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Aurialie Jublin

Les objets connectés sont de plus en plus utilisés pour le harcèlement et l'i... - 0 views

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    "Lors de son entretien avec les agents de centres d'appel, une femme rapportait par exemple qu'elle avait allumé son climatiseur, mais celui-ci s'est éteint sans qu'elle y touche. Une autre expliquait que les numéros de code de la serrure numérique de sa porte d'entrée changeaient tous les jours et elle n'arrivait pas à comprendre pourquoi. Une autre femme encore expliquait qu'elle entendait toujours la sonnerie de la porte se déclencher, mais personne n'était à la porte. Selon le New York Times, ces histoires font partie d'un nouveau modèle de menaces ou de violences qui s'est invité dans les maisons avec la montée en puissance des objets connectés. Ces objets connectés sont de plus en plus utilisés par des personnes malveillantes pour harceler, surveiller, contrôler ou se venger sur d'autres personnes, souligne le New York Times. Graciela Rodriguez, qui gère un refuge d'urgence de 30 lits au Centre for Domestic Peace à San Rafael, en Californie, aurait déclaré au New York Times que certaines personnes sont déjà venues la voir avec des histoires de « ;trucs fous ;» comme des thermostats connectés allant soudainement jusqu'à 100 degrés ou des haut-parleurs intelligents qui se mettaient à jouer la musique à fond. Sans explication sur ce problème qui pourrait ressembler à un mauvais film d'exorcisme, ces personnes ont déclaré qu'elles commençaient à perdre le contrôle de leur maison et à devenir folles. Il faut préciser que les personnes malveillantes utilisant ces objets connectés à mauvais escient ne sont pas forcément des personnes hors de la vie des maisons ciblées. Quelques fois, il s'agirait d'un conjoint ayant mal digéré une rupture et disposant toujours des mots de passe des objets intelligents installés dans la maison. Une négligence donc de la part des victimes qui serait aggravée par le manque de connaissance sur le fonctionnement de ces appareils, soutient le New York Tim
Aurialie Jublin

Une ville plus accueillante pour les femmes : Millenaire 3, - 0 views

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    "<< Moins on est conforme à la norme hétérosexuelle virile dominante et moins on a d'emprise spatiale dans la ville >>. Spécialiste de la géographie du genre, Yves Raibaud est enseignant-chercheur à l'Université Bordeaux-Montaigne. Auteur de La ville faite par et pour les hommes (Belin, 2015), il démontre à quel point la ville se construit sur des normes hétéro-sexuelles et viriles.  Il ne cesse de dénoncer la banalisation du harcèlement des femmes dans l'espace public et redoute que la ville dite « durable et intelligente » aggrave encore les inégalités de genre."
Aurialie Jublin

[Internet] Internet : vive le prétendu anonymat ! - Libération - 0 views

  • Sale temps pour la privacy, comme on dit dans le monde des nouvelles technologies, c’est-à-dire pour notre intimité - le mot français est sans doute plus parlant. Elle était déjà menacée par les grandes plateformes numériques qui vivent de la prédation de nos données personnelles, et qui en savent parfois plus que nous sur nous-mêmes. Elle est désormais attaquée sur un deuxième front, politique cette fois, avec le retour sur le devant de la scène d’un serpent de mer aussi inutile que dangereux : l’appel à en finir avec «l’anonymat&nbsp;sur Internet».
  • «Forçons chacun à publier avec son vrai nom, et alors Internet redeviendra une agora paisible et constructive !» Le mantra est repris jusqu’au sommet de l’Etat. Tant pis si la recherche universitaire ne démontre pas de lien nécessaire entre «anonymat» et comportement haineux ou manipulateur sur les médias sociaux. Tant pis si le concept même d’anonymat numérique veut tout, et surtout rien dire - on laisse quasiment toujours des traces sur Internet, sauf efforts et technicité hors normes. Tant pis donc si «l’anonymat» n’existe pas et est à proprement parler, dans la grande majorité des cas, un pseudonymat, c’est-à-dire l’utilisation d’un identifiant qui ne renvoie pas directement à son nom, prénom. Tant pis si la justice, en France, a déjà les moyens techniques et légaux d’identifier qui se cache derrière une identité fictive, en cas de comportement délictueux et si elle est saisie. Au&nbsp;diable la nuance, transformons le Web en un gigantesque LinkedIn, et tout ira mieux !
  • Fait significatif, les contempteurs de l’anonymat - qui-est-en-fait-un-pseudonymat - ne font jamais l’effort de se demander à quels usages il renvoie concrètement, par delà le fantasme de l’immonde troll téléguidé par une puissance étrangère qui viendrait tourmenter l’honnête internaute à coups de théories du complot et de harcèlement organisé. S’ils faisaient cet effort, ils comprendraient, je l’espère, que l’horrible «anonymat» recouvre autant de libertés, et de possibilités, qu’il est en réalité urgent de défendre et de sanctuariser.
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  • La liberté d’exprimer des idées qui soient jugées pour elles-mêmes, et non pour l’identité de la personne qui les profère.
  • La liberté de dire ce que l’on pense, d’affirmer ou de discuter convictions politiques, religieuses, philosophiques, passions et centres d’intérêt personnels, sans avoir à affronter le qu’en-dira-t-on de ses voisins, de ses collègues, de son milieu.
  • La liberté de dire, tout court, quand son emploi ne le permet pas, que l’on ait un devoir de réserve - comme les fonctionnaires - ou une fonction sensible dans une entreprise.
  • La liberté de faire savoir ce qui se passe à son travail, en bien comme en mal, sans avoir à en référer à son patron, ni courir de risque professionnel.
  • La liberté de se dévoiler quand ce qu’on vit ou ce qu’on est peut attirer critiques, moqueries, menaces, opprobre sociale - quand on appartient à une population discriminée, et même si on n’a aucune honte à en avoir.
  • La liberté de changer, de ne pas être prisonnier de positions tenues ou d’erreurs commises des mois ou des années plus tôt, et que n’importe qui pourrait venir inspecter à tout moment, en passant au crible un nom sur tous les moteurs de recherche.
  • La liberté de ne pas tout partager avec tout le monde, d’avoir une vie compartimentée, une identité complexe, multiple, et de choisir comment, à et qui, on veut la dévoiler. Parce que tout le monde n’a pas fait le choix d’être une célébrité ou un «influenceur» vivant du voyeurisme institutionnalisé.
  • La liberté de créer, de tenter des choses, des expressions, des façons de faire - faut-il rappeler la place des pseudonymes dans l’histoire de la littérature ?
  • La liberté, en résumé et paradoxalement, d’être soi-même, sans&nbsp;passer son temps à s’autocensurer.
  • L’appel à cette transparence totalitaire, mais à sens unique - on aimerait que les politiciens qui la défendent s’astreignent à la même règle sur leurs rapports avec lobbys et financeurs - a, enfin, un ultime effet pervers : il fait peser le poids des problèmes actuels d’Internet, que nul ne conteste, sur l’utilisateur final, plutôt que sur leurs principaux coupables. Si vous voulez vraiment «civiliser» le Web, mesdames et messieurs les législateurs, portez plutôt votre attention sur le modèle économique et l’architecture technique des plateformes quasi monopolistiques qui le dominent et le façonnent. Donnez à la justice les moyens financiers et humains de poursuivre et de punir ceux qui abusent des canaux numériques pour menacer, insulter, harceler. Interrogez-vous sur les pratiques de vos propres partis, dont les militants ne sont pas les derniers à «ensauvager» ces nouveaux espaces de débat et d’expression. Votre responsabilité est immense. Notre vigilance la sera aussi.
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    "On n'est jamais totalement incognito sur les réseaux sociaux, on laisse toujours des traces. C'est donc une fausse bonne idée de supprimer ce relatif anonymat. Il recouvre en fait autant de libertés que de possibilités d'agir qu'il faut conserver."
Aurialie Jublin

Christchurch : les pyromanes appelés à éteindre l'incendie - La Quadrature du... - 0 views

  • Facebook fait mine de prendre conscience du problème de viralité lié à la plateforme en promettant aussi de «&nbsp;renforcer ses intelligences artificielles&nbsp;», encore une fois… Comme si, précisément, la «&nbsp;solution magique&nbsp;» de ses filtres automatisés ne venait pas d’être définitivement décrédibilisée, il y a deux mois, par une poignée d’internautes complices du tueur de Christchurch parvenant à les contourner pendant des jours, manifestement sans grand soucis. D’après Facebook, la première journée, 300 000 copies seraient passé au travers de ses filtres automatisés, n’étant traitées que pas son armée de modérateurs sous-payées et exposés aux pires conditions de travail.
  • Surtout, Facebook sait très bien que sa plateforme ne peut pas être corrigée, à moins de renoncer à son modèle économique, tout comme Google ou Twitter, véritable cœur du problème. La raison d’être de ces plateformes est de réunir le plus de personnes possibles en un seul endroit, pour les surveiller et leur proposer la publicité qui les influencera le plus.
  • Il est techniquement et humainement impossible de modérer d’aussi grosses plateformes pour éviter qu’elles ne deviennent des outils de harcèlement, de haine et de mort. Pire, pour maintenir tous nos cerveaux disponibles, leurs «&nbsp;intelligences artificielles&nbsp;» (qui ne se montrent efficaces qu’ici) entretiennent autant que possible la culture du buzz et, par là, le conflit, la caricature, la peur – tout ce qu’il faut pour éviter l’entraide et la cohésion. C’est le prix à payer pour capter plusieurs milliards de cerveaux en même temps, et ils ne renonceront jamais à nous le faire payer (c’est pourquoi nous luttons pour le développement d’un Web décentralisé et à taille humaine).
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  • Et, bien sûr, leur emprise s’exerce en marchant sur nos libertés fondamentales, exploitant nos données personnelles et violant le RGPD pour mieux nous contrôler (voir nos plaintes devant la CNIL et la première sanction de celle-ci en réponse contre Google).
  • Il y a 2 mois, le Parlement européen a adopté en première lecture le règlement terroriste, dont l’objectif principal est de généraliser les filtres automatisés de Google et Facebook à l’ensemble du Web – oui, ces mêmes filtres qui viennent de démontrer toute leur inefficacité. Pour imposer ces filtres à tout le monde, le gouvernement français, qui est à l’initiative de ce texte avec l’Allemagne, n’a pas peur de détruire le Web européen composé d’une multitude de petits acteurs et, ainsi, de laisser les GAFAM en maîtres. En vrai, ces géants s’étant montrés particulièrement coopératifs dans l’ambition de Macron de «&nbsp;civiliser&nbsp;» Internet, ils apparaissent comme des alliés de choix qu’il vaudrait mieux laisser régner (voir notre premier bilan sur le règlement terroriste).
  • En ce moment, c’est la proposition de loi LREM «&nbsp;contre la haine en ligne&nbsp;» qui reprend cette entente Macron-GAFAM&nbsp;: les géants s’engagent à faire le travail de la police et de la justice sur Internet et, en échange, le gouvernement les présente en «&nbsp;solutions&nbsp;», légitime leur toute puissance, les laisse tranquille et les invite à tous ses événements sur «&nbsp;comment la technologie sauvera le monde&nbsp;». Comme on l’a vu dans notre dernier article, cette alliance risque aussi de conduire à la censure de critiques anti-Macron ou de mouvements sociaux un peu trop dérangeants…
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    "Facebook, qui participait au lancement de la campagne aux côtés de Google, a aussitôt répondu : il empêchera désormais ses utilisateurs les plus suspects de diffuser des vidéos en direct - outil qu'avait utilisé le tueur de Christchurch. Cette réponse de Facebook est bien à la hauteur des attentes du gouvernement Macron, qui recevait précisément Mark Zuckerberg la semaine dernière : de la poudre aux yeux pour que surtout rien ne change, au mépris de la gravité des événements. "
Aurialie Jublin

The next billion users : une immersion dans l'internet des pauvres - Digital Society Forum - 0 views

  • Rien n’y fait : équipés d’Internet, les pauvres ne font pas du tout ce qu’on attend d’eux, à savoir se sortir de la pauvreté. Les cabines numériques disposées dans les villages indiens deviennent des bornes d’arcade et, surprise, les cent millions d’ordinateurs de l’opération « One laptop per child » (financée par des entreprises, notamment AMD, Brightstar Corporation, eBay, Google, Marvell, etc.) n’ont pas réduit le fossé éducatif, sans doute parce qu’ils avaient été distribués à des enfants ne sachant parfois ni lire ni écrire. Des absurdités de ce type, l’autrice en dresse une longue liste, comme ces smartphones que l’on distribue à de jeunes femmes n’ayant le droit de s’en servir que pour passer des appels d’urgence. A New Delhi, d’autres jeunes femmes (les «&nbsp;computer girls ») deviennent des craques de l’informatique, mais restent assignées à leur statut traditionnel, système de castes oblige. Le constat est sans ambiguïté : non seulement la technologie tombe du ciel sans être intégrée dans une quelconque stratégie sociale, mais toute tentative de réappropriation est méprisée et découragée.
  • Histoire similaire en Chine, où l’on craignait que les cybercafés populaires ne favorisent les activités anti-régime. Ils furent rapidement interdits aux mineurs et on y généralisa le tracking, une pratique désormais monnaie courante dans l’Empire du Milieu. D’exemple en exemple, Payal Arora démontre que les décisions prises par les pouvoirs en place n’ont eu de cesse de réduire l’accès à Internet et à la culture aux personnes les moins dotées, sous prétexte que l’usage qui en serait fait n’entrerait pas dans les bons standards de moralité. Comme souvent, les pauvres font l’objet de politiques paternalistes : on leur demande d’être vertueux et le moindre faux pas les condamne.
  • A l’inverse, la débrouille des quartiers défavorisés est érigée en exemple à suivre. La mode de l’innovation frugale (ou « Jugaad innovation » ) qui consiste à innover avec des ressources limitées, en témoigne. En Inde par exemple, la customisation des véhicules afin de transporter plus de passagers est souvent mise en avant. Cependant, elle augmente sensiblement le nombre d’accidents : « la frugalité a un coût, celui de la sécurité », écrit Arora. Les Nano cars de Tata – des petites voitures accessibles au plus grand nombre – quant à elles, sont certes pratiques mais occasionnent de lourds dégâts environnementaux : rien ne dit aujourd’hui que ces innovations améliorent réellement la vie des pauvres, affirme la chercheuse
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  • Plus grave encore, il y a fort à parier qu’elles freinent les solutions de plus long terme comme par exemple le développement de transports publics accessibles à tous. Côté mobile, une application comme AquaSift permet de détecter la toxicité de l’eau mais ne résout en rien le fait que dans beaucoup de communautés pauvres, y accéder reste difficile. On ne change pas le gouvernement avec une application. Si l’innovation frugale rencontre un succès fulgurant en Occident, ce n’est que parce que nous en avons totalement romantisé l’image.
  • En somme, la frugalité (Jugaad en Inde, « Shan-zaï » en Chine, « Gambiarra », «&nbsp;Bacalhau » ou « Jeitinho » au Brésil) est aussi une forme de solutionnisme technologique qui repose, une fois encore, sur la confortable conviction que les pauvres ont toutes les ressources en eux pour s’en sortir, pourvu qu’ils articulent habilement leurs problèmes aux dernières technologies disponibles.
  • Payal Arora n’a pas de mots assez durs pour dénoncer la vaste supercherie du système. Non seulement aucune relation de causalité n’a prouvé son efficacité, mais en plus, il structure l’éducation dans un sens qui pose une multitude de questions d’ordre éthiques et politiques. Ainsi, ces appareils et les programmes soi-disant éducatifs avec lesquels ils fonctionnent restent des boîtes noires, indisponibles à tout audit sérieux. L’expérimentation, qui dure 75 jours, nécessite la présence d’un ou plusieurs adultes dont on ne connaît pas la rémunération et le protocole de suivi des enfants est tout sauf rigoureux scientifiquement. Des études plus sérieuses ont rapporté que la plupart des machines ne fonctionnaient pas, faute de connexion Internet. Et quand elles marchaient, elles étaient souvent monopolisés par de jeunes garçons devant des jeux vidéos. Enfin, les contenus pédagogiques, souvent en anglais, présentent un danger pour la pérennité des langues traditionnelles. Pour le professeur Mark Warschauer (University of California), cité par Arora, ces dispositifs sont un échec total. Pourtant, Mitra a bien récolté un million d’euros grâce au Ted Prize pour cette «&nbsp;école dans le cloud » résolument inefficace… Pour Arora, cette triste histoire trouve ses racines dans la foi encore trop peu contestée dans le constructivisme , une théorie qui stipule que l’enfant peut apprendre seul et sans professeur.
  • En prenant un peu de hauteur, la chercheuse critique plus largement une certaine forme de philanthropie très à la mode dans les milieux technologiques. Elle l’accuse ouvertement d’être contre-productive et de servir les intérêts de grandes corporations plus que des populations pauvres : « la technologie est devenue une institution en soi, la pauvreté une opportunité. La croyance néolibérale en l’efficacité absolue du marché transforme n’importe quelle inégalité en actif pour l’innovation. » Pour Arora, cette idéologie vient justifier la nécessité de tester sur les moins aisés de nouvelles solutions qu’un riche Occidental n’imaginerait même pas pour ses propres enfants. Les pauvres n’ont pas besoin de plus d’innovation, mais de moins d’innovation, affirme-telle : « Si l’innovation est une courroie de transmission pour des projets pilote, alors les pauvres seront mieux sans. Ils ne devraient pas servir de rats de laboratoires pour les nouvelles technologies. Le simple fait qu’une technologie est nouvelle ne devrait pas justifier en soi qu’on l’expérimente sur des pauvres ».
  • Sa dénonciation englobe aussi le projet « AltSchool » largement financé par Mark Zuckerberg et Priscilla Chan, une sorte de « classe Ikea », où les enfants terminent seuls devant des écrans, pour un prix conséquent et sans que son efficacité réelle soit démontrée. Le plus grand problème selon elle, reste que le marché pardonne plus facilement les défaillances technologiques qu’humaines : la Silicon Valley peut réinjecter des millions de dollars pour trouver une nouvelle solution technique à un problème ancien, mais elle refuse de réfléchir aux problèmes de fond, comme le manque de professeurs ou l’état désastreux des écoles dans certains quartiers.
  • En dernière partie d’ouvrage, Payal Arora attaque les questions liant surveillance et vie privée. On le savait déjà, les pauvres en ont toujours été surveillés. Le « social credit system » chinois et son cousin indien « Unique Digital Number » (UID) sont ainsi connus pour conforter les hiérarchies sociales en place et agir par contagion : en Chine, fréquenter une personne dont le score est bas revient à prendre le risque de voir baisser son propre score. On en déduirait un peu rapidement que dans les pays pauvres, et plus généralement en dehors de l’Occident, la vie privée aurait moins de valeur aux yeux des individus. A y regarder de près, cela semble un peu plus compliqué. En interrogeant plus largement les usages quotidiens des réseaux sociaux dans les favelas et autres bidonvilles, Arora montre qu’ici comme là-bas, la vie privée n’est pas sans valeur ni abstraite, mais un concept avant tout lié à des particularités culturelles. Au Brésil par exemple, une jeune femme déclare ne pas en vouloir à sa mère de la « stalker » en ligne (c’est-à-dire à suivre ces déplacements, fouiller ses messages et autres réseaux d’amis)
  • En Inde, Facebook est pour de nombreux jeunes l’occasion de parler au sexe opposé, chose difficile dans la vie réelle. Le Chat est à ce titre tout à fait adapté à la romance, à travers des poèmes et autres conversations romantiques. Cependant, à l’échelle mondiale, un tiers de ces échanges se font anonymement, avant tout pour protéger les données personnelles et par souci de réputation, notamment en Asie.
  • Arora en profite pour démonter les profonds préjugés qui tendent nous à faire croire que parce que l’on est pauvre, parce que l’on vit dans une communauté étroitement liée, parfois à plusieurs dans une même pièce, on ne valoriserait pas la vie privée. En réalité, les pauvres, dans les pays étudiés par Arora, ne sont pas moins attachés à la confidentialité que les Occidentaux, même si celle-ci prend différentes significations en fonction des pays, des cultures et des genres. Dans un village en Jordanie, la confidentialité sert avant tout à protéger la vertu féminine et l’honneur masculin (préserver son image dans la communauté, ne pas s’exposer publiquement pour les femmes). Dans une famille aisée du Royaume-Uni, elle préserve l’innocence des jeunes (notamment à travers le filtrage des contenus). Plus encore qu’en Occident, préserver sa confidentialité dans les pays pauvres relève de la lutte car le succès immense des réseaux amène aussi son lot de danger : « revenge porn » et harcèlement peuvent ruiner la réputation d’un individu, conduire à l’exil et même au suicide.
  • The Next Billion Users, Digital Life Beyond the West est, en résumé, une étude inestimable, formidablement documentée et regorgeant d’illustrations plus pertinentes les unes que els autres. Loin des théories globalisantes qui tendent à mettre dans un même sac « Les Chinois », « Les Indiens », quitte à les opposer à l’Occident dans une lutte pour la puissance technologique, cette enquête de terrain vient au contraire contredire nos préjugés sur ce monde que nous jugeons bien souvent à l’emporte-pièce et sans nous embarrasser de détails. A travers son étude et notamment ses entretiens et anecdotes, la chercheuse met en lumière les relents colonialistes qui ponctuent les relations Nord-Sud, notamment en matière numérique. Arora brise notre propension à romantiser la pauvreté, à ne l’envisager qu’à travers nos lunettes postcoloniales, comme une tribu de bons sauvages qu’il faudrait éduquer à notre mode de vie. Enfin, elle réduit en poussière le fantasme du pauvre débrouillard, entrepreneur par nature, auto-organisé et vertueux. Cette vision, biaisée, n’a pour objet que d’asseoir les projets technocratiques de l’Occident, qui ne regarde que ses intérêts propres et surtout pas ceux des populations « à civiliser ».
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    "A quoi ressemble l'Internet des pauvres ? Pas à l'image romantique forgée par la philanthropie occidentale, explique l'anthropologue Payal Arora. Pourtant, cette conception paternaliste de la pauvreté informe toujours nombre d'initiatives de développement par la technologie, qui s'apparentent à une nouvelle forme de solutionnisme."
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