"André Gerin : « Certains territoires de banlieues sont sous contrôle de la mafia et des islamistes »
Ancien maire de Vénissieux durant 24 ans, André Gerin connait bien les problèmes des quartiers populaires. Souvent provocateurs, les propos de l'ancien élu communiste ne sont pas toujours appréciés y compris dans sa propre famille politique. "
"Faut-il que nos jeunes djihadistes des banlieues soient désespérés, « cassés », pour ne plus avoir, à 20 ans, comme moyen de se sentir exister, ne serait-ce que quelques heures, que la mort ( attentats-kamikazes, ou équipées suicidaires à la Mérah et Coulibaly), au nom d'une religion dont on ne leur a inculqué que la vision salafiste - qui existe bel et bien, même si ce n'est pas la seule ; c'est le fameux « quart d'heure de célébrité auquel tout le monde aura droit une fois dans sa vie » , dont parlait Andy Warhol, quart d'heure qu'ils sont prêts à payer de leur vie elle-même.
À 20 ans, il est normal de chercher l'absolu ( à 25 ans, Régis Debray partait se battre aux côtés de Che Guevara en Bolivie ) ; et cette vision salafiste, simpliste, totalitaire et intransigeante de l'islam satisfait bien ce besoin d'absolu sans nuances ( par exemple : aucune distinction entre antisémitisme et antisionisme , entre Juifs et Israéliens ) - bien plus facilement que les subtilités tolérantes, relativistes et ouvertes du soufisme, ou que la complexité philosophique et rationaliste des m'utazilistes ."
"TERRORISME - En Europe et en particulier en France, les candidats au jihadisme se recrutaient traditionnellement dans leur écrasante majorité parmi les classes populaires: les jeunes des banlieues en France, le "disaffected youth" en Angleterre, etc. En France, depuis les années 90, la totalité des jihadistes qui ont réussi à organiser des attentats ayant entraîné la mort de plusieurs victimes se sont recrutés en banlieue: Khaled Kelkal (1995), Mohamed Merah (2012), Mehdi Nemmouche (2014), Saïd et Chérif Kouachi ainsi que Amedy Coulibaly (janvier 2015). Il y a eu quelques cas d'arrestation des membres de classes moyennes islamiques ou convertis mais dans l'ensemble ils n'ont pas pu mettre en oeuvre leurs attentats. Depuis 2013, avec la généralisation de la guerre civile en Syrie et l'avènement de l'Etat islamique (Daech), on assiste à l'extension sensible des jihadistes aux classes moyennes."
"« Zone interdite » a installé ses caméras à Roubaix, où le taux de chômage est l'un des plus forts de France, mais aussi aux Mureaux, en banlieue parisienne. L'émission part à la rencontre de Kevin et Inés, Français de souche convertis à l'islam ainsi que leurs enfants désormais élevés dans cette religion :"
"« La radicalisation dans les mosquées est devenue quasiment impossible »
Mohamed-Ali Adraoui, chercheur et enseignant à l'Institut d'études politiques (IEP) de Paris, spécialiste de l'islam, replace le parcours d'Alexandre D, qui a reconnu avoir agressé un soldat, dans un contexte plus large de radicalisation d'une frange de jeunes musulmans. Il pointe aussi la difficulté des "communautés" musulmanes à prévenir la dérive de ces individus. Il vient de publier Du Golfe aux banlieues, le salafisme mondialisé (PUF) ; il est co-auteur de Banlieue de la République avec Gilles Kepel (Gallimard, 2012). Il
Que vous inspire le cas d'Alexandre D. le jeune homme de 22 ans, qui après sa conversion à l'islam il y a quatre ans et un processus de radicalisation est passé à l'acte, le 25 mai, « au nom de son idéologie religieuse », selon les termes du procureur de Paris?"
"L'assemblée planière du CESE recevra Gilles Kepel pour une intervention suivie d'un débat sur " L'Islam de France : entre la crise des banlieues et les conflits du Moyen-Orient".
"J'ai toujours essayé de marcher sur mes deux jambes, c'est-à-dire d'observer simultanément ce qui se passait dans l'ensemble du monde arabe et les questions liées à l'immigration musulmane en France. Depuis les révolutions arabes, les deux thèmes n'ont fait que se rapprocher davantage, ce qui se passe en France étant fortement lié à ce qui se passe au sud de la Méditerranée. Un exemple : les bouleversements en Tunisie nous concernent directement puisqu'un huitième de la population tunisienne réside en France.
Il était donc temps de marquer les éléments de continuité entre les recherches identitaires qui se déroulent aujourd'hui dans le monde arabe et les événements du même ordre qui se produisent en France - parfois dans la douleur, d'où ce terme à double sens de « passion », qui signifie à la fois l'enthousiasme et, au sens christique, la souffrance."
Extrait d'un entretien avec Gilles Kepel, à propos de son ouvrage "Passion française, les voix des cités "
Gilles Kepel est professeur des universités et directeur de la chaire Moyen-Orient Méditerranée à l'Institut d'études politiques (IEP) de Paris. Membre Senior de l'Institut Universitaire de France depuis 2010. Il est diplômé d'arabe et de philosophie, il a deux doctorats en sociologie et en science politique. Il a aussi enseigné à la New York University en 1994, à la Columbia University, également à New York, en 1995 et 1996.
Gilles Kepel est également membre du comité éditorial de Maghreb-Machrek et directeur de la collection Proche-Orient aux PUF depuis 2004."
"On savait que nos banlieues pourvoyaient généreusement l'État islamique en djihadistes. Sans distinction de race, de sexe et d'ethnie, musulmans de souche ou convertis de fraîche date, cailleras délinquantes et ex-bimbos enrubannées en burqa vont par centaines chercher un présent meilleur aux confins de l'Irak et de la Syrie. Après les attentats de Charlie Hebdo et de l'Hypercacher, notre ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve jurait ses grands dieux qu'on ne reprendrait plus le gouvernement en flagrant délit d'angélisme, alors que les services de Beauvau assuraient l'été dernier que « ce n'est pas un délit de prôner le djihad »."
"L'idéologie jihadiste européenne est-elle directement importée du monde oriental ? L'islamisme dans nos banlieues est-il absolument résistant à la culture laïque et républicaine ? Ces questions sont sensibles, et il faut se garder en la matière de tout essentialisme."
"Poursuivant le travail de Passion arabe, Gilles Kepel signe une stupéfiante enquête sur les banlieues, déchirées entre espoirs démocratiques et essor du salafisme. "
"Depuis 35 ans, de Sciences Po Paris à l'Université Columbia, de la London School of Economics à l'Université de New York, le politologue partage sa science du monde arabe, dont il examine les aspérités culturelles, identitaires, religieuses, géopolitiques et économiques. Les ressorts, les vulnérabilités, les particularismes de ces territoires en effervescence depuis 2011, l'auteur de Passion arabe (Gallimard) juge qu'ils n'ont jamais autant interrogé et pénétré l'économie et la société françaises. Un éclairage lumineux. Et une mise en garde, par celui-même dont la tête est mise à prix par les salafistes radicaux. "
"André Gerin, l'ancien député-maire de Vénissieux, fin connaisseur des banlieues et figure emblématique du Parti communiste, n'est pas étonné des attentats terroristes qui viennent de frapper la France. Il explique qu'il tire la sonnette d'alarme depuis des années sans être entendu.
Le Point.fr : Vous dénoncez depuis des années ceux que vous appelez "les talibans français". Qu'entendez-vous par là ?"
""Islam de France, est-il trop tard ?" C'est la question cruciale que Causeur nous invite à nous poser ce mois-ci. Pour que l'harmonie entre les dissensus qui font le charme et le fond musical de cette publication soit complète, il faut bien sûr un chacal puant qui sorte de sa tanière et hurle aux grands cimetières sous la lune : "Oui, oui, il est trop tard, bien trop tard !" Ce chacal, ce sera moi."
"Guylain Chevrier analyse comment l'islam radical prospère dans certains quartiers de Seine-Saint-Denis, et s'étonne que le salafisme ne soit pas interdit sur le territoire français."
"REPORTAGE - Six jeunes de cette ville de Seine-Saint-Denis, partis pour le djihad, seraient morts en Syrie. À Sevran, l'islam radical prospère sur le terreau du communautarisme et des revendications religieuses. Les parents de Quentin Roy, 23 ans, décédé en janvier, mettent en cause « l'immobilisme » du maire."
"Un haut fonctionnaire, familier des lieux, jette sans détour: «Dans ces banlieues, qu'est-ce qui a remplacé l'effondrement de l'Église catholique et du Parti communiste? La religiosité musulmane! Elle imprègne tout le tissu associatif, du sport au soutien scolaire. Au point que lors des activités, même subventionnées, filles et garçons sont séparés. Si vous avez des enfants et les moyens de partir, c'est clair: vous ne restez pas à Sevran!»"
"Après neuf ans dans l'intimité des «jeunes des quartiers», le sociologue Fabien Truong publie Loyautés radicales*, une enquête ethnographique sur le rapport à la religion et à la violence des « mauvais garçons » de la nation."
"Elles sont mères, responsables associatives, éducatrices au cœur des quartiers populaires. Ces femmes de banlieue ont en commun de constater au quotidien la montée de l'intolérance religieuse. Lors d'une vaste concertation menée en 2016 sous l'égide du ministère des familles, de l'enfance et du droit des femmes, elles avaient alerté de l'impact de ce phénomène sur la vie des familles. Trois d'entre elles expliquent comment, à leur niveau, elles tentent d'organiser une riposte."
"La prolifération de commerces proposant de l'exorcisme en banlieue inquiète la Direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI) et La Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), dont nous dévoilons les extraits du prochain rapport." [RDP du 02 juin 2020]