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Jon Snow

L'identité nationale sous le regard des historiens - Mouvements - 2 views

  • Dans son ouvrage mêlant « histoire en train de se faire » et essai politique, Gérard Noiriel revient sur les discours tenus pendant les présidentielles et montre comment Nicolas Sarkozy a réaménagé le vieux discours nationaliste sur la « menace étrangère » en opposant les français issus des immigrations passées aux nouveaux immigrants.
  • Patrick Weil montre que des politiques de préférence ethnique explicite ont été envisagées à deux moments précis de l’histoire républicaine française : en 1945, certains experts ont proposé d’adopter un régime de quotas par zones géographiques pour répondre aux besoins de main d’oeuvre ; en 1978-1980, Valéry Giscard d’Estaing instaure une politique de retours forcés à destination de l’immigration d’Afrique du Nord.
  • Dans un second temps, Patrick Weil s’attarde sur quatre exemples de discriminations ayant eu une traduction institutionnelle : les musulmans d’Algérie qui en 1889 conservent leur statut alors que les Juifs algériens et les enfants nés en Algérie de parents étrangers deviennent Français ; les naturalisés qui pendant longtemps n’ont pas eu accès à certaines fonctions politiques ou professionnelles ; les femmes qui, de 1803 à 1927, perdent leur nationalité en épousant un étranger ; et les juifs Français dénaturalisés ou déchus de leur citoyenneté entre 1940 et 1944. Ces discriminations peuvent produire des phénomènes douloureux de désidentification et/ou de non reconnaissance. Et ce d’autant plus lorsqu’ils sont ravivés par des évènements postérieurs comme ce fut le cas avec la réforme du code de la nationalité en 1993 pour les musulmans ou, dans le cas des juifs, le discours de De Gaulle revenant sur la guerre des 6 jours. De ses exemples Patrick Weil tire la certitude que la « perception des histoires des autres » est absolument nécessaire pour ne pas raviver des blessures du passé. Dans ce cadre, il s’agirait donc de « faire plus d’histoire de la colonisation, ou plutôt des colonisations, et non simplement de la guerre d’Algérie, [pour] rétablir ou rendre possible à nouveau les identifications ». Et donc permettre le vivre-ensemble.
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  • Dans le même esprit, Patrick Weil montre, dans la troisième partie de son ouvrage, comment un véritable travail sur la mémoire peut permettre d’apaiser de vives divisions du passé en instituant une « nouvelle concitoyenneté » et en fabriquant une nouvelle unité autour de valeurs fondamentales. Revenant sur les exemples de l’esclavage et de l’extermination des juifs Français sous Pétain, il met en évidence le besoin d’utiliser un double outil : le bannissement et la célébration. Ainsi, la loi de 1848 vise à bannir les esclavagistes tandis que la loi de 2001 –rendant explicite la caractérisation de crime de l’humanité qui était implicite en 1848– vise à célébrer cette abolition. Toutes les deux se font au nom de la France et au regard de la responsabilité qui est celle des Français. Du coup, la loi de 2001 célèbre, selon l’auteur, la valeur que constitue l’égalité de tous les citoyens, anciens et nouveaux, indépendamment de leur couleur et origine.
  • Dans les deux cas, les commémorations fournissent le cadre de la réconciliation de la nation avec elle-même.
  • Il propose de reconstruire le fil historique et idéologique qui a rendu possible l’association entre les termes « identité nationale » et « immigration ». Reconnaissant que la logique identitaire n’est pas nouvelle et a toujours alimenté les discours nationalistes et/ou patriotiques –sur lesquels il revient en détail– il rappelle qu’un tel rapprochement sémantique a été mise en circulation en France d’abord par le Club de l’Horloge et le Grece (Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne), deux officines d’extrême droite, au tournant des années 1970.
  • D’ailleurs, Noiriel insiste fortement sur le rôle des médias : de celui du Figaro Magazine qui décomplexe les intellectuels de droite au début des années 1980 à celui des médias audiovisuels qui, sous couvert de s’adresser à l’ensemble de la population et de prétendues contraintes de neutralité, dépolitisent le traitement de l’actualité, Noiriel montre comment les médias peuvent transformer l’agenda politique et décrédibiliser les discours des intellectuels engagés.
  • Pour Noiriel, ce qui a été présenté comme le « tournant » de l’élection présidentielle 2007 est plus complexe qu’il n’y paraît. Puisant sa conception de l’identité nationale dans des usages datés, Nicolas Sarkozy la remodèle à sa guise en fonction des enjeux de la période. Ainsi, il construit un lien entre la lutte contre l’immigration clandestine, le combat contre le communautarisme et la promotion d’une intégration autour des valeurs de la République. Dans la droite ligne national-sécuritaire, il réinstitue donc un lien entre les ennemis intérieurs et extérieurs de la France : la haine du voisin, de celui qui n’aime pas la France, redevient un élément clef du sentiment national.
  • Mais la conception de l’identité nationale de Nicolas Sarkozy comporte également des particularités. Tout d’abord, il va réintégrer dans un discours de droite l’idée selon laquelle c’est l’origine des personnes qui porte le danger pour l’unité nationale et non leurs actes.
  • Au final, Gérard Noiriel, en rappelant que la droite a toujours tiré sur la corde nationaliste pour capter les voix d’une fraction des classes populaires, démontre que Nicolas Sarkozy a su exploiter au maximum les opportunités qu’offre aujourd’hui la « démocratie du public » pour imposer un « nationalisme convenable ». Et quoi de mieux que d’étatiser la question de l’immigration pour qu’elle reste toujours présente dans le débat public ? Inscrite dans la loi, l’association des termes « immigration » et « identité nationale » facilite la surenchère sécuritaire ministérielle, puisqu’il s’agit de sauver la France. Et, d’autre part, de l’utilisation quotidienne du nom du ministère résultera une banalisation d’un rapprochement de termes jusqu’ici utilisé par la seule extrême-droite. À la fois lucide et volontariste, Noiriel conclut que l’historien a beau démontrer que l’identité nationale n’est pas un concept scientifique mais un simple élément de langage politique, « la vigilance est plus que jamais à l’ordre du jour ».
  • Comprendre pour agir Aussi bien Patrick Weil que Gérard Noiriel démontrent que le travail de l’historien est absolument nécessaire pour expliquer le rôle des symboles. Mais ce travail ne saurait équilibrer la puissance de stigmatisation que peuvent être les discours politiques maniant les symboles qui touchent les mémoires collectives. Convaincus que le rôle des mots est tout aussi important que des idées ou des arguments dans la construction des stéréotypes sur l’immigration, les deux auteurs s’inquiètent de la stigmatisation croissante des immigrés. Sommes-nous à une période charnière ? Oui, si l’on en croit Patrick Weil, au regard du retour en force du différentialisme ethnique au sein même de la droite traditionnelle : il y aurait donc des personnes intrinsèquement inadaptées à « notre » société [1]. Si l’on confronte cette idée à la volonté d’intégrer des tests ADN dans la politique d’immigration, ou encore à la réintroduction de la notion de « Criminel Né » du XIXe siècle à travers la loi sur la rétention de sûreté, c’est, sans doute, tout simplement la bataille sur les fondements de l’égalité qui est en train de se jouer. Pour que la génétique ou que le différentialisme ethnique ne remplace pas l’égalité –même inachevée– à la naissance, il devient urgent de repenser les fondements de l’égalité et des solidarités, en ce début du XXIe siècle.
Jon Snow

« Le Moment unipolaire et l'ère Obama » : une conférence de Noam Chomsky - Ar... - 0 views

  • Quant on se penche sur les affaires internationales, il est important de garder à l’esprit plusieurs principes considérablement répandus et utilisés. Le premier est la maxime de Thucydide : les forts agissent tel qu’ils le veulent, et les faibles souffrent tel qu’ils le doivent.
  • Un second thème directeur fut exprimé par Adam Smith. Il parlait de l’Angleterre, la plus grande puissance de son époque, mais son observation peut se généraliser. Smith observait que les « architectes principaux » de la politique anglaise étaient les marchands et les fabricants, lesquels s’assuraient que leurs intérêts personnels soient bien servis par la politique, quelles qu’en soient les conséquences néfastes sur les autres (y compris sur le peuple anglais).
  • Dans cette « grande aire », les États-Unis détiendraient le « pouvoir incontesté » grâce à leur « supériorité militaire et économique » et agiraient de manière à s’assurer la « restriction de tout exercice de souveraineté » des États interférant avec leurs plans. Au début, les planificateurs pensèrent que l’Allemagne serait prédominante en Europe, mais lorsque la Russie commença à broyer la Wehrmacht, la vision devint plus large et la Grande Aire se dut d’ incorporer le plus de territoires possibles en Eurasie, avec au minimum l’Europe occidentale, cœur économique eurasien.
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  • Alors que les politiques bipartisanes [2] envers Cuba s’accordent avec la maxime de Thucydide, elles rentrent en conflit avec le principe de Smith et nous donnent donc un aperçu particulier sur la formation des politiques. Depuis des dizaines d’années, le peuple américain est en faveur de la normalisation des relations avec Cuba. Si ignorer la volonté de la population n’a rien d’inhabituel, ce qui est plus intéressant dans ce cas c’est que de puissants secteurs du monde des affaires sont en faveur de la normalisation : l’agroalimentaire, les industriels de l’énergie, les sociétés pharmaceutiques et bien d’autres qui forment d’habitude le cadre politique. Leurs intérêts dans ce cas sont supplantés par un principe des affaires internationales délaissé par la littérature universitaire spécialisée. C’est ce qu’on pourrait appeler le principe de la Mafia. Le parrain ne tolère pas les exemples de « défi réussi », même de la part d’un petit épicier qui ne peut payer pour sa protection. C’est trop dangereux. Par conséquent, il faut le réprimer, et ce de manière brutale, afin que les autres comprennent que la désobéissance, le « défi réussi », n’est pas une option valable. Un défi réussi envers le maître peut être un « virus  » qui « répand la contagion », pour emprunter un terme d’Henry Kissinger lorsqu’il préparait le renversement du gouvernement Allende
  • Par exemple, lorsque Washington se préparait à renverser le gouvernement Allende, le Conseil National de Sécurité nota que, si les États-Unis ne pouvaient pas contrôler l’Amérique Latine, ils ne pouvaient prétendre « obtenir un ordre satisfaisant ailleurs dans le monde  », c’est-à-dire imposer leur domination efficacement au reste du monde. La « crédibilité  » de Washington en aurait été entamée, comme l’a avoué Henry Kissinger. D’autres pourraient se tourner vers la désobéissance, s’inspirer des « défis réussis  », si le virus chilien n’était pas détruit avant qu’il ne puisse « répandre la contagion ». Par conséquent la démocratie parlementaire au Chili devait disparaître, comme ça s’est passé à l’occasion du premier 11 Septembre, en 1973. Cet événement a disparu de l’histoire occidentale, bien qu’en termes de conséquences pour le Chili et ailleurs, cela surpasse de loin les terribles crimes du 11 septembre 2001.
  • Avec cet arrière-plan en tête, tournons-nous vers le « moment unipolaire  », sujet d’un grand nombre de discussions universitaires et populaires depuis l’effondrement de l’Union Soviétique il y a 20 ans, qui fit passer les États-Unis de principale superpuissance mondiale à seule superpuissance mondiale. Nous apprenons beaucoup sur la nature de la Guerre Froide et des évènements survenus depuis lors en regardant la façon dont Washington a réagi à la disparition de son ennemi mondial, de cette « impitoyable et monolithique conspiration » visant à s’emparer du monde pour reprendre la description de John F. Kennedy.
  • il leur fallait trouver un nouveau prétexte. Il fut vite donné : la menace des narcotrafiquants hispaniques focalisés sur la destruction des EU. La « guerre contre la drogue » fut certes lancée par Nixon, mais elle prit un rôle nouveau et plus important au cours du moment unipolaire.
  • Le besoin d’un nouveau prétexte guida aussi la réaction officielle à l’effondrement de la superpuissance ennemie. En quelques mois, l’administration de Bush père exposa le nouveau cap de Washington : en bref, tout restera comme avant, mais sous de nouveaux prétextes. Nous avons toujours besoin d’un gros système militaire, mais pour une nouvelle raison : la « sophistication technologique » des puissances du Tiers-monde. Nous devons maintenir la « base industrielle de défense  », un euphémisme pour désigner l’industrie de haute technologie soutenue par l’État. Nous devons maintenir les forces d’intervention pour les régions du Moyen-Orient riches en énergie, où les menaces importantes contre nos intérêts ne peuvent plus être rejetées sur le Kremlin, contrairement aux décennies de mensonges précédentes. Tout ceci passa discrètement et fut à peine signalé. Mais pour ceux qui cherchent à comprendre le monde, c’est très instructif.
  • Les élites intellectuelles se mirent rapidement au travail et remplirent leur mission. Elles annoncèrent une «  révolution normative » qui accordait aux États-Unis le droit d’ « intervention humanitaire », ceci pour les plus nobles des raisons bien entendu. Le moins que l’on puisse dire, c’est que les victimes traditionnelles n’étaient guère convaincues. Au Sud, des conférences de haut-niveau condamnèrent amèrement « le soi-disant ’droit’ d’intervention humanitaire ».
  • Un affinage était donc nécessaire, et le concept de la « responsabilité de protection » fut échafaudé à sa place. Ceux qui prêtent attention à l’histoire ne seront pas surpris de découvrir que les puissances occidentales exercent leur «  responsabilité de protection  » de manière extrêmement sélective, en parfaite correspondance avec les trois maximes.
  • Les faits concordent de manière troublante et requièrent une agilité considérable de la part des classes intellectuelles
  • Alors que l’Union Soviétique s’écroulait, Mikhaïl Gorbatchev fit une concession sidérante : il accepta que l’Allemagne réunifiée rejoigne l’alliance militaire hostile dirigée par la superpuissance mondiale, malgré le fait que les Allemands aient à eux-seuls quasi anéanti la Russie deux fois au cours du siècle. Il y avait cependant un quid pro quo [3].
  • L’administration Bush promit à Gorbatchev que l’OTAN ne s’étendrait pas à l’Allemagne de l’Est, et encore moins plus loin à l’Est. Elle garantit aussi à Gorbatchev que « l’OTAN se transformera elle-même en une organisation plus politique  ». Gorbatchev proposa aussi la création d’une zone dénucléarisée de l’Arctique à la Mer Noire, afin d’établir une « zone de paix  » pour lever toute menace sur l’Europe, de l’Est ou de l’Ouest. Cette proposition fut rejetée sans examen.
  • Clinton a pris ses fonctions peu de temps après. Les engagements de Washington ont rapidement disparu. Il est inutile de faire des commentaires sur la promesse que l’OTAN deviendrait une organisation plus politique. Clinton a élargi l’OTAN à l’Est, et Bush a surenchéri. Obama a apparemment l’intention de poursuivre cette expansion.
  • Juste avant le premier voyage d’Obama en Russie, son assistant spécial pour la Sécurité Nationale et les affaires eurasiennes informa la presse que « nous n’allons pas rassurer ou donner ou échanger quoi que ce soit aux Russes en ce qui concerne l’expansion de l’OTAN ou le système de défense anti-missiles  ». Il faisait référence au programme américain de défense anti-missiles en Europe de l’Est et à l’adhésion de deux voisins de la Russie, la Géorgie et l’Ukraine, à l’OTAN.
  • Ces deux décisions sont considérées par les analystes occidentaux comme de sérieuses menaces pour la sécurité russe, propres à enflammer les tensions internationales.
  • L’objectif des systèmes d’interception états-uniens, s’ils fonctionnent un jour, est d’empêcher toutes représailles en cas d’attaques américaine ou israélienne sur l’Iran, c’est-à-dire éliminer toute dissuasion iranienne. Les systèmes anti-missiles sont une arme de première frappe [4], et chaque côté l’a compris. Mais cela semble être un de ces faits qu’il vaut mieux laisser dans l’ombre.
  • Lors d’une conférence de l’OTAN, le secrétaire général, Jaap de Hoop Scheffer, indiquait que « les troupes de l’OTAN doivent surveiller les oléoducs de gaz et de pétrole à destination de l’Occident » et, plus globalement, protéger les routes maritimes empruntées par les tankers et les autres « infrastructures cruciales » du système énergétique. Cette décision explique plus clairement les politiques post-guerre froide visant à réformer l’OTAN en une force d’intervention mondiale dirigée par les États-Unis, particulièrement préoccupée par le contrôle de l’énergie.
  • Dès la fin de la seconde guerre mondiale, il était clair que l’Europe occidentale pouvait choisir de mener une politique indépendante, peut-être en conformité avec la vision gaulliste d’une Europe de l’Atlantique à l’Oural. Dans ce cas le problème n’était plus qu’un « virus  » puisse « répandre la contagion », mais qu’une pandémie abatte le système tout entier de contrôle global. L’OTAN était considéré comme un remède à cette menace.
  • Dans un cours d’économie, on apprend que les marchés sont basés sur des consommateurs éclairés qui prennent leurs décisions de manière rationnelle. Mais quiconque regarde une publicité télé sait que les entreprises consacrent de grosses ressources à créer des consommateurs standardisés prenant des décisions irrationnelles. Les méthodes utilisées pour ébranler les marchés sont adaptées afin de saper la démocratie, créant un électorat profane qui prendra des décisions irrationnelles sur un faible éventail d’alternatives compatibles avec les intérêts des deux partis, lesquels devraient être considérés comme des factions concurrentes du parti unique des affaires. Dans le monde des affaires et celui de la politique, les architectes politiques ont régulièrement été hostiles aux marchés et à la démocratie, sauf en cas d’avantages temporaires. La rhétorique est différente bien sûr, mais les faits sont là.
  • Des plans précis et rationnels d’organisation globale ont été développés, une “fonction” étant assignée à chaque région. Le Sud en général devait avoir un rôle de service : fournir des ressources, une main d’œuvre bon marché, des opportunités d’investissement et de marchés, ainsi que d’autres services comme l’importation des déchets et de la pollution. A cette époque les États-Unis n’étaient pas tellement intéressés par l’Afrique, elle fut donc confiée à l’Europe afin qu’elle l’ « exploite  » pour sa reconstruction après-guerre. On aurait pu imaginer des relations différentes entre l’Europe et l’Afrique vu leur passé historique, mais cela n’a pas été envisagé. Par contraste, les réserves de pétroles du Moyen-Orient étaient considérées comme étant « une prodigieuse source de pouvoir stratégique » et l’ « un des plus formidables trésors matériels de l’histoire mondiale  », la plus « importante aire stratégique dans le monde  », selon les mots d’Eisenhower. Les planificateurs influents admettaient que le contrôle du pétrole moyen-oriental fournirait aux États-Unis un « contrôle important sur le monde  ».
  • En ce qui concerne l’Amérique Latine, les planificateurs post-Seconde Guerre mondiale concluaient que la menace principale sur les intérêts des États-Unis était le fait de « régimes nationalistes radicaux [qui] séduisent les masses » et cherchent à satisfaire la « demande populaire d’amélioration immédiate des conditions de vie médiocres des masses  » ainsi que le développement selon les besoins domestiques. Ces tendances rentrent en conflit avec l’exigence d’ « un climat politique et économique favorable à l’investissement privé », avec un rapatriement satisfaisant des profits et avec la « protection de nos matières premières ». Une part conséquente de l’histoire ultérieure provient de ces conceptions non-contestées.
  • Si on prend le cas particulier de Mexico, un atelier du Pentagone sur la stratégie de développement pour l’Amérique Latine constatait en 1990 que les relations mexico-américaines étaient « extraordinairement positives », indifférent aux élections volées, à la violence étatique, à la torture, au traitement scandaleux des travailleurs et paysans et à d’autres menus détails. Les participants à l’atelier avaient cependant un souci en perspective : la menace d’une « ouverture démocratique  » au Mexique,
  • Le moment choisi pour l’opération Gatekeeper n’était certainement pas accidentel. Les analystes sensés avaient anticipé qu’ouvrir le Mexique à un flot d’exportations agroalimentaires fortement subventionnées ébranlerait tôt ou tard l’agriculture mexicaine, et que les entreprises mexicaines ne seraient pas capable de soutenir la compétition avec d’énormes sociétés aidées par l’État, lesquelles devaient être autorisées à opérer librement au Mexique selon le traité. Une conséquence probable était une hausse de l’émigration vers les États-Unis, à additionner à celle fuyant des pays d’Amérique Centrale, ravagés par la terreur reagannienne. La militarisation de la frontière fut une solution naturelle.
  • L’attitude populaire envers ceux qui fuient leurs pays (appelés “étrangers illégaux”) est complexe. Ils exécutent des services de grande valeur en tant que main d’œuvre très peu coûteuse et facilement exploitable. Aux États-Unis, l’agroalimentaire, le bâtiment et d’autres industries reposent massivement sur eux, et ils contribuent à la richesse des communautés où ils résident. D’un autre côté, ils réveillent le traditionnel sentiment anti-immigration.
  • Quelles que soient les réalités historiques et économiques, les immigrants ont été perçus par les pauvres et les travailleurs comme une menace pour leurs boulots, quartiers et modes de vie. Il est important de garder à l’esprit que les gens qui protestent aujourd’hui ont de réels doléances. Ils sont victimes de la financiarisation de l’économie et des programmes néolibéraux de mondialisation conçus pour transférer la production à l’étranger et les mettre en compétition avec les travailleurs du monde entier, et donc baisser leurs salaires et avantages. Pendant ce temps, les professionnels diplômés sont protégés des forces du marché et les propriétaires et dirigeants s’enrichissent. À nouveau la maxime de Smith.
  • Les répercussions sont sévères depuis les années Reagan et se manifestent de façon extrêmement déplaisante, comme on peut le voir actuellement en unes des journaux. Les deux partis politiques se battent pour savoir lequel des deux pourra proclamer avec le plus de ferveur son attachement à la doctrine sadique selon laquelle les soins médicaux doivent être refusés aux « étrangers illégaux ». Leur position est cohérente avec le principe juridique, établi par la Cour Suprême, selon lequel ces créatures ne sont pas des « personnes  » selon la loi, et qu’ils ne disposent donc pas des droits accordés aux personnes.
  • Au même moment, la Cour examine si les grandes sociétés ne devraient pas avoir la permission d’acheter les élections librement au lieu de le faire de manière détournée C’est un problème constitutionnel majeur, puisque les tribunaux ont établis que, contrairement aux sans-papiers, les entreprises sont des personnes réelles selon la loi, et ont en fait des droits bien supérieurs à celles faites de chair et de sang, tels ceux accordés par le mal nommé « accord de libre-échange ». Ces coïncidences parlantes ne suscitent aucun commentaire. La loi est bel et bien une solennelle et majestueuse affaire.
  • Une différence fondamentale entre Bush et Obama fut très bien formulée par l’un des hauts conseillers de l’administration Kennedy, à l’époque de la crise des missiles à Cuba. Les planificateurs de Kennedy prenaient des décisions qui menaçaient littéralement l’Angleterre d’extinction, mais n’en informaient pas les Britanniques. A ce moment là, le conseiller définissait ainsi la « relation spéciale » avec la Grande Bretagne : elle est , disait-il, « notre lieutenant – le terme en vogue étant ’partenaire’  ». Naturellement, l’Angleterre préfère le terme en vogue.
  • Bush et ses sbires traitent le monde comme « nos lieutenants ». Ainsi, en annonçant l’invasion de l’Irak, ils informèrent l’ONU qu’elle pouvait suivre les ordres américains ou « ne plus avoir de raison d’être ». Une telle arrogance a bien évidemment suscité de l’hostilité. Obama a choisi une autre méthode : il reçoit les dirigeants et les peuples du monde poliment, en tant que « partenaires  », et c’est seulement en privé qu’il continue à les traiter comme des « lieutenants  ». Les dirigeants étrangers préfèrent cette approche et le public est aussi parfois hypnotisé par cette attitude. Mais il est sage de s’en tenir aux faits et non au comportement rhétorique et plaisant. Les faits racontent une histoire différente d’habitude, et ce cas là ne fait pas exception.
  • Le système mondiale actuel reste unipolaire dans un domaine, celui de la force. Les États-Unis dépensent quasiment autant pour la force militaire que le reste du monde réuni, et sont bien plus avancés en ce qui concerne la technologie de destruction. C’est aussi le seul pays à avoir des centaines de bases militaires tout autour du monde et à occuper deux pays dans les régions cruciales pour la production d’énergie. Il y établit des méga-ambassades gigantesques, de l’ordre d’une ville à l’intérieur de la ville, ce qui est une claire indication de ses intentions futures. A Bagdad, les coûts prévisionnels de la méga-ambassade sont de 1.5 milliard de dollars cette année et de 1.8 dans les prochaines années. Le coût de leurs équivalents au Pakistan et en Afghanistan est inconnu, tout comme le futur des énormes bases militaires établies en Irak.
  • Dissoute en 1950, la quatrième Flotte US a été réactivée en 2008, peu de temps après l’invasion colombienne de l’Équateur. Son champ d’action couvre les Caraïbes, l’Amérique Centrale et du Sud ainsi que les eaux environnantes. La marine définit ses « diverses opérations » comme la lutte contre les trafics illégaux, la coopération régionale en matière de sécurité, l’interaction entre les forces armées et les formations militaires bilatérales ou multinationales. La réactivation de la flotte a naturellement provoqué un tollé et l’inquiétude des gouvernements brésilien, vénézuélien et autres.
  • Ces plans font partie d’une politique plus générale de militarisation de l’Amérique latine. L’entraînement des officiers latino-américains a fortement augmenté dans la dernière décennie, bien au dessus des niveaux de la Guerre Froide. La police se forme aux tactiques d’infanterie légère. Leur mission est de combattre les « gangs de jeunes  » et le «  populisme radical  », ce dernier terme n’étant que trop bien compris en Amérique latine.
  • Le prétexte est celui de la « guerre contre la drogue ». Mais, même si nous acceptons la singulière affirmation selon laquelle les EU ont le droit de mener cette « guerre  » dans des pays étrangers, il est difficile de le prendre au sérieux. Les raisons sont connues, elles ont été redites en février par la commission sur les drogues et la démocratie, dirigée par les anciens présidents sud américains Cardoso, Zedillo et Gaviria. Leur rapport conclut que la guerre contre la drogue a été un échec complet et appelle à changer radicalement de politique, en se détournant des mesures brutales vers d’autres plus efficaces et beaucoup moins coûteuses.
  • Quelque-uns accusaient même Washington de crimes, et non pas simplement d’erreurs commises par excès de naïveté et bienveillance comme le déclaraient les commentateurs libéraux, obéissant en cela à la logique bien établie de Thucydide. Un problème apparenté était l’activisme, particulièrement parmi les jeunes, qui provoquait un « excès de démocratie » selon les avertissements d’intellectuels libéraux. Ils demandaient la restauration de l’obéissance et de la passivité ainsi que l’application par Nixon de mesures beaucoup plus brutales.
  • Les fondations étaient posées pour une campagne nationale « Loi et Ordre » visant à discipliner ceux qui s’égaraient au-delà des limites de subordination à la doctrine et au pouvoir. Le succès fut conséquent. Sans susciter aucune critique ou commentaire, le président Carter pouvait expliquer que nous n’avions aucune dette envers les vietnamiens, car la « destruction était mutuelle ». Pour Reagan la guerre était une « noble cause » et le président Bush Sr. put continuer à informer les vietnamiens, sans aucune objection publique, que nous ne pourrions jamais pardonner leurs crimes envers nous, mais que par compassion nous serions d’accord pour les laisser rejoindre le monde que nous dirigions. Pour cela, il fallait qu’ils démontrent leur bonne volonté en s’occupant du seul problème moral subsistant : cette « noble cause  » qui consistait à se dévouer afin de retrouver les ossements des pilotes américains abattus alors qu’ils bombardaient le Vietnam.
  • Bien que le monde soit unipolaire sur le plan militaire, cela n’est plus le cas depuis quelque temps sur le plan économique. Au début des années 1970 le monde devenait économiquement « tripolaire  », avec des centres comparables en Amérique du Nord, Europe et dans le nord-est de l’Asie. De nos jours l’économie mondiale est devenue encore plus diverse, particulièrement avec la rapide croissance d’économies asiatiques défiant les règles néolibérales du « consensus de Washington ». L’Amérique latine aussi se défait de ce joug. Les efforts états-uniens pour la militariser sont une réponse à ces développements (particulièrement en Amérique du Sud), qui, pour la première fois depuis les conquêtes européennes, commencent à s’adresser aux problèmes fondamentaux qui ont empoisonné et continuent d’empoisonner le continent.
  • Les questions d’intégration interne sont encore plus significatives. Il y a enfin des efforts sérieux pour s’adresser à la pathologie latino-américaine de gouvernance par d’étroits secteurs nageant dans l’opulence au beau milieu d’un océan de misère, les riches étant exempts de responsabilité si ce n’est de celle de s’enrichir, contrairement à l’Asie de l’est. Une de ces mesures concerne la fuite des capitaux. En Amérique Latine elle atteint presque le montant de l’étouffante dette. Dans les pays d’Asie de l’est elle a été fermement contrôlée. En Corée du Sud par exemple, pendant la période de forte croissance, l’exportation de capital était passible de peine de mort.
  • Ces développements en Amérique latine, parfois menés par d’impressionnants mouvements populaires de masse, sont d’une grande importance. Ils suscitent bien évidemment des réactions amères de la part des élites traditionnelles, supportées par la superpuissance voisine. Les obstacles sont immenses mais s’ils sont surmontés, cela pourrait changer de façon significative le destin de l’Amérique latine et entraîner de véritables conséquences ailleurs.
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    Superbe conférence de Noam Chomsky sur l'histoire de la politique etrangère guerrière US.
Jon Snow

« On n'a plus le temps... », par Serge Halimi (Le Monde diplomatique) - 0 views

  • En particulier sur la Toile. Aujourd’hui, aux 35 millions de Français qui lisent un périodique s’ajoutent ou se superposent 25 millions d’internautes qui, chaque mois, consultent au moins un site de presse. Mais ces derniers ont été habitués à croire que le règne de la société sans argent était advenu — sauf lorsqu’ils se précipitent pour acheter, cette fois au prix fort, leur ordinateur, leur Smartphone ou leur tablette, souvent pour pouvoir consulter une presse qui leur est offerte... L’audience en ligne ne rapporte donc pas grand-chose à ceux qui recherchent, éditent, corrigent, vérifient l’information. Ainsi une structure économique parasitaire s’édifie peu à peu qui concède aux uns tous les profits du commerce. Et qui facture aux autres tous les coûts de la « gratuité » (2). Un quotidien comme The Guardian, par exemple, est devenu grâce à son site Internet numéro un de l’audience au Royaume-Uni et troisième dans le monde, sans que cela l’empêche — et, devrait-on dire, au contraire — de perdre l’année dernière 57 millions d’euros et de licencier plus de soixante-dix journalistes. Car bien qu’elle requière toujours davantage d’investissements, la croissance du trafic numérique des journaux coïncide en général avec la réduction de leurs ventes en kiosques. Assurément, près de 6 millions de Britanniques lisent au moins un article du Guardian par semaine, mais seuls 211 000 l’achètent quotidiennement. C’est cette petite population, déclinante, qui finance la lecture gratuite de la plupart des internautes. Un jour, forcément, ce voyage s’arrêtera pour tous faute de carburant.
  • vec l’information en ligne, le fiasco du même calcul est devenu patent. Les sites de presse ont beau aligner les succès d’audience, la ressource publicitaire ne leur parvient qu’au compte-gouttes. Car son produit profite avant tout aux moteurs de recherche, devenus selon M. Marc Feuillée, président du Syndicat de la presse quotidienne nationale (SPQN), « des mégarégies publicitaires, absorbant comme des Moloch la quasi-totalité des revenus de nos annonceurs ». M. Feuillée précise : « Entre 2000 et 2010, le chiffre d’affaires publicitaire des moteurs est passé de 0 à 1,4 milliard d’euros, celui de la presse [en ligne] de 0 à 250 millions d’euros (3). » Informé en détail des goûts et des lectures de chacun d’entre nous, capable (comme Facebook) de vendre aussitôt cette avalanche de données personnelles aux publicitaires, qui s’en serviront pour mieux « cibler » leur gibier, Google est également passé maître dans l’art de faire de l’« optimisation fiscale » en Irlande et aux Bermudes. Très opulente, cette multinationale ne paie donc presque pas d’impôts.
  • Quant au nombre revendiqué d’abonnés, il s’écroulerait sans les techniques dignes du hard discount que colporte par exemple le jovial directeur du Nouvel Observateur chaque fois qu’il propose 13 numéros de son magazine pour 15 euros, avec en prime une « montre de collection Lip Classic ». Mais le patron de L’Express aux écharpes colorées surenchérit aussitôt : avec lui, c’est 45 numéros pour 45 euros, et en bonus un « réveil à ambiance lumineuse et sonore ».
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  • Soyons donc singuliers également dans notre franchise : depuis janvier de cette année, la diffusion du Monde diplomatique a baissé de 7,2 %. Le temps qui fait défaut, l’argent aussi, un certain découragement face à une crise qui se déploie ainsi que nous l’avons anticipé, bien avant les autres, mais à laquelle nous ne pouvons pas seuls apporter remède, une contestation de l’ordre économique et social qui peine à trouver des débouchés politiques : tout cela a contribué à notre recul.
  • Au fond, peu importe : notre réseau social, c’est vous. C’est donc à vous qu’il revient d’abord de faire connaître ce mensuel, ses valeurs, d’encourager son aventure intellectuelle, ses engagements. De convaincre autour de vous qu’il n’est ni urgent ni nécessaire de réagir à toutes les « polémiques », de tout embrasser pour ne rien étreindre, de tout parcourir pour ne rien retenir. Et qu’il est bon — par exemple une fois par mois ? — de quitter la pièce où les gens vocifèrent, de décider qu’on s’arrête et qu’on réfléchit.
  • A quoi peut servir un journal ? A apprendre et à comprendre. A donner un peu de cohérence au fracas du monde là où d’autres empilent des informations. A penser posément ses combats, à identifier et faire connaître ceux qui les portent. A ne jamais rester solidaire d’un pouvoir au nom des références qu’il affiche sitôt que ses actions les démentent. A refuser le verrouillage identitaire d’un « choc des civilisations » oubliant que l’héritage de l’« Occident », c’est le sac du Palais d’été, la destruction de l’environnement, mais aussi le syndicalisme, l’écologie, le féminisme — la guerre d’Algérie et les « porteurs de valises ». Et que le « Sud », les pays émergents qui défont l’ordre colonial, englobe des forces religieuses moyenâgeuses, des oligarchies prédatrices, et des mouvements qui les combattent — le géant taïwanais Foxconn et les ouvriers de Shenzhen.
  • A quoi peut servir un journal ? En des temps de reculs et de résignations, à défricher les sentiers de nouveaux rapports sociaux, économiques, écologiques (4). A combattre les politiques austéritaires, à aiguillonner ou à tancer des social-démocraties sans souffle et sans sève.
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    A quoi peut servir un journal ? En des temps de reculs et de résignations, à défricher les sentiers de nouveaux rapports sociaux, économiques, écologiques (4). A combattre les politiques austéritaires.
Fabien Cadet

Le scandale des banques qui créent - effectivement - de l'argent | Blog de Pa... - 0 views

  • Aujourd’hui, le système monnaie participe d’un système économique général dont aucune des tendances n’est soutenable à long terme (ni l’augmentation rapide des inégalités, ni l’accroissement monétaire, ni la croissance économique infinie, ni la disparition de la biodiversité, ni l’exploitation des ressources naturelles, ni…). Il est même possible qu’il soit un des moteurs de cette évolution dangereuse, en instituant par le mécanisme de la dette des promesses sur l’avenir…
  • e me demande donc comment faire pour que la monnaie soit une institution humaine reconnue comme telle et comme elle pourrait servir l’intérêt collectif de la société… Il ne suffit donc pas qu’elle soit “solide” (vis-à-vis de l’inflation par ex.) mais aussi “adéquate” vis-à-vis des objectifs que se donnerait la société humaine, en termes sociaux ou environnementaux par ex. Je n’ai pas de réponse à cette question aujourd’hui…
  • A partir de la monnaie centrale qu’elles contrôlent (sous forme électronique à son compte à la BC, ou en stock via les dépôts de ses clients) ces banques de premier niveau peuvent créer autant de monnaie bancaire que leur permet le « coefficient de réserves obligatoires » fixé par la BC.
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  • En accordant un prêt, la banque crée à son tour, ex-nihilo, de la monnaie bancaire électronique qui s’appelle euro, dollar ou pesos mais qui n’existe pas. Ou plutôt, elle n’en possède sous forme matérielle (billets) que ce pourcentage.
  • ne banque peut donc créer 12 fois plus de monnaie bancaire qu’elle n’a de monnaie centrale !
  • Conclusion intermédiaire : dans un système bancaire à réserves fractionnaires toute banque est en permanence en faillite potentielle !!!
  • un « bank run »
  • Pour conclure ce mot de Henry Ford, au début du 20ème siècle, alors que la FED venait d’être créée (1913) : « si le peuple comprennait comment fonctionne la monnaie fiduciaire et le système bancaire à réserves fractionnaires, il y aurait une révolution avant demain matin ».
  • la monnaie bancaire est la contre-partie de dettes ou plutôt d’emprunts.
  • Le vice du système est que cette monnaie bancaire peut être retirée au guichet sous forme de monnaie centrale fiduciaire, des billets, alors que ceux-ci sont en nombre insuffisant. Et qu’elle utilise la même unité, le même nom.
  • eule la dernière transaction définit le prix d’une chose, donc besoin marginal de monnaie.
  • Si tous les propriétaires de ces choses voulaient vendre pour obtenir de la monnaie, alors les cours (prix) s’effondreraient :
  • il y aurait assez de monnaie pour faire face. Mais la représentation intellectuelle qu’ils en ont est fausse, « l’effet richesse » ne joue que si peu de personnes cherchent à la concrétiser sous forme fiduciaire ; la mauvaise compréhension vient de l’amalgame entre prix et valeur qui utilisent les mêmes unités et pour lesquels l’esprit humain ne fait plus la différence car en situation statistiquement normale, on peut passer facilement de l’un à l’autre. Mais que survienne un accident et la différence se sent, souvent douloureusement.
  • Quant à la garantie de l’Etat, ce n’est que le fait qu’un gouvernement (en général non élu directement !) engage … le contribuable, c’est-à-dire socialise la faillite en allant chercher la monnaie dans la poche du contribuable.
  • Ron PAUL a introduit l’année derière une proposition de loi pour abolir la FED, proposition toujours en attente.
  • Les Américains, et le monde, se retrouvent dans la situation juridique suivante : une monnaie ayant cours légal, mais non convertible en or, l’actuel USdollar, mais … inconstitutionnelle ! En effet la constitution US dispose que seuls ont cours légal le gold-dollar et le silver-dollar (convertibles à vue contre une once de métal fin). La Cour Suprême n’a jamais eu à se prononcer sur ce problème (ou elle a évité d’avoir à se prononcer). C’est la base de l’argument de Ron PAUL.
  • mais plutôt sur le fait que des mécanismes aussi instables aient justement été choisis comme mode d’organisation de la vie en société.
  • Ainsi les banques vont avoir des besoins énormes en monnaie centrale …
  • le système bancaire CREE dans son ensemble de la monnaie ex-nihilo de par le système de réserves fractionnaires
  • en 2002 les seules transactions annuelles sur produits dérivés (dont on parle tant actuellement) étaient 21 fois supérieures au PIB mondial, soit (700 Tdollars pour 33 Tdollars de PIB mondial).
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    Pour conclure ce mot de Henry Ford, au début du 20ème siècle, alors que la FED venait d'être créée (1913) : « si le peuple comprennait comment fonctionne la monnaie fiduciaire et le système bancaire à réserves fractionnaires, il y aurait une révolution avant demain matin ».
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    Mea culpa ! Vous m'avez convaincu que je me suis trompé : si des intérêts sont bien perçus sur de sommes créées de manière ad hoc par les banques commerciales - même si celles-ci sont neutralisées ensuite - il y a bien création d'argent ex nihilo. Comme le dit alors très justement Armand dans son commentaire au billet précédent [...]
Fabien Cadet

Rapport Bourdieu-Gros (8 Mars 1989) : Principes pour une réflexion sur les co... - 2 views

  • Premier principe Les programmes doivent être soumis à une remise en question périodique visant à y introduire les savoirs exigés par les progrès de la science et les changements de la société (au premier rang desquels 1'unification européenne), toute adjonction devant être compensée par des suppressions.
  • une telle réduction, opérée avec discernement, doit permettre une élévation du niveau dans la mesure (et dans la mesure seulement) où elle permet de travailler moins longtemps, mais mieux, en remplaçant l'apprentissage passif par la lecture active, qu'il s'agisse de livres ou de supports audio-visuels, par la discussion ou par l'exercice pratique, et en redonnant ainsi toute sa place à la créativité et à l'esprit d'invention.
  • Deuxième principe L'éducation doit privilégier tous les enseignements propres à offrir des modes de pensée dotés d'une validité et d'une applicabilité générales par rapport aux enseignements proposant des savoirs susceptibles d'être appris de manière aussi efficace (et parfois plus agréable) par d'autres voies.
  • ...13 more annotations...
  • Il faut résolument privilégier les enseignements qui sont chargés d'assurer l'assimilation réfléchie et critique des modes de pensée fondamentaux comme le mode de pensée déductif, le mode de pensée expérimental ou le mode de pensée historique, et aussi le mode de pensée réflexif et critique qui devrait leur être toujours associé. Dans un souci de rééquilibrage, il faudrait notamment rendre plus clairement perceptible la spécificité du mode de pensée expérimental
  • Et il faudrait enfin veiller à faire une place importante à tout un ensemble de techniques qui, quoiqu'elles soient tacitement exigées par tous les enseignements, font rarement l'objet d'une transmission méthodique : utilisation du dictionnaire, usage des abréviations, rhétorique de communication, établissement d'un fichier, création d'un index, utilisation d'un fichier signalétique ou d'une banque de données, préparation d'un manuscrit, recherche documentaire, usage des instruments informatiques, lecture de tableaux de nombres et de graphiques, etc.
  • Troisième principe Ouverts, souples, révisables, les programmes sont un cadre et non un carcan : ils doivent être de moins en moins contraignants à mesure que l'on s'élève dans la hiérarchie des ordres d'enseignement
  • Sans sacrifier à l'imitation servile des modèles étrangers, on devrait trouver une inspiration critique dans la comparaison méthodique avec les programmes en vigueur dans d'autres pays, européens notamment
  • Quatrième principe L'examen critique des contenus actuellement exigés doit toujours concilier deux variables : leur exigibilité et leur transmissibilité
  • Ce principe devrait conduire à exclure toute espèce de transmission prématurée.
  • Cinquième principe Dans le souci d'améliorer le rendement de la transmission du savoir en diversifiant les formes de la communication pédagogique
  • L’accroissement de la connaissance rend vaine l'ambition de l'encyclopédisme : on ne peut enseigner toutes les spécialités et la totalité de chaque spécialité. En outre, des spécialités sont apparues qui allient la science fondamentale et l'application technique (c'est le cas de l'informatique dans tous les ordres d'enseignement ou de la technologie au collège). Leur introduction dans l'enseignement ne peut être une simple addition : elle devrait avoir pour effet d'imposer à plus ou moins long terme une redéfinition des divisions de l'enseignement.
  • Il importe de substituer à l'enseignement actuel, encyclopédique, additif et cloisonné, un dispositif articulant des enseignements obligatoires, chargés d'assurer l'assimilation réfléchie du minimum commun de connaissances, des enseignements optionnels, directement adaptés aux orientations intellectuelles et au niveau des élèves, et des enseignements facultatifs et interdisciplinaires relevant de l'initiative des enseignants.
  • Sixième principe Le souci de renforcer la cohérence des enseignements devrait conduire à favoriser les enseignements donnés en commun par des professeurs de différentes spécialités et même à repenser les divisions en "disciplines", en soumettant à l'examen certains regroupements hérités de l'histoire et en opérant, toujours de manière progressive, certains rapprochements imposés par l'évolution de la science.
  • Septième principe La recherche de la cohérence devrait se doubler d'une recherche de l'équilibre et de l'intégration entre les différentes spécialités et, en conséquence, entre les différentes formes d'excellence. Il importerait en particulier de concilier l'universalisme inhérent à la pensée scientifique et le relativisme qu'enseignent les sciences historiques, attentives à la pluralité des modes de vie et des traditions culturelles.
  • Tout devrait être mis en oeuvre pour réduire (toutes les fois que cela parait possible et souhaitable) l'opposition entre le théorique et le technique, entre le formel et le concret, entre le pur et l'appliqué et pour réintégrer la technique à l'intérieur même des enseignements fondamentaux.
  • L’opposition entre les "lettres" et les "sciences", qui domine encore aujourd'hui l'organisation de l'enseignement et les 'mentalités' des maîtres, des élèves et des parents d'élèves, peut et doit être surmontée par un enseignement capable de professer à la fois la science et l'histoire des sciences ou l'épistémologie, d'initier aussi bien à l'art ou à la littérature qu'à la réflexion esthétique ou logique sur ces objets, d'enseigner non seulement la maîtrise de la langue et des discours littéraire, philosophique, scientifique, mais aussi la maîtrise active des procédés ou des procédures logiques ou rhétoriques qui y sont engagés.
Jon Snow

LA DETTE PUBLIQUE… OU LE PARTAGE DU BUTIN ?, par Jean-Luc D. - 0 views

  • Fort de la lecture de ce blog dont la 1ère qualité est de nous dessiller l’esprit en levant  le voile sur une réalité financière nébuleuse et donc complexe, mon daimôn me soufflait à l’oreille que ce discours sur la dette publique était trop insistant pour être vrai, trop simpliste pour décrire une réalité complexe, trop accusateur pour ne pas cacher derrière son index pointé une éventuelle autre cause à nos supposés malheurs d’aujourd’hui. Bien sûr, la dette existe, elle est réelle, mais qu’en est-il de sa cause ? Les néolibéraux vous répondront à l’unanimité et dans un chœur harmonieux que l’État dépense trop, qu’il gaspille ses recettes dans des investissements non productifs (entendu récemment dans la bouche de J.-C. Trichet), en d’autres termes que le social lui coûte ses deux bras et ses deux jambes. Par contre sur les recettes, pas un mot, rien, nada… Ils y ont bien sûr tout intérêt quand vous verrez les  graphiques ci-dessous. D’autant plus d’intérêt que dans le monde doré et angélique qu’ils nous proposent – un monde capitonné d’« épanouissement au travail », de « développement personnel », de « plan de sauvegarde de l’emploi » et j’en passe -, moins-disant social rime avec moins-disant fiscal.
  • La propagande bat son plein œuvrant sans cesse à la manipulation des opinions publiques et à la fabrique des consentements. Edward Bernays, neveu de Freud et 1er grand théoricien de la propagande, n’hésitait  pas écrire au tout début du 1er chapitre de son livre Propaganda ou Comment manipuler l’opinion en démocratie : « la manipulation consciente, intellectuelle, des opinions et des habitudes organisées des masses joue un rôle important dans une société démocratique » et de conclure dans une formule derrière laquelle perce un cynisme à peine voilé :  « les esprits intelligents doivent comprendre qu’elle (la propagande) leur offre l’outil moderne dont ils doivent se saisir à des fins productives, pour créer de l’ordre à partir du chaos ». Le message étant clair et le décor bien planté, il nous appartient d’en déjouer les rouages et de proposer, dans un au-delà prospectif et constructif, à partir de toutes vos contributions, un contre-modèle syncrétique.
Jon Snow

Dedefensa.org : Le tourbillon de Madison - 0 views

  • Enfin, après deux années d’exubérance de la droite conservatrice, dans la vague de Tea Party, c’est la gauche progressiste US qui exulte. Elle est du côté de la révolte, du soulèvement contre un pouvoir jugé oppressif et arbitraire. Tea Party, lui, se trouve exposé dans son côté le plus ambigu, – lequel n’a jamais été dissimulé à nos yeux, tant ce mouvement est insaisissable dans son identification, – notamment par le biais indirect des liens entre le gouverneur Walker, qui se réclame de l’esprit de Tea Party, et les frères milliardaires Koch qui le subventionnent, – tout comme ils subventionnent Tea Party d’ailleurs, au nom de leur hostilité à tout ce qui est service public (et de tout ce qui est, ajouteront les critiques, faveur et puissance pour le corporate power). (Au reste, ces liens ne sont pas plus incestueux et révélateurs que ceux de l’administration Obama et des démocrates avec Wall Street, ce qui n’enlève rien au mouvement de Madison, soutenu par les démocrates et Obama.)
  • Pour l’instant, à Madison, Wisconsin, tous les ingrédients de la crise sont là, et les grands esprits progressistes, même les plus prudents comme Noam Chomsky, y voient les prémisses de la grande révolte attendue aux USA. Une détermination et une organisation exceptionnelles des foules, avec des actes entravant effectivement le fonctionnement des institutions de l’Etat du Wisconsin ; un soutien affirmé des officiels démocrates de l’Etat, avec des actes à mesure (“exil” dans l’Ohio, pour échapper à l’obligation de présence au vote de la loi Walker, qui permettrait d’atteindre le quorum) ; une détermination affichée comme sans faille du gouverneur Walker pour imposer sa loi ; après un temps d’hésitation, la crise de Madison élevée au rang de grande crise intérieure US, et traitée comme telle par les réseaux de communication, et aussi par les commentateurs et intellectuels comme on l’a vu plus haut avec Chomsky. (Pour l’instant, on s’abstiendra de dire un mot sur Obama, dont le soutien au mouvement est trop calculé pour avoir un impact décisif.)
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    Résumé des manifs aux USA, en français
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