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Aurialie Jublin

Pour une protection sociale des données personnelles - - S.I.Lex - - 0 views

  • Une première contestation est venue du Think Tank Génération libre par le biais d’un rapport défendant la thèse de la « patrimonalisation » des données personnelles. L’idée consiste à créer un droit de propriété privée sur les données personnelles de manière à ce que les individus puissent négocier leur utilisation sur une base contractuelle avec les plateformes, en se faisant éventuellement rémunérer en contrepartie. Ce point de vue sous-entend que c’est le marché qui doit réguler l’utilisation des données et que la vie privée sera plus efficacement protégée par ce biais qu’en la défendant comme un droit fondamental de la personne. A l’opposé de cette vision ultra-libérale, Antonio Casilli et Paola Tubaro ont publié une tribune dans les colonnes du Monde, formulant une critique d’ordre « social » du système actuel. Intitulé Notre vie privée : un concept négociable, ce texte invite lui aussi à un renversement profond de perspective résumé par la phrase suivante : « la défense de nos informations personnelles ne doit pas exclure celle des droits des travailleurs de la donnée ».
  • Le défi qui attend la CNIL est de devenir non pas un gardien de la propriété sur les données, mais un défenseur des droits des travailleurs de la donnée.
  • S’il y a un rapport de production assimilable à du travail, alors il faut s’assurer de l’extension des régimes de protection du travail, y compris à ceux qui, de prime abord, seraient présentés comme de simples usagers ou consommateurs.
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  • Il paraît en effet douteux que la CNIL puisse à elle seule assurer une défense des droits des travailleurs de la donnée, même si son champ d’action était élargi. Non pas que cette autorité soit dépassée, comme certains le laissent entendre, mais parce que la protection des travailleurs passe traditionnellement par des mécanismes juridiques et institutionnels d’une nature bien différente de la régulation assurée aujourd’hui par la CNIL. Historiquement, c’est un système de droits et la protection sociale qui se sont progressivement mis en place pour protéger les individus dans le cadre des relations asymétriques de travail. Il convient de ne pas participer à leur affaiblissement en morcelant les espaces de régulation, mais bien de faire valoir les droits sociaux existants.
  • Nous soutenons donc que si les données sont produites dans le cadre d’activités assimilables à de nouvelles formes de travail, alors ce sont des mécanismes de protection sociale enracinés dans le droit social qu’il convient de déployer pour garantir les droits des personnes.
  • Si la défense du droit à la vie privée dépend aujourd’hui avant tout d’une négociation collective, alors il convient de nous doter collectivement des moyens les plus efficaces possibles pour engager, conduire et peser dans ces négociations, dont les termes restent aujourd’hui dictés par le cadre profondément déséquilibré imposé par les plateformes. Un simple appel à la CNIL sera là encore sans doute insuffisant pour changer en profondeur cette situation. C’est en réinventant la protection des données sous l’angle de la protection sociale qu’il nous paraît possible de faire émerger de nouveaux moyens d’action collective qui sortiraient l’individu de l’isolement dans lequel il reste trop souvent enfermé lorsqu’il s’agit de vie privée, que ce soit face aux plateformes ou à l’État.
  • Car la protection sociale renvoie plus fondamentalement à la question des solidarités et celles-ci ne peuvent être uniquement une affaire d’État. Si négociation collective autour de la vie privée il y a, celle-ci doit être le fait d’une société civile collectivement organisée, sans quoi les individus ne pourront échapper aux rapports structurellement inégalitaires auxquels les soumettent les plateformes, et la négociation en cours ne pourra conduire qu’à la soumission collective.
  • Du point de vue d’une protection sociale entendue comme participant à la construction d’un « régime de travail réellement humain », on peut se demander si la seule option souhaitable ne consiste pas pour le législateur à interdire purement et simplement que l’on rémunère ce type de tâches à la pièce. Aucune « protection sociale » ne pourra jamais venir compenser après coup les dégâts causés par la réduction d’humains au rang de « tâcherons du clic » et l’accepter reviendrait à porter un coup mortel à l’idée que le travail puisse constituer une activité « réellement humaine ».
  • Il s’agit non seulement de s’intéresser aux architectures techniques des plates-formes qui permettent l’extraction et la circulation des données personnelles, mais aussi de créer les conditions pour que le travail de production et d’enrichissement des données (autant de la part des services de microtravail que des usagers de plates-formes généralistes comme Instagram ou Google) reste respectueux des droits des personnes et du droit du travail
  • Se référer à ce riche héritage juridique, institutionnel et social permettrait selon nous de dépasser certaines des insuffisances auxquelles la défense des données personnelles et de la vie privée se heurte encore trop souvent aujourd’hui. C’est notamment en suivant une telle piste qu’il nous paraît possible de réconcilier les dimensions individuelle et collective en matière de protection des données. Le système juridique actuel reste en effet imprégné d’un individualisme méthodologique qui n’envisage la personne que de manière isolée et indépendamment des rapports sociaux dans laquelle la vie privée est toujours étroitement enchâssée.
  • C’est ce fil que nous souhaitons suivre dans cet article qui vise à explorer les différentes dimensions d’une protection des données repensée comme une protection sociale. Comme le souligne la démonstration d’Antonio Casilli et Paola Tubaro, il convient de partir de l’idée qu’il existe un continuum de pratiques entre usagers et travailleurs des plateformes, depuis les utilisateurs de Google ou Facebook jusqu’aux chauffeurs d’Uber. Cette continuité justifie la construction de nouveaux droits et un nouveau volet de la protection sociale, pensé dans une solidarité entre usagers et travailleurs.
  • expliciter en préambule ce que nous percevons des liens qui se sont tissés entre données personnelles, vie privée, usages et travail numériques. Ces liens sont remarquables et inédits à plusieurs égards : leur volume, la précision des informations que produisent nos usages, et leurs méthodes de production
  • Le second phénomène inédit, intrinsèquement lié au premier, c’est le degré d’opacité des mécanismes techniques et humains de production des données qui forgent cette identité. Ce qui nous échappe, c’est donc autant la perception (y compris physique) de nos traces et signaux numériques, que les processus de production (partant de l’exploitation de ces signaux et traces) qui forgent une donnée, et enfin leur exploitation ou utilisation sous la forme d’une expression explicite de nos identités et de nos activités.
  • Cette triple perte de contrôle justifie à notre sens que notre relation avec les plateformes soit considérée sous l’angle d’une présomption de subordination d’usage. Elle permettrait d’acter en droit les déséquilibres de fait qui caractérisent les forces en présence, entre la société civile, les collectifs d’usagers et les travailleurs numériques d’une part, et les plateformes lucratives d’autre part. Notion distincte de la subordination des rapports de production dans l’espace du travail, elle viendrait s’articuler à elle, établissant en droit un continuum de négociation.
  • La subordination juridique et économique est ainsi reconnue et traditionnellement associée au statut d’employé. Mais elle déborde aujourd’hui ce cadre pour s’exercer sur les consommateurs et les usagers, également saisis par une subordination d’usage. Celle-ci intègre une logique lucrative, en ce qu’elle transforme en valeur financière – et donc « financiarise » à proprement parler – des rapports humains jusqu’alors vécus hors des sphères de production de marché orientées vers le profit.
  • Pour faire émerger ce concept de « subordination d’usage », il paraît possible de s’appuyer notamment sur les travaux d’Alain Supiot, qui propose depuis la fin des années 90 des moyens conceptuels pour identifier des formes de travail « au-delà de l’emploi ». Il propose en particulier de saisir les « nouveaux visages de la subordination » à partir du critère de la « dépendance économique » qui viendrait compléter celui de la subordination stricto sensu caractérisant aujourd’hui le contrat de travail. Dans cette vision, le rapport de production est bien conçu comme incluant d’emblée un rapport de subordination face à la figure de l’entreprise capitaliste, intégrant la notion de déséquilibre exorbitant dans les rapports sociaux, que le droit et la négociation doivent participer à « civiliser »
  • La présomption de subordination permettrait donc de faire correspondre au continuum des pratiques d’usage et de travail, une continuité de droits, puisant pour partie leur légitimité dans le caractère exorbitant et disproportionné des rapports induits à la fois par la nature propriétaire et par l’objectif d’exploitation des plateformes lucratives de marché. Pour faire émerger ce concept de « subordination d’usage », il paraît possible de s’appuyer notamment sur les travaux d’Alain Supiot, qui propose depuis la fin des années 90 des moyens conceptuels pour identifier des formes de travail « au-delà de l’emploi ». Il propose en particulier de saisir les « nouveaux visages de la subordination » à partir du critère de la « dépendance économique » qui viendrait compléter celui de la subordination stricto sensu caractérisant aujourd’hui le contrat de travail.
  • Cette continuité entre ces deux régimes d’action est liée au rapport de production (des données) que nous entretenons avec les plateformes, rapport qui vient se fondre dans la problématique de la régulation du travail. Un des enjeux est de faire émerger une identification claire du travail numérique, dans un moment historique d’exploitation des travailleurs les plus fragiles et des pratiques prédatrices de délocalisation de la main d’œuvre.
  • Il y a donc un double enjeu à mieux saisir ces rapports sociaux de production : il s’agit d’identifier ou de faire émerger plus distinctement les régimes de travail présent dans les espaces de production numérique pour mieux les encadrer d’une part, et d’autre part d’envisager les limites que nous voulons leur fixer pour protéger la vie privée et son exploitation.
  • La pénétration du travail numérique dans notre vie privée, au sens où il est saisi par les plateformes pour le transformer en valeur économique, interroge à la fois nos conceptions et nos imaginaires contemporains relatifs à la vie privée et au travail, en particulier le travail domestique.
  • Le second phénomène inédit, intrinsèquement lié au premier, c’est le degré d’opacité des mécanismes techniques et humains de production des données qui forgent cette identité. Ce qui nous échappe, c’est donc autant la perception (y compris physique) de nos traces et signaux numériques, que les processus de production (partant de l’exploitation de ces signaux et traces) qui forgent une donnée, et enfin leur exploitation ou utilisation sous la forme d’une expression explicite de nos identités et de nos activités.
  • Une patrimonialisation des données personnelles, telle qu’elle est proposée par Génération libre, ne constituerait pas un moyen d’ouvrir cette discussion collective, mais conduirait au contraire à y renoncer définitivement. En effet, la réparation de cette violence par la réaffirmation ou la revendication d’une propriété privée négociable sur un marché réduit la question politique du vivre ensemble à l’abandon total de toute volonté collective de débat démocratique – ici remplacé par la négociation sur le marché.
  • Accepter des micro-rémunérations corrélées aux données personnelles, c’est graver dans le marbre que les discussions collectives deviennent des petites négociations individuelles […] Ce micro-revenu est d’ailleurs en parfaite cohérence avec la promotion d’un revenu universel tel le que propose Génération Libre (attention, il y a plein de revenus universels différents) façon néo-libérale : on vous donne le minimum pour ne pas trop vous ennuyer dans ce nouveau monde plein de machines (dont personne n’a discuté au préalable, faute au déterminisme technologique, mais c’est encore un autre sujet). Ce qui nous laisse avec l’amère sensation d’avoir gagné quelque chose, alors que c’est justement le projet des libertariens. L’argumentaire de Génération Libre est subtil puisqu’il explicite un certain nombre de ces problèmes (surveillance de masse, ciblage publicitaire abusif, croisements de données non choisis) tout en prétendant qu’à partir du moment où l’on se ferait payer pour ses données, on deviendrait conscient – et consentant – quant à l’usage qui pourra en être fait…).[…]
  • La défense de la dignité et des libertés des personnes est centrale dans le fait de distinguer espace privé et espace de production. De fait, une part de nos gestes privés et intimes, exprimés dans des espaces numériques qui revêtent l’apparence de la sphère privée, sont accaparés dans un objectif de profit. De plus, les industries travaillent activement à influencer l’environnement et nos comportements numériques pour mieux capter la valeur issue des entrelacements de nos liens sociaux qui forment le « graphe social », reflet numérique de notre vie collective.
  • Il est urgent de revendiquer collectivement une régulation efficace contre ces phénomènes d’exploitation, mais aussi le soutien et l’encouragement au développement d’outils numériques émancipateurs. Car comme le souligne Irénée Régnauld, cette exploitation et cette violence ne sont pas des fatalités technologiques
  • Que reste-t-il de ces aspirations et du sens investi collectivement dans le travail lorsque l’on exerce des « métiers » de tâcherons développés par les industries numériques ? Au-delà des déséquilibres économiques, c’est la dignité des personnes qui est à protéger face au retour des modèles d’exploitation proprement féodaux. De même, il apparaît combien notre conception du travail sous-tend nos conceptions de la société dans son ensemble, et les perspectives de progrès social et de progrès humain partagé qu’il nous revient de discuter collectivement.
  • Compléter l’action de protection de la vie privée en l’articulant avec les enjeux de respect du droit du travail et la protection des travailleurs pourrait permettre d’enrichir le débat en réintroduisant les notions de consentement et d’intentionnalité, mais aussi d’intimité, associés à la notion de vie privée moderne, à réencastrer dans nos comportements au sein des plateformes. Relier l’exploitation des données et de la dimension potentiellement intime qu’elle recouvre, avec la question centrale d’un régime de travail décent des travailleurs professionnels, pourrait permettre de poser plus distinctement l’enjeu de rapports éthiques numériques, entre usagers, consommateurs et travailleurs, tels qu’ils sont discutés au sein des autres espaces de production
  • Or les données personnelles sont bien toujours également des « données sociales », parce que la vie privée elle-même est toujours enchâssée dans un tissu de relations sociales (amicales, familiales, professionnelles, territoriales, citoyennes, etc.). L’interconnexion des données, via les outils numériques, constitue par ailleurs un préalable indispensable à leur valorisation, y compris financière
  • Il y a donc d’emblée une double dimension collective caractéristique de nos données « personnelles », qui s’exprime au sens d’un usage du monde « en lien » dans nos pratiques numériques, de la connexion et de la mise en relation – autant que du point de vue des rapports de production qui sont nécessaires à l’existence et l’exploitation des données. Ces deux répertoires d’actions numériques sont difficiles à distinguer précisément car l’approche centrée sur « l’émission » de données est marquée par une grande continuité des effets, sinon des pratiques individuelles et collectives
  • Le droit des données personnelles reste aujourd’hui largement « aveugle » à cette double dimension collective et pour la chercheuse Antoinette Rouvroy, cette construction individualiste du statut des données est précisément ce qui entraîne aujourd’hui une « inadéquation des régimes de protection »
  • Le défi qui serait le nôtre aujourd’hui, relativement à la protection des données, pourrait donc s’énoncer ainsi: comment tenir compte, de la nature relationnelle, et donc aussi collective, à la fois de la donnée (une donnée n’est jamais que la transcription numérique d’une relation entre un individu son milieu, laquelle n’acquiert d’utilité, dans le contexte d’analyses de type big data, que mise en rapport avec des données « émises » par les comportements d’autres individus), et de ce qui mérite d’être protégé, y compris à travers la protection des données ?
  • Avec les données d’intérêt général, on songeait à donner à l’État une forme de pouvoir de « réquisition » de données détenues par des acteurs privés dans une série de secteurs stratégiques (santé, énergie, environnement, logement, etc.) ou pour faire face à des situations de crise. Ce concept a fait l’objet de nombreuses critiques et s’il a été maintenu dans la version finale du texte, ce n’est qu’au prix d’une profonde transformation, puisqu’il se réduit désormais à une simple obligation d’ouverture des données imposée aux personnes privées délégataires de service public.
  • Des négociations collectives avec des représentants des utilisateurs, formalisées et encadrées par la loi, pourraient intervenir ensuite pour obtenir des conditions plus favorables de la part des plateformes. Ces discussions pourraient se dérouler secteur par secteur, de la même manière que les négociations collectives en droit du travail se font au niveau des branches, permettant aux utilisateurs de s’organiser sur une base concrète. Il y aurait aussi intérêt à ce que ces négociations puissent s’ouvrir au niveau local, par exemple celui des métropoles, car on sait que c’est à cette échelle que des conflits peuvent naître à propos de l’utilisation des données avec des plateformes comme AirBnB, Uber ou Waze et qu’il existe des enjeux importants en termes de récupération des données pour la conduite de politiques publiques infrastructurelles (dans les transports, le logement, l’urbanisme, etc.).
  • Les choses sont différentes avec les plateformes comme Facebook ou Google qui s’appuient sur le « travail gratuit » de simples utilisateurs ne pouvant agir pour bloquer l’outil de production. Ils pourraient certes cesser de recourir à ces services, mais jusqu’à présent, même les plus grands scandales n’ont pas entraîné des exodes significatifs d’internautes hors de l’écosystème des GAFAM…
  • Mais imaginons à présent un « droit à la portabilité collective » qui puisse être actionné par des groupements d’individus agissant au sein d’associations ou de syndicats tels qu’évoqués plus haut, et plus seulement par des individus isolés revendiquant leur droit à la vie privée. Un tel droit collectif pourrait être opposé aux plateformes lorsque ces acteurs parviendraient à apporter la preuve que la récupération des données est nécessaire pour l’exercice de droits et libertés fondamentaux. On changerait alors l’échelle, mais aussi le sens même de la portabilité, car ce serait bien alors des portions entières du graphe qui pourraient être récupérées collectivement de cette manière, en conservant leur valeur « sociale » sans que celle-ci ne soit dissoute par l’atomisation que provoque fatalement la portabilité individuelle.
  • Si l’objectif est de réinventer la protection des données sous la forme d’une « protection sociale » à même de préserver la dignité et les droits fondamentaux des individus, n’importe-t-il pas de nous poser en amont la question de savoir si nous devons nous résigner à ce que toutes ces activités basculent dans des rapports de production, y compris lorsque nous ne l’avons pas choisi, individuellement et collectivement ? Si l’idée d’une « protection sociale des données » a un sens, ne devrait-elle pas précisément résider dans une faculté de déterminer quelle part de nos vies nous voulons voir saisies dans un rapport de production et quelle part nous voulons au contraire en préserver ?
  • Admettre d’emblée que toutes nos activités numériques sont assimilables à du Digital Labor ne revient-il pas à entériner que ce basculement dans des rapports de production est inéluctable et que plus rien de nous permettra d’échapper à cette « financiarisation » forcée de nos vies, y compris dans ce qu’elles ont de plus intime ? Si tel était le cas, la « protection sociale des données » pourrait recevoir la même critique que celle qu’on adresse parfois à la protection sociale tout court : que ces mécanismes, installés dans leur forme actuelle pendant la période fordiste, visent simplement à « compenser » les rapports de domination imposés aux individus dans la sphère du travail et non à remettre en cause le principe même de la soumission qu’ils impliquent. Pour conjurer ce risque, il importe selon nous d’être au contraire capable d’opérer des distinctions claires au sein même du continuum de pratiques décrites comme du Digital Labor, en les repositionnant soigneusement par rapport à l’idée de protection sociale.
  • Si l’idée d’une « protection sociale des données » a un sens, ne devrait-elle pas précisément résider dans une faculté de déterminer quelle part de nos vies nous voulons voir saisies dans un rapport de production et quelle part nous voulons au contraire en préserver ?
  • Face à ces situations de fragilisation brutale des individus, il importe de réactiver les principes de base de la protection sociale, en appelant à ce que les juges ou le législateur fassent preuve de volontarisme en requalifiant ces activités en emplois salariés. C’est de cette manière que le législateur a procédé par exemple avec les intermittents du spectacle dans les années 1990 en instaurant une présomption de salariat, alors même que ces activités s’exercent dans un cadre où la subordination traditionnellement associée à la situation d’emploi n’est pas nécessairement caractérisée. Même s’il y aurait beaucoup à dire sur les lacunes de la protection sociale des intermittents, il n’en reste pas moins que ce rattachement à l’emploi salarié participe à la sécurisation du parcours des individus œuvrant dans ce secteur.
  • En imposant aux individus d’inscrire leur intimité dans un rapport de production, les plateformes provoquent en réalité un effondrement de la distinction entre la sphère publique et la sphère privée, phénomène lourd de conséquences qu’Hannah Arendt a identifié comme un des mécanismes par lesquels le totalitarisme s’empare des sociétés. Le cadre analytique du Digital Labor traduit donc une certaine vérité, car à l’époque moderne c’est bien le fait de faire apparaître une activité dans l’espace public qui la transforme presque mécaniquement en « travail ».
  • Cela implique donc, lorsque nous utilisons des services numériques, de toujours être en mesure de savoir clairement si nous sommes engagés dans un rapport de production et de pouvoir en sortir, si nous le voulons. Sachant que cette possibilité de « sortir » reste en réalité profondément illusoire si n’existent pas des alternatives tangibles dans lesquelles nos activités sociales pourraient s’inscrire sans qu’on les soumette à des dominations à visée économique. C’est la raison pour laquelle une protection sociale des données personnelles passe nécessairement aussi par la construction de Communs numériques, basés sur des logiciels libres.
  • Compte tenu de ce contexte, il s’agit bien de construire une protection sociale des données en même temps que de revendiquer des conditions de travail dignes et réellement humaines pour les personnes impliquées professionnellement dans leur production. Cette double dimension collective dans la production et la gestion des données ouvre sur un vaste enjeu de solidarité, en action, dans la coordination de nos usages « amateurs »/non-professionnels avec ceux des travailleurs des plateformes. Discuter collectivement le fondement d’une éthique dans l’agencement de nos relations numériques nous amène nécessairement à regarder en face les grands équilibres économiques, l’exploitation et les mécanismes de prédation des grandes firmes sur les travailleurs les plus précaires, et souligne tout autant l’urgence de la construction de responsabilités collectives pour y répondre.
  • Il ne faut pourtant pas nous priver de penser des environnements et des pratiques numériques beaucoup plus émancipatrices, en s’appuyant sur ce que le monde du logiciel libre, le mouvement des communs et de l’économie solidaire, proposent conjointement : participer à la construction du progrès social et des capabilités numériques individuelles et collectives, permettant de prendre une part active dans l’organisation de nos pratiques. A cet égard, les activités d’éducation populaire développées par l’association Framasoft sont tout à fait remarquables, en ce qu’elles articulent des solutions logicielles alternatives avec un travail de fond d’éducation populaire – au sens d’une éducation qui prend en compte la dimension profondément politique de la construction et de la circulation des savoirs et des savoir-faire.
  • Dans cette même perspective, qualifier les données d’intérêt général, c’est aussi ne pas laisser s’échapper le caractère profondément politique de leur usage : c’est réaffirmer la dimension sociétale de nos usages individuels et collectifs.
  • Pour contrer cela, nous devons construire une nouvelle infrastructure pour permettre aux personnes de regagner cette souveraineté individuelle. Ces aspects de l’infrastructure qui concernent le monde qui nous entoure doivent appartenir aux biens communs et les aspects qui concernent les gens – qui constituent les organes de notre être cybernétique – doivent être détenus et contrôlés par les individus eux-mêmes.
Aurialie Jublin

Devoir de déconnexion | La qualité de vie au travail - 0 views

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    La déconnexion un droit ou un devoir ? En tout cas, en 2002, un article d'IA en parlait déjà : http://www.internetactu.net/2002/11/09/travail-tltravail-et-droit-la-dconnexion/ L'auteur développe 2 notions à l'idée de déconnexion : - le "droit à la déconnexion" à construire collectivement dans les organisations pour réguler l'usage de l'internet et en particulier de l'internet mobile puisque de plus en plus de salariés sont équipés en internet mobile. Ce droit à la déconnexion est popularisé depuis quelques années par Jean-Emmanuel Ray, Professeur de droit à la Sorbonne (Paris) - ce que j'appellerais le "devoir de déconnexion" qui renvoie à la responsabilité individuelle de préserver sa santé et l'équilibre de ses sphères de vie; aussi parce que l'usage inapproprié des TIC n'est pas seulement le résultat d'une injonction de la hiérarchie, loin s'en faut. Autre article lié sur le même site : "la déconnect attitude" http://laqvt.fr/la-deconnect-attitude
Aurialie Jublin

« Loin du bureau » : ce que révèlent nos messages d'absence | Nouveau monde |... - 1 views

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    Une partie de la conclusion de l'article : "Connexion et mobilité : les deux caractéristiques des ordiphones sont appelées à constituer la structure fondatrice d'un nouveau contrat de travail, adapté à la réalité. Dans un souci de cohérence, un droit à la mobilité sera reconnu : droit de travailler depuis n'importe où, trois ou quatre jours par semaine. Un droit à la mobilité géographique apparaît comme l'autre face de l'obligation de connexion, qui tend à s'imposer, en pratique. Il n'est pas question de télétravail, synonyme de « bureau à la maison ». Il est question d'accorder au salarié la liberté de travailler où il veut, pendant une partie de la semaine. Connexion obligatoire, car on ne peut pas payer les gens à ne rien faire. Droit au déplacement, car on ne peut pas non plus continuer à imposer aux salariés des trajets quotidiens éreintants et coûteux alors que ces mêmes salariés peuvent fort bien faire leur travail depuis n'importe où (sous certaines réserves tenant notamment à la protection des informations confidentielles de l'entreprise)."
Aurialie Jublin

Tout savoir (ou presque) du rapport Mettling en moins d'un quart d'heure - 3 views

  • Le premier volet des 36 propositions concerne justement le développement de l’éducation numérique par les moyens de la formation professionnelle. Le rapport demande que le numérique fasse partie des savoirs fondamentaux dès l’école et souhaite que dans les six prochains mois, les branches professionnelles "lancent une consultation […] pour mesurer leur besoin en formation".     Le rapport propose aussi de placer la transformation numérique au cœur des dispositifs de professionnalisation et de passerelles entre les métiers.
  • Dans la sixième proposition, il est ainsi proposer de développer les formations de reconversion, tandis que la huitième invite à "privilégier le management de proximité au sein de l’effort d’éducation numérique". Sans oublier de mobiliser la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) pour préparer l’adaptation (mesure n°5)
  • D’autres propositions visent à créer un cadre juridico fiscal, qui soit à la fois incitatif et protecteur. C’est le morceau le plus médiatique, puisqu’il concerne les questions de réglementation du temps de travail. Le rapport propose de sécuriser le forfait jours. Si ce mode d’organisation du travail semble adapté pour les entreprises et les salariés du numérique, les décisions de la Cour de cassation, qui a estimé hors la loi un certain nombre d’accords de branche, ont jeté le trouble.
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  • es auteurs proposent ainsi la création de nouveaux droits attachés à la personne, qui pourraient être transférés d’un statut à un autre. Par exemple, un salarié qui deviendrait indépendant pourrait conserver ses droits à la formation et continuerait à alimenter son compte. C’est l’idée implicite du compte personnel d’activité. Mais le rapport Mettling va plus loin en estimant que ces nouvelles formes de travail qui se sont développés avec le numérique doivent participer au financement de la protection sociale.
  • Et dans sa préconisation numéro 16, il va encore plus loin, puisqu’il indique qu’il est nécessaire d’instaurer "un devoir d’information des plateformes de services pour l’établissement des droits et cotisations". Le rapport estime, en effet, que pour les personnes qui ont développé une activité qui est une source de revenus significative sur une plateforme numérique, il n’est pas question que cela soit assimilé à du travail au noir.
  • Conséquemment, elle doit être "soumise à des obligations similaires en termes de cotisations et de taxes que les activités du secteur formel". Pour les plateformes de type Uber ou Airbnb, cela pourrait signifier de devoir déclarer toutes "les informations nécessaires à l’établissement des droits et des cotisations".
  • Le rapport propose également des mesures pour que le développement du numérique soit au service de la qualité de vie au travail. Cela suppose l’instauration d’un droit de déconnecter, complété par un devoir de déconnecter.
  • Parmi les autres préconisations, on notera encore la volonté de développer un dialogue social recourant davantage aux outils numériques et de favoriser "l’accès aux outils numériques des partenaires sociaux". Et pour aller encore plus loin à l’avenir, il souhaite qu’une partie des financements des investissements d’avenir aille vers la recherche en sciences sociales, notamment pour réfléchir à des notions comme le travail passif du client ou les relations sociales dans l’entreprise étendue.
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    "Le texte très complet débouche sur 36 préconisations allant loin dans les pratiques managériales des entreprises, puisqu'il évoque aussi bien la rémunération que la formation. L'ensemble est relativement créatif, proposant de nouveaux droits mais aussi de nouvelles obligations. Il propose notamment des mesures pour rapprocher le salarié et le travailleur indépendant. Pour qu'ils aient des droits plus proches et que les uns et les autres cotisent équitablement au système de protection sociale."
Aurialie Jublin

Le problème avec la mobilité, c'est qu'elle vous suit partout (2) - Etherciel - 0 views

  • Les systèmes de messagerie permettent en effet de laisser un message en cas d'absence, qui sera systématiquement adressé en réponse à tous les courriels. Depuis le "Absent jusqu'au xx, messages non lus" jusqu'au "je consulte mes messages et ferai en sorte de vous répondre aussi vite que possible", en passant par tous les stades de "messages lus épisodiquement" ou "m'appeler en cas d'urgence", la pratique a déjà inventé différents paliers de disponibilité. Ces paliers mériteraient d'être formalisés, prévus et organisés au niveau collectif, plutôt que laissés à la fantaisie des salariés ou à l'arbitraire des patrons. Ce que les salariés "absents" définissent ainsi sont des niveaux de service, des paliers de pression, des temps de réponse aux sollicitations électroniques. Cette création de la pratique, improvisée par les individus concernés, pourrait passer en force de loi.
  • Les inventeurs du "droit à la déconnexion" ont oublié une étape intermédiaire importante, qui va consister à analyser l'obligation de connexion qui s'impose actuellement à des millions de salariés. Cette obligation ne saurait être combattue, elle fait partie des conditions imposées par la nature du terrain, l'Etherciel. Mais elle peut être maîtrisée, mesurée. Il faut la négocier. Et il faut souhaiter que, dans une certaine mesure, cette obligation s'efface, pour certaines plages horaires, dans le cadre d'un droit à la déconnexion qui a toute sa raison d'être.
  • Dans un souci de cohérence, un "droit à la mobilité" pourrait être reconnu : droit de travailler depuis n'importe quel point sur la surface du globe. Un droit à la mobilité géographique assorti d'engagements de service apparaît comme l'autre face de l'obligation de connexion, qui tend à s'imposer, en pratique. La présence au bureau ne doit plus être le point de référence qu'elle est aujourd'hui. Puisque les outils permettent de travailler "à distance" de la même façon que au bureau,
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    Demain, comment seront fixées les conditions de travail du salarié téléchargé ? Pour tenir compte du bouleversement en cours lié à l'adoption des outils numériques mobiles, nous allons devoir redéfinir les paramètres sur lesquels se fonde la relation employeur/employé :   - droit à la mobilité géographique, concrètement je peux travailler de n'importe où, cela revient au même, alors je ne vois pas pourquoi je serais obligé de venir tous les jours au bureau pour y passer un quota d'heures   - obligation de connexion, par contre, quel que soit le lieu où je trouve, je me dois de rester en ligne, pour faire mon travail, effectuer la prestation attendue,   - niveaux de service ...et je me dois de respecter des pourcentages de disponibilité, des taux de réponse fixés à l'avance. Ces niveaux de service varient au fil de la journée. 
Aurialie Jublin

Les nouvelles formes de conflictualité en entreprise : entre Droit et Managem... - 1 views

  • Plus audacieuse encore, est récemment apparue la grève virtuelle : en septembre 2008, IBM a vu 1850 de ses salariés manifester sur Second Life. L’impact d’une telle manifestation ? Les journaux du monde entier se sont intéressés à ce mouvement, lui donnant une ampleur considérable ; la direction fut obligée de négocier un accord. Nous voyons bien en l’espèce que la médiatisation d’un conflit peut offrir à la masse salariale un pouvoir qu’une simple grève ne confère pas. Or le pouvoir est l’arme la plus importante dans une négociation. Notons aussi que ce qui interpelle les médias, c’est la nouveauté, l’originalité de ces expressions du mécontentement.
  • De nombreux blogs anonymes dénigrant les conditions de travail de certaines entreprises ont ainsi vu le jour. Ces supports pouvant être lus par un très large public, l’image de la société peut s’en trouver rapidement altérée. Or l’image et le crédit d’une entreprise sont des éléments extrêmement importants du fonds de commerce : la direction aura tout intérêt à négocier.
  • Ainsi le coaching des managers, mis en place dans de grandes entreprises, est un accompagnement permettant de mieux comprendre et d’appréhender les problématiques ; la boîte aux lettres anonyme peut aussi être utile pour prévenir les conflits, tout comme la création de blogs internes, à condition qu’ils soient régulièrement mis à jour et qu’ils fassent l’objet d’une prise en compte réelle par  tous les niveaux hiérarchiques. Il peut s’agir par exemple de blogs d’information, de conversation, ou de blogs collaboratifs (pour les groupes de travail) voire de blogs syndicalistes, comme il en existe dans des grands groupes tels Eurofloat ou Oracle.
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    Si la grève est le mode officiel de contestation au sein de l'entreprise, la pratique montre aujourd'hui qu'elle est de moins en moins utilisée, au profit de modes alternatifs de conflictualité. En ce sens, nous constatons une augmentation des débrayages, des grèves perlées, tournantes ou encore virtuelles, de l'absentéisme et des séquestrations de dirigeants sociaux.   Pourquoi les salariés usent-ils moins du droit de contestation qui leur est reconnu, préférant  des actions qui les mettent parfois en danger ? Quelle réglementation pour ces actions ? Comment y faire face ? Tels sont les points qui intéresseront nos développements.
Aurialie Jublin

Libérer le travail de l'emprise du marché total | Témoignage Chrétien - 0 views

  • Prenons par exemple le modèle allemand : il valorise les communautés de travail, au niveau de l’entreprise comme à celui des branches professionnelles. À la différence de leurs homologues français, les dirigeants des grandes entreprises allemandes en ont souvent gravi les échelons. Ils ont la même culture professionnelle que les travailleurs, qui sont de leur côté associés au contrôle de la direction. En revanche, ce système accorde une moindre place aux droits des individus, ce qui explique que les réformes Hartz de 2004, créant des contrats de travail sous-payés pour une population sans emploi, n’ont pendant longtemps pas suscité de fortes réactions syndicales. Ce n’est que dix ans après, au regard de la forte croissance des inégalités qu’elles avaient générées, que le gouvernement allemand de coalition s’est résolu à instaurer le salaire minimum. 
  • Dans les conditions actuelles, il est rare qu’un autoentrepreneur puisse maintenir longtemps son activité sans s’insérer dans des réseaux de dépendance économique, soit qu’il doive diriger le travail d’autrui, soit que son travail soit dirigé par autrui. C’est l’une des leçons qui peut être tirée de la crise du modèle industriel que l’on a mis en oeuvre en agriculture dans les années 1960. La plupart des éleveurs ont été intégrés dans des liens de dépendance économique à l’égard des grandes firmes agroalimentaires, de l’Union européenne et des banques. Ils ont ainsi perdu tout contrôle sur ce qu’ils produisaient, sur la façon dont ils le produisaient et sur la fixation des prix de leurs produits. C’est particulièrement vrai des éleveurs «hors-sol» qui sont en fait des travailleurs subordonnés mais demeurent en droit des entrepreneurs indépendants.
  • Dans l’économie actuelle, beaucoup d’entreprises petites ou moyennes sont ainsi les maillons de chaînes de production où ce sont les entités les plus puissantes, celles qui contrôlent non pas les moyens de production mais les systèmes d’information, qui disposent du pouvoir et captent la majeure partie de la valeur ajoutée. Sans avoir à répondre de la sécurité économique des travailleurs. Un chauffeur remercié par Uber n’est pas licencié, il est « déconnecté ».
  • ...6 more annotations...
  • La réalisation de la justice sociale ne dépend pas principalement du droit du travail, mais bien davantage des règles qui régissent la sphère monétaire, le commerce international et le fonctionnement des grandes entreprises. C’est là que se situent les vraies « réformes structurelles » dont nous avons besoin. Il faut sortir de la schizophrénie actuelle qui fait que d’un côté l’Europe oblige les pays les plus pauvres à démanteler leurs barrières douanières et que de l’autre elle déplore l’émigration en masse de leur jeunesse ; que d’un côté on autorise le rachat par les sociétés de leurs propres actions, c’est-à-dire l’enrichissement des actionnaires aux dépens des ressources vives de l’entreprise, et que de l’autre on déplore la chute de l’investissement ; que d’un côté on autorise le dumping social et fiscal en Europe, et que de l’autre on s’inquiète de l’endettement des États et du délabrement des services publics.
  • La mutation que vous évoquez est celle de l’ubérisation, du self-employment. Elle transforme des formes de la dépendance économique qui affecte aussi bien les salariés que les entrepreneurs. Le travail n’est plus organisé sur le modèle taylorien du travail à la chaîne, c’est-à-dire d’une obéissance mécanique aux ordres, mais sur celui de la direction par objectifs, de la programmation du travailleur. La subordination ne disparaît pas mais change de forme. Ce n’est plus le moindre de ses gestes qui est dicté et mesuré, mais sa « performance ». L’obéissance fait place à l’allégeance du travailleur à l’égard d’un donneur d’ordre qui lui assigne une tâche qu’il peut organiser avec une certaine marge d’autonomie, pourvu qu’il remplisse ses « objectifs ».
  • Le cercle vertueux de la libération dans le travail et de la créativité ne peut être tracé que si ceux qui le réalisent ne vivent pas dans la peur du chômage et peuvent peser collectivement sur son contenu et son organisation.
  • La logique des droits de tirage sociaux est d’assurer une solidarité dans l’exercice d’une liberté individuelle ; par exemple, prendre un congé sabbatique, prendre soin de ses parents malades, acquérir des connaissances ou une formation nouvelle, créer une entreprise, élever ses jeunes enfants, etc. La personne qui ferait ce choix bénéficierait de dispositifs finançant la rémunération de ces différentes activités.
  • Les droits de tirage sociaux donneraient à chacun la possibilité de combiner diverses formes de travail dans une vie et de passer de l’une à l’autre sans mettre en péril ses revenus et ses droits. Cette proposition complète la Sécurité sociale, qui assure une solidarité face aux risques indépendants de la volonté, comme la maladie, l’accident ou la vieillesse.
  • Sans réduction des inégalités, notamment entre les revenus du travail et ceux du capital, et sans interdiction du dumping social et fiscal, le « compte personnel d’activité » prévu dans la loi el-Khomri risque de devenir un moyen de renvoyer chacun à une épargne individuelle qui renforcera encore le poids de la « bancassurance ». C’est seulement sur la base d’une plus juste distribution des revenus et des charges que de nouveaux dispositifs de solidarité pourront voir le jour, qui mettront les progrès de la productivité au service du plus grand nombre et permettront à chacun de faire ainsi plus de place à des tâches librement choisies.
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    "La loi Travail de Myriam El Khomri soulève des débats passionnés. Professeur au Collège de France, Alain Supiot pose un regard aiguisé sur ce qu'ils révèlent."
Aurialie Jublin

Du lien de subordination au lien de sub-organisation - JM RAY | L'Observatoire - 1 views

  • Exemple concret du décalage entre règles actuelles du droit du travail et réalité du terrain, le télétravail : l’examen du carnet de logs d’un télétravailleur pose très vite au juriste deux problèmes : horaires de nuit et travail dominical.  Le code du travail traite le télétravaileur comme un travailleur comme un autre. Pour un juriste classique le télétravail ne passe pas. Mais le télétravail pose surtout un souci sociétal majeur. Selon l’INSEE, il y a 3 millions de travailleurs du savoir en France qui  travaillent le dimanche. Le plus souvent pour finir le travail qui ne l’a pas été pendant la semaine. Ce qui s’opposait autrefois à l’exportation du travail à la maison ce n’était pas le droit du travail, c’était la loi de la pesanteur : impossible pour un ouvrier de rapporter sa pièce à finir à la maison!
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    "Le fondement du droit du travail classique c'est la subordination. Tout repose sur « l'autorité qui tombe d'en-haut », le management « à la petit chef ». Il existe donc aujourd'hui un décalage réel entre les règles actuelles du droit du travail et la réalité du terrain." Notamment du fait de la collaboration, co-construction, du télétravail, ...
Aurialie Jublin

Site du film Article 23 - 1 views

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    Synopsis : On oublie trop souvent que l'article 23 de la déclaration universelle des droits de l'homme stipule que chaque être humain a droit à un travail... A travers le récit d'une histoire largement inspirée de faits réels, ce film interroge avec acuité "la valeur travail" et le drame du chômage. Avec l'humour du désespoir, il décape au vitriol la brutalité opérée par des cabinets de recrutements et les coulisses de ce métier si lucratif. Embaucher.
julien camacho

La CNIL consulte les internautes sur le droit à l'oubli numérique - 2 views

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    La CNIL n'a pas oublié le "droit à l'oubli numérique". La Commission ouvre une consultation publique en ligne auprès des internautes sur cet enjeu important lié à l'e-réputation de chaque individu en liaison avec les traces volontaires ou involontaires qu'il laisse sur les univers numériques
Aurialie Jublin

Guillaume Gibault (Le slip français) : «Je contourne le droit pour embaucher»... - 0 views

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    "Cette semaine, le jeune patron de la marque «Le slip français» dévoile son secret : le «démerde management». Très génération Y." Le «démerde management», c'est ce recours aux statuts spéciaux pour embaucher des jeunes gens à qui il promet une aventure, des responsabilités et une vraie expérience dans un délai rapide. Il y apprend d'ailleurs à diriger: imposer des horaires, faire vite et bien, ne pas se perdre dans le perfectionnisme, faire comme il dit «les choses dans le bon ordre». Sans faire de généralité, le fondateur de «Le slip français» et sa petite bande incarnent une partie non négligeable de cette génération Y: celle qui va éviter de finasser pour s'en sortir. Avec ou sans droit du travail.
Aurialie Jublin

Vivre ensemble et travail : pour un droit à la collaboration, Le Cercle - 2 views

  • n vise à réconcilier le beau travail et la performance, dût-elle aller à l’encontre des mythes du "tout communication" et de l’ouverture à 360 degrés. Je la conçois comme l’une des deux modalités du travail (avec la coopération), et comme un impératif, en ce sens qu’il incombe à l’employeur, lorsque son activité s’y prête, de mettre en place les conditions matérielles et organisationnelles propices à la collaboration. En ce sens, l’on pourrait presque parler, du point de vue du travailleur, d’un droit à la collaboration et d’un devoir de collaboration.
  • Ce droit à la collaboration, complémentaire à la coopération, me semble de nature, par sa simplicité et la diversité des situations qu’il embrasse, de sous-tendre de nombreux axes d’amélioration du travail. Côté pile, la collaboration : à elle la prise de recul, la réflexion stratégique et tactique initiale, la créativité individuelle, la veille et la lenteur du travail bien fait. Côté face, la coopération : à elle la mise en débat du travail, la réflexivité, la créativité collective, la tactique opérationnelle ou la prise de décision.
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    "Le travail s'effectue de plus en plus souvent dans des espaces partagés. Face à la mythologie de l'open space, il faut parfois savoir laisser de la place à la réflexion et à la créativité individuelles et favoriser le travail en retrait."
Aurialie Jublin

"Emploi store", simulateur de droits sociaux... quand l'administration se met... - 0 views

  • À commencer par le simulateur de droits sociaux Mes Aides, destiné en particulier à tous ceux, nombreux selon les ministres, à ne pas réclamer leurs droits. Notamment les personnes éligibles au RSA. Et c’est justement en collaboration, en codéveloppement, avec plusieurs d’entre eux dans le cadre d’un atelier qu’ont été pensés le service, son ergonomie, la forme de son formulaire de saisie, le vocabulaire utilisé… La personne concernée se connecte et saisit quelques informations (nom, date de naissance, logement, situation familiale, épargne…) en quelques minutes, et les aides qui lui sont accessibles apparaissent dans des cadres très simples et lisibles. Il suffit ensuite à l’intéressé de cliquer sur une d’entre elles pour être dirigé vers le bon formulaire Cerfa. "On ne perd jamais l’usager, et ce, jusqu’au formulaire", insiste le secrétaire d’État.
  • Côté emploi, le service mise sur une cartographie sur laquelle les offres sont identifiées en fonction du temps de déplacement du futur employé, et non uniquement de la zone géographique. Il suffit ensuite au demandeur de cliquer sur une offre, et il peut bien sûr obtenir l’itinéraire en fonction du moyen de transport. Le démonstrateur actuel est en test avec une trentaine de personnes dans les régions Centre et Franche-Comté. Ce service accessible aujourd’hui sur internet donnera naissance, mi-2015, à un "emploi store", magasin d’apps multi-OS à destination des employeurs et demandeurs d’emploi.
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    Marylise Lebranchu et Thierry Mandon ont organisé, durant trois jours, une Cité de l'innovation publique, au Centquatre à Paris, destinée à montrer ses innovations numériques aux Français. Au-delà de la technologie, l'administration montre aussi comment elle se transforme pour être plus simple et plus transparente, en jouant l'open innovation et la collaboration avec le privé et les citoyens.
abrugiere

Refonder l'entreprise : entretien avec Armand Hatchuel et Blanche Ségrestin -... - 1 views

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    entretien vidéo
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    Notes brutes sur la vidéo USA : gouvernance actionnariale/rachat d'action (équivalent au budget R&D) / gestion des capitaux au lieu de gestion de l'entreprise / Création et innovation collective sous-évaluée Pas de modèle de l'entreprise (ni juridique, ni théorique), d'où importance de la corporate gouvernance // pas de droit de l'entreprise en tant que tel (droit du travail, droit des contrats, droit commercial ...) Entreprise différent de société commerciale : 1874-Valras-"entrepreneur"-loue des territoires, des services, .../1932-Mills-"modern cooperation", "manager"/1880-1910, luttes syndicales, 1898 "chef d'entreprise" responsable en cas d'accident du travail, contrat de travail apparait 1881-business school apparait 3 caractéristiques de l'entreprise : 1) dynamique de création collective (domestiquer l'innovation)-> subordnation/contrat de travail/nouveaux métiers/figure du chef d'entreprise, manager différent du propriétaire et du créateur // 2) collectif organisé // 3) figure de gestion Théorie de l'agence : focalisation de la shareholder value / mangement par objectif / décomposition du collectif / surveillance des dirigeants / stockoptions interdits jusqu'au début des années 80 Perspectives (refonder l'entreprise qd responsabilité sociale des entreprises inssufisante et shareholder value prépondérante) : 1) refonder l'entreprise autour de l'idée de la création collective : nouveaux usages des ressources mobilisées pour créer qq chose de nouveau / parler de potentiel plutôt que de capital 2) nécessité d'une personne pour inventer ces nouveaux usages (ne représentant aucune entité ou groupe) / parler d'habilitation plutôt que de mandat / renoncer à biaiser leur jugement (par ex avec des stock options) 3) céder son autonomie de gestion : les salariés aussi assument des risques (pas que les actionnaires) puisqu'ils renoncent à une partie de leur autonomie 4) règle de solidari
Aurialie Jublin

Quand les enfants revendiquent leur droit au travail - 0 views

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    Pour l'Organisation Internationale du Travail, faire travailler les plus jeunes, c'est les priver de leur enfance. Tous les intéressés ne sont pas de cet avis. Des « syndicats d'enfants » défendent le droit à un travail digne et valorisant. Ex. d'un enfant au Pérou qui aide sa mère à vendre des produits dans le magasin familial.
Aurialie Jublin

Mutations des formes d'emploi dans une Europe en crise : de nouvelles sécurit... - 0 views

  • Au Royaume-Uni, pays connu pour sa tendance à adopter des mesures libérales, l'année 2013 a vu l'émergence d'une forme particulière de contrats de travail, les contrats « zéro-heure », qui suscitent une certaine inquiétude. Ces contrats ne garantissent aucun salaire ni aucune durée de travail minimale, les travailleurs restant chez eux jusqu'à ce que leur employeur les appellent en cas de besoin.
  • Par ailleurs, ce même pays a adopté récemment une loi très controversée introduisant un nouveau type de contrat . Ce contrat prévoit en effet que les travailleurs recevront des parts dans leur entreprise pour peu qu'ils acceptent de renoncer à certains de leurs droits, tels que ceux liés aux licenciements abusifs, aux licenciements économiques, à la possibilité de demander un aménagement flexible du temps de travail ou un congé pour formation.
  • Plus à l'Est, la Pologne voit prospérer depuis plusieurs années des contrats dits « de service ».Ce type particulier de contrats n'est pas couvert par le droit du travail mais est régi par le droit civil. De ce fait, la plupart de ces contrats ne sont pas soumis non plus à contributions sociales.
  • ...2 more annotations...
  • Au Sud, la Grèce fait face à une situation particulièrement délicate, avec un taux de chômage parmi les plus élevés d'Europe, touchant fortement les moins de 25 ans. Depuis juillet 2010, la loi a permis la conclusion de « contrats jeunes », l'idée étant d'embaucher de jeunes travailleurs jusqu'à 25 ans avec un salaire inférieur de 32% au salaire précédent prévu pour le premier emploi, une période d'essai de deux ans et sans droit aux allocations chômage à la fin du contrat. De plus, pour ce type de contrat, les employeurs ne sont soumis à aucune contribution sociale.
  • Les différences habituellement retenues entre ces catégories traditionnelles s'amenuisent à mesure que des catégories de travailleurs se précarisent. Les frontières entre travailleurs salariés et travailleurs autonomes s'estompent et certains travailleurs se retrouvent dans une « zone grise », caractérisée par un manque évident de protection.
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    "La crise économique qui sévit en Europe depuis 2008 a donné lieu à de nombreuses évolutions en ce qui concerne les législations du travail et l'emploi en général. Ces évolutions se sont notamment traduites par la mise en place de nouvelles formes d'emploi : certains Etats membres ont ainsi créé des contrats de travail inédits. Ce faisant, ces mutations des formes d'emploi contribuent à modifier profondément et durablement la composition du marché du travail et se traduisent souvent par une précarisation accrue. Peut-on dès lors imaginer de nouvelles sécurités ou à tout le moins un cadre protecteur plus approprié à ces travailleurs d'un nouveau genre ?"
julien camacho

L'en-jeu professionnel > Produits | Thot Cursus - 0 views

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    En France, la loi du 24 novembre 2009 relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, qui met notamment en place le DIF (droit individuel à la formation), réaffirme le droit au salarié d'être acteur de son évolution professionnelle. Une évolution qui a inspiré l'Apec, Opcalia et le FONGECIF Île-de-France, créateurs d'un serious game tout récemment mis en ligne : L'en-jeu professionnel.
hubert guillaud

Les scientifiques doivent être les fers de lance de l'usage éthique des Big D... - 1 views

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    Pour le physicien Albert-László Barabási, le spécialiste de l'analyse des réseaux, la façon dont la NSA recueille les données personnelles des américains a brisé le modèle traditionnel qui lie la science et la société. La plupart des technologies ont plusieurs usages (pensez à l'énergie atomique, au génie génétique...) et on ne peut pas pour autant décider d'arrêter toute recherche du fait des risques qu'elles comportent. Au lieu de cela, les scientifiques doivent faire preuve de transparence sur les risques et les abus possibles et parvenir à un consensus avec la société pour l'usage de ces technologies. Les scientifiques dont les travaux ont alimenté la NSA ont échoués à montrer les dangers de ces outils. Les politiques, enivrés par la puissance de ces outils, n'ont pas réussi à faire que leur utilisation respecte les cadres strictes de la constitution. Les Big Data sont un saint Graal. Ils promettent de mettre à jour les lois mathématiques qui régissent la société. Barabási explique qu'il a lui-même utilisé des données de millions d'utilisateurs de téléphone mobile pour faire des analyses, sauf que les siennes étaient anonymisées afin de ne pas nuire aux utilisateurs. Mais oui, la fouille de données peut être une arme, reconnaît le chercheur. Il peut être tout aussi dommageable que la bombe atomique. Il empoisonne la confiance. Il peut cibler des combattants, mais aussi des civils innocents. Utilisée comme une arme, elle doit être traitée comme une arme. Et Barabási d'en appeler au concept de la non-prolifération pour tenter de trouver une règle d'apaisement en rendant public les outils, en prônant le désarmement et l'utilisation pacifique. Pour cela, il faut tisser une nouvelle alliance avec la société en amendant les droits de l'homme par le droit de propriété de ses données. Il faut réaffirmer que les données (mon historique et modèle de navigation, mes habitudes de consommation, mon historique de
Aurialie Jublin

"L'entreprise doit avoir la liberté de fixer sa propre réglementation" - 0 views

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    Le cabinet d'avocat en droit social Capstan propose de refondre le droit du travail de fond en comble autour d'une ligne directrice : la subsidiarité des règles légales au profit de l'accord d'entreprise. Explications de Bruno Serizay, avocat associé.
Aurialie Jublin

Tous pirates - error 404 - 0 views

  • Concernant mon précédent billet, et parce que la share economy recouvre une très forte variété de domaines, je n'ai pas fait la distinction entre la production et la consommation. J'y reviens ici sur des points de débats que j'ai eus. Enfin, les deux types de cette nouvelle économie mettent en exergue deux points essentiels de notre société : la raréfaction du travail, et la déconnexion patente de l'investissement (partant, la finance) envers l'économie réelle. Plus d'investissement productif, et une numérisation qui crée de la valeur sans créer de l'emploi; il y a donc un nouveau contrat social à définir.
  • Depuis la faillite du socialisme (politique), un subtil équilibre se joue entre le public et le privé. L'Etat crée par l'éducation une richesse - le travailleur - qui sera exploitée par l'entreprise. En échange, l'entreprise contribue par l'impôt et les taxes à l'organisation de l'Etat. Le code libre, c'est une richesse commune, exploitée par tous, mais dans une asymétrie d'échanges. S'il fait le bonheur de communautés (celles d'Ostrom), il fait aussi le bonheur de la sphère privée. Ainsi, les flux économiques apparaissent comme une captation de valeur sur des territoires et des individus hors marchés (de l'Europe vers les US, du libriste vers Microsoft) à coût nul, pour être ensuite revendus aux producteurs initiaux. Le libre, c'est un peu l'Afrique qui importe son chocolat après avoir vendu à prix dérisoire ses fèves de cacao.
  • Que se passe-t-il ? Il faut en fait considérer qu'il n'existe pas un marché du travail, mais deux marchés : un marché de l'emploi, et un marché du revenu, lesquels ne sont pas corrélés. Les rentiers, investisseurs en capital, dealers de drogue, proxénètes, n'existent pas sur le marché du travail mais le sont bien sur celui du revenu. Idem pour les travailleurs pauvres, stagiaires, qui n'existent - quasiment - pas sur le marché du revenu, mais bien sur celui du travail.
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  • Le droit de la concurrence implique des entreprises, non des individus. Or, Internet permet de mettre en concurrence n'importe quel cerveau humain avec un autre. Même dans un territoire soumis au droit national. On a beaucoup glosé sur les emplois à 1€ du système allemand, pour des emplois peu gratifiants, d'une économie de cols roses. Le stagiaire français, lui, arrive sur un marché de cols blancs à 3€ de l'heure (436,5€ pour une semaine de 35h).
  • De même, le crowdfunding - qui apparaît comme une solution au problème du financement de l'entrepreneuriat - n'est que le symptôme d'une maladie beaucoup plus grave : la rupture consommée entre travail et capital, qui était déjà initiée bien avant la crise des subprimes
  • Quant au web, c'est la force du factor system, amplifiée par l'électricité. Ce pourrait être Pinterest, Tumblr, Github, Facebook, Amazon qui mettent en place une plateforme de travail - ludique, altruiste, sociale - à destination des populations du monde. Et dont la création de richesse ne bénéficie ni à la collectivité (via les procédés d'optimisation fiscale), ni à "l'ouvrier" de la connaissance, puisqu'il n'y a plus de pièce, seulement des flux d'information dont on ne mesure pas la valeur, avec un capital qui reste aux mains de la plateforme. Et dont les bénéficiaires sont quelques passagers clandestins d'une étrange économie.
  • Puisqu'il y a rupture de l'équilibre ténu entre public et privé, on voit apparaître une nouvelle structure : la communauté. Communauté d'intérêts, elle se structure autour de ses propres besoins, en dehors (ou à coté) des deux sphères connues. Pour certains share economy, nouvelles monnaies, troc, AMAP. Un système adaptatif qui n'a rien de nouveau.
  • Ce qui est appelé improprement économie collaborative, c'est finalement la société humaine. Parce que l'Etat n'opère plus son rôle de balancier face au privé, ne restent que deux sociétés qui se développent en parallèle, l'économie de marché et les communautés. Et l'une devient petit à petit le parasite de l'autre. Passager clandestin d'une économie dite collaborative, tirant des bénéfices sans les contraintes de la structure, les "pirates" ne sont pas ceux qui téléchargent le dernier Beyoncé, mais des multinationales qui exploitent un travail gratuit, repackagent des biens du domaine public, ou libérés (voir les méfaits du copyfraud que dénonce inlassablement Calimaq). Ou réorganisent des flux de travail ou de capital à leur avantage, sur le dos des communautés.
  • Pirate vient du grec : peirao, qui signifie tester, mettre à l'épreuve. Hacker a la même signification. Organisations comme individus testent en permanence la solidité des modèles en cours; ils s'introduisent dans les failles du sytème (la PI, l'optimisation fiscale, la territorialisation du droit); ils inventent un monde à part, intangible, non juridiquement encadré, mais qui se développe sur l'écosystème en place (les dérivés financiers, le trading haute fréquence).
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    Pour @marklor le marché de l'emploi n'est plus celui des revenus et l'économie collaborative en est le symptôme
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