Comme le relevait le sociologue Robert Castel dans son livre phare «Les métamorphoses de la question sociale, chronique du salariat», ce statut a longtemps été, jusqu'au début du XXe siècle, l'apanage d'une minorité. Et pas de la plus chanceuse : être salarié, au milieu du XIXe siècle, c'était faire partie de la lie de la société. On peine à imaginer aujourd'hui, dans notre société dominée par ce mode d'organisation sociale, tout ce que le statut de salarié pouvait avoir de dégradant, dans une France encore largement agricole, où les agriculteurs plus ou moins riches mais pour la plupart d'entre eux propriétaires, ou espérant le devenir, étaient les plus nombreux, aux côtés des artisans et bourgeois. Le salarié, c'était celui qui n'avait rien. Aucun patrimoine. Rien que ses bras. C'était donc, initialement, le prolétaire. Un prolétaire souvent en marge de la société, effrayant le bourgeois, relevant des classes dites alors «dangereuses».