L’histoire comme clef de lecture ? De ce point de vue, le regard des historiens des entreprises, des techniques et de l’innovation permet d’éclairer le débat actuel, et, en premier lieu, d’attirer l’attention sur deux basculements majeurs. Le premier, qui relève de la sémantique, n’est pas des moindres. Le débat s’est cristallisé aujourd’hui sur la figure du chercheur ”fondamental”, et par extension sur le scientifique et le savant, en imposant une dichotomie formelle avec les figures de l’inventeur et de l’ingénieur, et par extension le chercheur ”appliqué”. Alors même que l’environnement et les enjeux ont changé, on reste ainsi figé sur une représentation archaïque - conservatrice et cloisonnée - des lieux et des acteurs de la recherche. Deuxième basculement, celui d’une dérive élitiste négative. De plus en plus de jeunes diplômés des grandes écoles scientifiques (Centrale, Arts et Métiers, etc.) ont eu tendance, au cours de ces quinze dernières années, à préférer la finance à l’industrie… comme si le diplôme d’une grande école valait exclusivement pour sa représentation sociale, et non pour sa capacité à ouvrir à des carrières d’ingénieur-chercheur de haut niveau. La crise financière changera-t-elle la donne, les fera-t-elle revenir vers l’industrie? Au cours de ces vingt dernières années, de nombreux succès conjoints des centres de recherches des grandes écoles et d’entreprises industrielles (Thales, Snecma, CEA, etc.), ont pourtant montré l’excellence de ce type de partenariats et l’efficacité de ces passerelles technologiques (grandes écoles /universités/entreprises, et public/privé). Le mouvement de ces partenariats contractuels n’est pas marginal, il implique déjà 9000 enseignants-chercheurs.