Ces mutations des statuts d’emploi et des formes d’organisation du travail, ainsi que les déplacements des responsabilités dans l’exercice de l’activité, nous apparaissent majeures et spécifiques et justifient l’usage du terme de « capitalisme de plateforme ». En effet, cette notion met l’accent sur la création de valeur et son partage, inégalitaire, entre, d’une part, les détenteurs des algorithmes, sites et applications que sont les plateformes et, d’autre part, les travailleurs présents sur celles-ci. Ces derniers ont pour particularité, en plus de ne pas être salariés, de mettre à la disposition des entreprises non seulement leur force de travail mais également une partie des outils de production (vélos, voitures, etc.). En mettant au travail des travailleurs indépendants, le capitalisme de plateforme, loin de leur conférer de l’autonomie, participe de l’émergence de formes renouvelées, voire exacerbées, de sujétion des travailleurs, visant à les mobiliser, et cela à l’écart des régulations actuelles des mondes du travail.