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Aurialie Jublin

Technologie : l'âge sombre | InternetActu.net - 0 views

  • Pire, la technologie s’est fait la complice de tous les défis auxquels nous sommes confrontés : à la fois d’un système économique hors de contrôle qui ne cesse d’élargir les inégalités, la polarisation politique comme le réchauffement climatique. Pour Bridle, la technologie n’est pas la solution à ces défis, elle est devenue le problème. Il nous faut la comprendre plus que jamais, dans sa complexité, ses interconnexions et ses interactions : mais cette compréhension fonctionnelle ne suffit pas, il faut en saisir le contexte, les conséquences, les limites, le langage et le métalangage.
  • Trop souvent, on nous propose de résoudre ce manque de compréhension de la technologie par un peu plus d’éducation ou son corollaire, par la formation d’un peu plus de programmeurs. Mais ces deux solutions se limitent bien souvent en une compréhension procédurale des systèmes. Et cette compréhension procédurale vise surtout à renforcer la « pensée computationnelle », c’est-à-dire la pensée des ingénieurs et des informaticiens qui n’est rien d’autre que le métalangage du solutionnisme technologique 
  • Les systèmes techniques sont devenus de plus en plus complexes. Trop critiques et interconnectés pour être compris, pensés ou conçus. Leur compréhension n’est disponible plus que pour quelques-uns et le problème est que ces quelques-uns sont les mêmes que ceux qui sont au sommet des structures de pouvoir. Pour James Bridle, il y a une relation causale entre la complexité des systèmes, leur opacité, et les violences et inégalités qu’ils propagent.
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  • Le cloud (l’informatique en nuage) n’est plus une métaphore du réseau, c’est l’incarnation de ce système global et surpuissant qu’aucun d’entre nous ne peut désormais attraper. Ce nuage est pourtant une bien mauvaise métaphore. Rien de ce qu’il recèle n’y est sans poids, rien n’y est amorphe ou invisible. Le cloud cache une infrastructure physique complexe faite de lignes téléphoniques, de fibre optique, de satellite, de vastes entrepôts d’ordinateurs, qui consomment d’énormes quantités d’énergie et qui influent sur de multiples juridictions. Le cloud est l’incarnation d’une nouvelle industrie.
  • De la sécurité nationale aux secrets industriels, il y a beaucoup de raisons à obscurcir ce que recouvre ce nuage. Mais ce qui s’en évapore est assurément notre propriété (dans les nuages, tout appartient à d’autres) et notre agentivité, c’est-à-dire notre capacité à faire.
  • Le réseau donne l’impression d’être à la fois l’idéal de progrès le plus abouti et l’idéal de base de notre culture tout en paraissant avoir émergé inconsciemment, poursuivant son but d’interconnexion sans fin pour lui-même et par lui-même… « Nous présumons que l’interconnexion est inhérente et inévitable. Le réseau semble être devenu le résultat du progrès, son accomplissement ultime », à l’image de machines qui accompliraient ainsi leurs propres désirs. Internet semble avoir accompli l’idéal des Lumières, l’idéal du progrès : celui que plus de connaissance et plus d’information conduit toujours à prendre de meilleures décisions.
  • Mais n’est-ce pas plutôt le contraire auquel nous assistons ? « Ce qui était censé éclairer le monde l’a obscurci. L’abondance d’information et la pluralité d’opinion accessible à tous n’ont pas produit un consensus cohérent, mais au contraire a déchiré la réalité en narrations simplistes, en théories fumeuses et en politique d’opinion. Contrairement au Moyen Âge, où l’âge sombre était lié à une perte de connaissance antique, l’âge sombre moderne est lié à une abondance de connaissance dont nous ne savons plus démêler collectivement l’apport. »
  • L’obscurité dont parle Bridle c’est notre incapacité à voir clairement ce qui est devant nous, avec capacité et justice. Pour Bridle pourtant, ce constat ne doit pas être lu comme une condamnation de la technologie. Au contraire. Pour relever l’âge sombre qui s’annonce, il nous faut nous engager plus avant dans la technologie, avec elle, mais avec une compréhension radicalement différente de ce qu’il est possible d’en faire, en retrouver un sens que la seule recherche d’efficacité nous a fait perdre. Tout comme le changement climatique, les effets de la technologie s’étendent sur le globe et affectent tous les aspects de nos vies. Mais comme le changement climatique, ses effets sont potentiellement catastrophiques et résultent de notre incapacité à comprendre les conséquences de nos propres inventions. Nous devons changer de manière de voir et penser le monde, nous invite Bridle, un peu facilement ou naïvement.
  • « En rapprochant la simulation de l’approximation, les grands prêtres de la pensée computationnelle pensent remplacer le monde par des modèles biaisés de lui-même ; et en le faisant, les modeleurs s’assurent du contrôle du monde. » James Bridle s’inscrit dans la continuité des constats de l’historien des sciences David Noble qui, dans Le progrès sans le peuple notamment, soulignait combien la pensée des ingénieurs avait contribué à donner du pouvoir aux puissants plutôt que favoriser l’équité ou la démocratie ; comme dans celle de Richard Sclove du Loka Institute, qui dans Choix technologiques, choix de société, soulignait combien les enjeux démocratiques restaient le parent pauvre de la question technologique.
  • La pensée computationnelle s’infiltre partout : elle devient notre culture. Elle nous conditionne à la fois parce qu’elle nous est illisible et à la fois parce que nous la percevons comme neutre émotionnellement et politiquement. Les réponses automatisées nous semblent plus dignes de confiance que celles qui ne le sont pas. Dans la pensée computationnelle, nous sommes victimes du biais d’automatisation : « nous avons plus confiance dans l’information automatisée que dans notre propre expérience, même si elle est en conflit avec ce qu’on observe ». Les conducteurs de voitures comme les pilotes d’avion ont plus tendance à croire leurs instruments que leur expérience, même si celle-ci n’est pas alignée.
  • Pour Bridle, l’informatique, en ce sens, est un piratage de notre capacité cognitive, de notre capacité attentionnelle, qui renvoie toute responsabilité sur la machine. « À mesure que la vie s’accélère, les machines ne cessent de prendre en main de plus en plus de tâches cognitives, renforçant par là leur autorité – sans regarder les conséquences ». « Nous nous accommodons de mieux en mieux et de plus en plus aux confortables raccourcis cognitifs que nous proposent nos machines. L’informatique remplace la pensée consciente. Nous pensons de plus en plus comme des machines, ou plutôt nous ne pensons plus du tout ! ».
  • « Ce qui est difficile à modéliser, à calculer, à quantifier, ce qui est incertain ou ambigu, est désormais exclu du futur possible. » L’informatique projette un futur qui ressemble au passé (« Les algorithmes ne prédisent pas le futur, ils codifient le passé », disait déjà Cathy O’Neil). La pensée computationnelle est paresseuse. Elle propose finalement des réponses faciles. Elle nous fait croire qu’il y a toujours des réponses.
  • les réseaux souffrent d’une gouvernance fragmentée, sans responsabilités claires, peu cartographiés et sous-financés ; des infrastructures en silos ; des investissements privés comme publics insuffisants et plus encore un manque de compréhension de la complexité de leur fonctionnement… expliquent leur fragilité intrinsèque et la difficulté de leur maintenance. Ajoutez à cela les impacts du changement climatique sur leur maintenance et leur évolution et vous comprendrez que les réseaux ne sont pas dimensionnés pour faire face au futur. Bref, non seulement l’informatique contribue largement au réchauffement climatique, mais elle risque d’en être l’une des principales victimes.
  • Mais les grands volumes de données ne produisent pas de la connaissance automatiquement. Dans la recherche pharmacologique par exemple, les dépenses et investissements n’ont jamais été aussi forts alors que les découvertes, elles, n’ont jamais produit aussi peu de nouveaux traitements. On appelle cela la loi d’Eroom : l’exact inverse de la loi de Moore. Le nombre de résultats de recherche chute et ces résultats sont de moins en moins dignes de confiance. Si les publications scientifiques n’ont jamais été aussi volumineuses (au détriment de leur qualité), les rétractions ont augmenté et le nombre de recherches ayant un impact significatif, elles, ont diminué proportionnellement. La science connaît une crise de réplicabilité majeure.
  • Plusieurs facteurs expliquent ce revirement de la loi du progrès. La première est que les choses les plus évidentes à découvrir ont été exploitées. La régulation est également devenue plus exigeante et la société moins tolérante aux risques. Mais le problème principal relève certainement des méthodes désormais employées. Historiquement, la découverte de médicament était le fait de petites équipes de chercheurs qui se concentrait intensément sur de petits groupes de molécules. Mais depuis 20 ans, ces processus ont été largement automatisés, sous la forme de ce qu’on appelle le HTS (High-throughput screening pour criblage à haut débit) qui consiste en des recherches automatisées de réactions potentielles via de vastes bibliothèques de composants. Le HTS a priorisé le volume sur la profondeur. Ce qui a marché dans d’autres industries a colonisé la recherche pharmaceutique : automatisation, systématisation et mesures… Certains commencent à douter de l’efficacité de ces méthodes et voudraient revenir à l’empirisme humain, au hasard, au bordel, au jeu… À nouveau, « la façon dont nous pensons le monde est façonnée par les outils à notre disposition ». Nos instruments déterminent ce qui peut être fait et donc, ce qui peut être pensé. À mesure que la science est de plus en plus technologisée, tous les domaines de la pensée humaine le sont à leur tour. Les vastes quantités de données ne nous aident qu’à voir les problèmes des vastes quantités de données.
  • Les bourses et places de marchés d’antan ont été remplacées par des entrepôts, des data centers, anonymes, dans des banlieues d’affaires impersonnelles. La dérégulation et la numérisation ont transformé en profondeur les marchés financiers. La vitesse des échanges s’est accélérée avec la technologie. Les transactions à haute fréquence (HFT, High-frequency trading) reposent sur la latence et la visibilité. La latence, c’est-à-dire la rapidité d’échange où des millions peuvent s’échanger en quelques millisecondes et la visibilité (sauf pour les non-initiés), c’est-à-dire le fait que les échanges sont visibles de tous les participants, instantanément. Les échanges reposent sur des algorithmes capables de calculer des variations éclair et de masquer les mouvements de fonds. Les échanges sont plus opaques que jamais : ils s’imposent sur des forums privés, les « dark pools » (en 2015, la SEC, l’organisme américain de réglementation et de contrôle des marchés financiers, estimait que les échanges privés représentaient 1/5e du total des échanges)… Les échanges financiers ont été rendus obscurs et plus inégaux que jamais, rappelle Bridle.
  • Pour Bridle, l’une des clefs qui expliquent que les inégalités se renforcent avec la technologie est intrinsèquement liée à l’opacité des systèmes. Comme les robots des entrepôts d’Amazon et ses employés commandés par des commandes vocales émanant de robots, nous sommes en train d’arranger le monde pour rendre les machines toujours plus efficaces, quitte à ce que le monde devienne incompréhensible et inadapté aux humains. Les travailleurs deviennent le carburant des algorithmes, utiles seulement pour leurs capacités à se déplacer et à suivre des ordres. Pour Bridle, les startups et les Gafam signent le retour des barons voleurs, ces tyrans industriels du XIXe siècle. La technologie est venue couvrir d’un voile d’opacité la prédation : l’avidité s’est habillée de la logique inhumaine des machines. Amazon ou Uber cachent derrière des pixels lumineux un système d’exploitation sans faille
  • Pour la sociologue Deborah Cowen (@debcowen), nous sommes entrés dans la tyrannie de la techne explique-t-elle dans The Deadly Life of Logistics (2014) : l’efficacité est devenu primordiale sur tous les autres objectifs, sur toutes les autres valeurs
  • Autre exemple avec How-Old.net un outil de reconnaissance faciale qui tente de prédire l’âge d’une personne, et qui a été utilisée pour deviner l’âge de migrants arrivants au Royaume-Uni. Microsoft, qui a développé cette application, s’est défendu et a dénoncé cette utilisation… comme les 2 chercheurs chinois. Ceux-ci expliquaient néanmoins dans leur défense que leur système était « sans préjugé » (sic). Comme souvent, on nous explique que la technologie, et plus encore l’apprentissage automatisé, est neutre. Mais « la technologie n’émerge pas de nulle part. Elle est toujours la réification de croyances et de désirs, notamment de ses créateurs. Leurs biais sont encodés dans les machines et les bases de données ou les images que nous prenons du monde. »
  • Pour Bridle, le problème n’est pas tant que les machines puissent réécrire la réalité, mais que la réalité, le passé comme le futur, ne puissent plus être correctement racontés. DeepDream de Google illustre parfaitement cela. L’enjeu n’est pas pour nous de comprendre ce qu’est l’image, mais de nous demander ce que le réseau de neurones veut y voir ?
  • Pour Bridle, nous devrions ajouter une 4e loi aux trois lois de la robotique d’Asimov. Les machines intelligentes devraient être capables de s’expliquer aux humains. Ce devrait être une loi première, car éthique. Mais le fait que ce garde-fou ait déjà été brisé laisse peu d’espoir quant au fait que les autres règles le soient à leur tour. « Nous allons devoir affronter un monde où nous ne comprendrons plus nos propres créations et le résultat d’une telle opacité sera toujours et inévitablement violent ».
  • Pour Bridle, l’alliance entre l’humain et la machine peut encore fonctionner, comme l’a montré Garry Kasparov avec les échecs avancés, consistant à ce qu’une IA et qu’un humain jouent ensemble plutôt qu’ils ne s’affrontent. C’est dans la perspective d’associer les talents des humains et des machines, d’associer leurs différences d’une manière coopérative plutôt que compétitive que nous parviendrons à réduire l’opacité computationnelle. La perspective que l’intelligence des machines nous dépasse dans nombre de disciplines est une perspective destructrice. Nous devons trouver la voie d’une éthique de la coopération avec les machines, plutôt qu’un affrontement.
  • Bridle s’en prend également longuement à la surveillance et notamment à la surveillance d’Etat pour souligner combien elle nous est masquée et continue à l’être, malgré les révélations d’Edward Snowden. Vous pouvez lire n’importe quel e-mail dans le monde d’une personne dont vous avez l’adresse. Vous pouvez regarder le trafic de tout site web. Vous pouvez suivre les mouvements de tout ordinateur portable à travers le monde. Pour Bridle, cela nous a montré qu’il n’y a pas de restriction possible à la capacité de surveillance du réseau. L’échelle et la taille de la surveillance a excédé ce que nous pensions comme étant techniquement possible.
  • En opposition au secret, nous demandons de la transparence, mais elle n’est peut-être pas le bon levier. La NSA et Wikileaks partagent la même vision du monde avec des finalités différentes, rappelle Bridle. Les deux pensent qu’il y a des secrets au coeur du monde qui, s’ils étaient connus, pourraient rendre le monde meilleur. Wikileaks veut la transparence pour tous. La NSA veut la transparence pour elle. Les deux fonctionnent sur une même vision du monde. Wikileaks ne voulait pas devenir le miroir de la NSA, mais voulait briser la machine de surveillance. En 2006, Assange a écrit « Conspiracy as Governance » (.pdf). Pour lui, tout système autoritaire repose sur des conspirations, car leur pouvoir repose sur le secret. Les leaks minent leur pouvoir, pas par ce qui fuite, mais parce que la peur et la paranoïa dégradent la capacité du système autoritaire à conspirer. Mais les fuites de données ne suffisent pas à remettre en cause ou à abattre l’autorité. Les révélations ne font pas bouger l’opinion, sinon, nous aurions réagi bien avant les révélations de Snowden. Tant que les organisations de surveillance ne changent pas de l’intérieur, ceux qui sont en dehors de ces organisations, comme les lanceurs d’alertes, n’ont pas de capacité d’action. Ils attendent que des fonctionnaires ou que la justice confirment ce qu’ils avancent.
  • Mais la lumière du calcul nous dépossède de pouvoir, car elle nous fait crouler sous l’information et nous donne un faux sens de la sécurité. C’est là encore une conséquence de la pensée computationnelle. « Notre vision est devenue universelle, mais notre capacité d’action, elle, s’est réduite plus que jamais. » A l’image du réchauffement climatique, à nouveau, « nous savons de plus en plus de choses sur le monde, mais nous sommes de moins en moins capable d’agir sur lui ». Au final, nous nous sentons plus démunis que jamais. Plutôt que de reconsidérer nos hypothèses, nous nous enfonçons dans la paranoïa et la désintégration sociale.
  • Le monde est devenu trop complexe pour des histoires simples. En fait, « la démultiplication de l’information ne produit pas plus de clarté, mais plus de confusion ». L’un des symptômes de la paranoïa consiste à croire que quelqu’un vous surveille. Mais cette croyance est désormais devenue raisonnable, s’amuse Bridle en évoquant la surveillance d’Etat comme la surveillance des services numériques. Nous sommes entièrement sous contrôle, tant et si bien qu’on peut se demander qui est paranoïaque désormais ?
  • « Les théories conspirationnistes sont le dernier ressort des sans pouvoirs, imaginant ce que serait que d’être puissant », avance Bridle. Pour le spécialiste de la postmodernité, Frederic Jameson, les théories conspirationnistes sont « la cartographie cognitive des plus démunis dans un âge postmoderne ». C’est la figure dégradée de la logique par ceux qui ont le moins de capital culturel, une tentative désespérée de se représenter un système qu’ils ne comprennent pas. Encerclé par l’évidence de la complexité, l’individu a recours à un récit simpliste pour tenter de regagner un peu de contrôle sur la situation. À mesure que la technologie augmente et accélère le monde, celui-ci devient plus complexe. Les théories conspirationnistes deviennent alors des réponses, étranges, intriquées et violentes, pour s’en accommoder.
  • Ainsi, si vous cherchez de l’information sur les vaccins, vous tomberez invariablement sur de l’information contre les vaccins. Si vous cherchez de l’information sur la rotondité de la terre, vous tomberez inexorablement sur ceux qui pensent qu’elle est plate. Ces opinions divergentes semblent devenir la majorité tant elles sont exprimées et répétées avec force. « Ce qui se passe quand vous désirez en savoir de plus en plus sur le monde entre en collision avec un système qui va continuer à assortir ses réponses à n’importe quelle question, sans résolution ». Vous trouverez toujours quelqu’un pour rejoindre vos points de vue. Et toujours un flux pour les valider. Voici l’âge de la radicalisation algorithmique (à l’image de ce que disait Zeynep Tufekci de YouTube). Les théories conspirationnistes sont devenues la narration dominante. Elles expliquent tout. Dans la zone grise des connaissances, tout prend un sens.
  • Les failles des algorithmes sont les dernières failles du capitalisme où certains s’infiltrent non pas pour le renverser, mais pour tenter de gratter un peu d’argent que les plus gros systèmes s’accaparent. Au final, des vidéos automatisées finissent par être vues par des enfants. Leurs personnages préférés y font n’importe quoi, parfois suggèrent des scènes de meurtre ou de viols. Ces effets de réseaux causent des problèmes réels. Les algorithmes de YouTube ont besoin d’exploitation pour produire leurs revenus. Derrière leurs aspects séduisants, ils encodent les pires aspects du marché, notamment l’avidité. « La capacité à exploiter l’autre est encodée dans les systèmes que nous construisons », pointe très justement James Bridle, puisque leur efficacité repose sur leur capacité à extraire de l’argent de nos comportements.
  • À défaut d’une solution, Google annonçait en avril que l’application YouTube Kids allait devenir « non-algorithmique »… À croire, comme le pointait très justement le chercheur Olivier Ertzscheid, que l’algorithimsation n’est pas une solution sans limites.
  • Pour Bridle, les humains sont dégradés des deux côtés de l’équation : à la fois dans l’exploitation qui est faite de leur attention et à la fois dans l’exploitation de leur travail. Ces nouvelles formes de violence sont inhérentes aux systèmes numériques et à leur motivation capitaliste. Le système favorise l’abus et ceux qui le produisent sont complices, accuse-t-il. L’architecture qu’ils ont construite pour extraire le maximum de revenus des vidéos en ligne a été hackée par d’autres systèmes pour abuser d’enfants à une échelle massive. Les propriétaires de ces plateformes ont une responsabilité forte dans l’exploitation qu’ils ont mise en place. « C’est profondément un âge sombre quand les structures qu’on a construites pour étendre la sphère de communications sont utilisées contre nous d’une manière systématique et automatique. »
  • Pour Bridle, les fausses nouvelles ne sont pas le produit de l’internet. Elles sont le produit de la cupidité et de la démocratisation de la propagande où tout a chacun peut devenir un propagandiste. Elles sont un amplificateur de la division qui existe déjà dans la société, comme les sites conspirationnistes amplifient la schizophrénie.
  • Mais ce qu’il y a de commun avec le Brexit, les élections américaines ou les profondeurs de YouTube, c’est que malgré tous les soupçons, il reste impossible de savoir qui fait ça, qu’elles sont leurs motivations, leurs intentions. On peut regarder sans fin ces flux vidéos, on peut parcourir sans fin les murs de mises à jour de statuts ou de tweets… cela ne permet pas de discerner clairement ce qui est généré algorithmiquement ou ce qui est construit délibérément et soigneusement pour générer des revenus publicitaires. On ne peut pas discerner clairement la fiction paranoïaque, l’action d’États, la propagande du spam… Ces confusions servent les manipulateurs quels qu’ils soient bien sûr, mais cela les dépasse aussi. C’est la manière dont le monde est. Personne ne semble réellement décider de son évolution… « Personne ne veut d’un âge sombre, mais nous le construisons quand même et nous allons devoir y vivre. »
  • Exploiter plus de données pour construire de meilleurs systèmes est une erreur. Cette méthode ne parviendra pas à prendre en compte la complexité humaine ni à la résoudre. Le développement de l’information n’a pas conduit à une meilleure compréhension du monde, mais au développement de points de vue alternatifs et concurrents. Nous devons changer nos façons de penser comme nous y invitait Lovecraft. Nous ne survivrons pas plus à l’information brute qu’à la bombe atomique. Le nouvel âge sombre est un lieu où le futur devient radicalement incertain et où le passé devient irrévocablement contesté. Mais c’est le présent dans lequel nous devons vivre et penser. Nous ne sommes pas sans pouvoir ni capacités. Mais pour cela nous devons nous défaire des promesses illusoires de la pensée computationnelle. Penser le monde autre, c’est ce à quoi nous invite James Bridle dans le nouvel âge sombre.
  • Reste à savoir si cet âge sombre des technologies est vraiment notre avenir. L’âge sombre du Moyen Âge n’a jamais vraiment existé ailleurs que dans les lacunes des historiens. On peut douter également de cette nouvelle obscurité ou regretter le titre faussement prophétique. Reste que la complexité et l’intrication du monde que décrit James Bridle, montrent combien il nous faut, plus que jamais, nous défaire justement d’une vision simple et manichéenne de la technologie.
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    "Ce New Dark Age porte un titre prophétique et apocalyptique. Un peu trop peut-être. C'est effectivement un livre très critique sur notre rapport à la technologie, très éloigné du rapport souvent curieux et amusé que Bridle portait aux technologies avec la nouvelle esthétique. En une dizaine de chapitres, Bridle explore les glitchs qui sont désormais devenus des schismes, des scissions, des ruptures… comme s'ils n'étaient plus aussi distrayants. Dans son livre, il montre combien les bugs se cristallisent en caractéristiques. Combien la complexité technique que nous avons construite s'entremêle pour produire des effets en réseau, complexes, profonds, intriqués que nous ne parvenons plus vraiment à démêler. Son constat principal consiste à dire que ces dysfonctionnements ne sont pas amenés à être corrigés. Ils sont au contraire intrinsèques à la nature même des technologies qui se déploient aujourd'hui. Contrairement à ce que nous annonçaient les pionniers et les prophètes des technologies, pour Bridle, la technologie n'annonce pas de nouvelles Lumières ou une Renaissance, mais, comme Jules Michelet parlait du Moyen Âge, un âge sombre, une ère d'obscurité pour ne pas dire d'obscurantisme. Ni les réseaux sociaux, ni l'intelligence artificielle, ni les systèmes techniques ne vont nous aider à faire monde commun. Au contraire."
Aurialie Jublin

Vers une République des biens communs ? (vidéos) - 0 views

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    Mieux connu depuis l'attribution, en octobre 2009, du prix Nobel d'économie à Elinor Ostrom, le concept de "communs" ou de "biens communs" fait actuellement florès dans de nombreuses disciplines: économie, gestion, droit et science politique, mais aussi dans les programmes de militants et responsables politiques. Ainsi le Parlement européen a constitué un intergroupe dédié aux "services publics et biens communs". Surtout, de très nombreuses initiatives témoignent de la vitalité de nouvelles forces sociales du vivre et produire ensemble et autrement, pour promouvoir des laboratoires citoyens et économiques dans les domaines tels que l'économie collaborative, la santé, l'éducation, la transition énergétique, le domaine foncier et pour utiliser des logiques de biens communs pour une gouvernance plus démocratique de fourniture de services d'intérêt général et élargir les choix dans les partenariats publics/privés. Dans ces temps de mutations économiques, technologiques, écologiques, sociales, majeures, ce colloque est conçu comme un carrefour pluridisciplinaire de rencontres et d'échanges entre chercheurs et acteurs, venant de plusieurs pays européens, pour cerner le contenu du concept de biens communs et sa capacité à permettre la construction d'une nouvelle manière de vivre en société.
Aurialie Jublin

Pour une pratique féministe de la visualisation de données - Catherine D'Igna... - 0 views

  • Et pourtant, il existe des façons de procéder à des représentations plus responsables. Il existe des moyens pour « situer » le regard et le localiser dans des corps et des géographies concrètes. Les cartographes critiques, les artistes de la contre-cartographie, les pratiquants de cartographie participative et d’autres développent des expérimentations et des méthodes pour cela depuis des années et ont beaucoup à nous apprendre.
  • Une manière de re-situer les visualisations de données pourrait être de les déstabiliser en rendant les désaccords possibles. Comment créer des manières de répondre aux données ? De mettre en question les faits ? De présenter des points de vue et des réalités alternatives ? De contester et même de saper les bases de l’existence de ces données et des méthodes par lesquelles elles ont été acquises ? Comment procéder ? Sachant que la plupart des gens qui travaillent sur les données sont des hommes blancs, il s’agit simplement d’inclure des gens différents, avec des points de vue différents, dans la production des visualisations. Ainsi par exemple, le Detroit Geographical Expedition and Institute était né, à la fin des années 1960, d’une collaboration entre des géographes universitaires, dont les responsables étaient des hommes blancs, et des jeunes du centre ville de Detroit conduits par Gwendolyn Warren, une militante de la communauté noire de 19 ans.
  • Cette carte, intitulée « Where Commuters Run Over Black Children on the Pointes-Downtown Track », était technologiquement en avance sur son temps. Peut-être est-elle assez conventionnelle (à nos yeux) dans sa stratégie visuelle. Mais ce qui donne à cette carte son caractère dissident, c’est le titre, formulé par les jeunes Noirs qui ont produit la carte. « Où les banlieusards qui rentrent du boulot écrasent les enfants noirs ». Un titre qui n’est pas neutre. On est loin de « Localisation des accidents de la route dans le centre de Detroit », titre qui aurait probablement été donné à la carte si elle avait été élaborée par des consultants extérieurs employés par la ville. Mais du point de vue des familles noires dont les enfants avaient été tués, il ne faisait aucun doute que les enfants étaient noirs, les banlieusards blancs, et les événements décrits comme des « meurtres » plutôt que des « accidents ».
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  • ToxicSites.us, un site web géré par Brooke Singer, met en ligne un rapport sur chacun des sites « superfund » — ces lieux répertoriés par le CERCLA, l’agence américaine en charge des sites souillés par des déchets dangereux. Le site invite les contributeur·e·s à ajouter des reportages locaux, des images et des films qui documentent ces sites (et contredisent potentiellement les données), et cherche à faciliter l’organisation et le plaidoyer pour les efforts de nettoyage. Permettre de « répondre aux données » invite aussi à transformer la conversation en action.
  • Si les infographies — je ne parle pas ici des outils de recherche et d’exploration, mais des représentations publiques et populaires — excellent à présenter des mondes entièrement contenus, elles ne savent pas représenter visuellement leurs limites. Où sont les lieux où l’enquête n’est pas allée, qu’elle n’a pas pu atteindre ? Comment les indiquer ? Comment représente-t-on les données manquantes ? Andy Kirk a fait cet exposé remarquable sur le design du rien, qui recense diverses manières de représenter l’incertitude et d’intégrer le zéro, l’absent et le vide. Comment encourager plus de designers à prendre ces méthodes en considération ? Peut-on demander à nos données qu’elles montrent aussi ce qui constitue leur extérieur ?
  • Quelles sont les conditions matérielles qui ont rendu cette infographie possible ? Qui l’a financée ? Qui a collecté les informations ? Quel travail a été nécessaire en coulisses et comment la production de ce graphique s’est-elle déroulée ? Par exemple, le Public Laboratory for Open Technology and Science — un groupe de science citoyenne dont je fais partie — utilise une technique de cartographie consistant à suspendre une caméra à un cerf-volant où à un ballon pour collecter des photos aériennes. Un effet secondaire de cette méthode, adopté avec entrain par la communauté, est que la caméra capture aussi l’image des personnes qui collectent les images. On voit le corps des collecteurs des données, un objet généralement absent des représentations sous forme de produit fini.
  • Quel est le problème ? La théorie féministe du point de vue situé rappelle que toute connaissance est située socialement et que les perspectives des groupes opprimés — femmes, minorités et autres — sont exclues de manière systématique de la connaissance dite « générale ». La cartographie critique dirait que les cartes sont des sites du pouvoir et produisent des mondes qui sont intimement associés à ce pouvoir. Comme le soulignent Denis Wood et John Krygier, le choix de ce que l’on place sur la carte « fait inévitablement surgir le problème de la connaissance, tout comme les opérations de symbolisation, de généralisation et de classification ». Il faudra bien admettre l’existence de ce pouvoir d’inclure et d’exclure, apprendre à le dépister et développer un langage visuel pour le décrire. Dans l’immédiat, il importe de reconnaître que la visualisation de données est un des outils de pouvoir parmi les plus puissants et les plus biaisés.
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    "La visualisation de données, ou infographie, est à la mode et chacun s'enthousiasme pour les nouveaux outils qui permettent d'en produire - nous en avons dénombré, avec mon collègue Rahul Bhargava, plus de cinq cents. Malgré cette richesse technique, on manque souvent d'outils permettant une réflexion critique sur la politique et l'éthique de la représentation. Et comme le grand public est plutôt facile à impressionner avec des graphiques, la « data visualization » acquiert un grand pouvoir rhétorique. Quand bien même nous savons rationnellement que ces images ne représentent pas « le monde entier », nous avons tendance à l'oublier, et à accepter les graphiques comme des faits car ils sont généralisés, scientifiques et semblent présenter un point de vue neutre et expert. Quel est le problème ? La théorie féministe du point de vue situé rappelle que toute connaissance est située socialement et que les perspectives des groupes opprimés - femmes, minorités et autres - sont exclues de manière systématique de la connaissance dite « générale ». La cartographie critique dirait que les cartes sont des sites du pouvoir et produisent des mondes qui sont intimement associés à ce pouvoir. Comme le soulignent Denis Wood et John Krygier, le choix de ce que l'on place sur la carte « fait inévitablement surgir le problème de la connaissance, tout comme les opérations de symbolisation, de généralisation et de classification ». Il faudra bien admettre l'existence de ce pouvoir d'inclure et d'exclure, apprendre à le dépister et développer un langage visuel pour le décrire. Dans l'immédiat, il importe de reconnaître que la visualisation de données est un des outils de pouvoir parmi les plus puissants et les plus biaisés."
Aurialie Jublin

affordance.info: Les algorithmes du Dr Frankenstein (ou pourquoi faut pas pou... - 0 views

  • néo-fascisme documentaire distinguant une humanité sur-documentée d'une humanité sous-documentée, néo-fascisme nourri d'un fétichisme du fichier (et du fichage). Et je milite et alerte comme je peux sur l'impérieuse nécessité et urgence de nourrir une réflexion politique radicale visant à une forme de "nationalisation" des grandes plateformes et du code informatique, et à réinstaurer des formes légitimes de "communs" (dont un index indépendant du web entre autres). 
  • Le problème n'est plus tant de se demander comment construire des technologies avec des sciences comportementales que de voir s'il est encore possible, pour en limiter l'impact politique et démocratique, de déconstruire la logique qui a mené quelques grandes plateformes à construire et à normer des comportements avec des technologies opérant dans le cadre d'architectures techniques toxiques.  
  • En gros le pitch de l'article du Guardian est, à partir notamment des travaux de Cathy O'Neil (les algorithmes comme "armes de destruction matheuse") et Neil Johnson, et en remobilisant des exemples issus du Trading Haute-fréquence ou du récent fait-divers sur le premier décès "accidentel" causé par une voiture autonome (dont je vous avais moi-même longuement parlé), de revenir en détail sur ces nouvelles "approches algorithmiques" ou "l'algorithme" ne désigne plus simplement la trivialité d'une série d'instructions logico-mathématiques mais un environnement complexe d'automatismes décisionnels sur la base de gigantesques jeux de données (Datasets) que plus personne n'est en mesure de comprendre ou d'englober dans leur totalité, à commencer par ceux-là mêmes qui développent lesdits algorithmes et jeux de données**.
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  • Et l'article du Guardian évoque donc ces "Franken-algorithms" : ces algorithmes semblables à la créature du Dr Frankenstein, des Franken-algorithmes qui deviennent totalement imprévisibles (et donc potentiellement très dangereux) non seulement au travers de leur mode opératoire "auto-apprenant" (on parle aussi d'algorithmes "génétiques" et "d'apprentissage renforcé" - Reinforced Learning) mais aussi et surtout au travers de ce que leur marge d'incertitude et d'imprévisibilité intrinsèque peut donner lorsqu'elle entre en interaction avec d'autres algorithmes, avec des comportements sociaux individuels ou collectifs, ou avec le monde - et les objets - physique(s).
  • Voilà ce qui, sur mon petit schéma donne naissance au "SPA", une sorte de "Service Public de l'Algorithmie" que mon côté Marxiste idéalise peut-être mais que je crois nécessaire et urgent de bâtir si nous voulons éviter de prendre le risque d'un Hiroshima technologique désormais plus que probable à l'échelle de nos formes démocratiques de gouvernance qui ont déjà en partie basculé dans les formes assumées et délétères de surveillance.
  • Au-delà de la seule transmission de connaissances ou d'informations, l'enjeu de l'apprentissage est de permettre à "celui qui apprend" de pouvoir un jour s'affranchir de la dépendance à "celui qui lui enseigne" certaines règles et certains codes sociaux. Et d'être en capacité de pouvoir à son tour "faire", "transmettre", "produire", "jouer" mais aussi "tricher" ou "faire semblant". Le souci, me semble-t-il, est que nous sommes aujourd'hui majoritairement et collectivement incapables de formuler clairement la raison pour laquelle nous voulons que ces algorithmes apprennent et nous échappent autrement.
  • Voilà pourquoi sans aller vers un radicalisme luddite dont Eric Sadin et quelques autres sont les opportunistes ténors, il nous faut construire une alternative politique qui, après le temps numérique de la "désintermédiation", soit celui de formes de remédiations respectueuses du corps social et partant de sa partie la plus fragile, la plus pauvre, et la plus exposée.
  • La vie de la cité aujourd'hui (c'est à dire "le" politique au sens étymologique), notre vie, est prise entre des techno-craties qui organisent l'espace économique et des techno-structures qui organisent l'espace social. Les plateformes comme Facebook, Google ou Amazon ont comme point commun d'être les premières techno-craties algorithmiques dans lesquelles les données ont fonction d'infrastructure et qui organisent l'espace social pour satisfaire à des impératifs d'organisation économique. 
  • Dans la montée partout en Europe (et ailleurs) des néo-fascismes qu'une pudibonderie tout à fait déplacée nous désigne sous l'euphémisme de "droites extrêmes", au moment où chacun est conscient de l'impact que jouent les architectures techniques toxiques dans la polarisation de l'opinion, alors même qu'il est établi, comme le rappelait récemment Cory Doctorow que  "le problème de Facebook n'est pas un problème de contrôle des esprits mais un problème de corruption : Cambridge Analytica n'a pas convaincu des gens ordinaires de devenir racistes mais ils ont convaincu des racistes d'aller voter", il ne faudrait pas qu'aux algorithmes du Dr Frankenstein s'ajoutent les ambitions politiques d'Anénoïd Hynkel.
Aurialie Jublin

Dans un monde de la post-vérité, de nouvelles formes de luttes émergent | Met... - 0 views

  • Le terme de « post-vérité » a été utilisé pour la première fois en 2004 par l’écrivain américain Ralph Keyes. Il décrit la post-vérité comme l’apparition d’un système ou d’une société où la différence entre le vrai ou le faux n’a plus d’importance. Cette définition a éclaté aux yeux du monde en 2016 avec le vote pour le Brexit et l’élection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis. Et fake news a été élu terme de l’année 2017.
  • C’est pourquoi RSF a créé une commission sur l’information et la démocratie, composée de 25 personnalités de 18 nationalités différentes. Y figurent des lauréats du prix Nobel, des spécialistes des nouvelles technologies, des journalistes, des juristes et des anciens dirigeants d’organisations internationales. Cette commission a édicté une déclaration qui « vise à entrer dans cette nouvelle logique afin de définir les obligations des entités structurantes de l’espace public ». RSF a donc sélectionné douze pays qui vont s’engager à signer un pacte sur l’information et la démocratie sur la base de la déclaration évoquée ci-dessus. Le but est, à terme, de créer une entité qui associera des experts indépendants qui pourra édicter des propositions avec un monopole de l’initiative et qui pourront être mises en œuvre par des Etats.
  • Elle repose sur des principes forts : Le droit à l’information fiable La liberté de la presse La vie privée La responsabilité des participants du débat public La transparence des pouvoirs
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  • Pour lutter face à cela, Gerald Bronner préconise une nouvelle forme de régulation : une régulation individuelle. Cette forme de régulation consiste à développer un esprit critique, on parle même de « système de pensée analytique ». Scientifiquement, il a été prouvé que la stimulation de la pensée analytique réduit l’adhésion à des théories complotistes. C’est la raison pour laquelle le sociologue recommande d’apprendre aux élèves du cycle primaire jusqu’à l’université le fonctionnement de leur cerveau. Le principal biais dont il est question est le biais de la taille de l’échantillon.
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    "« Le sort de la vérité a toujours été très fragile », a déclaré il y a quelques jours Edgar Morin lors du colloque sur la post-vérité à la Cité des sciences et de l'industrie à Paris. A cette occasion, chercheurs, décideurs publics et professionnels des médias ont décrit cette société de la désinformation, rétablit quelques faits sur les fake news et proposé quelques pistes pour lutter contre l'infox.  "
Aurialie Jublin

Society in the loop : vers un intelligence artificielle plus démocratique ? -... - 0 views

  • Mais l’intelligence artificielle se diffuse également dans des sphères qui concernent plus directement la vie publique, et donc la société. Pour ne citer qu’eux : le classement de lycéens après leurs bacs[4], l’automatisation de procédures judiciaires[5] ou des horaires de ramassage scolaire[6], la dérégulation du flux automobile dans les villes dus à l’utilisation d’un service de GPS comme Waze[7], l’utilisation de la reconnaissance faciale dans des lieux publics[8] et privés[9], l’usage de « détecteurs de mensonges » aux frontières[10], la police prédictive[11], ou même plus simplement l’usage de systèmes reposant sur la captation de l’attention de l’utilisateur[12].  A leurs échelles, ces sujets touchent la vie sociale dans des dimensions qui pourraient légitimement demander à ce que des discussions plus démocratiques aient lieu. Ils entrent certes, plus ou moins directement dans la catégorie « intelligence artificielle » mais participent de la numérisation du monde à travers des algorithmes, et feront tous le pas vers l’IA si ce n’est déjà fait.
  • C’est là qu’intervient le passage qualitatif du « human in the loop » (HITL) au « society in the loop » (SITL). Pour le dire simplement, le SITL devient nécessaire lorsqu’un système utilisant l’intelligence artificielle a des implications importantes sur la sphère sociale. Iyad Rahwan explique : « alors que le HITL utilise le jugement d’un individu ou d’un groupe pour optimiser un système pensé trop étroitement, SITL embarque le jugement et les valeurs d’une société vue comme un tout, dans la définition la gouvernance algorithmique[13] de questions sociétales ». En résumé, le SITL est une forme de contrat social entre ceux qui doivent obéir aux règles et ceux qui écrivent les règles.
  • Coupons court au débat qui concerne les bulles de filtres : leur émergence et leurs effets dépendent du paramétrage des algorithmes de Facebook, de Google et des autres services susceptibles de créer ces bulles. Par conséquent, elles restent à leur main, notamment à travers leurs Conditions générales d’utilisation (CGU) et le secret d’affaires qui protègent ces systèmes (et les modèles d’affaires de captation du « temps de cerveau disponible » qui y sont directement liés). Pas de démocratie à cet endroit, quand bien même les impacts sur la démocratie pourraient être réels, même s’ils sont encore mal mesurés. C’est une des premières limites du modèle « Society in the loop ».
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  • Dans le cas des véhicules autonomes en revanche, une vaste étude a été réalisée sur plusieurs années par le MIT Lab. Elle a concerné des millions de personne dans 233 pays (à travers le petit jeu http://moralmachine.mit.edu/) et a montré à quel point le traitement des questions éthique est variable, même lorsqu’on parle de conduite automobile ! Comme le relate Hubert Guillaud : « la question éthique diverge selon la culture, le niveau économique et la localisation géographique ; bien plus que selon des préférences individuelles (…) les Japonais ont plutôt tendance à préférer des véhicules qui épargnent les piétons alors que d’autres cultures, comme la culture chinoise, préfèrent des véhicules qui épargnent les passagers. » L’objectif d’une telle étude est d’apporter l’éclairage de la société toute entière afin que le système technique réponde au « bien commun ».
  • A l’initiative de Grégoire Japiot (@gregoire) et Matteo Mazzeri (@matemaz), le projet GEnIAL (voir le site internet) est « Une plateforme qui utilise les interfaces conversationnelles et l’intelligence artificielle afin de permettre à la population d’un territoire de mieux vivre dans sa ville à l’ère de la Smart City en offrant des moyens simples pour accéder aux services des administrations et des autres acteurs de la région. » Le projet, qui se revendique de « Society in the loop », est d’utilité publique et censé resté « la propriété des citoyens », contrairement aux services d’assistants proposés par les géants d’internet. Les données collectées ne sont pas commercialisées et la vie privée reste préservée. Grégoire, le fondateur, précise que les concertations citoyennes sont au cœur du projet. L’idée : intégrer dans le service les retours de la société (citoyens, administrations/institutions publiques, chercheurs et acteurs économiques) en vue d’élaborer des modèles d’apprentissage utilisés pour construire une « intelligence artificielle concertée ».
  • Concrètement, GEnIAL Bot, est une « solution qui vise à permettre aux utilisateurs d’interagir avec l’ensemble des informations d’un territoire via des interfaces conversationnelles de type chatbot et assistant vocal. » Au lieu de devoir utiliser des moteurs de recherche pour identifier les différents sites où se trouvent les informations recherchées ou bien de devoir téléphoner aux services concernés, les utilisateurs peuvent interroger GEnIAL Bot en s’adressant en langage naturel et se laisser guider sous forme de conversations vers l’information. Pour la partie technologique, GEnIAL « dispose d’une convention de partenariat avec le CERN qui lui permet de concevoir avec les équipes les plus pointues, une intelligence artificielle éthique et explicable, dont les modèles d’apprentissage sont pensés de manière à refléter l’identité du territoire et intégrer un processus de concertation continue avec ses habitants. »
  • A une échelle très locale, le projet GEnIAL pourrait entrer dans ce qu’il convient d’appeler la « démocratie technique ». La formule que j’emprunte ici à Callon, Barthes et Lascoumes dans l’ouvrage fondateur Agir dans un monde incertain, Essai sur la démocratie technique (Seuil, 2011) désigne notamment les dispositifs par lesquels des profanes peuvent peser sur les modes de conception et de diffusion des sciences et des techniques. A l’évocation de la démocratie technique, on pense souvent aux grandes polémiques et controverses qui ont agité des sujets technoscientifiques comme les OGM, l’enfouissement des déchets nucléaires, ou encore les traitements contre le SIDA. Ce dernier cas a montré que l’intrusion des malades parmi les experts a pu conduire à améliorer les protocoles des laboratoires pharmaceutiques, alors très éloignés de leurs vies.
  • Si ces exemples peuvent paraître éloignés des questions relatives à l’intelligence artificielle, ils permettent d’entrouvrir une autre dimension de la démocratie technique. Par-delà la pure contestation ou modification a posteriori d’une technique existante, Callon, Barthes et Lascoumes décrivent un modèle de « co-production des savoirs ». Ce modèle postule que les non-spécialistes peuvent produire des connaissances à partir de leurs intérêts propres. Ils sont les plus à même d’entrevoir les risques d’un projet et de les faire reconnaître comme légitimes lors d’une étape de conception commune. Ce faisant, ils participent pleinement à la production des sciences et des techniques. Ce modèle suscite des critiques : on pointe le fait que des profanes ne seraient pas capables de s’exprimer sur un sujet technique, et que par conséquent, l’avis des experts serait toujours supérieur, de meilleure qualité, et devrait être pris en compte en priorité.
  • De nombreux contre-exemples viennent infirmer ces thèses. L’expérience prouve que si les conditions sont réunies, des personnes éloignées d’un sujet technique ou scientifique peuvent tout à fait construire des rapports de grande qualité et reconnus comme tels par les experts eux-mêmes. Ce fut le cas lors des controverses concernant les OGM il y a de cela une vingtaine d’années. Callon, Barthes et Lascoumes racontent également comment les amateurs contribuent à améliorer la connaissance scientifique dans de nombreux domaines, comme par exemple l’astronomie.
  • pourquoi ce traitement démocratique si spécial devrait-il se limiter à l’intelligence artificielle ? Une des raisons est sans doute que l’on pressent que son déploiement va changer le monde et susciter des controverses qu’il vaut mieux anticiper. N’oublions pas cependant que de nombreuses technologies numériques (ou non) changent le monde plus insidieusement et suivant des échelles temporelles qui nous les rendent « invisibles à l’œil nu ». Légitimement, on pourrait aussi poser la question démocratique à leur endroit[20].
  • Ce que la démocratie technique questionne, c’est non seulement l’aménagement du progrès, mais aussi sa définition. C’est-à-dire la direction donnée à la civilisation. Entraîner une intelligence artificielle – même avec la méthodologie Society in the loop – c’est déjà faire le choix d’une intelligence artificielle. Ce qui ne veut pas dire que ce choix soit mauvais. Pas plus qu’il n’est naturellement bon. Disons que c’est un choix parmi d’autres. Ce point chaud qui concerne la définition du progrès est et sera de plus en plus au centre de toutes les questions liant technosciences et démocratie.
  • Parallèlement, l’Université de Montréal a bâti une « Déclaration pour un développement responsable de l’intelligence artificielle[23] ». Cette déclaration décrit dix principes phares pour guider le développement de l’IA, parmi lesquels un « principe de bien être » ou encore un « principe d’inclusion de la diversité » (
  • Toutes les controverses techniques n’ont pas vocation à passer sous les fourches caudines de la démocratie, il existe une multitude d’autres échelons pour co-construire, réguler, interdire ou favoriser des systèmes. En témoignent les nombreuses villes qui se « défendent » contre AirBnb ou Uber puis qui finissent par utiliser les données que ces sociétés récoltent, à d’autres fins (des « arrangements » a posteriori[25]). Par ailleurs, c’est aussi dans les écoles qui forment les ingénieurs, designers et entrepreneurs de demain et bien sûr dans les entreprises elles-mêmes, dont certaines décident d’être plus soucieuses des effets générés par leurs activités, que l’avenir se joue
  • Bien sûr, ces quelques pages souffrent de nombreuses limites et à de multiples niveaux. A mon sens néanmoins, le fond de la question consiste (aussi) à savoir quelle « dose » de démocratie nous sommes prêts à mettre dans nos ambitions technologiques. Et en retour, dans quelle mesure les technologies que nous produirons permettront ou non à la démocratie de continuer d’exister[26].
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    "En 2017, Iyad Rahwan (@iyadrahwan), responsable du groupe des coopérations évolutives au MIT posait avec Joi Ito (@Joi) du MIT Medialab le concept de « Society in the loop » (SITL), une méthode pour impliquer différentes parties-prenantes dans la conception d'un système d'apprentissage automatique[1] (ou machine learning), à la base des intelligences artificielles (IA) qui jalonnent le quotidien. L'idée : co-construire plutôt qu'imposer les solutions au grand public, en faisant intervenir dès la phase de conception une diversité d'acteurs. J'en retrace ici un court historique, une illustration et les quelques perspectives et limites qu'il me paraît intéressant de pointer, notamment au regard des questions relatives à ce qu'on appelle la « démocratie technique »."
Aurialie Jublin

Libra : « Jamais aucune société n'a eu autant de pouvoir que Facebook » | Les... - 0 views

  • Cette  monnaie numérique est le dernier étage de la fusée pour l'entreprise américaine. Facebook est déjà un géant médiatique et social d'une puissance inédite, avec plus de 2,4 milliards d'utilisateurs sur sa plateforme. Le fait de créer sa propre monnaie la positionne comme une puissante étatique.A l'échelle de l'humanité, aucune banque ni même un Etat n'a, une fois, été en mesure de proposer une monnaie à plus de 2 milliards d'individus. Le sentiment est, lui, mitigé, car il existe un risque évident en termes d'ingérence envers les activités originellement dévolues à l'Etat et de nombreuses questions relatives à la vie privée. Même si Facebook  promet comme d'habitude de forts standards de confidentialité .
  • Facebook a toujours dit que son prochain milliard d'utilisateurs se trouvait sur les marchés émergents, c'est-à-dire en Amérique du Sud, en Afrique, mais aussi en Inde (la Chine et la Russie n'étant pas accessibles, politiquement parlant). Avec cette monnaie numérique, Facebook vise avant tout à fournir des accès bancaires en ligne aux habitants des pays en développement et leur permettre d'effectuer des opérations monétaires élémentaires.
  • Aucune entreprise n'a jamais possédé un tel pouvoir, étant en mesure de toucher autant de gens quotidiennement et en possédant autant de données individualisées sur eux. Le faire en 15 ans, c'est totalement inédit.Les enjeux de la création d'une monnaie sont énormes, tant en matière de confidentialité, que de commerce et de libre concurrence. Or, Facebook, on l'a vu avec la gestion des discours de haine et de la  désinformation sur sa plateforme , s'est montré incapable de faire sa propre régulation. Celle-ci doit être prise en charge notamment par l'Etat.
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  • Aux Etats-Unis comme en Europe, de nombreuses voix réclament le démantèlement de l'entreprise. Quelle est votre opinion ?Le lancement de cette monnaie ne fait que me conforter dans cette idée. C'était un discours très marginal il y a cinq ans. Je milite pour une gestion commune de Facebook, qui s'apparente à une forme de démantèlement. On pourrait s'orienter sur une forme de « commonisation » où on imposerait une gestion plus collaborative, sur le modèle de Wikipédia par exemple.
  • Tout le monde est conscient, aujourd'hui, de la valeur collective et individuelle que peut apporter l'infrastructure qu'a créée Facebook. On rêverait que cette entreprise soit éloignée de toutes ces polémiques. Mais il faut pour cela rompre avec la logique économique, ce qui ne viendra jamais de la firme elle-même.
  • On parle de scinder Facebook en plusieurs entités, chacune avec un objet différent, ou imposer à la société de nouvelles règles faute de quoi elle n'aura plus accès à certains marchés. Mais il faudrait pour cela faire évoluer la doctrine antitrust, qui n'est pas adaptée à l'économie numérique. Il faut en revanche prendre des mesures dans un avenir très proche, sinon il sera trop tard pour le faire. Car une fois que la monnaie sera installée, il sera très difficile que le régulateur la défasse.
  • D'un autre côté, certains analystes avancent que Facebook est en train de se planter un couteau dans le ventre. Le fait de lancer sa propre monnaie risque de déplaire à nombre de régulateurs et de convaincre les indécis qui jugeaient jusqu'ici que Facebook n'était qu'une entreprise commerciale privée comme les autres.
  • Le philosophe Bernard Stiegler expliquait il y a peu que la disruption était une stratégie de tétanisation de l'adversaire, où on le prend en permanence de vitesse, de sorte qu'il n'ait pas le temps de réfléchir à des modes de régulations. C'est un peu ce qui se passe avec Facebook.
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    "Olivier Ertzscheid est maître de conférences et chercheur en sciences de l'information à l'Université de Nantes. Le lancement par Facebook de sa propre monnaie numérique positionne, selon lui, l'entreprise comme une puissance étatique. Un pouvoir qui pose la question de son démantèlement."
Aurialie Jublin

Pour défendre le covoiturage « libre », deux plateformes indépendantes joigne... - 0 views

  • En 2017, Matthieu Jacquot, son fondateur, accepte de passer son infrastructure sur un socle open source. « Un prérequis indispensable pour garantir l’indépendance de notre communauté » souligne Bastien, ce qui scelle l’ébauche de partenariat entre les deux plateformes. « Cette alliance est primordiale, car nous sommes une association qui fonctionne avec peu de moyens. La maintenance de son interface technique est un problème récurrent. S’il y a un bug, il faut compter sur les bénévoles pour le corriger. » RoulezMalin, lui, possède une infrastructure solide.
  • « À travers ce rapprochement, on est en train de redessiner les cartes du covoiturage en France », espère Bastien. « On n’a aucun problème avec BlaBlaCar, on pense juste que c’est important qu’il y ait une offre avec laquelle la richesse créée par les covoitureurs reste à la communauté des covoitureurs ». Doctorant en science politique autour des questions du numérique, fondateur de l’Association internationale du logiciel libre, l’homme demeure fidèle à son mantra : faire du numérique un outil de progrès social.
  •  
    "« L'important pour nous, c'est que quand quelqu'un partage son trajet avec quelqu'un d'autre, cette générosité et cette conscience écologique ne conduisent pas à l'enrichissement de personnes privées ou de fonds d'investissement », explique Bastien Sybille. Président de Covoiturage-Libre, l'homme vient de nouer un partenariat avec le site RoulezMalin. Ces deux acteurs du covoiturage libre (ils ne prélèvent pas de commissions) souhaitent augmenter leur masse critique de covoitureurs pour proposer une alternative au géant du secteur."
Aurialie Jublin

Let's make private data into a public good - MIT Technology Review - 0 views

  • Why is this a problem? Well, maybe because these giants are making huge profits from technologies originally created with taxpayer money. Google’s algorithm was developed with funding from the National Science Foundation, and the internet came from DARPA funding. The same is true for touch-screen displays, GPS, and Siri. From this the tech giants have created de facto monopolies while evading the type of regulation that would rein in monopolies in any other industry. And their business model is built on taking advantage of the habits and private information of the taxpayers who funded the technologies in the first place.
  • Apologists like to portray the internet giants as forces for good. They praise the sharing economy in which digital platforms empower people via free access to everything from social networking to GPS navigation to health monitoring. But Google doesn’t give us anything for free. It’s really the other way around—we’re handing over to Google exactly what it needs. When you use Google’s services it might feel as if you’re getting something for nothing, but you’re not even the customer—you’re the product. The bulk of Google’s profits come from selling advertising space and users’ data to firms. Facebook’s and Google’s business models are built on the commodification of personal data, transforming our friendships, interests, beliefs, and preferences into sellable propositions.
  • And because of network effects, the new gig economy doesn’t spread the wealth so much as concentrate it even more in the hands of a few firms (see Rein in the Data Barons). Like the internal-combustion engine or the QWERTY keyboard, a company that establishes itself as the leader in a market achieves a dominance that becomes self-perpetuating almost automatically.
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  • The low tax rates that technology companies are typically paying on these large rewards are also perverse, given that their success was built on technologies funded and developed by high-risk public investments: if anything, companies that owe their fortunes to taxpayer-funded investment should be repaying the taxpayer, not seeking tax breaks.
  • We should ask how the value of these companies has been created, how that value has been measured, and who benefits from it. If we go by national accounts, the contribution of internet platforms to national income (as measured, for example, by GDP) is represented by the advertisement-related services they sell. But does that make sense? It’s not clear that ads really contribute to the national product, let alone to social well-being—which should be the aim of economic activity. Measuring the value of a company like Google or Facebook by the number of ads it sells is consistent with standard neoclassical economics, which interprets any market-based transaction as signaling the production of some kind of output—in other words, no matter what the thing is, as long as a price is received, it must be valuable. But in the case of these internet companies, that’s misleading: if online giants contribute to social well-being, they do it through the services they provide to users, not through the accompanying advertisements.
  • This way we have of ascribing value to what the internet giants produce is completely confusing, and it’s generating a paradoxical result: their advertising activities are counted as a net contribution to national income, while the more valuable services they provide to users are not.
  • Let’s not forget that a large part of the technology and necessary data was created by all of us, and should thus belong to all of us. The underlying infrastructure that all these companies rely on was created collectively (via the tax dollars that built the internet), and it also feeds off network effects that are produced collectively. There is indeed no reason why the public’s data should not be owned by a public repository that sells the data to the tech giants, rather than vice versa. But the key issue here is not just sending a portion of the profits from data back to citizens but also allowing them to shape the digital economy in a way that satisfies public needs. Using big data and AI to improve the services provided by the welfare state—from health care to social housing—is just one example.
  • Only by thinking about digital platforms as collective creations can we construct a new model that offers something of real value, driven by public purpose. We’re never far from a media story that stirs up a debate about the need to regulate tech companies, which creates a sense that there’s a war between their interests and those of national governments. We need to move beyond this narrative. The digital economy must be subject to the needs of all sides; it’s a partnership of equals where regulators should have the confidence to be market shapers and value creators. 
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    "The internet giants depend on our data. A new relationship between us and them could deliver real value to society."
Cécile Christodoulou

Scientists Warn the UN of Capitalism's Imminent Demise - Motherboard - 0 views

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    " Many experts believe we're moving past capitalism, but they disagree on what the ultimate outcome will be. In his book Postcapitalism: A Guide to Our Future, British economics journalist Paul Mason theorises that information technology is paving the way for the emancipation of labour by reducing the costs of knowledge production-and potentially other kinds of production that will be transformed by AI, blockchain, and so on-to zero. Thus, he says, will emerge a utopian 'postcapitalist' age of mass abundance, beyond the price system and rules of capitalism. It sounds peachy, but Mason completely ignores the colossal, exponentially increasing physical infrastructure for the 'internet-of-things.' His digital uprising is projected to consume evermore [https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2214629618301051] vast quantities of energy (as much as one-fifth of global electricity by 2025), producing 14 percent of global carbon emissions by 2040."
Aurialie Jublin

Réseaux sociaux : « Les utilisateurs sont conscients de leur dépendance aux a... - 0 views

  • Il y a eu une chute des audiences de Facebook depuis les révélations sur son implication dans la diffusion de « fake news » lors des dernières élections présidentielles américaines et l’affaire Cambridge Analytica. Les géants du numérique sont aujourd’hui globalement dans une tentative de reconquête, en affirmant qu’ils agiront de manière plus responsable, plus régulée.Mais leur objectif est aussi d’obtenir de nouvelles métriques pour affiner encore l’extraction intentionnelle des informations sur leurs utilisateurs. C’est sur ces méthodes d’exploitation que repose leur modèle : susciter l’attention, définir notre profil de données pour vendre ensuite de la publicité.
  • Comment changer les choses, plus globalement ?H. G. : Je pense qu’il faut porter cette question de l’attention sur le plan politique, en réglementant davantage. Nous appelons aussi, avec la Fondation Internet nouvelle génération (Fing), à nommer dans les entreprises du numérique, des médiateurs chargés des questions attentionnelles, pour qu’elles soient enfin prises au sérieux.
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    "Facebook a annoncé début août la mise en place en cours d'un outil permettant de mieux maîtriser le temps passé sur le réseau social. Google et Apple avaient déjà lancé ce genre d'option. Analyse d'Hubert Guillaud, spécialiste des questions d'attention sur les réseaux et responsable de la veille à la Fondation Internet nouvelle génération (Fing)."
Aurialie Jublin

Le mythe de la technologie salvatrice | Esprit Presse - 0 views

  • Le débat entre les pessimistes, qui craignent pour l’environnement, et les optimistes, tenants du business as usual, ne porte donc pas sur la nécessité d’agir – personne n’est vraiment pour la disparition des éléphants ou la contamination des nappes phréatiques aux pesticides –, mais sur la gravité du problème, l’intensité et la vitesse avec laquelle il faudrait réagir, la possibilité de changer modes de production et habitudes de consommation, la manière (régulation, taxes, incitations, soutien public…) et les moyens (financiers, techniques) de mener la transition.
  • De fait, les solutions techniques sont présumées disponibles et abordables, sinon à portée de main, que ce soit pour les énergies « décarbonées », les solutions de mobilité du futur ou la capacité des rendements agricoles à toujours s’accroître – ou à se maintenir. Les plus audacieux, comme Jeremy Rifkin, vont jusqu’à promettre de telles « ruptures » technologiques – un vocable à la mode – que tout ou presque en deviendrait gratuit ou à « coût marginal zéro », à commencer par l’énergie issue de sources renouvelables2.
  • La pénurie a bien été un aiguillon essentiel, à l’origine d’une grande partie des innovations de la révolution industrielle, car la croissance permanente de la consommation allait bientôt dépasser les capacités de ponction sur les ressources renouvelables, locales ou importées. Jusque tard dans le xixe siècle, il y eut une limite purement « surfacique » à la production de produits essentiellement animaux et végétaux 
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  • Globalement (hors l’épineux problème de répartition), le système technique, enchâssé dans un système social, moral et culturel qu’il modifiait à mesure, a plutôt bien répondu aux « besoins ». Mais cela a eu un prix : celui d’une fuite en avant, d’une accélération permanente entre des risques de pénuries et de nouvelles solutions pour y répondre, créant elles-mêmes de nouveaux besoins et de nouveaux risques ; celui de pollutions, de destructions sociales et environnementales sans précédent. Nos « ingénieurs thaumaturges » font rarement des omelettes sans casser des œufs.
  • À quoi ressembleraient nos campagnes, s’il avait fallu y monter les nouvelles usines – et assumer leurs rejets – pour notre consommation exponentielle de téléphonie, d’informatique, de jouets, de vêtements ? Pour y répondre, il faut regarder les zones industrielles chinoises. Mais grâce à la distance, nous nous berçons d’illusions sur la « dématérialisation » de l’économie et la croissance « verte » à base de nouvelles technologies.
  • Le numérique n’a rien de virtuel. Il mobilise toute une infrastructure, des serveurs, des bornes wifi, des antennes-relais, des routeurs, des câbles terrestres et sous-marins, des satellites, des centres de données… Il faut d’abord extraire les métaux (argent, lithium, cobalt, étain, indium, tantale, or, palladium…), engendrant destruction de sites naturels, consommation d’eau, d’énergie et de produits chimiques nocifs, rejets de soufre ou de métaux lourds et déchets miniers. Ensuite fabriquer les composants, comme les puces au silicium qui nécessitent quantité d’eau purifiée, mais aussi du coke de pétrole, du charbon, de l’ammoniaque, du chlore, des acides, etc., fournis par le cœur du capitalisme « carbonifère9 ». Puis faire fonctionner le tout, avec plus de 10 % de l’électricité mondiale ! Enfin, se débarrasser des déchets électroniques, parmi les plus complexes à traiter : une partie – majoritaire – est incinérée ou jetée en décharge ; une autre rejoint les circuits « informels » (Afrique de l’Ouest, Chine…), où ils sont brûlés à l’air libre et empoisonnent les sols et les eaux. Le reste rejoint quelques usines spécialisées, qui ne récupèrent que partiellement les ressources. In fine, le taux de recyclage de nombreux métaux rares est inférieur à 1 %, un terrible gâchis.
  • Pourtant, plus que jamais, nous vivons dans la religion exclusive du « techno-solutionnisme », en plaçant tous nos espoirs dans les innovations et les effets bénéfiques (futurs) du numérique, en fantasmant un monde où tout sera bien mieux optimisé, où les outils et les services numériques seront facteurs d’efficacité et de sobriété : énergies renouvelables distribuées par des smart grids, covoiturage bientôt servi par des véhicules autonomes, déplacements fluidifiés dans les smart cities, économie de la fonctionnalité réduisant les équipements individuels, etc., sans parler des biotechnologies et des applications médicales.
  • Mieux, les technologies de demain ne seront pas seulement propres, elles seront réparatrices : les bactéries modifiées génétiquement dépollueront les sols, les big data et les capteurs protégeront les forêts tropicales, la science ressuscitera même le mammouth laineux, dont l’Adn dégèle en même temps que le permafrost.
  • Peut-on compter sur une « sortie par le haut » à base d’innovation technologique ? Il serait périlleux de tout miser dessus. En premier lieu parce que la plupart des technologies prétendument « salvatrices » nécessitent, à plus ou moins grande échelle, des ressources métalliques, non renouvelables, et viennent accélérer, plutôt que remettre en cause, le paradigme « extractiviste » de notre société thermo-industrielle
  • En second lieu parce que les gains d’efficience sont balayés par un formidable effet « rebond ». Indéniablement, la consommation d’énergie des véhicules, des avions, des centres de données, des procédés industriels baisse régulièrement, les innovations sont nombreuses et les progrès réels. Mais la croissance du parc automobile, des kilomètres parcourus, des données échangées et stockées est largement supérieure aux gains unitaires. Entre 2000 et 2010, le trafic internet a été multiplié par cent. Que vaut alors une amélioration de quelques dizaines de points d’efficacité énergétique par octet ?
  • Il n’y a pas de solution technique permettant de maintenir – et encore moins de faire croître – la consommation globale d’énergie et de ressources. En continuant à alimenter la « chaudière du progrès11 », nous nous heurterons tôt ou tard aux limites planétaires, régulation climatique en tête. C’est donc – aussi – vers l’économie de matières qu’il faut orienter l’innovation. Avant tout par la sobriété, en réduisant les besoins à la source, en travaillant sur la baisse de la demande et pas seulement sur le remplacement de l’offre.
  • Mais on peut imaginer toute une gamme d’actions, comme bannir le jetable, les supports publicitaires, l’eau en bouteille, revenir à des emballages consignés, composter les déchets même en ville dense, brider progressivement la puissance des véhicules et les alléger, avant de passer au vélo, adapter les températures dans les bâtiments et enfiler des pull-overs, car il est bien plus efficace, plus simple, plus rapide, d’isoler les corps que les bâtiments !
  • Pour recycler au mieux les ressources et augmenter la durée de vie de nos objets, il faudra les repenser en profondeur, les concevoir simples et robustes (Ivan Illich aurait dit « conviviaux »), réparables et réutilisables, standardisés, modulaires, à base de matériaux simples, faciles à démanteler, n’utiliser qu’avec parcimonie les ressources rares et irremplaçables comme le cuivre, le nickel, l’étain ou l’argent, limiter le contenu électronique. Quitte à revoir le « cahier des charges », accepter le vieillissement ou la réutilisation de l’existant, une esthétique moindre pour les objets fonctionnels, parfois une moindre performance, de l’intermittence, une perte de rendement ou un côté moins « pratique ».
  • Pourquoi ne pas tenter plutôt la voie d’une transition post-croissance vers un nouveau « contrat social et environnemental » ?
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    "Les coûts écologiques de la technique (déchets, pollution) sont rendus invisibles par la délocalisation de la production industrielle. Ils devraient nous inciter à promouvoir une technologie sobre et résiliente."
Aurialie Jublin

Concrètement, comment rendre les algorithmes responsables et équitables ? | I... - 0 views

  • Et rappelle la difficulté à définir mathématiquement l’équité, comme l’a souligné l’informaticien Arvind Narayanan (@random_walker) lors de la dernière édition de la conférence FAT (la conférence annuelle sur l’équité, la responsabilité et la transparence). Outre les biais et déséquilibres statistiques, rappelle David Robinson (@drobinsonian), responsable des associations EqualFuture et Upturn (et qui a notamment publié un rapport sur la question de l’examen public des décisions automatisées (.pdf)), leur impact dépend surtout de la manière dont sont utilisés ces systèmes, avec le risque, que pointait Eubanks, que les plus discriminés soient encore plus surveillés par ces systèmes.
  • Pour remédier à ces problèmes, beaucoup d’agences américaines ont recours à des chercheurs extérieurs pour déjouer les biais de leurs systèmes. En avril, l’AI Now Institute a défini un cadre (voir le rapport (.pdf)) pour les organismes publics qui souhaitent mettre en place des outils de prise de décision algorithmique, recommandant notamment de mettre à contribution la communauté de la recherche et de permettre à ceux que le système calcul de faire appel des décisions prises à leur sujet.
  • Leurs recommandations invitent les systèmes à respecter le droit d’information du public, à recourir à des examens par des chercheurs indépendants, à améliorer l’expertise des organismes qui les conçoivent et à développer des modalités pour permettre au public de contester les décisions prises. L’initiative recommande aux agences publiques de répertorier et décrire les systèmes de décision automatisés, y compris d’évaluer leur portée et impact. Elle recommande également de mettre en place des modalités d’accès afin que des chercheurs, des experts indépendants, des associations ou des journalistes puissent accéder et évaluer ces systèmes et pour cela doivent s’assurer notamment que leurs fournisseurs privés de systèmes acceptent ces vérifications. Elle souligne également que les agences doivent monter en compétences pour être expertes des systèmes qu’elles mettent en place, notamment pour mieux informer le public, et invite les fournisseurs de solutions à privilégier l’équité, la responsabilité et la transparence dans leurs offres.
  • ...7 more annotations...
  • Mais ce n’est pas la seule piste qui permettrait d’interroger les biais des systèmes automatisés. Microsoft travaille à un outil de détection automatique des biais, Facebook également (notamment via le projet Fairness Flow annoncé par Isabel Kloumann du département d’IA de FB research à la dernière conférence de F8 Conference parmi une longue liste d’outils pour l’IA) rapporte la Technology Review.
  • La mathématicienne Cathy O’Neil (@mathbabedotorg, blog), qui s’est fait connaître en dénonçant les dangers de ces outils, a lancé une entreprise d’audit algorithmique. Visiblement, souligne Wired, ses premiers clients sont des entreprises qui ont besoin de certifier qu’elles sont équitables : comme cela a été le cas de Rentlogic, une entreprise qui évalue les immeubles automatiquement pour leur attribuer une note, ou comme Pymetrics, une entreprise qui utilise des tests de personnalité pour aider les entreprises à embaucher qui avait besoin d’assurer que ses logiciels n’étaient pas discriminants.
  • Dans son livre, Weapons of Math Destruction, Cathy O’Neil avait émis l’idée de créer un serment d’Hippocrate pour les datascientists, sous la forme d’un code de conduite édictant quelques principes moraux. Elle soulignait dans une remarquable interview pour Wired, que ce code de conduite n’était certes pas suffisant en soi, notamment parce que les datascientists ne sont pas seuls à décider de ce qui sera implémenté dans les services développés par les entreprises. Pour autant, ces techniciens ne peuvent pas seulement suivre « les recommandations des manuels d’optimisation qu’ils utilisent, sans tenir compte des conséquences plus larges de leur travail ».
  • Cathy O’Neil a proposé une matrice éthique, basée sur les travaux du philosophe Ben Mepham qui l’a utilisé en bioéthique, qui aide à saisir ce sur quoi ce que l’on développe a un impact, et de l’autre ce dont s’inquiète les gens qui sont impactés par ce que l’on développe. Cette grille confronte quelques notions (exactitude, cohérence, partialité, transparence, équité, rapidité) à leur impact sur chacune des parties prenantes. La matrice sert à créer une conversation. Chaque case propose des questions : « qui souffre si le système se trompe ? » Le but est de révéler des problèmes. Quand la réponse pose problème, la case est colorée de rouge.
  • Elle propose également de se poser plusieurs questions, comme « les algorithmes que nous déployons vont-ils améliorer les processus humains qu’ils remplacent ? » Bien souvent, on constate qu’ils fonctionnent beaucoup plus mal que les systèmes précédents. Pour elle, il est également nécessaire de se demander : « pour qui l’algorithme échoue-t-il ? » Un système de reconnaissance facial échoue-t-il plus souvent pour les femmes que pour les hommes, pour les gens de couleurs que pour les blancs, pour les personnes âgées que pour les jeunes ?… Enfin, elle invite à se poser une troisième catégorie de questions : « est-ce que cela fonctionne pour la société (donc à très large échelle) ? Est-ce que nous enregistrons les erreurs du système ? Peut-on les réintroduire dans l’algorithme pour l’améliorer ? Est-ce que le système a des conséquences non intentionnelles ?… » Et la chercheuse de rappeler qu’aucunes de ces questions ne mettent en danger les secrets des algorithmes que les entreprises veulent protéger.
  • Le militant pour la protection de la vie privée Aral Balkan (@aral) estime qu’un code d’éthique risque surtout d’être utilisé comme caution de vertu par les entreprises pour continuer à faire comme d’habitude. Appliquer le RGPD aux États-Unis aurait plus d’impact pour prévenir les dommages algorithmiques. Sur son blog, Virginia Eubanks a réagi en proposant plutôt un « serment de non-violence numérique », qui, dans la forme au moins, est plus impliquant pour celui amené à le prononcer que de signer à quelques grands principes vagues
  • Mais l’enjeu demeure de les mettre en pratique. « Tout code d’éthique des données vous indiquera que vous ne devez pas collecter des données de sujets expérimentaux sans leur consentement éclairé. Mais ce code de conduite ne vous dira pas comment implémenter ce consentement éclairé. Or, celui-ci est facile si vous interrogez quelques personnes pour une expérience de psychologie. Mais il signifie quelque chose de bien différent en ligne ». Et ce n’est pas la même chose bien sûr de demander la permission via une fenêtre pop-up par exemple ou que via une case précochée cachée… La mise en oeuvre de principes éthiques englobe des questions qui vont des choix dans l’interface utilisateur aux choix de structuration des données ou d’interrogation des données de connexion. Et pose la question de rendre néanmoins le service utilisable sans dégrader l’expérience utilisateur…
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    "Face aux multiples biais inscrits dans la production même des données utilisées par les algorithmes et les outils d'apprentissage automatisés, le risque, rappelle la chercheuse Kate Crawford (@katecrowford), co-fondatrice de l'AI Now Institute (@AINowInstitute), est que « plutôt que de concevoir des systèmes censés résoudre les problèmes, nous les exacerbions »."
Aurialie Jublin

De l'imbrication algorithmique | InternetActu.net - 0 views

  • Pour la programmeuse et essayiste Ellen Ullman, le problème est que la programmation est de plus en plus éloignée de la compréhension humaine du fait de l’intrication des programmes, algorithmes et données. Les gens pensent souvent que les algorithmes peuvent être modifiés, mais le plus souvent, ils s’exécutent et évoluent par eux-mêmes (cf. notre dossier, réinventer la programmation). Leurs concepteurs ne les contrôlent pas vraiment et ce d’autant plus qu’ils font appellent à des bases de données, à des bibliothèques de programmes distants, à d’autres algorithmes qui évoluent également.
  • Mais désormais, les algorithmes désignent des systèmes logiciels de prise de décision complexes, avec un nombre de règles et de critères volumineux, souvent interreliés et interdépendants. Or, ils nous ont été toujours présentés comme des promesses d’objectivité, d’où le fait qu’ils se soient étendus à nombre de décisions de la vie courante : octroi de prêts, de prestations, de places… Pourtant, ces décisions ne sont pas sans biais, du fait de la manière même dont ces relations sont conçues par les ingénieurs.
  • Le problème, c’est que quand l’algorithme apprend, nous ne savons plus quels sont les règles et les paramètres qu’il utilise puisqu’il les transforme. Ces algorithmes-là ne sont plus prévisibles et peuvent se mettre à produire des résultats erratiques. Pour Smith ce sont des « algorithmes Frankenstein », des machines qui créent leurs propres règles, comme ceux qui dominent désormais les marchés financiers via les transactions à haute fréquence. Pour Neil Johnson, physicien de la complexité à l’université George Washington, Facebook peut ainsi avoir des algorithmes simples pour reconnaître un visage dans une photo… Mais que se passe-t-il quand des milliers d’algorithmes travaillent ensemble sur des milliards de profils ? « Vous ne pouvez pas prédire le comportement global appris à partir de règles microscopiques ».
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  • Pour la mathématicienne Cathy O’Neil (@mathbabedotorg), dans l’environnement algorithmique complexe actuel, il est difficile de définir les responsabilités des différents segments de codes imbriqués les uns aux autres. Les Flash Crash, ces krachs financiers éclair, n’ont pas lieu que sur les marchés financiers. La tarification algorithmique d’Amazon s’emballe aussi parfois en faisant grimper le prix de livres à des hauteurs folles. Or, comprendre où se situe la responsabilité de ces emballements n’est pas si simple. « Comme dans la finance, le déni est intégré au système ».
  • Éviter les conflits de code sur des millions de lignes de code alimentés par des flux d’information constants est extrêmement difficile. Pour l’historien des sciences George Dyson, le problème est que nous construisons des systèmes qui vont au-delà de nos moyens intellectuels pour les contrôler. Or, nous pensons que si un système est déterministe (c’est-à-dire qu’il agit selon des règles fixes), alors il est prévisible et que s’il est prévisible alors il peut être contrôlé. Mais ces deux hypothèses sont fausses, estime Dyson. « La loi d’Ashby dit qu’un système de contrôle doit être aussi complexe que le système qu’il contrôle ». Mais cela se révèle difficile. Nous ne savons pas tester cette complexité de manière exhaustive.
  • Une étude sur les attaques par drones au Pakistan entre 2003 et 2013 a ainsi montré que 2 % des personnes tuées par drones étaient des cibles présentant une menace. 20 % étaient considérés comme des non-combattants… Et 75 % étaient des cibles… « non identifiés ». Pour elle, nous sommes face à une technologie d’identification très grossière. Dans ce contexte, la perspective du développement d’armes autonomes laisse plus que perplexe. Pour Lilly Irani (@gleemie) de l’université de Californie, les choix des concepteurs d’algorithmes nous sont trop souvent présentés comme objectifs quand ils cachent des enjeux politiques.
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    "On se souvient de la mort d'Elaine Herzberg, première humaine tuée par une voiture autonome en mars 2018 (voir l'enquête qu'en dressait l'écrivain Thierry Crouzet). Pour le Guardian, le journaliste Andrew Smith (@wiresmith) revient sur les hésitations de l'algorithme de la voiture à reconnaître ce qu'il se passait."
Aurialie Jublin

[sobriété] Bientôt l'âge d'or des low-tech ? - 0 views

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    Complexes, énergivores, consommatrices de ressources rares, les high-tech pourraient se voir concurrencées par des technologies plus sobres. Mais la transition prendra du temps.
Aurialie Jublin

[Fake] Internet serait-il devenu complètement fake? - Digital Society Forum - 0 views

  • Sur Internet, moins de 60% du trafic serait humain, explique l’auteur. Le reste des Internautes seraient des bots, des logiciels opérant de manière autonome sur le réseau. Au point de brouiller la frontière entre Internautes humains et non-humains. En 2013, la moitié des usagers de Youtube étaient ainsi des bots se faisant passer pour des êtres humains, ce qui avait fait craindre aux employés de la multinationale l’avènement d’une ère où les systèmes de détection du trafic frauduleux jugeraient réelle l’activité des bots, et fausse celle des êtres humains.
  • Au cours des deux dernières années, Facebook aurait également publié des chiffres erronés sur le renvoi du trafic depuis Facebook vers des sites externes, la portée des publications, ou encore le nombre de “vues” des vidéos postées sur la plateforme. Ce qui interroge, là encore, sur la notion de “réel” sur Internet.
  • “Tout ce qui semblait auparavant incontestablement réel semble maintenant légèrement faux; tout ce qui semblait auparavant légèrement faux a maintenant le pouvoir et la présence du réel”, déplore l’auteur. Et de multiplier les exemples: entre les vidéos complotistes pullulant sur Youtube, les trolls russes se faisant passer pour des soutiens de Donald Trump sur Facebook et le “deepfake”, une technique de synthèse permettant de falsifier le visage ou la voix d’une personne sur une vidéo grâce à l’intelligence artificielle, l’auteur s’inquiète de l’effondrement de toute distinction claire entre le réel et l’irréel sur Internet.
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  • L’exemple de Lil Miquela , une “influenceuse” suivie par plus d’un million et demi de personnes sur Instagram, est à ce titre particulièrement révélateur. Partageant régulièrement ses états d’âme, ses séances de shopping et ses sorties entre amis sur le réseau social entre deux selfies, ce mannequin américano-brésilien est en réalité un avatar, créé grâce à l’imagerie de synthèse par une start-up californienne spécialisée en intelligence artificielle et en robotique. Un faux mannequin, donc, mais une influence bien réelle: là aussi, avertit l’auteur, la frontière entre le vrai et le faux s’émousse.
  • “Ce qui a vraiment disparu d’internet, ce n’est pas la réalité, c’est la confiance : le sentiment que les personnes et les choses que l’on y rencontre sont ce qu’elles prétendent être,” conclut l’auteur. Remédier à cet état de fait nécessite selon lui une réforme du modèle économique d’Internet qui a permis au mensonge, à la déformation et à la falsification de devenir lucratifs. Sans une telle réforme, estime-t-il, Internet risque de devenir une usine à “fakes”, et les revenus publicitaires qu’ils génèrent la seule réalité.
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    "Une chronique du New York Magazine alerte sur l'abondance de contenus faux sur Internet. Selon son auteur, les manipulations de données et de faits y auraient atteint un seuil critique, au point de compromettre notre capacité à distinguer le réel de l'irréel."
Aurialie Jublin

[Logiciel libre] Et si le monde numérique devenait vraiment « libre » ? - 0 views

  • « Je ne vois pas ce qui peut exister et qui ne soit pas remplaçable par une solution open source, en particulier dans les innovations sociales et tous les projets d’intérêt général, dit-elle. Hier, je suis tombée sur un logiciel qui gère la projection dans les cinémas... Le libre permet aussi de répondre à des besoins publics, à l’image d’OpenCimetière qui a été produit pour une commune et qui sert à présent à d’autres mairies.
  • Cet élan d’ouverture s’est décliné dans la production de marchandises avec l’open hardware, dans les données avec l’open data (mise à disposition de données publiques) ou encore dans le partage des connaissances avec l’open innovation, l’open science, etc. Ce mouvement général repose sur la libre circulation des savoirs, l’accessibilité au « faire » et la coopération entre pairs.
  • « Quand des salariés transforment leur entreprise en coopérative, cela ne les empêche pas de recruter un directeur, mais la direction est une compétence de coordination et non un organe de pouvoir. C’est la même chose dans le pair-à-pair », précise-t-elle.
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  • Mais, si l’open source a permis au libre de gagner en efficacité, sa focalisation sur la technique l’a sans doute éloigné de ceux à qui il s’adressait en premier lieu : tous les autres, qui ne développent pas. Le libre reste, en effet, très circonscrit au monde de l’informatique et se compose majoritairement d’hommes, même si d’une multitude de nationalités.
  • Les logiciels libres ne permettent pas forcément de protéger les données, mais on est sûr que l’exploitation des données ne constitue pas le modèle économique du service. Quand on entre dans l’état d ’esprit du logiciel libre, on prend conscience de l’impact de l’informatique dans sa propre vie, on est plus vigilant et on est assuré que quelqu’un quelque part vérifiera s’il y a des mouchards dans le code et alertera les autres. La faiblesse du libre, c’est que si j’envoie un mail à un ami qui est sur Gmail, malgré tous mes efforts, Google aura mes données. Le libre te pousse à considérer l’interconnexion aux autres et le risque qu’on fait prendre aux autres en laissant ses données sur internet sans s’assurer de ce qu’elles deviennent », explique Catherine Guillard.
  • L’une des clés serait sans doute de rendre l’engagement dans le libre aussi mobilisateur pour d’autres métiers que ceux du développement... Par exemple les graphistes, les juristes ou pourquoi pas le monde médical, qui tous doivent composer avec le numérique et les dérives de certains de ses acteurs. Enfin, il faudrait peut-être revenir aux origines sociales et politiques du libre.
  • En effet, à l’image du bio qui n’est pas qu’une méthode de culture, le libre n’est pas qu’une méthode de développement, mais propose un modèle de société plus respectueux des autres, plus solidaire, plus attentif aux impacts sociaux et environnementaux. Faire un pas vers le libre, c’est, au fond, soutenir le « faire ensemble ».
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    "Les logiciels libres et le mouvement open source luttent contre les boîtes noires, prônant le partage des savoirs et le « faire ensemble ». Mais l'ouverture des codes est-elle vraiment un gage d'ouverture aux autres ? Le monde du « libre » ne devrait-il pas engager une mutation pour rendre plus tangible sa dimension solidaire et toucher un public plus large ? Ce sont les questions que pose cet article de Solidarum, issu du numéro 3 de la revue Visions solidaires pour demain, en librairie depuis la mi-janvier."
Cécile Christodoulou

Dominique Cardon : « Il ne faut pas avoir peur de la liberté d'expression qu'... - 0 views

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    "Le numérique est avant tout une culture, qu'il convient de comprendre et de décoder. Voilà l'objet - et le but - du dernier livre du sociologue Dominique Cardon, Culture numérique, publié aux Presses de Sciences Po. Avec lui, nous sommes remontés aux origines de cette culture, et de celle d'Internet." "Cinq traits le caractérisent : Internet est avant tout une affaire d'individus, il encourage la création de communautés, il confine à « changer la société sans prendre le pouvoir », fidèle à son projet initial, il se défie des Etats et institutions mais beaucoup moins du marché, et enfin il revêt un pouvoir transformateur, thaumaturgique. Le numérique, plus largement, écrit-il dans son ouvrage, a permis un enpowerment des individus, il a encouragé l'apparition de formes collectives nouvelles et redistribué le pouvoir et la valeur."
Asso Fing

« On cherche à éveiller la conscience éthique des développeurs et data scient... - 0 views

  • Comment la communauté Data For Good utilise-t-elle les algorithmes ? Qu’est-ce qui vous différencie des grandes entreprises tech ? Avec Data For Good, on veut permettre aux associations, aux projets citoyens et aux institutions d’avoir accès à la data science, qui est utilisée uniquement par les grandes entreprises comme les GAFA et les start-up pour l’instant, car c’est un service qui coûte très cher. Notre communauté bénévole soutient certains projets comme celui de l’association Frateli, qui travaille sur du mentorat. On leur a créé une plateforme de matching, avec des algorithmes, pour matcher en un clic un mentor avec un mentoré, alors qu’avant tout était fait à la main sur un tableur Excel. L’humain garde la décision finale, il peut changer les résultats donnés par l’algorithme, mais cela reste beaucoup plus rapide.
  • Notre but n’est pas de récolter des données, on ne fait pas des algorithmes qui utilisent les données des utilisateurs pour faire de la publicité. De plus, les codes sources produits par Data For Good sont tous en open source, donc si une autre association veut les utiliser, elle peut le faire gratuitement et librement. Les GAFA ouvrent certains de leurs codes sources, mais c’est avant tout pour attirer des développeurs, et ils n’ouvrent que des bribes de leurs codes. Et ils savent très bien que sans les données qu’ils possèdent, ces extraits de codes ne servent à rien.
  • Vous travaillez aussi chez AlgoTransparency, une plateforme qui cherche à décrypter les mécanismes de l’algorithme de YouTube : avez-vous réussi à savoir comment était construit cet algorithme, qui est un secret bien gardé par YouTube ? Sur YouTube, on est enfermé dans une spirale de recommandations qui ne montre pas forcément le meilleur de l’humanité... Sur AlgoTransparency, on a mis en place un robot qui est capable de mesurer quelle vidéo est recommandée, à partir de quelle vidéo. On a donc des données sur ces vidéos, mais comprendre comment fonctionne l’algorithme est très compliqué car celui-ci est très complexe, et il évolue en permanence car il est ré-entraîné tous les jours. Nous, on a décidé d’étudier nos données, en rentrant des mots clés, et de voir ce qu’il en sort.
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  • L’algorithme de la plateforme, et YouTube le dit lui-même, c’est de maximiser le temps passé sur la plateforme, le « watch time ». Et quand l’algorithme voit que les gens passent plus de temps sur la plateforme quand ils regardent des vidéos complotistes par exemple, il va plus recommander ce contenu. Il fait juste le boulot pour lequel on l’a programmé.
  • Et dans un second temps, on pourrait créer pour la plateforme un statut hybride, qui serait entre l’hébergeur, qui n’a pas de responsabilité sur le contenu qu’il héberge, et le média, qui a toute la responsabilité sur ce qu’il partage. Pour l’instant, YouTube dit être un hébergeur, car il ne peut pas éditorialiser tout le contenu qui se trouve sur la plateforme. Pourtant, les algorithmes ont un rôle éditorial : quand ils recommandent un million de fois une vidéo à des êtres humains, il y a un choix fait derrière, l’algorithme a privilégié un contenu plutôt qu’un autre.
  • Par contre, là où on peut avoir peur, c’est quand ces algorithmes, notamment de machine learning (c’est-à-dire des algorithmes qui vont apprendre à partir des données qu’on leur a fourni pour prédire des choses), impactent la vie humaine : par exemple, lorsqu’on les utilise dans l’espace public pour faire de la reconnaissance faciale, ou quand les décisions concernant les peines de prison sont prises par des algorithmes. Si on ne sait pas quels sont les critères choisis pour définir les algorithmes, c’est là que ça devient dangereux. Et c’est pour cela qu’on demande l’ouverture de tous les codes sources utilisés dans les administrations (comme la loi Le Maire le recommande).
  • Est-ce que le problème de l’algorithme ne serait pas de décontextualiser les données ? Normalement, c’est aux data scientists de garder en tête le contexte des données qu’ils étudient, et de savoir qu’elles peuvent être biaisées : par exemple, connaître le quartier où habitent les utilisateurs peut être un biais sur leur niveau social. Dans le serment d’Hippocrate de Data For Good, on cherche au mieux à éveiller la conscience éthique des data scientist, en « informant les parties prenantes sur (…) l’utilisation des données », en assurant que « les individus ne soient pas discriminés par rapport à des critères illégaux ou illégitimes », en « respectant la vie privée et la dignité humaine » et en « assumant ses responsabilités en cas de difficulté ou de conflits d’intérêts ».
  •  
    "Et si les développeurs et data scientists prêtaient serment, comme les médecins, pour une utilisation des données plus éthique ? Data For Good, une communauté de data scientists et de développeurs bénévoles au service de projets d'intérêt général, en a fait une de ses missions. Ce « serment d'Hippocrate » des data scientists sera mis en ligne le 26 juin, lors d'un « Demo Day » qui présentera les projets soutenus par Data For Good. Curieux d'en savoir plus, nous avons interrogé Frédéric Bardolle, membre de Data For Good et d'Algotransparency, une plateforme qui décrypte les mécanismes de l'algorithme de YouTube. "
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