomérats dominent les marchés, souligne que nous ne sommes peut-être plus dans un capitalisme où la concurrence était un préalable. Peut-être que l’analyse de Srnicek n’est peut-être pas assez radicale ?
  • La conclusion de Srnicek est limpide. Le numérique ne nous conduit pas du tout à dépasser le capitalisme. Nous restons dans une économie où règne la concurrence et la rentabilité. Pour lui cependant, le modèle des plateformes fait face à un défi d’importance qui risque d’éprouver leurs limites : la crise de la production industrielle. Depuis 2008, la croissance est en berne. La Chine elle-même connaît une surcapacité industrielle, qui entraîne une baisse des prix… L’internet industriel est vu comme un espoir pour inverser la situation et ajuster la production à la demande. Or, souligne Srnicek, l’internet industriel lui-même ne semble pas capable de transformer le mode de production en profondeur : il se cantonne plutôt à réduire les coûts et le temps de production, plutôt que d’améliorer la productivité ou de développer de nouveaux marchés. L’internet industriel vise plutôt à agir sur la baisse des prix, et ce alors que l’austérité tend à diminuer la demande et à faire chuter la productivité. Quant au capital, explique-t-il, il cherche un peu partout les moindres opportunités, mais sans qu’elles soient raccord avec les difficultés actuelles.
  • Pour Srnicek, le scénario le plus probable est que les plateformes se propagent dans tous les secteurs, alors que la concurrence les entraîne à se refermer sur elles-mêmes. Les plateformes publicitaires pourraient être poussées à offrir des services payants, alors que les plateformes allégées pourraient être amenées à se transformer en plateformes de produits. « En dernière analyse, il semble que le capitalisme de plateforme tende inéluctablement à prendre la forme d’un échange d’une rente contre un service ». C’est-à-dire à construire des rentes par ceux qui souhaitaient les défaire…
  • La grande promesse de libération des plateformes, de fluidification de l’économie, se termine sous la forme de simples droits de péages (le fameux 30 % de marge qu’elles pratiquent toutes peu ou prou) pour accéder aux services, selon le modèle de bien des entreprises traditionnelles qu’elles prétendaient détrôner.
  • Dans une conclusion certainement trop rapide, Nick Srnicek, rappelle que les enjeux à venir consistent à s’opposer aux monopoles, à développer d’autres types de plateformes qui bénéficient à ceux qui les utilisent, à l’image du coopérativisme de plateforme, à lutter contre l’ubérisation, c’est-à-dire contre la précarisation, qu’induisent les plateformes allégées, à lutter contre l’évasion fiscale et l’exploitation des données… Pour lui, pour agir sur ce qui a permis le développement des plateformes, il est nécessaire de construire des plateformes publiques, de collectiviser les plateformes existantes pour mettre leurs données au service d’une meilleure redistribution des ressources, d’une plus grande participation… D’imaginer une autre innovation ne reposant plus sur l’optimisation capitalistique. Dommage que cette dernière partie ne dépasse pas l’appel d’intention.
  • Pour Erik Brynjolfsson et Andrew McAfee, dans Des machines, des plateformes et des foules (2018), la plateforme était encore définie comme une solution magique, puissante, sans réelle externalité (« la plateforme est un environnement numérique qui se caractérise par un coût marginal d’accès, de reproduction et de distribution proche de zéro »). La catégorisation de Srnicek apporte donc un peu de complexité et de mise en perspective et permet de relativiser l’enthousiasme et la fascination pour les plateformes, longtemps vues comme des infrastructures qui mettent en correspondance l’offre et la demande.
  • La plateforme était surtout un instrument pour industrialiser la création de valeurs et accélérer les rendements d’échelle nécessaires à l’établissement d’une position dominante sur les marchés, via un ensemble de mécanismes allant du crowdsourcing à l’appariement, en passant par des technologies comme les API et toutes les capacités offertes aux développeurs tiers. Reste que ces mécanismes et ces technologies ne sont plus magiques.
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    "En attendant leurs nouvelles publications, intéressons-nous au précédent livre de Nick Srnicek Plaform Capitalism (2016), qui vient d'être traduit en français sous le titre Capitalisme de plateforme (Lux éditeur, 2018). Il est certainement moins ambitieux sur le plan politique que son manifeste, mais très stimulant pour comprendre les transformations concrètes de l'économie numérique. Ce court essai d'analyse de la réalité économique des plateformes nous aide à en saisir leur impact en les situant dans leur réalité économique."
Aurialie Jublin

« Dans mon livre, j'ai imaginé un mélange entre l'ONU et Google » - 0 views

  • Un autre anachronisme consiste à penser que plus un pays est grand géographiquement, plus il est puissant. La situation économique et l’étendue du territoire sont de moins en moins intriqués. Je trouve plus intéressant d’imaginer une organisation plus flexible, qui donne à chaque personne la possibilité de choisir le gouvernement qu’elle souhaite.
  • L’Etat-nation, c’est l’idée que nous avons une identité liée à l’Etat plutôt qu’à notre ethnie, à notre religion ou à notre langue. C’est un progrès mais ce n’est qu’une étape si nous voulons échapper au déterminisme de nos identités liés à nos gènes, à notre naissance. Cette étape continue à nous lier par notre naissance puisque, si l’on n’a pas beaucoup d’argent, il reste très difficile de changer de nationalité. Il faut continuer à chercher d’autres étapes pour définir une autre identité, plus globale, en tant qu'être vivant. D’un point de vue écologique, il faut aussi se mettre à penser comme élément d’un écosystème
  • Oui, il y a une grande bureaucratie centrale qui facilite tout ça, qui s’appelle tout simplement « Information ». C’est une espèce de mélange entre l’ONU et Google, qui gère toute l’information dans le monde. Elle permet d’amener l’information à tout le monde tout en exerçant une surveillance globale. C’est une organisation très puissante. L’idée est d’interroger la possibilité et le bien-fondé d’une telle organisation globale, qui se réclame d’une neutralité en réalité impossible.
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  • Aujourd’hui, en France comme aux Etats-Unis et dans la plupart des démocraties, il y a le même problème d’un gouvernement devenu monolithique, qui n’offre que peu de choix et peu d’alternatives aux citoyens. Il y a également ce problème de la fragmentation de l’information et des « bulles » d’information favorisées par les réseaux sociaux comme Twitter, qui renforcent mes opinions en me suggérant de suivre seulement des gens qui me ressemblent et qui ne me permettent plus de distinguer ce qui relève d’une information ou d’une opinion.
  • Internet et les réseaux sociaux ont le potentiel d’être très « démocratisants ». J’ai imaginé une organisation qui éviterait cette fragmentation de l’information. Il faut explorer ka gestion de l’information comme bien public. Mais la question du contrôle d’un tel organisme soulèvet évidemment des difficultés…
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    "Le rattachement à un gouvernement par la géographie est aujourd'hui un anachronisme. Ça ne fait plus sens. J'ai travaillé dans beaucoup de pays connaissant des mouvements de sécession régionale ; presque tous les pays du monde sont concernés. C'est un gros problème pour la démocratie. On a d'un coté des populations qui ne se sentent plus appartenir à l'État-nation, qui veulent en sortir, et de l'autre des migrants qui veulent y entrer. C'est une contradiction fondamentale qu'il faut repenser. Ça ne marche plus d'avoir des frontières fixes qui ne changent pas avec les générations, et qui cherchent à conserver un peuple ayant un sentiment cohérent d'appartenance. C'est ridicule. C'est une résistance à l'idée que le monde change, que la démographie change, ainsi que les idées des gens."
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